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Agatha Christie : Intégrale - Le M... tome 1 sur 14

Jacques Baudou (Préfacier, etc.)jj Schleret (Éditeur scientifique)
EAN : 9782702420867
1306 pages
Le Masque (16/01/1991)
  Existe en édition audio
4.18/5   387 notes
Résumé :
Voici rassemblées les premières oeuvres de celle qui deviendra l'incontestée "Reine du Crime" de la littérature. Pour faire face à ses problèmes financiers qu'elle poursuivra une carrière commencée en amateur en 1920 avec la publication de La mystérieuse affaire de Styles.

Le roman policier des années 1920-1925 qui est, à l'image de l'époque, d'un extraordinaire foisonnement, voit passer Agatha Christie de l'énigme au roman d'aventures criminelles, et... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (30) Voir plus Ajouter une critique
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Ce premier recueil des Oeuvres complètes d'Agatha Christie reprend les cinq premiers romans policiers publiés par Agatha Christie, en commençant par la mystérieuse affaire de Styles, écrit pendant la première guerre mondiale, mais seulement publiée en 1920. Agatha Christie se devait de contribuer aux charges du ménage, son mari n'étant pas vraiment doué pour les affaires. le succès inattendu de ce premier livre mettant en scène un detective belge retraité réfugié en Angleterre pendant le conflit était assez inattendu. le prendre comme héros récurrent semblait difficile, mais son recyclage en détective privé en Angleterre plaisait autant aux lecteurs qu'à son éditeur. Suivront Mr Brown mettant en scène le jeune couple Tommy Beresford et Tuppence Crowley mais, avec les héroïnes féminines, elle allait se heurter chaque fois au même dilemne : pouvait-elle décemment continuer à mener une vie d'aventure après leur mariage ? Comme si, après la parenthèse de la guerre où les hommes étaient absents, la vie d'avant devait reprendre. En contradiction avec le vécu de bien des femmes de l'époque, à commencer par Agatha Christie.
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Bien que préférant largement les romans écrits par Agatha Christie que les nouvelles, je n'ai tout de même pas résisté devant l'intégrale des nouvelles mettant en scène Hercule Poirot. Il est parfois bien difficile de se procurer les différents recueils puisque certains ne sont plus édités. L'achat en occasion peut être une bonne alternative quand le vendeur a l'honnêteté de pratiquer des prix démocratiques ce qui n'est hélas pas toujours le cas.

Aussi pour la «modique» somme de 25 € me voilà l'heureuse propriétaire de l'intégrale des nouvelles du petit détective belge. J'ai eu l'heureuse surprise de découvrir deux versions de la Capture de Cerbère, l'originale publiée dans Les Travaux d'Hercule et une issue des Carnets Secrets d'Agatha Christie. Je reconnais avoir préféré la version originale car, bien que se basant encore sur un trafic de drogue, elle est tout de même bien plus réaliste que l'autre version qui est une utopie presque enfantine.

Également une autre nouvelle inédite publiée dans les Carnets Secrets : L'Incident de la balle de chien qui n'est rien d'autre que l'ébauche du roman Témoin Muet.

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Bien au chaud dans son salon londonien, Hercule Poirot s'apprête à passer une soirée tranquille lorsque le téléphone l'arrache à ses projets : à sa façon originale et impétueuse, Ariadne Oliver réclame son aide.

Une fête enfantine organisée pour Halloween s'est plutôt mal terminée par la découverte du cadavre d'une des participantes. La jeune Joyce a été noyée, sans doute parce qu'elle avait affirmé plus tôt avoir été témoin d'un meurtre.

Voici donc Hercule Poirot à la rescousse de son amie, tentant d'identifier le coupable : les suspects sont légion, tout comme les pistes à suivre et les rumeurs embrouillent l'affaire plus que nécessaire.

Le dépaysement est total : la campagne anglaise, ses traditions et ses ragots … créent une atmosphère inégalable et captivante. L'intrigue et ses innombrables ramifications prêtent à bâtir bien des scénarios.

J'ai pris plaisir à relire, grâce au Challenge Halloween de Hilde et Lou, cette enquête et à me replonger dans cette ambiance, mélange de fête et d'angoisse. Une lecture indispensable à cette période de l'année !
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(je précise avant tout que le livre que j'ai lu ne correspond pas à celui qui est en photo sur babelio, il ne contient pas l'affaire de Styles par exemple ... mais quand je tape l'ISBN 978-2702441435 c'est ce que Babelio me propose donc bon ... BREF )
-Mon exemplaire est : EAN / 9782702441435 / Les Intégrales du Masque/ Parution : 10-09-2014 / 1 200 pages / "Hercule poirot, nouvelles complètes" (la couverture est noire).

Je n'avais JAMAIS lu de bouquin d'Agatha Christie ... mais je suis une folle furieuse de la série TV Hercule Poirot avec David Suchet ... On m'a donc gentiment offert cette intégrale .

J'ai aimé avoir l'image de David Suchet en tête lorsque je lisais ces nouvelles (car je trouve qu'il colle pile poil à la description du personnage)(tout comme Japp et les autres!!!! ).

J'ai découvert la plume d'Agathe Christie ... fluide, drôle. C'est étrange car de moi-même je ne me serais jamais acheté ce bouquin (pensant que ça ferait doublon avec la série, craignant une écriture rigide ou que -sais-je d'autre... ) et pourtant j'ai passé un super moment de lecture, j'ai dévoré ces 1200 et quelques pages ... et je suis très contente de me dire qu'en cas de besoin Hercule Poirot est sur mes étagères pour toujouuuuuurs , ah!

Un coup de coeur.
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Dans ce volume entre autres :
Dix petits Nègres
Je crois que tous les heureux lecteurs de ce livre sont encore sous le charme de l'intrigue. Et pourtant depuis sa sortie, combien de millions de lecteurs ont tout échafaudé avant d'arriver au dénouement sans avoir ne serait-ce qu'approché l'échafaudage diabolique qu'avait monté la Reine du crime.
Parmi tous les meilleurs livres d'A.C., citons évidemment ABC contre Poirot, le Train de 16h50, le crime de l'Orient-Express (malheureusement pour moi, une “bonne âme” m'avait dévoilé le dénouement…), Mort sur le Nil, La mort n'est pas une fin… C'est sans conteste les Dix petits Nègres qui reste mon préféré, de plus ç'a été mon premier Christie, j'avais eu cette fois beaucoup de chance. Aujourd'hui encore j'aime à le relire et mes fistons l'ont lu et même étudié pour l'un d'eux avant d'aller dans le Devon voir le site et donc l'île qui avait inspiré notre chère Agatha.
À avoir dans toute bibliothèque digne de ce nom.
Aujourd'hui encore je viens de le finir, et en dépit du fait que je connais les dessous de l'intrigue, j'ai passé un moment incomparable à étudier toutes les ficelles employées pour nous mener au bout sans nous dévoiler l'intrigue. Une pure merveille !
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Citations et extraits (41) Voir plus Ajouter une citation
Au début de la guerre, miss Cowley quitte les délices - et les corvées domestiques - du foyer paternel. Elle se rend à Londres où elle prend du service dans un hôpital militaire. Premier mois : vaisselle - six cent quarante-huit assiettes par jour. Second mois : grâce à une promotion inespérée, essuyage des assiettes en question. Troisième mois, encore une promotion : à l'épluchage des pommes de terre. Quatrième mois : coupe le pain et beurre les tartines. Cinquième mois : grimpe d'un étage, est promue fille de salle, armée d'un seau et d'un balai. Sixième mois : promue au service des repas. Septième mois : son physique agréable et ses bonnes manières lui valent l'honneur suprême de servir les infirmières elles-mêmes ! Huitième mois : incident de parcours. La surveillante Bond ingurgite l'oeuf de la surveillante Westhaven. J'en prends pour mon grade ! La fille de salle est décrétée coupable ! Une faute d'inattention dans une affaire de cette importance ne saurait être trop sévèrement punie. Retour au seau et au balai ! Plus dure sera - ou plutôt fut - la chute ! Neuvième mois : de nouveau promue au balayage des salles, je tombe sur un ami d'enfance, le lieutenant Thomas Beresford (redresse-toi Tommy !), que je n'avais pas vu depuis cinq ans. Retrouvailles émouvantes ! Dixième mois : surprise par la surveillante en chef au cinéma, en compagnie d'un blessé de l'hôpital, le susmentionné lieutenant Thomas Beresford, je reçois un blâme. Les onzième et douzième mois, je recommence à servir à table avec brio si bien qu'à la fin de l'année, je quitte l'hôpital auréolée de gloire.
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Après avoir enfilé ses caoutchoucs, le major Burnaby boutonna son manteau jusqu’au cou, prit sa lanterne-tempête, ouvrit avec précaution la porte de sa maison et risqua un coup d’oeil au dehors.
Le spectacle qui s’offrait à sa vue rappelait de manière frappante ces paysages de la
campagne anglaise tels que les représentent les cartes de Christmas ou les vieux
mélodrames. Depuis quatre jours, sur toute l’Angleterre la neige tombait à gros flocons et
dans la contrée de Dartmoor elle atteignait plusieurs pieds d’épaisseur. D’un bout à l’autre de la Grande-Bretagne, les habitants se lamentaient sur l’état de leur conduite d’eau et, en ce temps calamiteux, posséder les bonnes grâces d’un plombier constituait un privilège des plus enviés.
Dans ce village de Sittaford, complètement isolé du reste du monde, les rigueurs de
l’hiver compliquaient l’existence de façon tragique.
L’intrépide major, debout sur le seuil de sa demeure, aspira l’air par deux fois, poussa un
grognement, puis s’aventura résolument dans la neige.
Il n’alla pas loin. Un petit sentier sinueux le conduisait à une grille. Il suivit l’allée en
partie déblayée de neige et heurta à la porte d’une maison cossue, bâtie en granit.
Une jeune bonne très accorte vint lui ouvrir et le débarrassa de son vieux cache-nez.
Elle l’introduisit ensuite dans une pièce qui lui procura l’illusion d’assister au brusque
changement de décors d’une scène à transformations.
Bien qu’il fût à peine trois heures, les rideaux étaient tirés sur les fenêtres, l’électricité
éclairait brillamment les objets et le feu pétillait dans la cheminée. Deux femmes en robe
d’après-midi se levèrent pour accueillir l’ancien soldat.
— Que vous êtes gentil de venir nous voir, major Burnaby ! dit l’aînée des deux.
— Et moi je vous remercie de votre aimable invitation, madame Willett.
Il serra la main de l’hôtesse et de sa fille.
— Nous attendons également Mr. Garfield ainsi que Mr. Duke. Mr. Rycroft a promis
d’assister à notre petite soirée, mais je doute qu’il sorte par un temps pareil. A son âge, il est excusé d’avance. Il fait vraiment trop mauvais. On sent le besoin de se divertir pour ne pas devenir neurasthénique. Violette, mets donc une autre bûche dans la cheminée.
— Permettez-moi, mademoiselle, fit le major qui, galamment, se leva.
D’une main adroite, il plaça une bûche à l’endroit voulu, puis se rassit dans le fauteuil que
lui avait indiqué son hôtesse. Sans en avoir l’air, il lança des regards furtifs autour de lui et s’étonna de la transformation apportée dans ce salon. Pourtant, il n’aurait su dire ce qui avait bougé de place.
Dix années auparavant, le capitaine de marine Joseph Trevelyan, lors de sa retraite, avait décidé de vivre à la campagne. Rêvant depuis longtemps de se fixer dans le pays de Dartmoor, il avait jeté son dévolu sur le hameau de Sittaford, perché au flanc d’une colline couverte de lande et de bruyère, à l’encontre des autres fermes et villages environnants. Le capitaine s’était rendu acquéreur d’un vaste terrain sur lequel il avait élevé une demeure confortable, baptisée par lui du nom pompeux de castel. Il y avait fait installer un moteur électrique qui fournissait la lumière et actionnait une pompe à eau. Puis, en vue de spéculation, il avait construit six maisonnettes en bordure de la route qui conduisait à la grille de sa demeure.
Dans le bungalow le plus proche du castel logeait son vieil ami, John Burnaby. Peu à peu, les cinq autres pavillons s’étaient vendus, car il se trouve toujours des gens qui, par goût ou par besoin, s’éloignent du monde.
Le hameau, en lui-même, comprenait trois cottages délabrés, une forge et une boutique
qui tenait lieu à la fois de bureau de poste et de confiserie. Pour se rendre à la ville, il fallait parcourir près de dix kilomètres d’un chemin où les descentes rapides nécessitaient
l’inscription si familière aux routes de Dartmoor : Motocyclistes, attention ! Descente
dangereuse !
Comme nous l’avons vu, le capitaine Trevelyan était un homme riche. Malgré cela, il avait
un amour exagéré de l’argent. Vers la fin du mois d’octobre, un agent de location
d’Exhampton lui avait demandé par lettre s’il consentirait à louer sa maison, une de ses
clientes ayant formulé le souhait d’y séjourner pendant l’hiver.
Le premier mouvement du capitaine fut de refuser net. Toutefois, après réflexion, il écrivit
à l’agent pour obtenir de plus amples renseignements. La locataire éventuelle, lui fût-il
répondu, était une veuve, Mrs. Willett.
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Miss Jane Marple avait coutume de lire son second journal dans le courant de l’après-midi. On lui en apportait deux à domicile chaque matin, et elle en parcourait un en prenant son petit déjeuner, à condition toutefois qu’elle le reçût assez tôt. En effet, le jeune garçon qui en assurait la distribution était particulièrement fantaisiste dans l’organisation de sa tournée.
Parfois aussi, il se faisait remplacer par un camarade, et chacun de ses collègues avait son idée personnelle quant à l’itinéraire à adopter. Peut-être évitait-on ainsi la monotonie, mais il est certain que les lecteurs qui souhaitaient glaner dans leur quotidien les nouvelles les plus importantes avant d’aller prendre le bus, le train ou tout autre moyen de transport pour se rendre à leur travail n’étaient guère satisfaits lorsqu’ils ne recevaient pas leur journal à temps. Par contre, les vieilles dames dont la vie s’écoulait, paisible, à Sainte-Marie-Mead, préféraient en général lire tranquillement leur journal assises à la table du petit déjeuner.
Ce jour-là, Miss Marple avait parcouru toute la première page, ainsi que quelques autres articles disséminés dans la feuille qu’elle avait baptisée la Macédoine Quotidienne, allusion tant soit peu irrévérencieuse au fait que le Daily Newsgiver, par suite d’un changement de propriétaire – et à sa grande consternation ainsi qu’à celle de plusieurs de ses amies –, proposait maintenant des articles insipides sur la mode, les peines de coeur féminines et les concours d’enfant, sans oublier de faire grand étalage des lettres des lectrices. De sorte que, à l’exception de la première page, on avait assez bien réussi à reléguer les nouvelles dignes d’intérêt en d’obscurs recoins où il était impossible de les dénicher. Miss Marple, qui appartenait à la vieille génération, aimait mieux que ses journaux fussent véritablement des organes d’information.
L’après-midi, après avoir déjeuné et s’être accordé un petit somme d’une vingtaine de minutes, elle avait ouvert le Times qui se prêtait encore à une lecture plus sérieuse, bien qu’il eût passablement évolué lui aussi et qu’il fût maintenant fort difficile d’y trouver ce que l’on cherchait. Au lieu de le feuilleter en commençant par la première page et de passer progressivement aux articles qui vous intéressaient particulièrement, vous deviez désormais vous accommoder, dans ce vénérable quotidien, d’invraisemblables et inexplicables solutions de continuité. Deux pages étaient soudain consacrées à un voyage à Capri agrémenté d’illustrations, et le sport y tenait une place beaucoup plus importante que par le passé. Les nouvelles judiciaires et la nécrologie étaient restées un peu plus conformes à la tradition. Les naissances, les mariages et les décès – qui avaient à une certaine époque accaparé l’attention de Miss Marple – avaient émigré en un nouvel endroit, avant d’être récemment rejetés à la dernière page.
La vieille demoiselle s’absorba d’abord dans la lecture des principales informations qui s’étalaient à la une, mais elle ne s’y attarda pas outre mesure, car elles étaient sensiblement la réplique de ce qu’elle avait lu le matin même, quoique peut-être présentées avec un peu plus de componction. Puis elle retourna le journal, afin de jeter un coup d’oeil rapide aux naissances, mariages et décès, se proposant après cela de rechercher la page consacrée à la correspondance où elle trouvait presque toujours quelque chose à son goût. Elle parcourait ensuite la chronique mondaine et les annonces de la salle des ventes, qui se trouvaient sur la même page. Il y avait aussi là un article scientifique, mais elle le laisserait de côté, car elle n’y comprenait généralement rien.
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Le coeur du West-End abrite de nombreuses petites rues calmes, inconnues de presque tous, sauf des chauffeurs de taxis qui les traversent avec facilité, et arrivent à Park Lane, Barkeley Square ou South Audley Street.

Si, en venant du parc, vous tournez dans une ruelle sans prétention, et tournez à nouveau une ou deux fois, à gauche puis à droite, vous aboutirez dans une rue tranquille, où se dresse l’hôtel Bertram. L’hôtel Bertram se trouve là depuis longtemps. Durant la guerre, les maisons sur sa droite furent démolies, ainsi que celles, un peu plus loin, sur sa gauche, mais le Bertram fut épargné. Toutefois, il ne put éviter d’être meurtri et marqué de cicatrices (comme diraient les agents immobiliers), mais grâce à une somme d’argent raisonnable, il fut restauré et reprit son aspect original. En 1955, il était précisément le même qu’en 1939, imposant sans ostentation et discrètement coûteux.

La clientèle du Bertram se recrutait, depuis toujours, dans la hiérarchie ecclésiastique, parmi les ladies douairières de l’aristocratie, arrivant de la campagne et les jeunes filles qui, sortant d’institutions coûteuses, retournaient chez leurs parents pour les vacances. « Il y a si peu d’endroits où une jeune fille seule soit en sécurité à Londres, mais bien sûr, le Bertram est tout à fait convenable, nous y sommes allées durant des années. »

Il avait existé naturellement beaucoup d’autres hôtels du même genre que le Bertram. Certains subsistaient encore, mais presque tous avaient été victimes des bouleversements sociaux d’après-guerre.
Il leur fallut obligatoirement se moderniser, s’adapter à une nouvelle sorte de clientèle. Le Bertram aussi avait dû changer, mais cela avait été fait d’une manière tellement habile qu’on ne le remarquait absolument pas au premier coup d’oeil.

Au pied des escaliers, menant aux larges portes, se tenait ce qui semblait être, à première vue au moins, un feld-maréchal. Galons dorés, décorations, ornaient sa large poitrine. Son attitude était parfaite.
Il vous recevait avec une affectueuse attention alors que vous émergiez d’un taxi ou d’une voiture avec des difficultés rhumatismales, vous conduisait avec précaution au haut des marches et vous guidait à travers les portes battantes mais silencieuses.

À l’intérieur, lorsque vous visitiez le Bertram pour la première fois, vous éprouviez, avec une pointe d’angoisse, la sensation que vous pénétriez dans un monde disparu. Vous aviez l’impression d’être transporté hors du temps. Vous vous trouviez à nouveau dans l’Angleterre « édouardienne ».
Certes, il y avait le chauffage central, mais cela ne se voyait pas. Dans l’immense salon se dressaient deux magnifiques cheminées, près desquelles de grands seaux à charbon en cuivre brillaient comme les faisaient briller les domestiques de l’époque édouardienne, et ils étaient remplis de morceaux de charbon tous de même grosseur. Ces cheminées, tout autant que le riche velours rouge, donnaient un sentiment de confortable intimité. Les fauteuils n’étaient pas de notre époque. Ils s’élevaient bien au-dessus du sol, de telle sorte que les vieilles ladies arthritiques ne risquaient point de perdre leur dignité en tentant de se lever. Les sièges, eux-mêmes, ne s’arrêtaient pas, comme la plupart des coûteux fauteuils modernes, à mi-chemin entre la cuisse et le genou, ce qui inflige d’atroces douleurs à ceux souffrant de sciatique. De plus, ils n’étaient pas tous de même modèle. Les uns présentaient un dossier droit, d’autres un dossier incliné. Ils étaient encore de largeurs différentes, convenant au mince comme à l’obèse.

On était à l’heure du thé, le hall se trouvait rempli de monde.
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Miss Jane Marple était assise à sa fenêtre. Celle-ci donnait sur ce jardin dont elle était si fière, autrefois. Il n’y avait pas si longtemps, à vrai dire. Aujourd’hui, elle le contemplait, pleine d’amertume.
Tout jardinage lui était interdit Elle ne pouvait plus se baisser, bêcher ou planter – seulement, à la rigueur, couper une branche çà et là. Le vieux Laycock, qui venait trois fois par semaine, faisait de son mieux, bien sûr. Mais ce n’était pas grand-chose et il travaillait à sa manière, qui n’était pas celle de miss Marple. Celle-ci savait exactement ce qu’elle voulait obtenir et en faisait part, régulièrement, à son jardinier. Le vieux Laycock déployait alors toutes les ressources de son génie personnel : il acceptait avec enthousiasme les recommandations qu’on lui prodiguait et n’y donnait aucune suite.
— Vous avez raison, miss. On mettra ces pois de senteur là, dans le coin, et les Canterbury le long du mur. On fera ça la semaine prochaine.
Les excuses de Laycock étaient toujours raisonnables et ressemblaient étrangement à celles du capitaine George de Trois hommes dans un bateau, refusant de prendre la mer. Pour l’un, le vent était toujours mauvais, inconstant s’il venait de l’ouest, encore plus dangereux et traître si c’était de l’est.
Laycock évoquait le temps – trop sec – ou trop humide, ou trop froid. Sinon, il donnait toujours la priorité à quelque chose d’extrêmement important (généralement aux choux, ordinaires ou de Bruxelles, qu’il aimait à planter en quantités industrielles). Les principes de Laycock, en matière de jardinage, étaient simples et aucun de ses employeurs, même qualifié, jamais n’avait pu l’en débarrasser. Il lui fallait de nombreuses tasses de thé, très fort et très sucré, pour lui permettre de soutenir son effort : un certain volume de feuilles mortes à balayer à l’automne et, au printemps, de quoi faire un superbe bouquet de ses fleurs préférées, asters ou sauges.
Pour lui rendre justice, il était très attaché à ses employeurs et allait même jusqu’à admettre leurs fantaisies en matière d’horticulture (à condition cependant que le travail exigé ne fût pas trop dur) mais les légumes restaient pour lui la base essentielle de la vie. Les fleurs n’étaient que distraction pour femmes oisives. Il témoignait de son attachement en offrant de ces asters, ou sauges, qu’il aimait.
« J’ai travaillé au Quartier Neuf. Veulent des jardins magnifiques, là-haut. Y a beaucoup trop de fleurs, alors, j’en ai rapporté quelques-unes. Les ai mises à la place des roses. C’est moins démodé et ça fait mieux. »
Pensant à tout cela, miss Marple soupira et reprit son tricot.
Il fallait regarder les choses en face : Sainte-Mary Mead avait changé. Comme tout le reste, d’ailleurs. La guerre en était cause, ou la nouvelle génération. À moins que ce ne fût la bombe atomique ou le gouvernement. En fait, miss Marple ne se faisait pas d’illusion : elle était vieille et c’était l’explication la plus simple. Elle s’en rendait compte davantage à Sainte-Mary Mead qui avait été son refuge pendant de si longues années.
Sainte-Mary Mead n’avait pas bougé. L’hôtel du Cochon Bleu était toujours là, comme l’église, le presbytère, l’îlot de Queen Ann et les maisons géorgiennes, dont l’une était la sienne. Miss Hartnell y habitait toujours mais miss Wetherby était morte et sa maison occupée par un banquier et sa famille. La plupart des habitants du village avaient changé mais l’apparence de celui-ci était toujours le même, à peu de chose près.
Seules, les boutiques de la grande rue étaient différentes, beaucoup plus modernes. La poissonnerie était méconnaissable avec ses grandes baies vitrées.
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