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EAN : 9782070136025
192 pages
Gallimard (08/10/2015)
3.05/5   22 notes
Résumé :
En dix-neuf récits, Herta Müller évoque les plaines du Banat et ses habitants. Cette région autour de la ville de Timisoara, ses villages souabes et ses dépressions constituent le microcosme que la plume de Müller dissèque avec férocité. L'univers si fermé de la petite communauté germanophone de Roumanie après la Deuxième Guerre mondiale, ses us et coutumes, sont souvent vus à travers les yeux de l'enfant. Au-delà de l'univers familial qui se trouve au centre de plu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Sombre dimanche, celui où j'ai lu "Dépressions", dix-neuf nouvelles d'inégale longueur, celle ayant donné son titre au recueil représentant à elle seule la moitié de l'ouvrage. Sombre dimanche, pour venir à bout des souvenirs émiettés d'une enfance hallucinée au sein d'une petite communauté germanophone dans la Roumanie de Ceaușescu. Un univers étrange, où minéral et vivant se mêlent, où intérieur et extérieur ne forment qu'une seule et même entité, où la frontière entre rêve et réalité n'existe plus, où les croyances et superstitions les plus absurdes sont toujours vivantes et nous rappellent qu'on est en Transylvanie, au coeur du pays des vampires. Sans doute cette auteure renommée, pourvue de la plus haute distinction internationale qui soit, le Nobel, a-t-elle voulu transcrire à sa façon les sentiments de répulsion qu'elle éprouvait, au cours de son enfance puis de son adolescence et de sa vie de jeune adulte, à l'égard de ce régime politique qu'elle hait au plus profond de son coeur. Transcrire une fois arrivé à l'âge adulte la vision du monde de l'enfant qu'on a été est un exercice difficile. Certains s'y sont essayés avec bonheur. On pense bien sûr à Jerzy Kosinski ("L'oiseau bariolé"), plus près de nous à Robert Sabatier ("Les allumettes suédoises"), mais j'avoue que je n'ai pas réussi à ressentir la moindre empathie à la lecture de ce pensum dont les étrangetés, souvent scatologiques, peuvent à la rigueur passer pour de la poésie, mais une poésie sans beauté même si l'on sait que, pour certains, le laid c'est le beau. Seule pépite au milieu de ce lac de désespérance, une petite, toute petite nouvelle, "L'opinion", une critique pleine d'humour de la bureaucratie toute puissante d'un régime totalitaire, que n'aurait pas reniée Kafka. Heureusement, il y aura d'autres dimanches, occupés par des lectures mille fois plus réjouissantes…
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Les chouettes dévorent les baisers oubliés sur les bancs

Dix neuf nouvelles dont un presque petit roman qui donne le titre de ce recueil.

La Roumanie rurale, une minorité de langue allemande, les regards lucides d'une enfant sur les mensonges et les violences, les mots contre l'oppression.

La mort, les rêves, l'eau glacée d'un bain, la haine des autres jusque dans la plus grande proximité, « Quand la nuit la peur avait chassé le sommeil », l'hypocrisie, la mort présente et cachée, « Et on dit que le dernier trépassé garde le cimetière jusqu'à la mort du suivant », les mensonges familiaux, « Les mains de mon père s'emparaient des mots du mensonge et rendaient convaincant tout ce qu'elles faisaient », les ensorcellements, le sommeil, « le sommeil presse son odeur de renfermé sur mon visage », les grenouilles, « Je me mords les lèvres en silence pour ne pas perdre ma bouche dans la nuit », les poires, et l'obscène, « Toute la plaine est remplie de lits noirs et de poires pourries », l'homme à la boîte d'allumettes…

Un village, les expropriations nommées nationalisations, un cimetière et ce qu'au village « on appelle se reposer », l'effacement du nom du village et la simple plaque « gare », des souabes et des tziganes, des valises « pleines d'objets du foyer, pleines du quotidien », les marionnettes, « il est fadasse ton sentiment, il sent le moisi »…

La force d'une poésie abrupte, les mots d'un quotidien voilé par la violence.
Lien : https://entreleslignesentrel..
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J'ai eu plus de difficultés que d'habitude à entrer dans le livre d'Herta Müller. Moins porté peut-être par le récit que précédemment. Car ce livre est celui du quotidien d'un village allemand en Roumanie après la guerre. Quotidien de labeur, d'hommes et de femmes qui animent leur corps pour labourer la terre, préparer les repas, planter une clôture, frotter le sol. Pensées pour Vies minuscules de Pierre Michon, ou les livres de Marie-Hélène Lafon. L'impression d'un quotidien résigné. Comme toujours chez Herta Müller, la nature a sa place, comme contrepoint à cette société humaine sans vie.
Les derniers chapitres s'éloignent du village vers l'environnement totalitaire qu'Herta Müller décrit avec tant de force. L'ouvrier qui proteste, la parade militaire. Un autre décor, mais toujours l'homme au travail aux mains impuissantes.
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Le moins qu'on puisse dire avec ces nouvelles, c'est que l'on sort de sa zone de confort. On sait lire les mots, mais que lit-on ? Mis à mal, l'intellect a les neurones en macramé, et ce n'est pas plus mal. On tente de se rapprocher de ce qu'on a pu déjà lire — Kafka pour ne citer que lui — mais c'est autre chose.
Dans ce que l'on pourrait qualifier de première partie — tournant autour du village (et de sa « distance par rapport à la ville, la guerre, l'administration) — on a affaire à ce qui, par des phrases minimalistes, s'enchaînant parfois à l'aide d'un seul mot leitmotiv, s'apparente à des photographies, voire des photogrammes. Sépia, noir et blanc, noir et sang.
La seconde partie quant à elle traite davantage de la ville, de l'absurdité de la guerre et de l'administration — Kafka le retour.
Au final, ces nouvelles teintées d'une poésie très particulière, font partie des recueils qui marquent, que l'on n'oublie pas de sitôt.
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Des nouvelles de longueurs très variées, mais rien pour s'accrocher, pas de réelle narration, pas de personnage suffisamment empathique ou clairement défini, des phrases très courtes, extrêmement terre à terre, pas de talent littéraire à mon humble avis de lecteur (mais il s'agit d'une traduction d'une auteure allemande)... bref donc arrêt de lecture au milieu de la 3ème nouvelle, la plus longue. Et ça ne m'arrive pas tous les jours..
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Citations et extraits (32) Voir plus Ajouter une citation
À côté de moi le parc aboie. Les chouettes dévorent les baisers oubliés sur les bancs. Les chouettes ne me voient pas. Les rêves fatigués et usés sont tapis dans les buissons.
Les balais me balaient le dos parce que je m’appuie trop contre la nuit.
Les balayeurs des rues balaient les étoiles, en font un tas, les balaient sur leur pelle et les vident dans le canal.
Un balayeur des rues crie quelque chose à un autre balayeur des rues, qui le crie à un autre, qui le crie à un autre.
À présent tous les balayeurs des rues parlent en même temps. J’avance au milieu de leurs cris, dans l’écume de leurs apostrophes, je me brise, je tombe dans la profondeur des significations.
Je fais de grands pas. Je m’arrache les jambes en marchant.
Le chemin est balayé.
Les balais me tombent dessus.
Tout est sens dessus dessous.
La ville erre à travers champs vers on ne sait où.
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Les enfants chantent des chansons et récitent des poèmes. Les chansons parlent de randonnées et de chasse, les poèmes de l’amour pour la mère et pour la patrie. Quelquefois la jardinière d’enfants qui est encore très jeune, ce qu’on appelle au village une jeunesse, et une bonne accordéoniste, apprend aux enfants des rengaines dans lesquelles il y a aussi des mots anglais comme darling ou love. Il arrive quelquefois que les garçons mettent la main sous la jupe des filles, regardent par la fente large d’un doigt dans la porte des toilettes des filles, ce que la jardinière d’enfants appelle une honte.
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Et les vieux pêcheurs dans le bistrot témoignaient d'une belle déchéance. Leurs barbes étaient ébouriffés et collées et ils buvaient et chantaient de beaux chants rauques de brigands et je voulais qu'ils n'arrêtent pas de chanter de si beaux chants rauques. Et ils tambourinaient sur le tables pour rythmer leurs chants avec leurs belles mains sales jusqu'à ce que les tables se balancent sur l'eau, et c'était beau
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Et lorsque vint l’hiver, les jardins se dépouillèrent. Les plates-bandes étaient vides. Les épouvantails restèrent perchés sur les mâts et grandirent lorsqu’il neigea, brandissant leur menace dans les airs. Ils devinrent de grands magiciens de glace et de porcelaine dominant les arbres de leur hauteur.
La neige tombait de leurs chapeaux sur le village, les nuages étaient accrochés sur leurs épaules.
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En pleurant la mère prononce de longues phrases qui ne veulent pas s’interrompre et si elles m’étaient indifférentes, elles seraient belles. Mais elles contiennent ces mots lourds et le père se remet à chanter sa chanson et en chantant il prend le couteau dans le tiroir, le plus grand des couteaux et j’ai peur de ses yeux et le couteau coupe tout ce que je veux penser.
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Video de Herta Müller (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Herta Müller
http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=59753&motExact=0&motcle=&mode=AND
DU TRAUMA À L'ÉCRITURE
Un point de vue sur la création littéraire de Herta Müller
Radu Clit
Études Psychanalytiques
Décelé dans la création littéraire de Herta Müller, le rapport du trauma avec l'écriture se décline différemment en fonction des quatre types de prose qui sont isolés dans la création de la lauréate du prix Nobel de littérature 2009. Dans son volume de début, le trauma est ou physique ou subi par des animaux. Les romans qui décrivent la vie quotidienne sous le régime communiste présentent des traumas infligés par les autorités de l'état. Dans le camp de travail soviétique, le trauma est intégré dans le cadre existentiel. Les essais de l'écrivaine ouvrent la perspective autobiographique et montrent que tous les traumas présentés ont été subis ou par elle, ou par sa famille.
Radu Clit a déjà publié un livre et plusieurs études sur les effets psychiques des phénomènes totalitaires. Psychologue clinicien, psychanalyste, psychothérapeute de groupe, il ajoute cette fois à l'approche interdisciplinaire la grille d'analyse littéraire, ce qui lui permet d'affiner certains points de vue avancés précédemment.
Broché - format : 13,5 x 21,5 cm ISBN : 978-2-343-14532-7 ? 16 mai 2018 ? 230 pages
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