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3,89

sur 1122 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Un très beau roman, malgré des thèmes âpres et difficiles. Un roman à la construction complexe, qui mêle les histoires, victoires et défaites de nombreux personnages, et qui pourtant livre des messages limpides. Quelle guerre mène vraiment à une victoire ? Toute guerre ne porte-t-elle pas en elle la défaite ? Que sommes-nous prêts à sacrifier à une guerre ? En nous contant des passages de la vie des personnages principaux, Assem un agent des services secrets et Mariam une archéologue passionnée, mais aussi des trames de la vie de Grant, de Hannibal et de Hailé Sélassié, Laurent Gaudé nous embarque dans des histoires multiples, qui font L Histoire, chacune à sa façon.
J'ai d'abord été déconcertée par ces différents personnages, et je ne sais pas exactement quels critères ont présidé au choix de l'auteur, pourquoi ces personnages et pas d'autres. Puis je me suis laissé prendre au jeu, et j'ai continué, avancé, chapitre après chapitre. L'écriture est belle, et la magie opère. le souffle romanesque est là. On a envie de suivre ces différentes histoires, de comprendre les personnages, de les accompagner. Malgré la thématique de la guerre, dans ce qu'elle a de plus violent, de plus dérangeant, de plus terrible, il me semble qu'il y a aussi des messages d'espérance dans ce livre. Je retiens par exemple les figures de Mariam, de Shaveen, du vieux monsieur qui reste à Palmyre envers et contre tout, jusqu'à la destruction. Dans ce monde menacé par l'obscurantisme, l'amour, l'humanité et le patrimoine universel restent des lumières, des phares, qui guident et qui éclairent.
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" On ne peut pas partir au combat avec l'espoir de revenir intact. " Il n'y a aucune victoire pleine et entière car pour que la victoire en soit une il faut que les vaincus se considèrent comme tels.

Hannibal triomphant à Trasimène et Cannes n'écrase pas Rome et perd à Zama. « Le boucher », Ulysses S. Grant, s'interroge sur ses victorieuses et sanglantes batailles sur les confédérés. Avec la victoire de Mussolini, Hailé Sélassié perd son royaume, mais résiste au fascisme.

Plus près de nous, l'archéologue irakienne, Mariam, tente de soustraire à la barbarie des terroristes des œuvres millénaires. Elle rencontre et aime Assem, agent des renseignements français, qui à l'occasion de sa dernière mission, remet en cause les éliminations perpétrées au nom de son pays.

Hannibal, Ulysses S. Grant, Mussolini, Daesh, Assem, leurs victoires ne sont-elles pas plutôt des défaites devant la capacité d'empathie et d'amour des hommes, la supériorité des mots et de la pensée sur l'action guerrière, la survivance et la permanence de l'art et la beauté ?

Sur un ton en apparence sombre et pessimiste, Laurent Gaudé a écrit, avec Écoutez nos défaites, une magnifique leçon de vie et un formidable roman d'amour, profond, intelligent et émouvant.
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Mariam et Assem se rencontrent au bar d'un hôtel. Corps à corps amoureux pour lui qui connait surtout les corps à corps meurtriers en tant que militaire de la DGSE, pour elle, archéologue irakienne, meurtrie dans sa chair par des cellules cancéreuses ; repos des guerriers, purge salvatrice de l'âme où Assem déclame un poème et où Mariam l'envoûte avec des récits mythologiques. Unique rencontre à la fois renaissance et testament amoureux.
Elle repartira en essayant de sauver les trésors archéologiques irakiens aux mains de DAESH.
Il partira à Beyrouth pour évaluer, voire neutraliser un ex de la CIA soupçonné de trafic.

Parallèlement, nous suivons le destin d'HANNIBAL, roi carthaginois, qui marchera jusqu'à Rome pour tenter de briser l'hégémonie latine, la guerre meurtrière du général GRANT qui, au nom de l'abolition de l'esclavage massacrera l'armée des confédérés pendant la guerre de sécession, la résistance héroïque mais désespéré de l'empereur d' Ethiopie contre les forces italiennes de Mussolini, son exil forcé en Angleterre et son discours tonitruant face à la SDN.

Ce roman prend la forme d' une mélopée mélancolique qui chante la détresse des vaincus et des vainqueurs, pleure les millions de morts engendrés par ces guerres.
"Ecoutez les défaites " oppose la nécessite de combattre pour défendre une cause juste, pour briser ses chaînes, ou tout simplement pour survivre à la vacuité de la victoire.
" Ce qui ne te tue pas te rend plus fort" disait Nietzsche. Non, répond Gaudé, tout combat laisse des cicatrices qui suppurent à tel point que nous ne savons plus s'il faut rire ou pleurer.

Roman puissant, au thème original, ambitieux dans sa forme mais aussi dans les nombreuses réflexions qu'il suscite chez le lecteur.

Mais ce n'est que mon humble avis
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Voilà une lecture à déflagration lente, une épée qui tranche dans le vif pour nous donner à voir et entendre la complainte des victorieux perdants, une mélopée à plusieurs voix qui se métabolise profondément en nous, car en effet il faut les écouter ces défaites, les regarder ces cohortes de soldats décimés par milliers depuis le fonds des âges dans une vague infinie de destruction. Et par-delà le désespoir d'Hannibal, de Grant, de Sélassié il faut une redoutable force d'abnégation pour entendre celles d'Assem et Mariam, leur désir, leur amour du beau, leur choix "d'enterrer les ombres" et d'accepter qu'il n'y a pas de victoires.
Coup de coeur pour ce texte envoutant, profond et magnifique.
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Mariam, Assem, Hannibal, Grant ou Hailé Sélassié sont des hommes et des femmes de combats. Qu'ils aient écrit l'histoire comme Hannibal marchant sur Rome avec ses éléphants, qu'ils aient gagné le surnom de "Boucher" comme le général Grant ou qu'ils aient été roi des rois comme Hailé Sélassié, tous ont payé de leur vie et de leur esprit pour aller au bout de leurs idées. Plus près de nous, un homme et une femme, dont la rencontre fugace dans un hôtel de Zurich va permettre de tourner une page dans leur vie mouvementée, un couple dont les autorités des pays respectifs vont utiliser et perdre au prix de leur rêve...
Laurent Gaudé, avec toute l'élégance de son écriture, nous pousse dans nos propres retranchements : peut on gagner ou perdre alors que nous ne sommes jamais seuls ? Gagner une guerre quand on marche sur les vaincus est-il noble ? Perdre une bataille alors qu'on a été les plus courageux est-il honteux ? de Rome à Mossoul, en passant par l'Ethiopie, la folie des hommes nous met à genoux comme elle peut nous élever...
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Avec sa plume enchanteresse, Laurent Gaudé nous promène ici à travers les siècles et les grandes contrées du monde dans le but de nous faire réfléchir à ce que sont nos victoires et nos défaites.
Sont-elles si opposées l'une de l'autre ?
Certaines victoires n'ont-elles pas des allures de défaites en ce qu'elles nous ont poussés à aller trop loin, à trahir notre humanité, nous laissant un goût amer en bouche ?

A travers les combats de trois grands personnages historiques, il nous démontre que la victoire n'est jamais totale, que la guerre la rend laide et sâle.
Comment peut-on savourer sa victoire quand on voit ses troupes décimées, ensanglantées ? N'est-ce pas trop cher payer ?
Et quand ceux qui sont défaits font encore trembler les vainqueurs, peuvent-ils encore se considérer comme tels ?

Ces questions, Assem, agent de renseignements pour les services français, maintes fois envoyé en mission et fatigué, se les pose également.
Lui qui a vu des régimes tomber, des peuples se relever, des hommes mourir, comprend qu'il n'y aura jamais de victoire définitive, celle qui lui apporterait le repos.
Sa rencontre fugace avec Mariam, une archéologue irakienne qui tente de sauver des oeuvres d'art dans la zone dévastée du Moyen-Orient, est le seul moment où il accepte d'être lui-même, de s'abandonner, de ne rien dissimuler.
L'un et l'autre resteront marqués par cette unique nuit d'amour.
Mariam, confrontée à la maladie, apprendra à transformer cette défaite en victoire, car la vie n'est qu'une succession de victoires et de défaites qu'il nous faut gérer au mieux.

Une fois de plus, du grand Gaudé... avec un petit bemol quand-même pour moi.
Car, si je suis férue d'histoire, je me suis toujours emmêlée les pinceaux dans les récits de batailles.
Et Dieu sait s'il y en a dans cet opus !!
Par contre, mon intérêt pour l'archéologie s'est vu pleinement satisfait par les interventions de Mariam
sur les sites antiques.
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Laurent Gaudé se livre à une biopsie des guerres sur différentes périodes de l'Histoire. Il situe son analyse surtout sur les horreurs commises et vécues par les hommes.
L'enchaînement de chapitres courts et acerbes et les sauts dans L Histoire alimentent jusqu'à la nausée le lexique très imagé de la guerre et de ses abominations. Une guerre c'est toujours sale et effrayant.

En parallèle il vante le courage de ceux qui luttent pour sauver le patrimoine culturel, sauvagement rasé et pillé au passage des guerres barbares effaçant petit à petit l'âme d'une civilisation.

D'une plume acérée et documentée il nous offre un condensé glaçant de massacres et carnages où la conclusion pleine de bon sens c'est la certitude que le monde n'est jamais le même après une guerre et que celui qui en revient n'en sort jamais intact et se verra toujours amputé d'une part de soi.

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Parallèlement à l'histoire d'un couple (et d'une troisième personne) , l'auteur raconte les batailles menées par trois grands stratèges : Hannibal, Grant et Hailé Sélassié.
L'homme travaille pour les services secrets français, la femme ne vit que pour sauver des oeuvres d'art des griffes des barbares des temps modernes. Ils sont amoureux sans bien se connaître et en ne s'étant rencontrés que brièvement (comme dans la chanson de Brassens "Les passantes", qui est une de mes favorites).
Dans ce roman historique et philosophique, les victoires sont aussi des défaites, au vu du sang versé, et les vainqueurs n'en éprouvent aucune joie, mais plutôt une profonde tristesse.
Ce n'est pas le livre que j'ai préféré de cet auteur, cependant j'ai trouvé le titre fort bien choisi et la réflexion autour de lui très pertinente.
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Laurent Gaudé campe ce roman dans les zones en guerre. Assem a mené des opérations pour les renseignements français, il a dans son palmarès quantité de régions sensibles, le Kurdistan, Bamako, Benghazi. Il est fatigué. Il croise dans une nuit d'amour Mariam, une archéologue qui sauve ce qui peut l'être, à sa manière, déterre les couches enfouies par les tremblements de l'histoire.

Les autres vies fauchées loin derrière se rappellent à nous, avec Hannibal marchant sur Rome, le général américain Grand, qui mena des batailles sanglantes pour éliminer les nationalistes sudistes. L'auteur plonge dans tous ces visages humains. Ici, on ne compte pas les morts, on ne prend pas de parti, on n'énumère pas les vainqueurs et les vaincus, puisqu'au fond, ce qui compte, c'est chaque âme meurtrie, chaque vie cabossée. Ce qui compte, ce sont tous ces visages humains avec ni sentiment de gloire, ni sentiment de défaite mais des hommes au coeur meurtri.

La force de ce roman réside dans cet empilement de voix, de vies, de corps, de défaites, de gloire, de massacres. Ces sols où les couches sans distinction s'empilent, ces sols foulés qui loin d'étouffer les larmes et les cris, en portent les échos. Dévoilent l'absurdité des guerres qui se succèdent. Où il n'y a jamais de vainqueur, puisque même les vainqueurs ont un goût de défaite. Laurent Gaudé à l'art et la manière de sentir ces vibrations et de restituer les états d'âmes de ses personnages, de sortir de l'ornière du roman historique pour se plonger dans ces strates de vies qui laissent des empreintes sur nos corps, sur nos âmes.

Peut-être le livre le plus mélancolique qu'il ait écrit. Une plume pleine d'humanité avec tantôt un souffle long, tantôt un souffle haché. Notre histoire en somme, une histoire sans fin, parsemée d'éclats et de débris nous est raconté ici. Tout ce qui se convertit en chiffre et en évènement historiques dans les manuels d'histoire, nous est raconté sous l'angle des traces humaines qui peuplent notre conscience, nous habitent obscurément, et remontent comme ces objets exhumés pas Mariam.

Une très belle plume mélancolique et subtile.

4/5
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Aucune victoire n'a construit la paix.
Nulle part et jamais.
Naïfs ou aveugles, nous fêtons nos victoires et elles sont des défaites, aux milliers de morts sacrifiés à l'autel de la barbarie.
Avec sa plume lyrique, Laurent Gaude nous offre un récit historique passionnant en forme de bilan, remontant aux temps dits héroïques d'Hannibal contre Rome, passant par la guerre de Sécession et par le petit Roi des rois d'Ethiopie, au pays laminé par l'Italie fasciste.

Dans ce diaporama macabre, les guerres contemporaines sont aussi omniprésentes, avec leurs méthodes de destruction raffinées, leur mondialisation et les effets collatéraux de barbouzerie.
On peut s'interroger sur le sens patriotique, la nécessité de servir et de s'effacer devant le devoir. On peut accepter le désir de conquêtes, l'impérieuse volonté de liberté, la conviction d'imposer ses valeurs.
Mais l'individu ne perd-il pas lui-même son âme dans cette loterie mortifère?

Trop de sang vitrifie l'effroi et banalise. L'Homme a la planète qu'il mérite. J'ai été presque plus touchée par la perte des trésors archéologiques, miroirs de nos civilisations disparues. C'est là où la défaite m'a parue la plus radicale.

"Nous entrons par effraction dans le monde des morts, nous en saisissons des objets et les offrons au carnage des vivants..."
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