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Marie-France de Paloméra (Traducteur)André Charpentier (Traducteur)Pierre-Emmanuel Dauzat (Traducteur)
EAN : 9782070309832
720 pages
Gallimard (14/09/2006)
4.48/5   24 notes
Résumé :
L'histoire est une discipline ainsi faite qu'elle avance grâce à des études monographiques sur des acteurs, des lieux, des institutions, des événements, et, plus rarement, grâce à la mise en un récit unique de l'ensemble de ces données, traçant une perspective d'une seule coulée, donnant, pour des générations, le grand cadre de leurs recherches, l'impulsion même de leur vocation d'historiens. L'ouvrage de Raul Hilberg est de ceux-là, qui a définitivement décrit le g... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
L'ouvrage de Raul Hilberg est est le résultat d'une entreprise irremplaçable et fondatrice. Ce que nous savons par bribes, à propos de tel ou tel lieu, ou de telle ou telle personne, sur la shoah, se trouve ici rassemblé en une somme qui fixe le cadre et replace les éléments épars en un tableau cohérent. C'est magistral.
Ce premier tome est consacré aux préparatifs et à la première période de la destruction. Il comprend plusieurs phases: la définition, l'expropriation, la concentration et la destruction. La progression est inscrite dans l'idéologie nazie mais les méthodes sont construites au fur et à mesure, au gré des nécessités, des réalités et aussi des rivalités entre dirigeants.
Ce qui est frappant, c'est combien les nazis ont été méthodiques dans ce qu'ils appelaient "la solution finale de la question juive".
D'abord dans la définition. Pour éliminer une partie de la population allemande, il fallait d'abord déterminer de quelle partie il s'agissait. Les nazis ont alors tâché de déterminer qui était juif et qui ne l'était pas, en se fondant sur le nombre de grand-parents juifs (au moins deux), créant ainsi une catégorie intermédiaire de personnes qui n'étaient pas tout à fait allemandes mais pas vraiment juives non plus: les Mischlinge. Comme il était impossible de déterminer des critères raciaux, les grand-parents étaient considérés comme juifs s'ils pratiquaient ou avaient pratiqué la religion juive. Ainsi le racisme nazi se fondait sur un critère religieux!
Un autre enseignement frappant de ce premier tome est de constater à quel point le Reich nazi a été légaliste dans son entreprise de destruction. Ils avaient en horreur les flambées de violence spontanée, comme celles de la Nuit de cristal. Tout devait être planifié et organisé. D'où le nombre de décrets et de lois organisant le délire raciste.
Il fallait aussi tenir compte du fait que la population désignée comme juive jouait une rôle très important dans l'économie allemande. En détruisant les Juifs allemands, les nazis se sont privés de compétences et de capacités productives considérables. On comprend mieux dès lors comment le nazisme a été un nihilisme auto-destructeur.
Enfin, parmi beaucoup d'autres choses passionnantes, l'analyse de la composition des premiers commandos de tuerie qui ont sévi dans les territoires occupés à la suite de l'invasion de l'URSS, les Einsatzgruppen, montre qu'il ne s'agissait pas de brutes ou de repris de justice, mais de personnes éduquées, souvent de professions libérales, y compris des médecins. Là l'enseignement est effrayant: l'endoctrinement idéologique peut rendre n'importe quelle personne capable de tuer des dizaines d'individus dans la même journée, et au total des milliers.
On doit une énorme reconnaissance à Raul Hilberg d'avoir rassemblé patiemment tous les éléments qui permettent de raconter cette histoire incroyablement terrifiante. Je l'imagine travaillant jour après jour dans les fonds d'archives américains et européens, pendant des dizaines d'années. Et si la lecture de son ouvrage est évidemment éprouvante en raison des horreurs qu'il évoque, que devait ressentir jour après jour ce juif autrichien qui avait fui l'avancée des nazis? Pour tout ce qu'il nous transmet et nous apprend sur l'histoire de la shoah comme sur la nature humaine, le principal respect que nous lui devons est de le lire.
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Au bout des trois volumes d'une somme à laquelle Raul Hillberg a consacré une bonne partie de sa vie, l'épreuve s'achève. Et commence le travail intérieur qu'elle déclenche. Tout est là, expliqué, décortiqué, analysé, dans le moindre détail. Rien qui suscite le dégoût ou l'intérêt morbide, mais une description implacable du système, des organisations, des mécanismes administratifs, techniques, économiques qui ont rendu l'extermination possible. A lire pour comprendre. Et pour réfléchir sur ce qui reste de l'homme.
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J'ai travaillé dans une entreprise à Nuremberg trois semaines à l'été 1973. mon compagnon d'atelier avait près de soixante ans. un jour où il avait son taux de schnaps ordinaire dans les veines, il entreprit de me parler de la période nazie et de la guerre (ce que les journaux appellent NS-Zeiten). Il me dit sur le ton de la confidence : pendant la guerre, les Juifs… et il passa son index sous sa gorge.
Quand j'ai vu le film Shoah, de C. Lanzmann, j'ai retrouvé ce même geste chez le conducteur de locomotive…
Raul Hilberg raconte le détail de tout cela.
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La somme. Clair, net, précis.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Tuer les Juifs était admis comme une nécessité historique, le soldat devait le "comprendre"; et si pour un motif quelconque on lui ordonnait d'aider les SS et la Police dans leur travail, il était supposé obéir. Mais s'il tuait un juif spontanément, de sa volonté personnelle, sans ordre et du seul fait qu'il "avait envie" de tuer, alors il commettait un acte anormal, digne peut-être d'une "Européen oriental" - d'un Roumain par exemple - mais qui compromettait la discipline et le prestige de l'armée allemande. Là se situait la différence cruciale entre l'homme qui se "surmontait" lui-même pour tuer et celui qui se rendait coupable d'atrocités gratuites. Le premier était jugé bon soldat et nazi convaincu , le second ne savait pas se maîtriser et, de retour au pays après la guerre, représenterait un péril pour la communauté allemande.
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Le 26 avril 1938, la bureaucratie ministérielle prit une nouvelle mesure décisive pour abaisser les prix : désormais, tout contrat transférant une entreprise des mains d'un Juif à celles d'un Allemand serait soumis à l'approbation administrative. Un mois après la publication du décret, le Regierungsrat docteur Gotthardt, du ministère de l'Économie, en expliquait les effets à un des dirigeant de la Dresdner Bank. D'après lui, les acheteurs avaient jusqu'alors dû payer non seulement les actifs matériels des entreprises, mais en outre les actifs immatériels, la "valeur morale de la firme", c'est-à-dire ses marques de fabrique, sa réputation, ses contrats avec la clientèle, et autres facteurs impondérables qui relevaient d'autant l'estimation globale du prix de vente d'une entreprise. Cette "valeur morale", l'acheteur ne la paierait plus, car les établissements non aryens "n'avaient plus de valeur morale".
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La jurisprudence du décret Lösener montre une fois de plus que la définition initiale [du juif] ne se fondait sur aucun caractère "racial".
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Quant à la détermination du statut des grands-parents, il demeurait présumé que ceux-ci étaient ou avaient été juifs s'ils appartenaient ou avaient appartenu à la communauté religieuse judaïque.
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>Histoire de l'Europe depuis 1918>Seconde guerre mondiale: 1939-1945>Histoire sociale, politique, économique (169)
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