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sur 397 notes
Hanta est un ouvrier qui travaille dans une presse depuis 35 ans : en appuyant inlassablement sur le bouton vert puis sur le bouton rouge, il fabrique des boules de papier avec des chefs-d'oeuvre de la littérature destinés au pilon par ordre de ce régime soviétique qui tente de tuer toute velléité de réflexion dans l'oeuf. Mais cet ouvrier qui trime, qui rattrape le temps qu'il a perdu sur ses jours de congé est l'être le plus libre que l'on puisse concevoir. Car il ralentit volontairement son rendement pour dissimuler des livres dans ses boules de papier, créant des oeuvres d'art camouflées au nez et à la barbe des autorités.
Pour que l'on comprenne bien en quoi consiste tout le sordide de son activité, l'auteur tchèque Hrabal ne nous épargne rien, ni ses histoires d'amour aux fins tragiquement scatologiques ni ses combats valeureux contre les rats d'égout qui envahissent sa cave, ni les livres qui menacent d'engloutir notre héros pendant son sommeil tant il entasse chez lui partout où il peut chaque jour un peu plus de livres philosophiques : ainsi, "cette brute de Hegel" côtoie volontiers Kant dans sa cave tandis que Schopenhauer, ce génie suicidaire, ne se plaint pas de la compagnie écrasante de Nietzsche...
Ce court texte, traduit en 1983, nous dresse le portrait kafkaïen d'un homme qui entend vivre par les livres, pour qui le salut passe par le sauvetage de tonnes de papier arrachées à la vigilance des bourreaux, et qui souhaite mourir par eux, pourvu que leurs mots continuent de vivre en lui... Magnifique hommage à la littérature, et la création artistique et à la liberté de penser.
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Un livre incroyable, coup de poing, haletant.
Dans une cave, depuis plus de 30 ans, Hanta détruit au pilon des livres. Entre l'alcool et les rats, la chaleur et la mécanique de sa machine monstrueuse, Hanta n'en finit pas de parler dans une urgence, un emballement proche de la folie due à une exigence de rentabilité dans lequel le livre pressé s'agglutine, s'agglomère, se dissout.
Cette oeuvre littéraire m'a fait écho à une installation monumentale de l'artiste plasticien Robert Kusmirowski, "Stronghold', et présenté lors de la Biennale de Lyon de 2011.
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Bohumil Hrabal signe un ouvrage magnifique, l'histoire de cet homme chargé du pilon et d la destruction des livres. Sa passion de la littérature le pousse à un instinct de conservation. Écartés du pilon, les livres ont une seconde vie, une nouvelle chance d'exister. Une entreprise prométhéenne, phénoménale.
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Hanta est pressier depuis 35 ans. L'histoire se passe à Prague, en période de seconde guerre mondiale où des livres censués sont pilonnés. Hanta n'est pas très productif dans son travail car il sauve certains ouvrages ou à d'autres leur accordent une fin plus digne, en ornant les paquets avant que ceux-ci ne soient broyés par la machine. L'amour de Hanta pour les livres nous touche d'autant plus que l'écriture de Bohumil Hrabal est poétique, fluide et pénétrante. Ce sont les pensées du personnages qui fondent l'histoire, il est en marge du reste de la société justement à cause du regard, de l'attention qu'il porte sur ces livres.

Ce livre, pour les amoureux de lecture, ne peut laisser indifférent.
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Un livre qui interpelle ne serait ce que par son titre ! une fable existentielle qui m'a fait penser à Kafka ,avec moins de talent à mon humble avis.
C'est un livre difficile ,dont les inteprétations peuvent être diverses ... court heureusement! teinté d'humour parfois, comme pour adoucirou tourner en dérision les difficultés de la vie .Un livre qui parle de littérature ,à quel point cell-çi est essentielle ,justement pour continuer à vivre .
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Une trop bruyante solitude/Bohumil Hrabal
Il est dit que ce petit livre est un cri de révolte lancé à l'assaut des sociétés totalitaires. Soit !
Cependant l'histoire ahurissante de cet homme, le narrateur, ouvrier depuis trente-cinq ans dans une usine qui détruit les livres, les gravures et les tableaux pour les recycler en papier d'emballage ou d'autres livres, est assez hermétique.
Bien sûr c'est un déchirement au propre et au figuré de devoir passer à la découpe la Bible, le Talmud, Lao-Tseu, Hegel et Nietzsche entre autres. Mais d'une humeur égale notre homme tel Sisyphe poussant son rocher détruit des montagnes de livres…, soliloque, boit de la bière pour oublier qu'il détruit la culture…etc, jusqu'à n'en plus pouvoir !
Cette fable est relativement bien écrite mais reste assez difficile d'interprétation.
Certes c'est une réflexion profonde sur une société barbare et absurde, un peu comme le monde de Kafka mais en moins prenant.
Mais enfin, heureusement que l'ouvrage ne fait pas 500 pages sinon je ne serais pas allé au bout. ! L'ambiance est nauséeuse et sordide et l'ennui vous guette si vous n'y prêté garde.
Quelques jolies phrases cependant :
« Moi, quand je lis, je ne lis pas vraiment, je ramasse du bec une belle phrase et je la suce comme un bonbon, je la sirote comme un petit verre de liqueur jusqu'à ce que l'idée se dissolve en moi comme l'alcool. »
« Ma tête dont les cheveux se sont tous consumés, c'est la caverne d'Ali Baba, et je sais qu'ils devaient être encore plus beaux, les temps où la pensée n'était inscrite que dans la mémoire des hommes. En ces temps là, pour compresser des livres, il aurait fallu presser des têtes humaines. »
Notre narrateur n'hésite pas à sauver des monceaux de livres à l'insu de son supérieur qui lui reproche son manque d'ardeur et de rendement, ceux de Kant notamment dont il cite sa phrase fétiche :
« Deux objets emplissent ma pensée d'une admiration sans cesse nouvelle et croissante…le firmament étoilé au dessus de moi et la loi morale qui est en moi. »
Il fait chaque jour son choix et épargne Camus et Leibniz, Confucius etGoethe, Gauguin et Erasme de Rotterdam.
Pour son amour évident des livres, je respecterai l'écrivain Hrabal et mettrai trois étoiles.
Mais si vous voulez lire ce livre, prenez votre courage à deux mains durant trois heures.
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Abandonné à la page 43 par désir de ne pas perdre mon temps : des répétitions incessantes, des allusions à la culture universelle en citant des noms d'auteurs... Les allusions à un régime totalitaire oppressant (pléonasme sans doute) sont trop succinctes pour m'intéresser.
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Auteur d'une oeuvre conséquente, Bohumil Hrabal a été interdit de publication dans son pays, contraint de publier en Samizdat (j'apprends, donc, qu'il s'agissait d'un réseau clandestin, évidemment, permettant de faire circuler les ouvrages interdits au sein du bloc soviétique), du fait que deux de ses livres se sont même retrouvés au pilon en 1970. Il existe d'ailleurs trois versions de ce texte, nous explique Václav Jamek, auteur de langue française et tchèque, et préfacier de mon édition, modelées selon les pressions idéologiques exercées par les pouvoir.

Au centre de l'intrigue, la destruction de livres. Pourquoi cette infamie? Comment donc? Telle fut ma réaction première au résumé de la quatrième de couverture. On brûle les livres, depuis longtemps, c'est chose connue, les autodafés ont toujours été un moyen d'oppression des populations, encore aujourd'hui. Des auteurs, insatisfaits, mécontents, impétueux, ont même procédé à des autodafés de leurs propres livres, je pense à Gogol avec la deuxième partie de ses Âmes mortes et à Boulgakov ayant mis au feu les deux premières versions de son chef-d'oeuvre le maître et Marguerite. L'historien Suisse Christophe Vuilleumier, sur son blog, évoque même le terme de mémoricide continuel. Plus récemment, me dit Wikipedia, l'Etat Islamique a brûlé près de 2 000 livres à Mossoul, en Irak, tandis qu'en Pologne, en 2015, des prêtes catholiques ont brûlé des Harry Potter et autres Twilight.

Mais dans le cas des autodafés, le livre est écrasé, non pas brûlé. Cette différence est, il me semble essentielle, surtout en ce qui concerne sa valeur symbolique. Car si l'on brûlait, et que l'on continue à brûler des livres, c'est bien parce qu'on a peur de ce qu'ils contiennent, et de la manière dont ils peuvent influencer leurs lecteurs. Leur passage sous la presse ici, bien au contraire, fait d'eux des objets totalement inutiles et encombrants, qui ne représente de menace pour personne. Non seulement, il ne fait plus peur mais on s'en fiche totalement. Mieux encore, il ne sert même plus à caler les portes.

Hanta écrase les livres, condamnés à périr, parce qu'ils ont été oubliés, parce qu'ils ne servent plus à personne, c'est son métier, son gagne-pain. C'est un bourreau de livres, qu'il décime, par dizaine, par centaine, il écrase, aplatit, broie, compresse, tout ce qui est papiers et encres. Et pourtant, il les adore les livres, et c'est là toute l'ambivalence de sa situation. Il aime la littérature, il se délecte de belles tournures de phrases, il est la mémoire vivante qui face à la destruction de leur matière parle de leur âme. En effet, qui d'autre que lui, à travers son amour de la langue, de la perfection littéraire, lui le mieux en placé pour en connaître leur valeur. À cet égard, l'incipit est un joyau de poésie, dans la lignée du reste du texte d'ailleurs, vous le retrouverez en extrait plus-bas. La langue de l'auteur est d'une délicatesse et d'une poésie rare, un trésor de finesse, c'est une des premières choses qui m'ait frappé à la lecture de ce roman. C'est une langue très imagée et qui possède une force évocatrice sans pareil. Mais les points forts du texte sont loin de se résumer qu'à cela.

Hanta, à force de ces trente-cinq années, est devenu ce qu'il écrase, livres, pages déchiquetées, lettres morcelées. Hanta destructeur oui, mais créateur aussi, ce roman célèbre ainsi le livre, sa vie, sa puissance créatrice, qui n'a d'autres moyen d'être détruit qu'à travers la force de la presse hydraulique. Il y a ces livres, les élus, qui survivent même grâce à Hanta et sa mémoire, gardien féroce dont lui seul détient le secret. Célébration des belles-lettres, en tant que pouvoir créateur, mais aussi pouvoir modeleur, sculpteur d'une langue précieuse, d'un monde poétique unique, créateur du Beau. Mais c'est aussi, dans le même temps, une célébration de la lecture, et du lecteur, qui se nourrit, au sens littéral, des lignes que ses yeux devinent, des pages que son esprit décode, des chapitres que son cerveau dévore. J'y ai goûté, j'ai apprécié et savouré cette langue délicate au service de cet amour de la littérature. C'est un amour qui prend d'autres dimensions, il transcende vie humaine, il est au-dessus de tout, il est Dieu. Et c'est la religion de l'auteur. Lui, il extermine et il sauve, les meilleurs d'entre eux. Qu'il garde compulsivement chez lui, essayant d'étouffer la solitude pesante dans laquelle il s'est enfoncée d'année en année, un peu plus profondément. Ces livres qui remplacent les individus, sa société à lui. Pour tenter de palier à cette solitude si encombrante, il les collectionne, les entasse, les presse en des piles babyloniennes qui n'en finissent plus. Bourreau des livres, il subit lui-même le massacre orchestré de la bibliothèque de Prusse, mais il subit autant qu'il agit et il a bien du mal à comprendre leur destruction, même s'il en est l'instrument. Un carnage qui n'est pas sans rappeler un autre massacre, celui de l'holocauste, Vaclav Jamek ne manque pas d'établir le parallèle.

Tragédie du lecteur, drame d'une société qui n'a plus guère de considération pour ces livres, la vie de Hanka au sein de sa cave tourne peu à peu au délire, les personnages de ces précieux livres prennent vie, Jésus; Lao Tseu accompagnent Hanta, avec l'aide capiteuse des cruches de bière. Puisque au fond, c'est l'histoire tragique de la solitude d'un homme, qui ne peut que nous toucher, isolée et qui assiste à la mort des rares membres de sa famille, sa mère, puis son oncle, qui s'est tellement laissée envahi par le silence qu'il en vient à donner vie à des personnages fictifs ou morts. Un sentiment individuel fondu au milieu de l'universalité composée de ses livres. le témoignage émouvant d'un homme qui sombre peu à peu dans la folie, raconté par une écriture vive, alerte, prompte qui n'a de cesse de combler tous les v ides, de combler cette solitude oppressante.

Un homme déconnecté, incapable de s'adapter à la modernisation, lui-même compressé par un système qui n'a cure de l'individu au profit de l'efficacité et du rendement. La symbiose avec les livres devient parfaite pour son plus grand malheur. C'est un livre d'une riche incroyable, qui pourrait donner lieux à de longues exégèses, sur la place du livre dans cette société ou le temps est devenu monnayable, la disparition de la culture, les digressions philosophiques sur la vision sociale et humaine de Hanka, la destruction en masse, des livres, des hommes.


Lien : https://tempsdelectureblog.w..
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Le Livre du Mois de Mai 2020
Littérature Tchèque
Diffusé à Prague en 1976 sous forme de "samizdat" (publication clandestine).
Hanta, ouvrier dans une une usine de vieux papiers destinés au recyclage s'instruit par la lecture des ouvrages interdits avant pilon.
Fable sensible et émouvante.
Porté à l'écran par Vera Caïs avec Philippe Noiret.
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Travailleur de l'ombre, Hanta, obscure et anonyme ouvrier, pilonne livres, vieux papiers et oeuvres d'art dans une cave humide infestée de souris. Il accumule aussi dans son appartement les ouvrages condamnés, sauvant du pilon des trésors de la culture mondiale et se mettant, du coup, en constant danger de mort par ensevelissement. Grand buveur de bière, Hanta se fait également avaleur de grands textes. Un jour, dépassé par la modernisation du monde du travail, Hanta décide de suivre le chemin des livres et de disparaître.

L'écriture de ce roman a ce côté étrange propre aux écrivains de l'Europe de l'Est. Parfois assommante. Aussi harassante que le sujet qu'elle traite. Parfois drôle. Énigmatique. Une longue fable qui pose bien des questions sur des sujets tels que le pouvoir, le travail, l'utilité des choses, leur futilité, la vie, la mort ...

"... je sais qu'ils devaient être encore plus beaux, les temps où toute pensée n'était inscrite que dans la mémoire des hommes."
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