Livre qui avec Craintes et tremblements analyse un événement important de la vie de Kierkegaard : la rupture de ses fiançailles avec sa compagne Régine Olsen. En effet, Kierkegaard entretenant une relation suivie avec Madame Olsen, préparant le mariage, étant en fiançailles depuis quelques temps déjà, décide d'un coup subitement de rompre les fiançailles et du coup de rompre tout court.
Episode mièvre dirons-nous bien loin de la philosophie.
Pourtant cet événement sera fertile pour le philosophe danois. Dans craintes et tremblements Kierkegaard interroge la notion de choix, et celle de dilemme lors de situations qu'on ne contrôle pas et s'appuie sur l'épisode d'Abraham et du bûcher pour l'illustrer. C'est une manière d'expliquer à Régine les raisons de son choix et de son tourment.
Dans
la Reprise, qui cette fois-ci se sert d'une trame fictive, Kierkegaard veut exposer d'une autre manière la notion de décision et ainsi exprimer ses regrets à Régine. Malheureusement cela ne suffira pas, elle se mariera avec un autre tout en continuant à aimer le "philosophe maudit".
La fiction relate l'histoire d'un homme éperdument amoureux d'une femme, un poète qui s'en va trouver conseil auprès d'un philosophe qui va devenir son mentor pour la conduite de ses problèmes.
Le dilemme se résume à la problématique suivante : le poète n'est inspiré que lorsqu'il est seul, doit il sacrifier sa bien aimée pour exercer son art ou sacrifier son art pour sa bien aimée" ?
On retrouve là le dilemme de Kierkegaard pour la rupture de ses fiançailles. Tout le propos philosophique consistera à se demander quelle décision prendre et si décision il y a comment être sur qu'elle est bonne.
Reprise ou Répétition
éternel débat de la philosophie française. le titre original est Gjentagelsen. Au sens littéral il peut se traduire exactement des deux manières et donc il conviendra d'utiliser le sens que la philosophie de Kierkegaard lui apporte.
Actuellement le terme de répétition est préféré grâce au lobbying sérieux de
Hélène Politis. Cependant les traductions les plus fidèles ou les plus reconnues celle de
Nelly Viallaneix chez GF-Flammarion ainsi que celle plus ancienne de Tissot conservent et mettent en avant ce terme de Reprise.
La répétition est par définition une action ou un événement qui sans cesse existe ou agit de la même manière en renouvelant son action ou son existence. C'est la réitération d'une même action ou le retour d'un même fait, de façon constante et sans évolution.
La reprise est le fait de recommencer une action ou un événement en se succédant à une même action ou à un même événement mais en ayant l'expérience de ceux qui précèdent. Par exemple, j'ai travaillé tout le lundi, le mardi je ferai la même chose mais en ayant conscience du lundi.
Dans le second concept il y a deux notions qui sont essentielles :
- la temporalité
- la conscience de la succession.
Or quand Kierkegaard utilise le terme de Gjentagelsen, il l'utilise dans des exemples où l'homme fait consciemment la même expérience afin de savoir s'il décide la même chose à chaque fois. Mais également s'il ressent les mêmes émotions, s'il considère et perçoit la situation de la même façon etc.
Ce n'est donc pas une répétition qui se rapprocherait d'une conception plus platonicienne. Il y a bien une volonté de savoir, et de prendre conscience des choses en répétant une situation en effet mais plutôt en la reprenant avec le savoir acquis par la précédente tentative.
c'est pour cette raison que le terme de reprise me semble à moi aussi plus adéquate.
Du reste, c'est à mon sens la meilleure oeuvre de Kierkegaard. C'est la plus instructive sur soi car il y a une part de psychologie assez intéressante mais c'est également une excellente introduction à la façon de démontrer du philosophe.
Elle a l'avantage d'être assez courte, d'être bien écrite car narrée au travers d'une fiction et de demeurer très actuelle.
Un livre qui m'a énormément été utile dans ma vie. Et un chef d'oeuvre de la philosophie.