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EAN : 9782757806104
320 pages
Points (04/10/2007)
3.9/5   73 notes
Résumé :

Du fond de la case où ils sont retenus prisonniers, deux instructeurs russes assistent au viol d'une femme qui cache une poignée de diamants dans sa bouche. Derrière eux, à demi-mort, gît un révolutionnaire angolais. Il scande le nom d'un village sibérien. Et dans cette forêt, à la lisière du Zaïre et de l'Angola, au milieu d'une Afrique exsangue, surgit le souvenir du visage tant aimé d'Anna...
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
L'Afrique. Des noirs aux cous gras se goinfrant de petits fours lors de colloques pseudo-littéraires, pseudo-politiques, pseudo-spirituels. Des blanches grassouillettes baisant des éphèbes noirs. Des hôtels grands luxes accueillant ces grosses blanches, ces cous gras et ces éphèbes noirs. Tel est le portrait réaliste de cette Afrique contemporaine. Et lors d'un de ces colloques où le champagne coule à flot pendant que le peuple n'a même pas accès à l'eau potable, l'auteur se revoit 25 ans en arrière dans une geôle africaine en compagnie d'un étrange prisonnier, Elias. Cette nuit-là, massacres et viols se succédaient pendant que les rafales de tirs faisaient rage. Révolution, indépendance, pouvoir, tout était prétexte à cette barbarie humaine, à ces tueries successives et sauvages. Et au milieu de ces morts, Elias, jeune noir charismatique, aura un destin extraordinaire…

De l'Angola au Congo, de Cuba en Sibérie, Elias se forgera une vision politique hors-norme. Il parle révolution. Il espère entre-aide. Il pense soutien au peuple. Elias, le jeune révolutionnaire. Il partira se former à Cuba. Il rencontrera un certain Ernesto Guevara que certains appellent El Che. Il sera déçu. Il s'enfuira en Ex Union Soviétique pour continuer sa formation, découvrira le racisme. Il s'aventurera dans le froid et la Sibérie, y rencontrera l'Amour, le pur, avec la belle Anna…

Cela faisait plusieurs années que ce livre (pourtant assez court) m'attendait patiemment. L'auteur, Andreï Makine, un russe francophone qui écrit sur l'Afrique, la révolution, les rêves idéologiques et les massacres faussement idéologiques. Voilà de quoi dessiner une trame forte et cruelle. Les images sont fortes, les odeurs tenaces, les destins tragiques. Les morts, les viols, les violences, les massacres se succèdent au fil des pages. C'est ça la vie en Afrique, la vie dans une révolution. Pourtant au milieu des cadavres humains, l'auteur distille de l'espoir et de l'amour…
Lien : http://leranchsansnom.free.f..
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« On peut tuer un être humain sans lui enlever la vie. »

Depuis la nuit des temps, les êtres humains « s'affrontent pour la possession des femmes, de l'argent, du pouvoir… ». Ils violent et tuent, sans trop de remords, voire aucun, guidés par cet élan collectif qui pousse les hommes à s'unir pour s'élever au sommet d'une folie meurtrière n'ayant de limite que la soif insatiable de violence. L'amour humain cherche à donner un sens, s'il en est un, à ces batailles qui ont rendu les hommes méconnaissables. En posant un regard cynique sur la vie et les individus qui peuplent le monde, et ayant comme toile de fond la guerre coloniale portugaise tel un prétexte à son exposé, l'auteur nous raconte avec sensibilité les peurs qui nous hantent, incontrôlables. La conscience de la mort, l'indifférence qui en résulte et l'amour maternel vers lequel l'âme cherche sans cesse à revenir, bulle de réconfort dans un monde dont les valeurs essentielles semblent s'être effondrées. Mais aussi l'amour des sens et des souvenirs doux qui apaisent les maux.

Deux russes et un jeune révolutionnaire angolais, Elias – alias notre héros - sont retenus prisonniers au fond d'une case, ce dernier gisant à moitié mort. La guerre coloniale portugaise de 1961 vient d'éclater. Vingt-cinq ans plus tard, il se souviendra de cette nuit de terreur à Lunda Norte, où il assistera au viol d'une femme Noire par des soldats de l'armée angolaise. Au milieu de l'horreur, le visage d'Anna...

« Sans l'amour qu'il lui portait, la vie n'aurait été qu'une interminable nuit. »

Il se souviendra de ses mains noires sur sa peau laiteuse. de ce train filant à toute allure à travers la taïga sibérienne, sa terre natale. Des nuits d'amour et de cette femme qui portera sur sa robe les senteurs de la nuit. C'était le hasard d'une rencontre lors d'une conférence sur le développement durable en Afrique. Dans cette foutue jungle, peu leur importait le regard des autres. Parce que l'amour humain est incolore...

Il découvrira la tendresse, la confiance et la peur, celle inhérente à la perte. Sentiment inaltérable, inévitable. J'ai été transportée par ce roman de Makine. Avec douceur, il a su allier la révolution à l'amour - ce qui en fait, à mes yeux, toute sa beauté. L'amour des sens, l'amour maternel et celui des souvenirs. L'amour des mots, l'amour des gestes et l'amour qui panse, qui occulte la haine. L'amour d'Anna et les odeurs de la nuit. L'amour universel...

L'amour humain selon Makine. Plus fort que toutes les guerres. Merci Bison :-*

« le soleil de l'Afrique, un billet pour Cuba, de la neige à pelleter et une histoire d'amour ». T'avais raison, j'étais dans mon élément... :P

« Croyez-vous qu'après la victoire de la révolution les gens vont s'aimer autrement? »

Lien : http://www.lamarreedesmots.c..
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L'amour humain. Andreï Makine

Deux instructeurs russes dont le narrateur sont retenus prisonniers au fond d'une case en Angola. Nous sommes au début des années 60 qui précédent l'indépendance à laquelle le pays accède en 1975 après des années de guerre coloniale et de guerre civile. Par une ouverture, ils assistent au viol d'une zaïroise qui cache des diamants dans sa bouche. Au fond de la case, un révolutionnaire angolais gît à demi-mort : c'est Elias le héros de ce récit sans concession évoquant en toile de fond la politique africaine cynique des puissances mondiales. Elias, comateux, murmure le prénom d'Anna et de la ville de Sarma située au fin fond de la Sibérie, la ville de son amour inoubliable… Anna qu'il rencontra au hasard d'une conférence sur le développement durable en Afrique et qu'il aima…
En toile de fond également le visage de cette Afrique qui dans les dernières années du XX e siècle est la proie des dictateurs sanguinaires et jouisseurs, avides de compromissions et de bassesses, de petits fours , de champagne et de femmes blanches : « Ce délirant écheveau des affaires du monde, l'énergie de milliers d'hommes qui affrontent, complotent, vendent des richesses incalculables, entassent des milliards sur des comptes secrets, courtisent leurs adversaires et s'entredévorent avec leurs alliés, entrainent leurs pays dans de longues années de guerre, affament des régions entières, payent des légions de plumitifs qui acclament leur politique, toute cette démente mécanique planétaire se concentre, ce soir, dans le corps charnu d'une femme blonde qu'un homme noir en sueur voudrait posséder. »
Et le racisme sous tous ses aspects rythme le récit en un monde où il est préférable de se réclamer métis, un monde où l'on vit dans l'angoisse permanente de ne pas perdre son rang, de ne pas s'abaisser jusqu'au nègre, d'être plus blanc que blanc !
Et plus tard le narrateur pensant à Elias songe qu'en fait quelques années suffisent pour transformer un être vivant en un fantôme qui hante de moins en moins les mémoires : un jeune nègre qui a naïvement lutté pour un monde meilleur, a aimé sans succès, disparu sans bruit. Sans illusion : « le sens de l'Histoire, les causes des guerres et des paix, la morale universelle, tout cela n'a jamais aidé l'humanité à éviter qu'une botte fracasse la clavicule d'une femme et que les enfants apprennent à tuer…Au lieu de l'Histoire, j'ai vu alors des soldats qui empoignaient une femme postée à quatre pattes qu'ils venaient de violer et de tuer. »
le sens de l'Histoire est une folie meurtrière : « Par delà le délire bouffon des coïncidences, des millions d'hommes jetés les uns contre les autres au nom d'une haine qui paraitra stupide le lendemain, quand ces hommes seront vidés de leur sang. Il faudra alors inventer une autre haine et la vêtir d'oripeaux humanistes ou messianiques, la conforter par le bruit des chenilles sur le macadam des villes en ruine, par le feu des canons tirant sur les désarmés… »
Au terme de cette longue méditation, le narrateur constate avec perplexité qu'à aucun moment n'apparaît l'amour, un amour tout simple avec sa folle générosité, son esprit de sacrifice… »
Un roman où l'amour a bien du mal à se frayer un chemin ; et pourtant c'est bien l'amour qui devrait rendre au monde sa gravité sans laquelle nous ne serions que des insectes pressés de jouir, de mordre, de mourir… Et Elias de se demander si après la victoire de la révolution les gens vont s'aimer autrement !
Avec des mots simples et un style somptueux, chaque mot à sa juste place, Andreï Makine nous offre là un roman déroutant, sombre et pessimiste qui montre ce qui conduit le monde dans toute son horreur à l'affrontement, la possession des femmes, de l'argent, du pouvoir. L'amour dans tout cela reste un fantasme, un empyrée, un monde imaginaire, un électuaire possible. Anna, la rencontre de toute une vie.
Un très beau roman.
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4e de couverture : du fond de la case où ils sont retenus prisonniers, deux instructeurs russes assistent au viol d'une femme qui cache une poignée de diamants dans sa bouche. Derrière eux, à demi-mort, gît un révolutionnaire angolais. Il scande le nom d'un village sibérien. Et dans cette forêt, à la lisière du Zaïre et de l'Angola, au milieu d'une Afrique exsangue, surgit le souvenir tant aimé d'Anna...

Mon avis : le narrateur assiste à un colloque où le Champagne est servi à profusion alors que le peuple n'a pas usage de l'eau potable ; il se revoit 25 ans en arrière dans cette geôle africaine, en compagnie d'Elias, dont on va suivre le destin extraordinaire. Quelque soit le côté où on se trouve, pour la révolution ou l'indépendance, c'est toujours la même boucherie, la même barbarie humaine. Parfois, il y a aussi l'amour.
Andréï Makine dépeint formidablement la violence des actions, et au milieu de tout ce cahot, il y a l'amour. Mais c'est un roman assez dur.
Comme toujours, le style est impeccable, direct et percutant.

À lire avec une coupe de Champagne, des petits fours sur un fond sonore de musique russe.

Mon compte instagram : @la_cath_a_strophes


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Le narrateur, d'origine russe comme l'auteur, évoque dans ce roman la vie et les combats d'un ami angolais, un militant convaincu aux motivations personnelles très fortes, qui mettra toute son énergie au service de la révolution, et sera évidemment formé et entraîné dans les écoles de l'ex-URSS et de Cuba. Ayant vécu un amour d'une grande intensité sentimentale avec une étudiante moscovite qui lui fera connaître son village sibérien, son froid glacial et sa chaleur humaine sans phrases, il sera manipulé et connaîtra tous les aléas de la politique impérialiste du bloc soviétique dans l'Afrique de la guerre froide, avant de trouver, au terme d'un parcours aussi désabusé qu'héroïque, une fin admirable et dérisoire dans la panique et le brasier de Mogadiscio évacué par les Russes.
Dans ce roman inégal, de très belles pages sur la pureté et la force de l'amour voisinent avec des sarcasmes qui frôlent racisme et même sexisme, car l'auteur semble distinguer l'amour idéal de la bestialité d'une sexualité repoussante et caricaturale… On reste déconcerté par cette satire violente des compromissions et des bassesses de bien des dirigeants africains, même si la peinture, pour cruelle qu'elle soit, n'est pas entièrement inexacte… L'évocation de la politique soviétique en Afrique et de son cynisme, présente une assez grande originalité, ce thème étant peu connu et peu abordé. le lyrisme de certaines pages et la dénonciation impitoyable des menées politiques en Afrique, de quelque bord qu'elles soient, restent les deux atouts de ce roman assez hétérogène.
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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
p118 :
"Tu sais, je n'ai jamais pensé que notre combat était parfait et que les gens qui les menaient étaient des saints. Mais j'ai toujours cru à la nécessité d'un monde différent. Et j'y crois encore."

p119 :
"Tu vois ce type, oui en short, une chemisette à pois. Le steak qu'il mange pèse une livre, au moins. Son pays, l'Amérique, protège par toute sa puissance le droit de cet homme à manger une telle quantité de viande. Et surtout son droit de se foutre qu'à l'autre rive de l'Atlantique des enfants aux membres amputés mâchent de l'écorce pour tromper la faim, avant de crever. Les deux rives sont pourtant un seul et même monde, il suffit juste de se lever, comme ça, sur la pointe des pieds pour le voir."

p249 :
"Oui, il faudrait une foi qui balaye, en nous, le petit insecte grésillant, cette petite mouche de la peur de mourir. Mais surtout, il faudrait savoir aimer. Tout simplement aimer. Alors il serait impensable de casser d'un coup de botte la clavicule d'une femme jetée par terre..."
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Sur une route, encore à moitié campagnarde, il aperçut une très vielle femme qui marchait si lentement qu'elle donnait l'impression de poser avec précaution chacun de ses pas sur la broderie blanche et fragile. Dans un filet à provisions, elle portait quelques paquets enveloppés de gros papier gris et un pain recouvert d'un journal. En contournant une flaque d'eau, elle s'appuya sur la branche d'un pommier qui se penchait sur le chemin. Elias éprouva soudain, très profondément, l'instant qui reliait cette vielle main et l'écorce rabougrie. La femme s'arrêta, leva le visage vers le tournoiement neigeux. Il crut qu'elle souriait faiblement.
Il repensa souvent à cette femme. Dans un monde où les pauvres, fatalement malheureux, menaient leur lutte des classes contre les riches, inévitablement comblés de bonheur, il était difficile de trouver une place pour cette vieille passante du jour de la première neige. Etait-elle pauvre? Certainement. Et même plus démunie que ces "masses populaires", dans les sociétés capitalistes, qui bataillaient contre les bourgeois. Mais était elle malheureuse? Elias connaissait déjà assez la vie russe pour savoir à quel point ces destins invisibles pouvaient être mystérieusement emplis de sens. D'ailleurs, aurait-elle été plus heureuse si son filet avait regorgé de victuailles? Si, au lieu d'avoir traversé des guerres, des purges, des famines, elle avait mené une existence calme et fortunée quelque part en Occident? Ces questions lui paraissaient enfantines et même bêtes, et pourtant elles troublaient la rigueur des théories qu'il apprenait à l'université. Une vielle femme qui marche lentement, le jour de la première neige, s'appuie sur une branche, lève ses yeux vers le tourbillon des flocons... Impossible de caser cet être humain dans le trio de propagande qu'on voyait à Moscou sur les façades : un ouvrier aux bras musclés, un kolkhozien chargé de gerbes de blé, un intellectuel à lunettes avec ses outils de savant. Ces trois classes symbolisaient le présent et l'avenir du pays. La vielle femme n'appartenait pas à leur temps. "Comme tant d'autres, dans ce pays..." pensa Elias. Tout un pan de vie échappait aux beaux systèmes des philosophes.
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Durant toute sa vie, il aurait l'impression de se rappeler chaque minute passée avec elle, chaque angle de rue qu'ils tourneraient, chaque aquarelle des nuages au-dessus de leurs têtes. Et pourtant, dans les moments les plus proches de la mort, donc les plus vrais, c'est cet instant-là qui reviendrait avec la patiente douleur de son amour : la senteur amère de la neige, le silence d'une chute du jour et ces yeux qui l'avaient retenu debout.
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«On peut donc tuer un être humain sans lui enlever la vie», pensait Elias en observant cette masse de corps à peine couvert de lambeaux. Pas besoin de les vider de leur sang, de les démembrer. Il suffisait de les affamer, de mélanger femmes et hommes, vieux ou jeunes, de les obliger à faire leurs besoins devant les autres, de les empêcher de se laver, de leur interdire la parole. En fait, d’effacer tout signe d’appartenance au genre humain. Un cadavre était plus vivant qu’eux car, dans un mort, on reconnaît toujours un homme.
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La blondeur laiteuse de la peau, l’épaisseur charnue des cuisses : une femme retrousse sa jupe moulante et se cale dans une grande voiture de luxe. La nuit découpe des lumières crues, comme toujours en Afrique. La chevelure excessivement dorée de la femme scintille. Ses talons hauts l’obligent, quand elle s’assied, à redresser ses genoux. Son corps replié sur le siège fait penser à une… oui, à une grosse dinde qu’on met au four.
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Vidéo de Andreï Makine
Augustin Trapenard reçoit Andreï Makine, écrivain, académicien, pour "L'Ancien Calendrier d'un amour", édité chez Grasset. Ce titre énigmatique fait référence à une "parenthèse enchantée" pendant laquelle Valdas et sa bien aimée peuvent vivre "en dehors de la comédie humaine" entre l'ancien calendrier de la Russie et le nouveau.  En effet, le livre raconte l'histoire d'un jeune aristocrate russe embarqué dans le tourbillon de la révolution de 1917 qui finira sa vie en France. L'homme fera l'expérience de l'amour et ne cessera jamais d'oublier celle qu'il a aimé. Son histoire c'est aussi l'histoire d'un exil, un exil qui rappelle celui connu par l'auteur. 

Retrouvez l'intégralité de l'interview ci-dessous : https://www.france.tv/france-5/la-grande-librairie/
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