Le décès de l'écrivaine
Benoîte Groult, à l'âge de 96 ans, m'a amené cet été à lire une de ses oeuvres. Je savais un peu qui elle était, j'avais entendu parler de "
La part des choses" et "
Ainsi soit-elle", je pouvais même la situer par rapport à d'autres écrivaines féministes. Assez pour frimer mais sans plus. J'ai choisi de lire "
Le féminisme au masculin" parce qu'en tant qu'homme, je me suis senti plus attiré par ce titre, et que j'aime bien découvrir un écrivain ou une écrivaine en lisant autre chose que « un de ses classiques ».
J'ai apprécié beaucoup ce livre pour ce qu'il m'a appris, c'est-à-dire que des auteurs et philosophes européens masculins ont effectivement fait preuve d'une véritable pensée féministe. Tour à tour,
Benoîte Groult nous présente Poulain de la Barre, Condorcet, Stuart Mill,
Saint-Simon et Enfantin : souvent des utopistes, bien en avant de leur temps, trop en fait pour avoir réussi à exercer une influence directe sur l'évolution des pensées en ce qui concerne la femme. Mais ils ont existé et c'est bon de le rappeler ou de nous les faire découvrir.
Groult présente de longs extraits de textes de ces auteurs, mais ils sont toujours bien expliqués et surtout bien mis en contexte. Elle prend le temps de bien résumer la pensée générale du temps, avec noms et citations à l'appui, pour démontrer à quel point ces hommes étaient uniques dans leur pensée féministe. L'auteure a effectué un travail très sérieux et approfondi sur le sujet, livré cependant avec beaucoup d'humour et d'ironie. le lecteur masculin ne se sent donc pas attaqué, mais plutôt complice de la démarche de l'écrivaine.
J'aurais aimé en savoir plus sur le processus de recherche de l'écrivaine, soit comment elle a découvert ces auteurs, si elle les a choisis parmi d'autres qui auraient pu tout autant être traités, pourquoi seulement des Français (et un Anglais), etc. Malgré tout l'intérêt de cette oeuvre en soi et le plaisir qu'on peut en tirer, cela demeure une lecture plutôt « française » de l'histoire en général et de l'histoire du féminisme ; on peut donc regretter que cela n'aille pas plus loin et qu'on n'ait pas un portrait plus universel du phénomène.