AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782864322290
50 pages
Verdier (01/11/1998)
4/5   53 notes
Résumé :
Un jour où, comme à l'accoutumée, il mène glander les porcs à travers la chênaie, un jeune paysan voit un carrosse s'arrêter dans le chemin. Une fille très parée en descend et trousse haut ses jupes sous les yeux stupéfaits de l'enfant caché dans les fougères. Cette apparition éblouissante, la chair blanche et les dentelles, le pouvoir qu'ont les puissants de jouir avec arrogance du luxe et de la beauté, il va désirer les faire siens. Arraché à sa condition, il rest... >Voir plus
Que lire après Le roi du boisVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Jean-Pierre Richard* dit qu'"Il faudrait pouvoir parler, enfin, des qualités propres du texte de Pierre Michon : dire pourquoi il marche si bien, possède un pouvoir si singulier d'emportement, un tel entrain." Et c'est bien cela qui fait toute la beauté de la lecture des textes de Pierre Michon : la possession consentante du lecteur à l'emportement. Laissez-vous donc emporter dans ce très court texte aux grandes vertus. le langage y est riche et coloré, c'est la peinture manifeste d'une forêt dont l'inquiétante étrangeté me rappelle les magnifiques Études sur le vert de Ruud van Empel. Mais Pierre Michon arrive aussi, en un minimum de pages, à nous faire ressentir les différentes conditions sociales des protagonistes qui se croisent (ou s'épient) dans ce bois. Et puis il faudrait parler aussi de cette obsession pour la peinture bien sûr, souvent présente dans ses romans, incarnée ici par la présence d'un peintre, et... quoi vous dire encore ? si ce n'est de le lire, lentement et encore.
Commenter  J’apprécie          30
UNE ETUDE EN FRUSTATION

Prière d'insérer : Un jour où, comme à l'accoutumée, il mène glander les porcs à travers la chênaie, un jeune paysan voit un carrosse s'arrêter dans le chemin. Une fille très parée en descend et trousse haut ses jupes sous les yeux stupéfaits de l'enfant caché dans les fougères. Cette apparition éblouissante, la chair blanche et les dentelles, le pouvoir qu'ont les puissants de jouir avec arrogance du luxe et de la beauté, il va désirer les faire siens. Arraché à sa condition, il restera pendant vingt ans au service du peintre Claude le Lorrain. Mais la peinture n'aura pas su le faire prince et combler ses espérances. C'est, pour finir, au coeur des bois qu'il se taille son royaume, un royaume sans illusions, simple et noir, fait de jouissances immédiates et d'un dépit triomphant qui fait résonner dans l'ultime phrase du livre ses accents diaboliques : "Maudissez le monde, il vous le rend bien".

Un récit très court où tout l'art d'écrire de Pierre Michon semble se condenser en un texte d'une puissance stylistique inouïe. Entendre par inouï une maîtrise parfaite de l'articulation des phrases, un goût sûr dans le choix des mots les plus appropriés, un savoir-faire grammatical particulièrement adapté à l'expression du récit.

"Maudissez le monde, il vous le rend bien". Que dire de plus ? Cela vous dit tout sur ce que le mot frustration recouvre....

A lire !
Commenter  J’apprécie          10
Deuxième tentative dans l'univers de Pierre Michon dont la prestation dans une émission littéraire m'a emballée. le début s'annonçait sympa, mais vite, comme dans ‘Les onze', les mots n'arrivent pas à fixer mon attention. Décidemment cet écrivain n'est pas pour moi.
Commenter  J’apprécie          82
L'inspiration de Pierre Michon semble venir d'une peinture, peut-être de le Lorrain, mais ne la connaissant pas je ne peux rien affirmer. Cependant, l'histoire de ce jeune porcher, gardant ses bêtes en contrebas d'un palais italien dans un cadre champêtre du XVIIe siècle, s'apparente à une divagation libre de Pierre Michon après qu'il eût vu un tableau d'époque. Mais peu importe la raison de l'oeuvre, c'est le plaisir de la découverte qui compte, car nous contemplons ici de la littérature paysage, observant, tour à tour, tous les plans d'une oeuvre picturale, tous les personnages, de sa composition à sa structure, ses couleurs et ses détails.
Commenter  J’apprécie          40
Court texte ciselé de Pierre Michon, comme tous ses textes, c'est quasiment un pléonasme. Une économie de mots pour raconter cette histoire et celle des peintres italiens du 17ème, de leurs mécènes, la famille Barberini notamment, qui nécessite néanmoins si l'on est curieux et/ou pas très au fait des uns et des autres une petite recherche. Personnellement, j'aime bien, je me cultive, je ne savais pas que la famille Barberini, celle du pape Urbain VIII fut une grande famille riche mécène.

Il y est question des difficiles conditions de vie des pauvres à l'époque et de leurs désirs de s'élever dans la société, leur envie de profiter un peu aussi de douceurs, de luxe et de beauté. Quatre siècles plus tard, les choses n'ont pas beaucoup changé, certains -un petit nombre- profitent toujours des richesses pendant que le plus grand nombre trime pour pas grand chose. Pierre Michon parle aussi de peinture, thème récurrent chez lui. Mais surtout tout est dit avec une élégance et une érudition évidentes, c'est beau et prendre son temps est d'une part nécessaire pour ne rien rater et tout saisir et d'autre part pour en profiter le plus longtemps possible.
Lien : http://www.lyvres.fr/
Commenter  J’apprécie          60

Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
"Il pleut sur Mantoue. C'est une ville triste, qui a un goût de vase même quand il fait soleil. Dans ce goût je m'occupe. Où est-elle, la grande espérance qui fit que je peignis, du soleil sur la tête et dans l'âme, dans des odeurs de pins ? Où êtes-vous, petits hommes dont ma main décidait, dieux dociles, gredins à grands feutres et marins songeant, passants qui traversiez des gués ? Mais ils sont là sans doute, sous la pluie je les rassemble près des écuries, ils sentent la gnôle et le poil mouillé des chiens, mes gredins, mes piqueurs. Leur feutre dégoutte sur leurs yeux, je vois à peine les visages ; quelque chose les mange, c'est leur barbe, ou la pluie, l'angoisse du matin qui fait rentrer les loups. Celui-ci, est-ce Jean ou Giovanni ? Mais celui-là je crois bien le reconnaître, c'est Hakem : il est noir, comme de la suie. Allons, à cheval. Une fois encore agitons-nous dans la forêt, sonnons du cor et gesticulons, et que nos âmes dans nos corps exténués ce soir enfin, dorment. Ouvrez bien les yeux, mes gredins : il y a dans cette purée de pois des petites bêtes qu'on ne voit pas, et quand on les voit c'est pour les tuer ; pour les voir et les tuer on vous paie, et de ce que vous gagnez vous vous saoulez et dormez mieux. Que d'ombre autour de nous. Et autant nous portent. On dit que c'est le matin. On dit que c'est l'été, Nous galopons, cela est sûr."
Commenter  J’apprécie          80
J’ai peint pour être prince.
J’avais peut-être douze ans. C’était le plein été, l’heure du soir où il fait encore chaud, mais les ombres tournent. Je faisais glander des porcs dans un bois de chênes vers Nemi, en contrebas d’un grand chemin ; j’avais écorcé une baguette et m’étais beaucoup réjoui d’en frapper ces grosses bêtes ineptes passant à ma portée. Je m’en étais lassé et me contentais de briser à toute volée les fougères, les fleurs hautaines du sous-bois, dont ma violence exaltait les odeurs ; j’aimais user de ce fléau. J’entendis venir de loin une voiture lourde, à petit train ; je me cachai et me tins coi : le plein soleil frappait la route et j’étais là dans l’ombre à regarder cette route au soleil, pas plus haut que la terre, invisible. À dix pas de moi et de mes porcs dans la lumière de l’été un carrosse s’arrêta, peint, chiffré, avec des bandes d’azur : de cette caisse armoriée jaillit une fille très parée qui riait, elle courut comme vers moi ; elle m’offrit ses dents blanches, la fougue de ses yeux ; toujours riant elle se suspendit à la limite de l’ombre, résolument me tourna le dos, un interminable instant elle se campa dans ce soleil marbré de feuilles où flambèrent ses cheveux, ses jupes d’azur énorme, le blanc de ses mains et l’or de ses poignets, et quand dans un rêve ces mains se portèrent à ses jupes et les levèrent, les cuisses et les fesses prodigieuses me furent données, comme si c’était du jour, mais un jour plus épais ; brutalement tout cela s’accroupit et pissa. Je tremblais. Le jet d’or au soleil sombrement tombait, faisait un trou dans la mousse.
Commenter  J’apprécie          30
Moi, Gian Domenico Desiderii, j’ai travaillé vingt ans avec ce vieux fou. On me dit qu’il ne s’est pas encore décidé à mourir : j’entends de ses nouvelles, des louanges à son propos, et je vois de temps en temps quelqu’une de ses récentes fabriques avec les mêmes arbres, les mêmes bergeries, les mêmes palais quand le soleil se lève, et le ciel là-dessus comme un trou. La même splendeur sans doute, les mêmes merveilles. J’en ai soupé. Il n’en est pas encore dégoûté, le gros malin, le bon apôtre. Qu’il peigne encore, si ça lui chante. Qu’il se confise dans sa dévotion. Moi aussi je fus peintre, et maintenant je suis prince. Presque prince : je règne sur les piqueurs et les meutes, les équipages et la livrée, les carrosses ; je règne aussi sur les forêts ; je suis en ce bas monde connétable et videur de pots, factotum de Monseigneur de Nevers le duc Charles, qui tient Mantoue.
Commenter  J’apprécie          20
Une fille très parée... descend (du carrosse) et trousse haut ses jupes sous les yeux stupéfaits de l'enfant caché dans les fougères.
Cette apparition éblouissante, la chair blanche et les dentelles, le pouvoir qu'ont les puissants de jouir avec arrogance du luxe et de la beauté, il va désirer les faire siens.
Commenter  J’apprécie          30
Une chair qui porte au ventre des dentelles pour être chair d’avantage, ou qui les porte au col pour n’être plus chair mais seulement nom, éclat, dédain, la chair extrême des princes.
Commenter  J’apprécie          00

Videos de Pierre Michon (39) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Pierre Michon
Retrouvez les derniers épisodes de la cinquième saison de la P'tite Librairie sur la plateforme france.tv : https://www.france.tv/france-5/la-p-tite-librairie/
N'oubliez pas de vous abonner et d'activer les notifications pour ne rater aucune des vidéos de la P'tite Librairie.
Quel roman, devenu culte, rend un hommage sublime aux vies humbles et silencieuses ? Par un écrivain devenu culte, lui aussi…
« Vies minuscules », de Pierre Michon, c'est à lire en poche chez Folio.
autres livres classés : nouvellesVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (98) Voir plus



Quiz Voir plus

Arts et littérature ...

Quelle romancière publie "Les Hauts de Hurle-vent" en 1847 ?

Charlotte Brontë
Anne Brontë
Emily Brontë

16 questions
1085 lecteurs ont répondu
Thèmes : culture générale , littérature , art , musique , peinture , cinemaCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..