Le jeûne et le festin est un livre agréable à lire, une belle porte d'entrée à l'univers de l'auteure
Anita Desai et à celui de la littérature indienne. Ne nous faisons pas d'illusion, ce n'est pas une grande oeuvre mais c'est un bouquin facile d'accès et qui aborde plusieurs grands thèmes associés au sous-continent indien. Un seul point m'agace, toutefois : je me demande si ce portrait de ce grand pays est-il encore d'actualité ? Aucune date n'est mentionnée et le situer est ardu, l'auteure écrivant depuis plus d'un demi-siècle.
Il y est beaucoup question du poids des traditions et de la famille, avec des parents autoritaires et une atmosphère étouffante, où le garçon a tous les droits et les privilèges (dont celui d'aller étudier à l'étranger) et où les filles ne sont bonnes qu'à marier. Et encore, avec des candidats choisis par les parents (vive les mariages arrangés !). Celui de la belle Aruna lui mène la vie dure. Elle ne peut qu'envier sa soeur aînée Uma, idiote, qui craint de devenir vieille fille. Et quand on lui trouve (enfin !) un homme à marier, il se montre si froid et distant que l'union semble peu prometteuse. Dans tous les cas, ce sont les deux revers de la même médaille.
Comme je l'écrivais plus haut,
le jeûne et le festin est facile d'accès. le lecteur n'est pas déstabilisé en découvrant un pays aux coutumes complètement différentes du sien, avec des repères complètement nouveaux. Quelques mots spécifiques à l'Inde sont disséminés à droite et à gauche mais le contexte permet toujours de s'en faire une tête, que ce soit le titre d'une gouvernante, des morceaux d'étoffe ou autre chose.
Quant à l'écriture d'
Anita Desai, que, dans d'autres de mes critiques, je trouvais ordinaire, ici, elle me semble un peu mieux. J'ai apprécié quelques effets de style, ses jeux de mots. Pareillement sa façon de ne faire des parents qu'une seule et même personne ou entité, devenus «Mamanpapa». Rien de renversant mais c'est cette attention aux petits détails qui me rappelle ses recueils de nouvelles que j'avais aimés.
Plus haut, je mentionnais les soeurs Uma et Aruna, et leurs problèmes matrimoniaux. Leur frère cadet, tout aussi critique de sa famille et de sa société, pense échapper à toutes contraintes en allant étudier aux Etats-Unis. D'ailleurs, la deuxième partie raconte ses aventures en Amérique. D'abord, je trouvais que ça créait une rupture, que ça avait peu à voir avec l'Inde, allant même à remettre en question son utilité. Mais, finalement, je me suis ravisé. En effet, à des milliers de kilomètres et en ayant sous les yeux des modèles de famille différents (mais pas tant que ça !), il est amené à réévaluer certaines de ses conceptions sur son pays et les siens.
Le lecteur, quant à lui, peut être amener à se poser les mêmes questions…