Chaque livre de cet auteur est une véritable expérience… et cela va être dur à décrire… car pétrie de fascination et de déception… sans pour autant être mitigée… on sent une écriture ultra-sophistiquée, pensée et repensée, construite patiemment et sans en montrer les plans; une vision de l'histoire toute mythologique, mais traitée de manière intimiste. Bref, du très bon paradoxe, à consommer comme charnière, quand on ne sait plus trop bien quoi de rien.
…
La critique de Sachenka évoque très bien cet interminable problème des traductions de titres, batailles potentielles entre souci d'exactitude du traducteur et stratégie « marketing » de l'éditeur, certains titres en ressortant essorés par le consensus… Celui-ci particulièrement.
Ces « Derniers Mots Célèbres » (« Famous Last Words ») nous donnent ici un titre qui devrait appâter le lecteur de
John Irving, ou l'amateur des films de
Wes Anderson… Sans vraiment trahir, il séduit sans montrer qui il est.
…
Il s'agit bien d'un palace, dont l'ambiance habituelle devrait séduire les nostalgique de l'époque impériale, sauf que l'action se situe à la fin de la seconde guerre mondiale, y cristallisant les restes d'espoir perdu de ce monde qui disparait.
Findley va y installer son narrateur, vrai-faux écrivain-maudit américain, avatar doppelgänger résigné, dont on va tenter de percer les mystères de ses confessions posthumes gravés sur les murs de l'hôtel, à travers les yeux de deux militaires alliés antagonistes, l'un vengeur et dogmatique, l'autre bienveillant et humaniste, et de leur affrontement froid à mesure que le récit se déploie.
…
Findley aime jongler avec les grandes figures historiques dans ses romans, mêlant éléments biographiques formels et suppositions, voir inventions pures et simples selon ses besoins. Je ne suis jamais complètement à l'aise avec le genre. Ceux ayant lu son «
Pilgrim » se souviennent de « ses »
Leonard de Vinci et
Carl Jung, violemment décrits dans cet autre roman, agréablement décevant... les meilleurs personnages étant ceux les moins développés…
Ici, il nous refait le coup de se focaliser sur d'autres mystérieux dépressifs, ce prince de Galles et sa misogynophile épouse, dont quelques paragraphes suffisent à vouloir leur faire avaler pierre par pierre tous les châteaux de la Couronne.
Une ambiance de complots permanents, très réussie, jette le trouble sur tout ce que l'on y regarde, brouillant à dessein cette première construction Bien / Mal, qui de toute façon ne tient jamais quand on y met les mains et de l'esprit.
…
Nous avons donc là une construction ambitieuse, une écriture claire et ciselée, maniérée parfois, au service d'une histoire qui nous replonge dans la Grande, évoquant l'époque où le point Goodwin n'existait pas encore, où les nazis pouvaient être simplement considérés dans ces salons comme bien habillés.
Comme à chaque fois,
Findley impressionne par sa prose, plongeant à corps défendant le lecteur dans ces solitudes qu'il répugne à appeler folie, tout en se gardant bien d'y apporter quelque remède, témoin résigné de toutes ces histoires insensées.
…
Son livre « Le Chasseur de tête » reste selon moi son meilleur, celui-ci venant juste ensuite.