AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Jean-Paul Bruyas (Traducteur)
EAN : 9782864242499
307 pages
Editions Métailié (08/04/2005)
4.17/5   23 notes
Résumé :
Rubiao modeste professeur hérite une fortune du philosophe Quincas Borba, sous réserve de prendre soin de son chien. Mais avec la richesse il hérite la démence de son ami. L'amour et la folie surgissent ici romantiquement la main dans la main, cependant la basse continue du roman est l'ambition économique dont le héros devient l'instrument. Quincas Borba est un livre merveilleusement drôle, subtil et rapide.


Rubiao , modeste professeur hérite... >Voir plus
Que lire après Le philosophe ou le chien Quincas BorbaVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
« Eh bien ! pleurez les deux êtres qui viennent de mourir, si vous savez pleurer. Et si vous savez seulement rire, riez. C'est la même chose. »

Quincas Borba ou le philosophe chien. le parti du qu'en rira-t-on. Quelle comédie ! Obragido Joaquim Maria !

***

Mulâtre, descendant d'esclaves, celui qui fondera l'Académie des lettres du Brésil, sera célébré comme un immense écrivain alors même que l'esclavage ne sera aboli qu'en 1888, et aura droit à des funérailles nationales.

Le grand romancier lusophone, reconnu d'Anatole France à Salman Rushdie en passant par Philip Roth, nous invite à ne pas nous prendre au sérieux et n'a aucune intention de s'effacer derrière les personnages de son roman.

Le lecteur apprend à le connaitre, par intermittence, au fur et à mesure que se déroule la farce, le narrateur prend autant de plaisir que le lecteur et n'est pas en reste de petits commentaires acerbes et mondains sur les turpitudes, les marivaudages et les faiblesses d'égo de ses personnages.

Machado de Assis est plein d'attention pour son lecteur, tout au long du livre, il nous claque des doigts à l'oreille de peur que nous somnolions, nous chambre au besoin si nous n'avons pas pris assez de recul sur un évènement du livre, avec malice et courtoisie grâce à un procédé, l'une des six fonctions du langage : la fonction phatique.

Cette fonction, découverte par le linguiste Jakobson, sert à s'assurer que « la communication passe bien », contrairement à l'information qui délivre un énoncé, la fonction phatique s'intéresse à l'interaction sociale, à la façon dont le locuté reçoit le message du locuteur (exemple : la ligne téléphonique est brouillée vous interrompez votre propos pour dire « allo, vous m'entendez bien là ? »).

« Un monde de larmes serait monotone, un monde de rires, lassant ; seul un judicieux mélange de pleurs et de polkas, de sanglots et de farandoles, peut donner à l'âme du monde sa nécessaire diversité : ainsi s'établit l'équilibre qui caractérise la vie. »

Néanmoins, Machado de Assis et sa douce ironie ne tournent jamais en dérision les personnages de ce roman. A la dérision, Machado oppose le dérisoire. Dérisoire des conventions, des mondanités, des coquetteries, des folies, des orgueils et des dépenses.

« Écoute donc, ignare ! Je suis Saint Augustin. Je m'en suis avisé avant-hier : écoute et tais-toi. Tout coïncide ». le philosophe fou Quincas Borba ouvre ce livre et lui donne son nom, ainsi qu'à son chien.

Puis vient son ami et héritier Rubião personnage principal du livre, sorte de « candide au pays des cariocas ». Originaire de Barbacena, il monte à Rio : « la capitale est terrible ; on y attrape une passion comme on attrape un rhume ; un filet d'air, et l'on est pris » et voyez vous-mêmes comme Machado de Assis en tire le portrait : « Rubião avait plus de crédulité que de convictions ; il ne voyait jamais de raisons de contester ni de soutenir un point de vue ; ou pouvait semer à l'infini dans son esprit, le sol restait toujours comme vierge, prêt à accueillir n'importe quoi. »

Et enfin la figure de Sofia Palha, jalouse de sa beauté : « elle était de ces femmes que le temps, sculpteur patient, ne porte pas d'un coup à leur plus haut point de beauté mais s'attarde à polir ». Séductrice nonchalante, prise au piège de son physique, elle est poussée à s’assurer toujours qu’elle est intéressante, même lorsqu’elle n’est pas intéressée.

« Il pesta intérieurement contre l'homme qui l'arrachait ainsi à ses souvenirs. Souvenirs sans beauté, certes, mais précieux parce que anciens – anciens et médecins de l'âme : se plonger en eux, c'était boire un élixir qui guérissait du présent. » Les personnages de ce roman très théâtral nous offrent certes quiproquos, badinages et loufoqueries mais tout cela avec une attention extrême au détail, notamment dans le jeu mondain entre les pensées et les actes, une finesse qui confine à la sociologie, et qui ne manquera pas d'évoquer chez le lecteur des moments vécus.

« Mon cher monsieur, si l'on regarde de près, la vie ne dispose que de quatre ou cinq situations fondamentales, et ce sont les variantes apportées par les circonstances qui nous les font innombrables. » le livre ne manque pas non plus de réflexions par exemple sur les apparents choix de vie qui se réduisent comme peau de chagrin et ne se singularisent que par quelques nuances dans les coloris de la tapisserie mondaine, de la variété des climats sous lesquels nous vivons nos passions et nos soumissions.
J'ai lu ça chez Paul Valéry pour qui « L'homme est comme prévu pour plus d'éventualités qu'il n'en peut connaître », mais également chez D.H Lawrence pour qui le monde – supposé plein de possibilités – se réduit à quelques-unes pour la plupart des êtres humains.
Est-ce que les écrivains font ce constat dans leur vie ou est-ce au moment de créer une oeuvre que finalement, sous leurs feuillets, la diversité de situations, d'existences et de trajectoires les poussent à cet humble constat, à savoir que l'on passe sa vie à écrire le même livre ?

On rit haut (de Janeiro) dans cette comédie très fluide, effervescente et bien ciselée, sachez seulement que vous n'entrez pas seul dans ce roman, votre guide, Machado de Assis, vous attend de pied ferme : « suis-moi, ami lecteur ».

Qu'en pensez-vous ?
Commenter  J’apprécie          9611
Au Brésil, à la fin du 19ème siècle, Rubião est un modeste professeur qui tient lieu d'homme de compagnie et de garde-malade au philosophe millionnaire (ou l'inverse) Quincas Borba. A la mort de ce dernier, qui flirtait avec la folie depuis un certain temps (mais n'allez pas le répéter au notaire, cela pourrait remettre en question son testament), Rubião hérite de son immense fortune, à une condition : s'occuper du chien, également dénommé Quincas Borba, du vieil homme.
Voici donc le pauvre (enfin, façon de parler, désormais) Rubião tout ébaubi par ses nouvelles richesses, qui décide de s'installer à Rio. Il en découvre bientôt les fastes, la vie culturelle et sociale, les mondanités. Naïf, le candide ex-professeur se fait rapidement de nouveaux « amis », intéressés par son principal trait de caractère : sa générosité dispendieuse. Rubião se trouve ainsi embarqué dans des affaires commerciales douteuses, endosse les dettes des uns et des autres, prête de l'argent à la première demande, devient mécène d'un projet journalistico-politique fantoche. Mais il n'y voit aucun mal, ne flaire jamais les profiteurs et les escroqueries, ni l'hypocrisie, comprend à peine dans quoi il investit. Il faut dire que notre homme est amoureux : la belle Sofia, épouse de son associé, lui fait tourner la tête, au point qu'il pourrait bien la perdre tout à fait. Parce qu'on se demande quand même si Quincas Borba, en plus de sa fortune et de son chien, ne lui aurait pas aussi légué sa folie (des grandeurs).

« Quincas Borba » est une comédie très fluide, faite de très courts chapitres qui s'enchaînent rapidement, dans laquelle l'auteur s'amuse à interpeller directement le lecteur. Manifestement il prend aussi plaisir à raconter l'histoire de Rubião, mais sans jamais se moquer cruellement de son malheureux héros. Machado de Assis est plutôt du genre à égratigner ou ridiculiser la haute bourgeoisie carioca, sa superficialité et sa tyrannie des apparences et des conventions, plutôt qu'à s'acharner sur un pauvre type tel Rubião, dépassé par son destin. Et ce qui rend cette critique sociale encore plus savoureuse, c'est que l'auteur y intègre le thème de la folie et du fantasme qui se jouent de la réalité. Un bijou d'ironie et de finesse d'analyse.
Lien : https://voyagesaufildespages..
Commenter  J’apprécie          404
Le philosophe Quincas Borba,ancien clochard devenu millionnaire ,meurt ,léguant toute sa fortune à Rubaio,modeste professeur de province,à condition que ce dernier adopte son chien,appelé également ,Quincas Borba.
Un superbe récit sur la Vie,les hommes,la réalité,les fantasmes et la folie.
Ecrit par un des plus grands auteurs sud-américains (Brésil)du XIXème siècle,un pur bonheur de Lecture!
Commenter  J’apprécie          347
Quincas Borba ou le chien philosophe, ce double titre évoque deux personnages qui vont avoir une influence majeure sur la vie du héros Rubiao.
Nous sommes au Brésil, fin du XIXème siècle, Rubiao est un pauvre professeur, qui se lie d'amitié avec Quincas Borba, un riche homme se prétendant philosophe. Quincas Borba philosophe possède un chien qu'il va nommer.. Quincas Borba. Pour garder une place dans le monde. le philosophe se sent malade et sait qu'il lui reste peu de temps à vivre. Rubiao va le soigner et le soutenir jusqu'au bout, même pendant ces durs moments où le malade a des accès de folie. Rubiao va hériter d'une belle fortune et du chien. Il va découvrir la vie mondaine de Rio, les courtisans, les requêtes incessantes, les amitiés intéressées et l'amour vain.
Machado de Assis nous emmène patiemment sur les quais de la folie. Rubiao, son personnage principal, un peu simplet, attire toute la pitié du lecteur avec une pointe d'incrédulité devant tant de naïveté.
Commenter  J’apprécie          40
Une prose d'une grande originalité, où la bonté et l'innocence des personnages se mêlent subtilement à l'ironie du narrateur. L'identité brésilienne se perçoit par la naïveté des protagonistes qui se heurtent les uns aux autres. Des références littéraires et des adresses au lecteur agrémentent un récit léger, poétique, et d'une grande profondeur. Une écriture magnifique, judicieusement traduite par Jean-Paul Bruyas et qui pourra s'accompagner d'un disque de Milton Nascimento.

Commenter  J’apprécie          00

Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
« Il pesta intérieurement contre l'homme qui l'arrachait ainsi à ses souvenirs. Souvenirs sans beauté, certes, mais précieux parce que anciens – anciens et médecins de l'âme : se plonger en eux, c'était boire un élixir qui guérissait du présent. »
Commenter  J’apprécie          393
[Ainsi réfléchit le mari de Sofia:]
Rubião, certes, regardait beaucoup Sofia; et Sofia, de son côté, semblait lui rendre parfois ses regards... Menues coquetteries de jolie femme! Mais après tout, pourvu que les yeux fussent toujours les siens, il n'allait pas leur interdire de briller; on ne devait tout de même pas être jaloux d'un nerf optique.
Commenter  J’apprécie          90
Finalement, Quincas Borba s'endort. Les images de sa vie se mettent alors à danser dans sa tête, vagues, anciennes ou récentes, songes faits de pièces et de morceaux. Quand il se réveille, il ne se souvient plus d'avoir souffert ; il a un air - je ne dirai pas mélancolique, pour ne pas provoquer le lecteur.
Commenter  J’apprécie          10
Chapitre 106? Plus exactement, chapitre que le lecteur, tout désorienté, aborde en se demandant comment le chagrin de Sofia est compatible avec les propos tenus par le cocher. Et de s'interroger, perplexe : mais alors, le rendez-vous de la rue de l'Harmonie, Sofia, Carlos Maria, toute cette idylle où beauté rime avec péché, ce n'était donc que calomnie? Calomnie, oui, mais elle est le fait du lecteur ou de Rubiao, non du pauvre cocher, qui n'a cité aucun nom, qui n'a même pas su inventer une histoire vraisemblable. C'est ce dont tu te serais aperçu, cher lecteur, si tu m'avais lu un peu plus posément.
Commenter  J’apprécie          00
La Croix du Sud, que la belle Sofia n'a pas voulu contempler comme le lui demandait Rubiao, est assez haut dans le ciel pour ne pas distinguer entre les rires des hommes et leurs larmes.
Commenter  J’apprécie          20

Videos de Joaquim Maria Machado de Assis (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Joaquim Maria Machado de Assis
Voici une présentation d'un des plus grands écrivains brésiliens, Joaquim Maria Machado de Assis. C'est João Viegas; traducteur, qui nous fait le plaisir de nous en parler en évoquant pour nous le texte "Chasseur d'esclaves". Bon visionnage !
Dans la catégorie : Littérature portugaiseVoir plus
>Littérature (Belles-lettres)>Littérature espagnole et portugaise>Littérature portugaise (227)
autres livres classés : brésilVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (72) Voir plus



Quiz Voir plus

Les classiques de la littérature sud-américaine

Quel est l'écrivain colombien associé au "réalisme magique"

Gabriel Garcia Marquez
Luis Sepulveda
Alvaro Mutis
Santiago Gamboa

10 questions
371 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature sud-américaine , latino-américain , amérique du sudCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..