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3,89

sur 1126 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
C'est franchement un énorme coup de coeur de cette rentrée littéraire. le Prix Goncourt Laurent Gaudé signe un roman passionnant, entraînant et réflexif sur les guerres et les conflits. le coeur de l'oeuvre porte sur le vide de sens des victoires et sur l'impossibilité de s'éloigner réellement des défaites. Quelles sont les causes qui méritent autant de monstruosité, de morts pour être gagnées ? Quelle cause est assez grande pour nous protéger de la défaite ? Qu'est-ce qui nous fait avancer sans renoncer, malgré l'échec ? Ces questions forment l'essence même du livre.

L'auteur part d'une histoire contemporaine d'espionnage. Un tueur de la République, qui a traversé les différents conflits de ces dernières années, a pour mission d'enquêter sur un soldat américain (presque son double) ayant participé à l'assaut tuant Ben Laden et ayant ensuite déserté. Pour cela, il va se plonger au coeur des ténèbres entre Beyrouth, l'Éthiopie et la Libye. Il va croiser la route d'une archéologue irakienne combative, voyant les merveilles de son pays détruites aux mains de l'horreur, et qui est condamnée à rechercher des objets pillés et dispersés à travers le monde dans un éternel recommencement. Chaque protagoniste va s'interroger sur le sens et la finalité de son action.

L'auteur entremêle ces aventures cosmopolites avec l'Histoire des défaites d'Hannibal, de Ulysse Grant et Hailé Sélassié. C'est la force du livre de traverser les époques et de créer des ponts intemporels autour de ces notions de défaites, de vaincus et de vainqueurs. C'est un grand livre, où tout s'accumule. On est porté par le souffle lyrique de l'auteur. La diversité des histoires, des contextes historiques et des personnages rend l'oeuvre très dynamique. Il y a un rythme incroyable, tant dans l'écriture que dans l'articulation des passages.
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La critique est aisée mais l'art est difficile affirme une ancienne (1732) locution proverbiale. Pourtant, la critique de ce livre n'est pas une chose aisée. le livre de Laurent Gaudé "Ecoutez nos défaites" est dense, complexe (ce qui ne veut pas dire difficile), il induit une lecture à plusieurs niveaux et il touche au plus intime de chaque lecteur. Il nous parle du temps qui passe, de nos fragilités, de victoires et de défaites. Il tisse un fil ténu qui relie entre eux tous les personnages quelle que soit l'époque où ils ont vécue. Se faisant Laurent Gaudé entraîne son lecteur dans un dédale d'émotions, de réflexions, d'interrogations. On se sent tout à coup appartenir à une histoire qui n'en finit pas de balbutier, de se répéter, de détruire, de renaître. Les actes héroïques, grandioses qui semblent parfois nous dépasser deviennent ici fragiles, hésitants, terriblement humains. "Ecoutez nos défaites" nous parlent de batailles, de guerres, de destructions et pourtant rien de désespérer (ni de désespérant) dans ce livre magnifique qui parle de chacun d'entre nous.
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Trois histoires qui se recoupent se passent de nos jours, et trois histoires plus anciennes viennent s'intercaler et se fondre dans les trois premières.

Chaque paragraphe reprend une de ces six histoires. J'ai été un peu perdue au début, mais rapidement le rythme se prend. On ressent toute l'émotion, la douleur, le poids des décisions à prendre, la tension, l'horreur de la guerre et des batailles sanglantes, la folie des hommes.

Quelque soit le lieu et l'époque, on est devant l'humanité qui se tue. Chaque victoire est aussi une défaite, celle des vaincus bien sûr, mais aussi celle des vainqueurs qui ont été trop loin, qui sont devenus des barbares couverts du sang des soldats morts au combat.

Écoutez ses défaites, c'est aussi transmettre : par les oeuvres d'art qu'essaye de sauver Mariam, par la vie qui continue, par les champs de bataille recouverts de corps qui vont se transformer au fil des ans en terres cultivées, en paysage doux et paisibles.

C'est un roman très dense qu'il faut prendre le temps de lire et de digérer. Un magnifique roman sur le thème de la victoire et de la défaite. Une note d'espoir à travers l'amour, l'art et la culture. Une écriture ciselée et fluide qui donne envie de relire plusieurs fois des phrases.

Un livre à découvrir.
Lien : http://lesfanasdelivres.cana..
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Quel beau livre ! Très belle écriture. Structure très originale!
Par petites touches , Laurent Gaudé, nous narre les d'états d'âme de 5 personnages dont 2 sont nos contemporains. Trois sont des héros historiques, d'époques et de continents différents machines de guerre détruisant tout sur le passage de leurs troupes mais derrière ces visages, ce sont des humains avec des émotions qui les traversent dans tous les sens. Que de sacrifices pour gagner une guerre.
Ce livre nous amène à réfléchir sur la situation internationale actuelle . Les grands de ce monde n'ont donc rien retenu du passé et continuent à se battre au nom de causes qu'ils estiment bonnes
.
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Laurent Gaudé nous a habitués à une langue belle et évocatrice, à des histoires charnues qui tiennent le lecteur en alerte. « Écoutez nos défaites » se démarque de ces pratiques en ceci qu'il ne s'agit pas exactement d'un roman au sens réel du terme. Certes, il existe dans ces pages des personnages de fiction et d'autres qui sont réels mais dont la vie est, comme on dit, « romancée », même s'il vaudrait sans doute mieux dire qu'elle est nourrie, complétée, avec sang et chair, par la restitution – fiction de moments qui certes, n'ont pas pu être consignés dans les récits d'époque, mais qui sont vrais tant ils sont vraisemblables.

Trois parcours se croisent, se répondent, trois personnages vibrant d'émotions violentes sur les mêmes lieux au travers des siècles : Haïlé Sélassié, le Négus, attaqué par l'Italie de Mussolini et abandonné par les Nations avant de redevenir un point d'intérêt géopolitique pour finir sous les coups des traîtres de son propre camp. Hannibal, le Carthaginois qui a défié Rome, dans un délire d'ambition et dont l'épopée nous est contée avec brio mais aussi avec beaucoup de sensibilité. Et enfin Ulysses Grant, vainqueur De Lee, futur Président des États-Unis, surnommé « le boucher » par ses troupes tant il a mené de jeunes hommes à la mort.

Trois destins de guerre, de violence, de mort et de sang, dont l'auteur n'édulcore rien, ni la peur, ni l'horreur, ni la pestilence des viscères gisant au sol. Et la même question revient : de qui est-ce la victoire ? On entend la phrase qui répond : « Mort, où est ta victoire ? ». Longue réflexion sur la vanité des guerres, l'illusion des combats dits « justes », l'horreur qui semble, aujourd'hui, justifiée, mais dans un siècle ? Dans cent siècles ?

Pour compléter ce cheminement, Laurent Gaudé introduit une intrigue mettant en scène deux espions, l'un de la DGSE, l'autre de la CIA. le premier, Assem Graïeb, a assisté, participé sans doute, à la chute de Khadafi. le second, Sullivan Sicoh, a participé à la mise à mort de Ben Laden. Deux destins de traques secrètes, de rencontres au bout du monde, de danger, qui les mènent au Moyen-Orient et au Pakistan puis les font se rencontrer selon un scénario étrange : le Français est chargé par les Américains de « tester » son collègue, voire de l'exécuter s'il est considéré comme perdu pour les services. Il fait du trafic d'oeuvres d'art, vandalisées, volées, en Irak, en Syrie, en Égypte.

Alors intervient une histoire d'amour fugace entre l'archéologue Miriam et Assem, jolie parenthèse entre deux mondes, deux moments, seule petite lumière de ce roman. Comme nous, Laurent Gaudé semble avoir été horrifié par la disqueuse qui a scié les pieds du colosse de pierre, par le sac du musée de Mossoul, par la destruction (finalement pas totale, heureusement) de Palmyre. Miriam est chargée de pister tous les objets volés, vendus, au profit de terroristes ou de voyous ayant pignon sur rue.
Devant toutes ces horreurs, Miriam a sauvé de la destruction une statuette du dieu égyptien Bès, symbole ici de la protection des hommes, de l'objet-fétiche qui passe de main en main, jusqu'à se retrouver à sa place, dans la terre des Anciens.

Il y a de purs moments de grâce dans ce roman, au milieu de récits atroces. Les parcours des personnages se croisent, se ressemblent et divergent, nous menant des rives de la Méditerranée aux théâtres de guerres au Moyen-Orient. On pourrait croire qu'on va se perdre, ne plus suivre puisqu'à chaque paragraphe on change de lieu et d'époque, mais il n'en est rien, très vite on se replonge dans le récit un moment interrompu, comme si l'auteur voulait nous laisser le temps de réfléchir, d'imaginer les faits et les lieux. du grand art.
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Comme lors de la lecture de « Confiteor » de Jaumé Cabré, le début du livre m'a déstabilisé par les changements de personnages, d'époques qui se font sans avertissement pour le lecteur, mais on s'y fait vite. J'ai trouvé l'écriture dense et très agréable.

Je vois dans ce livre, en plus de tout ce qui a déjà été dit, un vibrant plaidoyer pour l'archéologie qui permet de transmettre à travers le temps des témoins du beau, de l'art dont l'Homme est capable malgré tous les massacres successifs qui jonchent son histoire.

Ce livre m’a évoqué le film « Apocalypse Now » où, pendant la guerre du Viêt Nam, les services secrets militaires américains confient au capitaine Willard, ici Assem Gaieb, la mission de retrouver et d’exécuter le colonel Kurtz, ici Sullivan Sicoh alias Job, dont les méthodes sont jugées « malsaines ». Willard doit remonter le fleuve jusqu’au plus profond de la jungle pour éliminer l’officier. Au cours de ce voyage, il découvre, en étudiant le dossier de Kurtz, un homme très différent de l’idée qu’il s’en faisait. Kurtz explique à Willard que ce sont les horreurs auxquelles il a assisté qui l'ont décidé à monter son projet. Willard finit par assassiner Kurtz, et repart. Dans les deux scénarios, le colonel Kurtz dans le film et Sullivan Sicoh dans le roman ont été abîmés par la guerre, forcés à faire des choses abominables qui les ont changé à jamais, les rendant désormais incontrôlables, il faut les éliminer !

En plus de Grant, d'Hannibal ou Hailé Sélassié, il y a un quatrième personnage dont je pense que l'Histoire se souviendra. Un personnage défait par Daesh, mais victorieux car son exemple et son martyre resteront à jamais dans l'Histoire : Khaled al-Assaad, directeur des antiquités et des musées de Palmyre pendant 40 ans, décapité par Daesh le 18 août 2015 alors qu'il avait 82 ans. Victorieux parce que malgré les tortures que lui ont infligées les séides de Daesh pour qu'il livre les trésors de Palmyre, il a résisté et n'a pas parlé.
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Laurent Gaudé a une haute image de son lecteur. Il ne craint pas de le perdre, il a confiance en lui.
Quelque soit le livre qu'il écrit, demeure une grande exigence littéraire qui nous hisse vers le haut et nous oblige.

Avec ce livre, une nouvelle fois il entremêle des époques, des lieux sans même prendre la peine de faire des signes à son lecteur par un changement de chapitre ou de page, non il ne nous épargne rien, il nous conduit sans répit - et avec quel talent - auprès de ces hommes avides de pouvoir qui méprisent les autres hommes pour arriver à leurs fins.
Mais dans le même temps il leur octroie une cruelle lucidité sur eux même qui nous permet de les considérer - sans les absoudre - avec plus d'épaisseur et non seulement comme des sanguinaires égocentrés.
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J'avais aimé l'âpreté africaine de "Salina"; les talents de conteurs du" Roi Tsongor ", alors dans le rayonnage de la bibliothèque j'ai pris "Ecoutez nos défaites " sans savoir le choc qui me saisirait au fil des pages.
Ces histoires antiques ou contemporaines portent en elles tant de vérité et de cruauté..Laurent Gaudé nous livre une magnifique méditation sur la Guerre, L Histoire , l'homme avec sa folie du pouvoir de conquête et ses failles , faiblesses
Un grand roman ou se mêle l'actualité brûlante des empires qui meurent et ceux qui naissent dans la course du monde.
Sherman dira "war is hell" , bravo Mr Gaudé , les hommes peuvent ils effacer L Histoire ? non, et j'en aime encore plus les poussiéreux musées d'ici et surtout d'ailleurs.
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Laurent Gaudé signe un magnifique roman où se mêlent plusieurs récits sur différentes époques. Au coeur de ces batailles, les hommes s'interrogent sous une plume envoutante et poétique.
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Roman où se mêlent les époques et les héros de Hannibal, à Hailé Sélassié au général Grant. La rencontre entre une archéologue irakienne et un agent des services secrets français nous ramène à la période contemporaine, comme un contrepoint à toutes ces épopées du passé. Toutes ces trajectoires se croisent et tissent une réflexion sur la guerre, la défaite.
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