René Fregni est un merveilleux déserteur professionnel qui, de son propre aveu, a toujours vécu "ici, à côté des choses réelles".
Quand ça tangue trop autour de sa bulle, il prend la fuite.
Lettre à mes tueurs, c'est la cavale d'un poète qui ne sait pas dire non à un vieux pote en galère, et qui , pour une cassette mystérieuse enfouie dans un de ses pots de géraniums, prend la poudre d'escampette avant que la poudre tout court ne se mette à parler..
Et sur quel ton! Ça défouraille et ça dégomme à tout va! Les tueurs s'en donnent à coeur joie. Pas de repos, pas de répit !
Encore un polar , donc, mais musical, une" fugue" à tous les sens du mot dont les variations, pour beretta et kalach' , scandent les trépidations d'une fuite éperdue: de Marseille au Danemark, des collines de la Drôme à ..Marseille.
Retour à la case départ.
Marseille où tout a commencé : les jeux de minots dans les calanques, les goûters tendres avec maman, les premières baignades avec la petite Marilou, les séances de boxe, les ateliers d'écriture derriere les barreaux des Baumettes...dont Pierrot Chopin - c'est le nouvel avatar de notre René préféré , lunaire et musical à souhait- connaît l'avers et l'endroit..
Marseille, précieux creuset de la mémoire et aussi, malheureusement, théâtre noir d'une terrible guerre des gangs ...
Beaucoup de rythme, des paysages lumineux et inspirés, des silhouettes familières, un vieux pote déglingué, un "parrain" protecteur, une ode à l'amitié et à ses codes d'honneur imprescriptibles, un assez palpitant récit d'évasion "littéraire" en Avignon, sur la route des rats...et par les soins d'un "rat" de bibliothèque...
Mais aussi quelque chose de plus, quelque chose de nouveau...
Une vraie et poignante mélancolie dans le "finale" , une petite cantate pleine de fragilité et d'éternelle enfance, une mélodie du malheur, une petite comptine de chagrin - et qui sonne comme un adieu...
J'ai eu, soudain, le coeur serré, le coeur en miettes, par inadvertance.. .