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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Sur les pentes jurassiennes s'étend le domaine des Danthôme. Des terres, des pâtures, des bois, un verger, un potager et des animaux. Un domaine dont Brun a toujours pris grand soin et auquel il tient beaucoup. Des terres qu'il a, pour certaines, données à son fils, Mo. Deux visions bien différentes de l'agriculture. Quand l'un pulvérise et traite à tout va, l'autre ne jure que par l'écologie et le laisser-faire. Mais lorsque le médecin lui annonce qu'il est atteint d'une leucémie, Brun, pour éviter la faillite et désireux d'agir contre le réchauffement climatique, va accepter le projet d'implantation d'éoliennes. Un chantier loin de plaire à son fils...

Si Brun Danthôme a voué sa vie à ses terres, il en paiera malheureusement le prix aussi. À coup de pesticides, de fongicides ou d'herbicides pulvérisés pour augmenter sa production, le voilà aujourd'hui atteint d'une leucémie. Ses jours comptés, il se lance dans un projet un peu fou : planter des éoliennes. Mo, réfractaire, féru d'écologie et d'agronomie, n'ose s'opposer à ce chantier, titanesque mais promis à de jolies rentrées d'argent. Avec ce roman âpre, dur et salutaire, Éric Fottorino nous plonge dans le monde paysan. Un secteur régi de plus en plus par la productivité, soumis à de fortes concurrences, délaissé parfois (la France compte plus d'un suicide d'agriculteur par jour) et plombé par la solitude. L'auteur défend ainsi ces hommes durs à la tache, au rythme de travail effréné mais ô combien attaché à leur terre. Avec finesse, l'auteur nous fait part du monde agricole d'avant et des souvenirs d'antan de Brun, ponctués d'une certaine mélancolie et de désillusions. Un portrait authentique, poignant et sensible sur le monde paysan, sur cet attachement viscéral à cette terre et sur les relations père/fils.
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Que faire pour le bonheur des champs

En suivant une famille de paysans jurassiens, Éric Fottorino raconte les mutations de l'agriculture française depuis les années cinquante. Un roman qui fait suite à «J'ai vu la fin des paysans», récit-reportage publié en 2015 avec Raymond Depardon.

Brun Danthôme a 76 ans. Il aura passé toute sa vie dans sa ferme du Jura. «Il n'avait de rapport au monde qu'à travers ses terres, minces terres caillouteuses des hauteurs, fortes terres argileuses de la plaine. Sa raison de vivre était tout enfouie dans ces étendues fécondées qui portaient l'épi comme un destin vertical. Plus il se penchait sur ses sillons, plus il se sentait grand, utile, et somme toute heureux. (...) Labourer, semer, récolter, et recommencer, respirer le grand air, c'était sa vie, il n'en connaissait pas de meilleure.»
Seulement voilà, Brun vient d'apprendre de la bouche de son médecin qu'il était condamné, qu'une leucémie allait l'emporter, sans doute victime des produits chimiques qu'il épandait depuis des années, lui l'«apôtre de l'agriculture». Il va pouvoir rejoindre tous les morts de la famille, à commencer par son épouse Suzanne, morte très jeune après avoir toutefois «eu le temps de lui transmettre ce qu'elle aimait, ce qu'elle était, même si le temps fut trop court comme le sont toutes les vies quand on brûle de la passion de vivre.» Il laissera son domaine à son fils Maurice, dit Mo, qui a choisi pour sa part une autre agriculture. Une agriculture qu'il ne comprend pas, une agriculture qui ne se donne «plus la peine de remuer la terre, de casser les mottes, de déchaumer. C'était les nouvelles idées écologiques. du travail de sagouin. Il en avait mal au ventre.»
Alors, peut-être plus par provocation que par conviction, il va accepter l'offre qui lui est faite d'installer des éoliennes sur son domaine. Mo n'aura qu'à se débrouiller avec cette énergie verte et encaisser la somme rondelette qui lui est promise, même si bientôt plus personne ne reconnaitra les Soulaillans: «Mon père ne veut pas se l'avouer, pense Mo, mais nous sommes déjà morts, et lui un peu plus que les autres. Les éoliennes, c'est la dernière arme qu'ils ont trouvés pour nous éliminer, nous les paysans. Quand le béton aura éventré nos terres, quand nos paysages seront devenus des usines en mouvement, nous aurons disparu à jamais.»
On l'aura compris, cette histoire de succession permet à Éric Fottorino de retracer l'histoire de nos campagnes. de ces paysans qui, au sortir de la Seconde Guerre mondiale et à l'aide du plan Marshall, ont cru à leur mission de nourrir la planète et de produire toujours plus, quitte à utiliser des tonnes de produits chimiques, fongicides, herbicides, insecticides et autres pesticides. de ces paysans qui vont voir au fil des ans leurs revenus se réduire comme peau de chagrin et les politiques agricoles successives leur enjoindre de changer de modèle, de produire moins mais mieux, de faire plus écolo. de se transformer en producteurs d'énergie soi-disant verte.
Construit en quatre parties, déluge, désert, destruction et délivrance, le roman dresse un constat sans concession de la vie dans les campagnes. Un sujet que le romancier et directeur de presse connaît fort bien, puisqu'il a commencé sa carrière de journaliste comme spécialiste des matières premières et publié un essai remarqué en 1988 intitulé le Festin de la Terre. Mais c'est après avoir parcouru la France avec le photographe Raymond Depardon en 2015 que l'idée du roman a germé. Pour présenter J'ai vu la fin des paysans, Éric Fottorino rappelle que l'agriculture fut la première grande rubrique qu'on lui confia au Monde au milieu des années 1980. «J'y ai appris la France vue du sol, avec ses traditions et ses élans de modernité, ses gestes ancestraux et ses révolutions silencieuses, ses bouleversements profonds alliant l'exode rural à une productivité si performante qu'elle fit craindre pour l'environnement.»
Après Nature humaine de Serge joncour, couronné l'an passé par le Prix Femina, le sujet a trouvé en cette rentrée littéraire deux autres beaux ambassadeurs, Corinne Royer avec Pleine terre et Matthieu Falcone qui publie
Campagne. Tous donnent raison à Gogol, qui proclamait dans Les âmes mortes qu'«il est démontré par l'expérience des siècles que, dans la condition d'agriculteur, l'homme conserve une âme plus simple, plus pure, plus belle et plus noble.»


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Au lieu dit des Soulaillans , Brun le vieux fermier, soixante- seize printemps , son père Léonce Danthôme , le patriarche avait succombé dès sa prime enfance à la modernité , dans sa mémoire , cinquante ans , après resurgissait la grande fête que l'ancêtre avait faite lors de l'arrivée flambant neuf du petit tracteur sorti des campagnes des chaînes Ford et des grandes plaines de l'oncle Sam
..Chez les Danthôme , alors , il fallait d'urgence produire pour éradiquer les famines sur toute la planète …
Brun , en meneur aimait surprendre et innover: vaches laitières , fabrication du Comté et autres Morbier , utilisation très tôt des pesticides ….
Soixante - ans après, , son vieux médecin , le docteur Caussimon à qui il fournissait depuis toujours volailles et fromages , légumes lui avait annoncé une grave maladie , résultats de la chimie balancée sur ses terres sans combinaison ,ni protection , avec des gants déchirés ou pas de gants du tout.
Il va mourir , laissera bientôt ses terres à son fils Mo , âgé de trente - sept ans , écolo , ne jure que par la lenteur des jours, la quiétude des herbages , les horizons préservés : coccinelles , fumure, couvert végétal ,engrais bio, fourrés , failles abruptes , pissenlits , boutons d'or , parfum des fleurs , haies vives remplies d'oiseaux, bourdonnement des abeilles , ample tilleul des Grands - Champs —— arbre tutélaire glorieux , indéracinable——-du chant des alouettes à cet or impalpable ——le temps des moissons —-qu'il fallait à tout prix préserver de la cupidité aveugle des hommes .
Les querelles entre le père et le fils , pudiques et obstinés , comme les gens de la terre, se réduisaient à un dialogue de sourds …

Avant de disparaître , pour éviter la faillite et gommer son image de pollueur Brun décide de couvrir ses champs de gigantesques éoliennes.
Lorsque le chantier démarre , c'est un déluge de fer et de béton qui s'abat sur la ferme de Mo.
Il ne supporte pas cette douloureuse invasion qui défigure les paysages , leur bruit de lasso, leur feulement régulier qui altère , détruit les équilibres entre les bêtes , la nature et l'homme .
Aux illusions de la modernité galopante Mo oppose agriculture durable, quête d'enracinement et espoir d'un avenir serein à visage humain .
«  Que faire pour le bonheur des champs ? » disait Virgile
Pour des raisons familiales et personnelles , j'ai beaucoup aimé ce livre , souvenirs d'enfance : surveillance de la météo , moindre orage ou gelée pernicieuse qui pouvaient tout détruire, longues veillées dans les champs travail harassant , discussions âpres à propos d'achats de matériel toujours plus coûteux, passion viscérale pour ce métier si particulièr.
On parlait déjà de la métamorphose de l'agriculture.
Personne pour reprendre des terres agricoles !
Qui a encore envie de faire ce métier si difficile , si peu apprécié, si méconnu, si décrié et si méprisé, surtout par les urbains ?
Personne !
Cette histoire pourrait se passer dans n'importe quelle région agricole de France.
L'auteur , avec tendresse , profondeur, retrace avec habileté , en connaisseur du monde paysan', l'histoire de l'agriculture française de la fin de la guerre jusqu'à nos jours , de l'optimisme , de l'entrain à une profonde détresse , le plan Marshall, l'exode rural, la création de fermes dotées de centaines d'hectares , le remboursement des crédits , les rendements , l'arrivée de la «  Chimie » pour «  protéger » les récoltes .
Il examine à la loupe les différentes mutations agricoles , c'est un roman au souffle long .
Dans un Jura rude , majestueux se nouera le destin d'une très longue lignée d'agriculteurs , de Léonce à Brun puis MO sans oublier le muet : Isidore et surtout la mère de Mo , institutrice , la belle Suzanne , disparue trop tôt !
Il dénonce à sa façon les partisans d'une agriculture intensive , les contre-vérités , les querelles parfois violentes et désordonnées pour une agriculture durable , respectueuse de l'environnement .
Il mobilise toute sa puissance narrative pour brosser le tableau d'une paysannerie en crise , ce monde qui ne veut pas mourir .
Il nous gratifie de très belles pages sur la relation père - fils .
Un très beau livre de rentrée , la fin est un peu surréaliste , mais on pardonnera à l'auteur.
«  Qui avait saccagé ce bonheur - là ?
Brun faisait défiler ses souvenirs mais aucun ne lui disait par qu'elle traîtrise la maladie s'était immiscée en lui aussi sûrement que les nitrates empoisonnaient les nappes d'eau profonde en aval de ses champs .
Tout ce en quoi il avait cru s'effondrait soudain. L'éclat blond des blés , les grains de maïs bien lourds et rebondis , les colzas pimpants , les capitules charnus du tournesol', toute cette beauté n'était donc que le visage trompeur de la mort » …
Bravo à Éric Fottorino , à l'écriture si sensible , touchante de sincérité et de vérité .
J'ai déjà lu plusieurs de ses livres , je n'ai jamais été déçue .
Merci à mon libraire qui m'a proposé cet ouvrage de rentrée .
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Voilà un très bon roman sur le thème de la paysannerie française d'aujourd'hui.

Brun et son fils Mo sont deux agriculteurs dans la Région du Jura.
Brun, le père, veuf, est un paysan à l'ancienne : productiviste, convaincu de l'intérêt des pesticides, il est toujours allé « de l'avant » en privilégiant « le progrès » comme on disait à l'époque.
Mo au contraire privilégie la nature, le bio et les méthodes naturelles pour se débarrasser des insectes ou des maladies qui peuvent affecter les cultures.
Comme on l'imagine père et fils ne sont pas du tout d'accord.

Mais l'intérêt de « Mohican » c'est qu'on comprend pas à pas pourquoi cette agriculture productiviste s'est développée : après des années où les parents de Brun devaient s'escrimer à faire vivre leurs fermes grâce à leur seule force de travail, l'arrivée de la mécanisation et de son cortège de produits attractifs (avec des têtes de mort et des toutes petites lignes comme le confirme Mo sur les bidons), tout paraissait pourtant simple.

Mieux : les paysans des années d'après-guerre étaient fiers : ils investissaient dans la terre et ses outils de production pour nourrir la France. Portés par la Politique Agricole commune, et des dirigeants caritatifs (on pense à Jacques Chirac par exemple), ils étaient heureux de pouvoir dire qu'ils nourrissaient leurs concitoyens, voire même au-delà avec la politique d'exportation du lait dans les pays sous-développés.

Las, Brun comprend d'autant moins les reproches qu'on fait aux paysans d'aujourd'hui.
Même Mo, quand il découvre une pancarte où on les traite d'é »AgriculTUEUR », voit rouge.
Le divorce avec la société d'aujourd'hui, plus soucieuse d'écologie et de produits naturels est pourtant consommé.

On pense au film "Au nom de la Terre" d'Edouard Bergeon avec Guillaume Canet. Ce film, construit comme une saga familiale rurale, d'après la propre histoire du réalisateur et de celle de sa famille, montre bien aussi le cercle infernal : investissements, emprunts lourds auprès du Crédit Agricole, nécessité d'une spirale du « toujours plus », avec ce chiffre dramatique : en France un agriculteur se suicide chaque jour.

Ici dans « Mohican » ce n'est pas le suicide qui menace Mo, mais bien la maladie qui le rattrape. Une leucémie mal détectée (il a trop attendu pour aller chez le médecin pourtant son voisin et ami), et surtout une grande interrogation qui lui tombe dessus : pourquoi moi ? Qu'ai-je fait pour mériter cela ?

Mais dans la vie Brun et Mo ne se parlent très peu. Juste ce qu'il faut pour le boulot. Et si Brun ne dit rien à son fils pour ne pas l'inquiéter, sa femme morte quelques années plus tôt d'un cancer, vient le relancer en rêve pendant la nuit …

Derrière l'artifice (un peu tiré par les cheveux), le talent d'Eric Fottorino consiste à prendre le temps de bien camper ses deux personnages principaux pour bien nous faire comprendre leur histoire et donc leur vie d'aujourd'hui.

Intervient alors, à ce moment du récit, un autre phénomène un peu surprenant : Brun est très tenté par l'installation d'éoliennes sur son exploitation dont un promoteur qui lui vente les mérites.
Mo est contre, bien sûr, mais en tant que fils, il n'a pas droit au chapitre. Et avant que Brun succombe à sa leucémie, il aura eu le temps de signer le contrat qui va engager sa ferme dans de très importants travaux de déblaiement, pour acheminer les mâts gigantesques et leurs pâles associées sur un véritable paradis naturel sur lequel régnait (comme on le verra à la toute fin) la famille depuis des lustres …

Eric Fottorino a des accents lyriques quand il décrit (très bien sans doute) la campagne environnante. Mais on sent bien que ce dont il parle, ici au coeur du Jura, est en cours de disparition.

S'en suit un long réquisitoire anti-éolien qui m'a laissée perplexe.
Sans parler politique (ce n'est pas le lieu ici sur Babelio) mais en restant sur le champ littéraire, l'auteur porte la thèse, défendue par Mo et son oncle un peu spécial nommé Isidore, que les éoliennes sont une catastrophe pour les prairies où elles vont s'implanter. Surtout quand elles ont des mètres de hauteur, et qu'elles fauchent au passage des oiseaux migrateurs.

La fin du récit, qu'on ne dévoilera pas pour ne pas divulgacher le plaisir du lecteur, redonnera raison à Mo et à son oncle Isidore, dans une « happy end » salvatrice. Si la ficelle est un peu convenue pour terminer le récit, il n'en reste pas moins que « Mohican » (comme on surnomme Mo à la fin de l'histoire) est une véritable ode à la paysannerie française, très bien documentée, et qui nous fait voyager dans les contrées jurassiennes à la découverte d'un petit coin de paradis.

Un très bel éclairage sur une véritable question de société qui met en lumière le monde paysan mieux que ne sauraient le faire les documentaires disponibles sur le sujet, parce qu'incarné par deux belles personnes.

A lire et faire lire sans modération donc.
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« Avant de cultiver la terre, l'homme ne travaillait pas. Il chassait, il cueillait, il allait et venait au hasard de sa condition d'errant. L'agriculture avait inventé le travail, c'était incontestable. »

Aux Soulaillans, dans le Jura bourru, Léonce, Brun son fils et nombres de générations avant eux avaient labourés, remués, façonnés, ensemencés ces terres qu'ils aimaient par-dessus tout.

Eric Fottorino a écrit un roman d'amour à la terre, aux combes, aux crêtes, aux arbres, aux fleurs, aux vaches, aux moutons et aux abeilles. D'amour à la vie.

Pour cet amour-là, Mo a renoncé à tous les autres et a cheminé dans les pas de son père.
« Comprends ceci, Mo. Sans la chimie, sans nos machines, jamais on n'aurait fait de notre pays une puissance agricole. C'est bien beau à présent de rêver écologie, petites fleurs et légumes bio. Mais si on était partis dans cette direction après la guerre, crois-moi, il y a longtemps qu'on aurait tous crevé de faim. »

Pour nourrir la France, il fallait multiplier les récoltes, sulfater, désherber, sulfater encore. Il y a tellement cru Brun qu'il y a brulé son corps.
Combien d'hommes ont donné leur vie pour une cause et il s'est avéré qu'avec les temps nouveaux, c'était une connerie ?

Avant de mourir, Brun va imaginer se racheter en signant la construction de trois immenses éoliennes sur ses terres ancestrales.

Avant de planter ces banderilles à hélice sur l'échine innocente et verdoyante des crêtes parfaites du Jura, l'auteur décrit avec poésie la magie naturelle de ces paysages enchanteurs, les vallons, les reculées, les rivières et les forêts.

Mo ne peut supporter d'entendre le fouet claquer à chaque tour de ce mixeur à déchiqueter les gypaètes et les cigognes. Il ne peut pas accepter voir ses chemins bucoliques transformés en autoroute de chaux et de ciment afin de transporter les énormes pales de fer. Il lui est intolérable de voir se creuser les fosses de milliers de mètres cubes qui seront gorgées du béton des socles.

Eric Fottorino dénonce sans débordement extrémiste cette gabegie mais en distille les éventuelles conséquences sur le territoire pour que s'immisce la réflexion dans l'esprit de chacun. Un vrai plaisir de lecture sur un environnement en danger.

Et demain, dans les prochains temps nouveaux, on s'apercevra que ça aussi c'était une énorme connerie.




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C'est pas l'homme qui prend la terre, c'est la terre qui prend l'homme !
Fottorino nous parle des gens de la terre avec sensibilité .Il écrit vrai, il écrit précis. Sa langue est belle, parfois fleurie toujours emplie d'humanité.
Le Jura, Léonce nourrit ses sillons de sa sueur. Avec un cheval ou une paire de boeufs, il laboure, sème...et récolte... si Dame Nature ne fait pas des siennes. Dans ce pays, l'hiver semble durer 9 mois.

Puis, vient Brun, qui se veut agriculteur, entrepreneur, pionnier d'une révolution agricole venue d'Amérique .
Il emprunte, se mécanise et injecte dans sa terre engrais, traitements, herbicides...jusqu'à plus soif ! Brun devient malade comme sa terre. Il offre à son fils son dernier cadeau ; des éoliennes sensées le sortir d'un endettement constant..

Mo, bercé par Virgile, adhère à la Conf. il veut redevenir paysan, panser sa terre dévastée, la repenser.

Ce livre est captivant. Il nous apprend beaucoup. Sa fin m'a deconcertée: le passé enfoui qui vient sauver ce présent en déliquescence...
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Qu'avons-nous fait de nos campagnes ? Non contents de les avoir empoisonnées avec les engrais chimiques, nous les défigurons avec des éoliennes, phares trompeurs d'un progrès étiqueté plus durable. Mais ce progrès-là ne respecte rien. Ni la terre, ni les hommes qui la cultive, tant bien que mal, depuis des millénaires.
Mo est né sur la parcelle des Soulaillans, dans le Jura.
Mo et son père, Brun, que la fatalité finit par réunir, au-delà de leurs différends. Mo et sa mère, Suzanne, qui « lui a laissé le goût du bonheur qu'on trouve dans la contemplation des choses simples qui ne font pas de bruit ». Mo et son oncle, Isidore, que l'usage de la gégène pendant la guerre d'Algérie a fâché avec l'électricité.
Sa famille lui enseigne la beauté et la vérité d'une vie parfois cruelle (« (…) je suis si heureuse que tu aies finis par aimer L'Angélus, et par le comprendre. Car tu as compris, pas vrai ? Ce panier n'est pas un panier, mais la tombe d'un enfant mort »). C'est par désespoir que le père de Mo se résigne à l'installation des éoliennes. Depuis le début de l'ère industrielle, les investisseurs savent convaincre des agriculteurs étranglés par les dettes.
Les pales du grand oiseau blanc tournent et les désastres s'enchaînent. Les migrateurs s'empalent, les vaches meurent sans explication, les abeilles s'affolent, la rivière s'assèche, les fleurs disparaissent (« Les buissons d'aubépines ont été sacrifiés mais au temps des mégawatts sur pied, à quoi bon les aubépines ? »). L'écosystème est brisé.
Les journalistes qui écrivent des romans ont tendance à faire de leur livre le réceptacle insipide des informations qu'ils ont glanées. Ce n'est le jamais cas avec Éric Fottorino qui nous propose ici une belle histoire servie par une langue riche et limpide. J'ai aimé les descriptions de la nature (ex : p126), et bien-sûr le plaidoyer de Mo à la barre du tribunal (p269-274).
Bilan : 🌹🌹
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Jadis ,un certain Jean de la Fontaine nous avait gratifié d'un laboureur incitant ses enfants à travailler la terre nourricière .
Version XXI ème siècle ,Eric Fottorino nous jette à la figure sa lignée de paysans tout aussi durs au labeur ,encore que Mo se contente du minimum productif.
Ce récit romancé nous éclaire sur certaines contradictions - habilement cachées - derrière la culpabilisation des anti-éoliens .
Il fut un temps où moi aussi je saluai l 'arrivée de ces moulins à vent des temps nouveaux : le vent ne coûte rien et nous serions idiots de n'en point tirer partie.
Va pour l'éolien !
Les sous investis vont "faire des petits", permettant aux promoteurs (particuliers, groupes d'actionnaires ou institutionnels) d'y retrouver leurs billes et aux paysans gentiment abusés (le cas de Brun est exemplaire ) par un discours séducteur partiel et partial.
Au final qui paie : vous, toi, moi en bout de chaîne pour une production toujours insuffisante et toujours soumise aux aléas du climat.
Je mets de côté l'esthétique ,les pylônes HT et les châteaux d'eau c'est tout aussi moche ..sans parler des périphéries urbaines (Cf Dominique A.)
Donc après enquête et réflexion ,j'en suis venu à conclure que l'on s'était un peu emballé sur l'éolien .
- Attends, j'essplique !...
Jamais la valeur produite n'équilibrera l'investissement(et la maintenance)
Tout comme avec le nucléaire on dissimule le coût du démontage à terme (quinze ou vingt ans ...!
Demeureront ces structures obsolètes et dangereuses ,charge au paysan (ou aux communes ? ) de les démonter ...
Quant au béton injecté ,tout le monde s'en fout !...
car il faut savoir que les promoteurs PAYENT UN LOYER A L'AGRICULTEUR mais se gardent bien D'ACQUERIR ce terrain ...
Etonnant !
A suivre donc ...
Il est vrai qu'un frémissement commence à parcourir les mouvements écologistes ,calculette en mains, on constate que jamais on ne pourra faire tourner *l'économie en se reposant sur l'éolien et que le coût est salé.
Restent le solaire ,l'hydrolien et l'hydrogène** (bientôt ? )
* à moins de prôner une décroissance drastique mais ceci est une autre histoire.
Désolé ,je devais parler de ce livre passionnant ...et bien les critiques précédentes sont excellentes ,aussi pourquoi bégayer ...!
**motus sur le nucléaire vous noterez...!
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Au lieu-dit Les Soulaillans, Brun Danthôme (soixante-seize ans) n'a pas pour habitude de s'écouter. Comme la majorité des paysans. Pourtant, il aurait peut-être dû, vu que le Docteur Caussimon vient de lui « balancer » les résultats de ses analyses : leucémie ! Conséquences malheureuses des pesticides utilisés depuis des décennies !…

(Et si sa femme avait succombé à son cancer du sein pour la même raison, quinze ans plus tôt ?…) C'est un point de discorde avec son fils Mo qui est un écolo pur et dur et refuse tout produit chimique (fatalement toxique !) sur ses propres cultures … Pour le projet des éoliennes, là non plus, ils ne sont pas du tout sur la même longueur d'onde ! Ce qui – paradoxalement – n'empêche nullement l'amour d'être omniprésent entre le père et le fils.

Éric Fottorino nous livre une jolie histoire de terroir, insistant sur la dure réalité d'une vie paysanne souvent pénible, qui parfois vire au désespoir, jusqu'à faire commettre des actes extrêmes à certains. L'amour de la terre, de la nature et de son semblable également – même si nombre d'entre eux ne savent pas bien l'exprimer … Bon, ok, la fin est moyennement crédible, mais pourquoi pas ?… Lu pour le prix FNAC 2021, un très agréable moment de lecture qui fait du bien à l'âme !
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C'est l'histoire de la terre à travers 3 générations de paysans, ceux qui l'ont exploitée, abîmée et pourtant aimée. Eric Fottorino nous conte avec délicatesse les champs, les arbres, les blés, la brume, le travail des champs, à la main d'abord puis arrive la mécanisation, la modernité. Mais trop de modernité ne risque-t-elle pas de détruire notre Terre ?
Je n'en dis pas plus au risque de divulgacher mais ne passez pas à côté de ce livre qui nous ramène à nos racines et nous interroge sur notre avenir.
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