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EAN : SIE60342_9664
Le Livre de Poche (30/11/-1)
3.92/5   25 notes
Résumé :
CHAPITRE PREMIER

Legornse se trouvait à l'hôpital depuis trois mois quand on lui apprit que sa femme et son fils étaient morts au cours de l'attaque. Lui s'en était tiré avec une double fracture de la jambe et une balle dans le poumon gauche.
Lorsque le médecin-chef lui annonça la nouvelle, il ne fit aucune remarque et inclina la tête à deux ou trois reprises, sans qu'on pût exactement comprendre ce qu'il voulait dire par là.
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Etoiles Notabénistes : ******

Préface : Jean Hougron

ISBN : 9782221101902

Un titre qui dit tout car cette histoire de vengeance lente et sagement mûrie par un homme qui a tout perdu mais qui ne veut punir que les seuls et vrais responsables de son malheur ne se situe qu'entre Blancs (Jean-Marie Legorn, la victime, et Vorlang, le commanditaire) et aussi un ou deux métis complices de ce dernier. Les hommes de main, quant à eux, sont vraisemblablement laotiens ou viêtnamiens, voire cambodgiens, mais Legorn ne cherche pas à régler son affaire à ce menu fretin, dispersé d'ailleurs dans la nature.

Comme motif de l'explosion du camion de Legorn au kilomètre 134, explosion dissimulée en principe sous la forme d'un attentat évidemment fomenté par le Viêt-minh (lequel, comme il le sera par la suite prouvé, n'a pourtant rien à y voir), l'envie, la basse et sanguine jalousie d'un Français d'origine allemande, Vorlang, qui vit d'une petite ferme et surtout de maints trafics pour lesquels il a déjà eu des problèmes avec les diverses autorités du lieu, envers Jean-Marie Legorn, fermier et éleveur de formation, qui a su, en s'appuyant sur une patience toute paysanne doublée d'une obstination résolument bretonne, développer au fil des ans une ferme qui est estimée comme la meilleure et la plus rentable du coin. Legorn est en outre heureusement mariée à Marthe et ils ont un fils.

Toute la famille se trouvait dans le fameux camion, avec une cargaison de soierie pour laquelle Legorn s'était endetté auprès de M. Kalandrajan, respecté et respectable commerçant hindou. Résultat : une cargaison et un camions en flammes, trois morts : Marthe, son fils et l'aide-chauffeur laotien, et un blessé grave, Legorn. Celui-ci finit tout de même par sortir de l'hôpital, avec une jambe désormais affligée d'une claudication qui le suivra jusqu'au cercueil, un problème aux poumons et les recommandations mi-apitoyées, mi-sévères des médecins. Autour de lui, tout le monde, y compris ses meilleurs amis, estime qu'il ne parviendra pas à redresser sa ferme et que, de toutes façons, endetté désormais tel qu'il est, sans compter les vols que, pendant sa convalescence forcée à l'Hôpital, son régisseur, Khoung le métis, grand ami de Vorlang entre parenthèses, a certainement commis avec délectation, mieux vaudrait pour lui, autant pour ses finances que pour sa santé, regagner la Métropole.

Dans le fond, Legorn, pour qui la Vallée Noire, sur laquelle il avait fondé tous ses espoirs de colon et qui l'avait si bien aidé à les réaliser, occupera à jamais une partie de son coeur, est du même avis. Mais pas question de s'en aller sans avoir tout réglé : d'abord ses dettes ... et ensuite ses comptes, invisibles mais meurtriers, avec Vorlang et ses complices.

Tranquillement, doucement, sans avoir l'air d'y toucher, sans laisser surtout à quiconque, fût-ce à ses meilleurs amis, entrevoir une seule des pensées vengeresses qu'il ne cesse de ruminer, Legorn pose ses pions, pousse Khoung à bout en lui reprenant déjà 47 000 piastres en espèces qu'il découvre dans son portefeuille et dont le métis ne peut expliquer la provenance et, bien entendu, en passant aussi au crible les livres de comptes ... et les troupeaux. Car, pour complaire à Vorlang, Khoung, qui ne devait pas croire au retour de son employeur ou, en tous cas, imaginait le voir revenir effondré et sans ressort aucun, a trouvé le moyen d'échanger certaines bêtes, en parfaite santé, bonnes laitières et excellentes reproductrices - les fameuses Australiennes que Legorn était le seul à avoir réussi à acclimater dans le pays alors que Vorlang, qui s'y était également essayé, avait subi un échec cuisant - contre des éléments faméliques, plus proches de la Mort que de l'herbe qu'ils mâchonnent sans appétit.

Khoung n'est d'ailleurs pas le seul sur qui Legorn fait planer comme une menace la fameuse question : "Va-t-il s'en aller sans faire du dégât, oui ou non ?" le commissaire du village, autre métis ami de Khoung et de Vorlang, est l'un des premiers à être touché. Tout autour, les locaux, prudents, observent. Certains, comme Oanh, la femme de Khoung, qui a bien des raisons pour détester son époux, aide d'ailleurs Legorn du mieux qu'elle peut. Et aussi, bien sûr, nombre de ses amis français, en particulier van Hollen et Deffand. En face, Vorlang rassemble ses troupes et se tient au courant, mais de loin car, dès qu'il a appris le retour de Legorn, il a filé à Saïgon ...

Le drame trouvera d'ailleurs son point final à Saïgon. Mais, avant d'en arriver là, le lecteur aura, un peu comme tous ceux qui veulent voyager par route ou par fleuve dans cette Indochine qui perd lentement sa cohésion coloniale, suivi Legorn et ses pensées - ce paysan "taiseux" pense énormément - dans les mille méandres que la Vie et, ici, le désir de venger ses morts et d'en finir avec un trafiquant rustre et sans panache, pour lequel, jamais, on ne ressent le moindre sentiment d'empathie (probablement parce que lui-même est incapable d'en éprouver envers autrui), imposent à une intrigue qui, en dépit de la tranquillité avec laquelle Hougron a choisi de la dérouler pour nous, se révèle bel et bien haletante, porteuse de coups de coeur et de colère, d'angoisses aussi . Cependant, l'auteur n'oublie pas son thème premier : nous faire connaître et aimer l'Indochine et ses peuples, tels qu'ils furent. Les descriptions sont toujours aussi puissantes et même, de plus en plus poétiques - on sent que Hougron a aimé cette Vallée Noire autant que son personnage ; les caractères des différentes nations représentées s'affirment en se nuançant ; plus que tout, l'éternel problème du métissage, qui semble souvent ne produire que des individus ivres de frustrations qui coulent dans leurs sangs mêlés, les poussant, semble-t-il, au-delà de leur nature individuelle, à une crise identitaire qu'ils vivent d'autant plus mal que, d'un côté comme de l'autre de leur ascendance, on n'accepte pas leur métissage dont ils ne sont pourtant pas responsables, s'impose ici dans toute sa complexité alors que, au contraire, le côté politique, auquel l'auteur nous avait habitués, s'efface tout-à-fait.

Pour résumer, un roman qui, au premier abord, ne paraît pas promettre beaucoup mais qui se découvre, au fur et à mesure des feuilles tournées, à la hauteur des deux premiers tomes de "La Nuit Indochinoise." Ne pas le lire serait passer à côté d'un excellent ouvrage. L'été approche : ne l'oubliez pas ! ;o)
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Deuxième volet de la Nuit Indochinoise, Rage Blanche se déroule au nord-ouest du Laos dans une vallée reculée mais fertile qui attire les européens qui n'ont pas peur de travailler une terre généreuse pour les courageux. Parmi eux Legorn fait figure de modèle : sérieux, honnête, acharné il a réussi à créer une exploitation enviable jusqu'au jour où il est victime d'une attaque soi-disant vietnamienne pendant laquelle sa femme et son fils sont tués et lui gravement blessé.

A sa sortie de l'hôpital Legorn est brisé mais déterminé à régler ses comptes, comme pour travailler la terre Legorn va être patient, opiniâtre et endurant et reconstituer les faits, les responsabilités et en tirer les conséquences.

Rien de spectaculaire chez Hougron mais un réalisme froid où les caractères sont explorés, le colonialisme et les tensions communautaires sont un levier des comportements, indigènes, métis ou colons doivent tenir un rôle en adéquation avec leur origine.
Mais les inimités et les intérêts se moquent des races et Legron colon sans remords mais sans vice a gagné du respect dans chaque clan et saura en jouer avec habilité. Mais les rapports sont rudes, la méfiance est de rigueur même entre amis.
Dans une atmosphère tendue, avec une violence sous-jacente prête à exploser un suspens s'installe, et même si le lecteur a deviné l'issue du roman, il est emporté par une narration sèche et rigoureuse. Un grand livre qui continue l'exploration de la société coloniale indochinoise sans rien cacher des travers des uns et des autres.
A noter bien sûr la profonde connaissance de cette terre indochinoise et de ses habitants qui rejaillit dans le texte de Hougron et qui lui donne une totale crédibilité.
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Second volet de la grande fresque consacrée à l'Indochine et comme pour le roman initial les mêmes remarques . Si on sent un réel amour pour la région on ressent également chez l'auteur une certaine condescendance envers les populations locales et un réel mépris envers les métis . Ceci dit les colons ne sont épargné non plus par Jean Hougron que du contraire . L'histoire qui est une sombre affaire de vengeance est plaisante à lire , bien écrite avec des retours au passé fréquent qui explique correctement la situation .
Ce roman peut se lire comme simple roman d'aventure et/ou comme témoignage de la vision colonialiste de l'époque et dans les deux cas c'est une parfaite réussite .
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Une plongée dans l'Indochine française, une leçon d'Histoire à hauteur d'hommes besogneux, avares de tendresse.
Le roman, magistralement construit, est envoûtant tant son écriture est riche et évocatrice des paysages, des situations, des sentiments.
Legorn, un Français de Normandie, est installé au Laos depuis de nombreuses années. Il gère la ferme ; sa femme fait tourner le "bungalow", un bistrot-restaurant. Les affaires sont prospères, trop peut-être. Au tournant des années 40-50 les coups de feu et les grenades visent tantôt les locaux tantôt les Blancs. La vie de Legorn a basculé au kilomètre 134, pourquoi ?
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
[...] ... Il essaya un coup de bluff ; parce que Khoung était un homme avec lequel on pouvait bluffer.

- "Hier matin, j'ai envoyé un mot à Corbois à la Banque Franco-Asiatique ..."

Le métis pâlit et serra les poings. Legorn se demanda s'il allait sauter sur lui. Il acheva, attentif :

- " ... Juste pour connaître le montant du chèque vert que tu m'as repris."

Ce qu'il fallait, c'est que Khoung comprît qu'il n'y avait pas d'issue ; qu'une seule solution lui était laissée, et seulement une : se soumettre, et se soumettre, c'était acheter le domaine au prix fixé par Legorn. Cela, Khoung ne le savait pas encore ; on le lui apprendrait quand il serait mûr à point.

- "Qu'est-ce qu'elle avait, l'écrémeuse ?

- Le disque d'admission était usé."

Legorn approuva. C'était exact. A force de tourner, la pièce s'était amincie sur les bords et la crème giclait à partir d'une certaine vitesse de rotation. Au-dessus de quinze-cents tours. Il s'en souvenait ; en janvier dernier déjà, il avait envisagé cette réparation.

- "Et ça coûte 2700 piastres, un disque ?

- Non, mais on dû remplacer toute la boule. Il n'y avait pas de pièces de rechange à Saigon. C'est une écrémeuse japonaise. J'ai demandé à un transporteur de me faire expédier par avion une boule américaine, comme celle de M. Van Hollen."

Legorn examinait l'écrémeuse. Effectivement, toute la boule était neuve. Du sale travail. N'importe quel ajusteur de Vien-Tiane ou de Saigon lui aurait usiné une pièce en vingt-quatre heures. Il aurait suffi de donner les mesures exactes.

- "Quel transporteur ?

- Jarlin."

Encore un métis !

- "Un copain à toi, comme par hasard.

- Je m'adresse aux gens en qui j'ai confiance.

- Il a fourni une facture ?

- Non, c'est déjà bien gentil qu'il ait pris soin de me chercher un disque neuf.

- On verra Jarlin et le fournisseur de Saigon.

- C'est chez un Chinois de Cholon qu'il a eu la boule. Moi aussi, je lui ai dit que c'était cher, mais il m'a répondu qu'on n'en trouvait nulle part et qu'il avait cru bien faire en s'adressant à un fournisseur chinois.

- On verra ..."

Legorn ressortit son papier.

- "Et les cinq carrioles à 4 300 piastres pièce ?

- Vous pourrez vous renseigner."

Legorn sentit que la colère qu'il refoulait depuis son réveil allait éclater. ... [...]
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[...] ... - "J'ai pensé qu'il fallait que je te parle avant de me remettre au travail."

Sabatier acquiesça d'un signe de tête. Il ralluma sa cigarette éteinte et précisa de lui-même en tirant la première bouffée :

- "Au sujet de Khoung ?

- Oui.

- Rien de particulier. Il fallait s'attendre à ce qu'il te vole. Il ne s'en est pas privé. Je crois même qu'il a pris du mobilier.

- J'ai vu.

- Ce n'est pas grave. Dans quarante-huit heures, tout peut être revenu chez toi avec les excuses du "monsieur."

- Et la ferme ?

- Là, il sera plus difficile de contrôler. On m'a parlé de disparition de bétail, de combinaisons avec les fournisseurs dans les factures. Tu connaissais tes stocks ?

- A peu près.

- Dans ce cas, tu pourras vérifier et te faire une idée précise. Mais j'ai peur que tu ne puisses pas récupérer la marchandise et surtout le bétail volé. Il a écoulé ça chez les Méos et dans les villages du Nord. Ce que tu pourras tenter, c'est réclamer une indemnité.

- Et Oanh, sa femme ?

- Rien d'important, je pense. Oanh est plutôt de ton côté. Elle a certainement empêché son mari de faire des ventes derrière le comptoir. Mais tu la connais ! Gentille, malheureusement pas plus de cervelle qu'un poulet, et Khoung n'aura pas de mal à lui fermer la bouche à coups de rotin. Déjà, de ton temps ... Pas difficile de lui prendre les clefs de la caisse et d'étouffer quelques billets de cent piastres, par-ci, par-là. Mais, là encore, si tu as un état détaillé des marchandises avant ton départ, tu pourras contrôler ... Tenais-tu un livre de caisse ?

- Oui.

- Ca l'aura rendu prudent.

- Et le reste ?"

Sabatier se balança pensivement sur sa chaise.

- "Tu dois te douter que ton histoire a fait couler pas mal de salive. ..." ... [...]
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Chaque heure avait sa couleur, son poids sonore, jusqu'à son odeur. A onze heures, il commençait à entendre couler le Mékong : un froissement doux que crevait parfois l'aboi sourd et rageur de l'eau irritée sur une saillie de roche, et il s'endormait peu après, avec l'image du fleuve lisse, chromé de lune.
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Legorn se trouvait à l'hôpital depuis trois mois quand on lui apprit que sa femme et son fils étaient morts au cours de l'attaque. Lui s'en était tiré avec une double fracture de la jambe et une balle dans le poumon gauche.
Lorsque le médecin-chef lui annonça la nouvelle, il ne fit aucune remarque et inclina la tête à deux ou trois reprises, sans qu'on pût exactement comprendre ce qu'il voulait dire par là.
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C'était un jour comme celui-là que Vorlangetait entré. Il avait ouvert la porte d'un coup de pied (...)
Les autres regardaient, immobilisés dans la position où les avait surpris l'irruption de Vorlang.
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Littérature
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