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EAN : 9782020136112
240 pages
Seuil (05/02/2004)
4.2/5   84 notes
Résumé :
Les procès intentés aux animaux, la mythologie du bois et des arbres, le bestiaire des fables, l'arrivée du jeu d'échecs en Europe, l'histoire et l'archéologie des couleurs, l'origine des armoiries et des drapeaux, l'iconographie de Judas, la légende du roi Arthur et celle d'Ivanhoé : tels sont quelques-uns des sujets traités par Michel Pastoureau dans cette "Histoire symbolique du Moyen Age occidental".

L'auteur, qui construit cette histoire depuis t... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
On ne présente plus Michel Pastoureau, historien médiéviste, qui a rencontré depuis plusieurs années un grand succès en librairie grâce à ses histoires des couleurs ou ses travaux sur les bestiaires du Moyen Âge.
Avec cette Histoire symbolique du Moyen Âge occidental, recueil d'articles de l'auteur édité initialement en 2004 au Seuil et aujourd'hui réédité en poche, on retrouve l'essentiel des thèmes chers à Michel Pastoureau et qui lui ont permis de toucher le grand public : couleurs et bestiaires, donc, qui occupent une place majeure dans l'ouvrage, mais aussi héraldique, vexillologie, végétaux, jeux, et regards portés postérieurement sur le Moyen Âge par des auteurs comme Walter Scott, Jean de la Fontaine ou Nerval.

Ouvrage à la fois érudit et grand public grâce à la plume alerte de Michel Pastoureau qui ne sacrifie jamais ni le style ni la précision des faits et des concepts, Une histoire symbolique du Moyen Âge se révèle être un livre qui allie dans le meilleur sens du terme la vulgarisation et l'exigence scientifique.
Car outre des articles solidement étayés par des décennies de recherches et de lectures et souvent passionnants, ce recueil offre aussi une belle leçon sur la façon de faire et de voir l'histoire, mettant notamment en garde contre la tentation qu'il peut y avoir à analyser des faits ou des mentalités à l'aune de nos propres valeurs contemporaines, véritable fléau aujourd'hui d'une grande partie de la vulgarisation, en particulier télévisuelle. Michel Pastoureau le rappelle en ce qui concerne la symbolique médiévale, mais la leçon est valable pour toutes les périodes historiques : « Ainsi non seulement l'étude des symboles nécessite de ne pas projeter tels quels dans le passé, sans précaution aucune, les savoirs qui sont les nôtres aujourd'hui parce qu'ils n'étaient pas ceux des sociétés qui nous ont précédés, mais elle invite également à ne pas établir une frontière trop nette entre le réel et l'imaginaire ».

Cet imaginaire médiéval qui est au centre de ce livre, de chacun de ses articles, vient par ailleurs faire vibrer le nôtre comme il a fait vibrer celui des générations précédentes. Et Michel Pastoureau de finir en nous montrant comment la manière dont cet imaginaire a pu être modelé et remodelé plus tard est aussi un fait historique en citant Marc Bloch : « L'Histoire, ce n'est pas seulement ce qui a été, c'est aussi ce l'on en a fait ».
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Est-ce son patronyme qui a poussé cet érudit, un nom qui évoque les bandes de serfs révoltés parcourant la France entre 1251 et 1320, à se plonger dans l'histoire médiévale ?
Toujours est-il que chacun de ses ouvrages me plonge dans un plaisir sans égal. Voici un recueil de textes très accessibles qui décryptent à nos yeux aujourd'hui si dénués de références culturelles les significations des symboles du Moyen-Âge.
Comment l'homme de ces temps reculés – que souvent nous considérons comme obscurs – « voyait » les couleurs, comprenait les allusions, résolvait certains jeux de mots, saisissait les allégories, « lisait » les armoiries ou les choisissait …même sans être noble. Comment cette symbolique a perduré dans la culture occidentale. Une science qui n'a pas grand-chose à voir avec la pseudo-littérature s'appuyant sur le décryptage des symboles (A. Perez-Reverte, Dan Brown …).

Au Moyen-Âge, le symbole commence souvent par un jeu de mots – fondé sur le latin, naturellement. Si le pommier est l'arbre du mal, c'est parce que son nom latin est « malus ». le nom d'une personne dit sa vérité, retrace son histoire, prédit son avenir. Véronique – vera icôna – est celle qui a recueilli l'image de la face du Christ … une légende hagiographique naît ainsi. L'image fait partie de la réalité, est une réalité au Moyen-Âge. le symbolisme occidental a donc un triple héritage : la Bible, la culture gréco-romaine, le monde celto-germanique et scandinave.
Naturellement, Michel Pastoureau passe en revue l'iconographie animalière : le roi lion et son contraire le léopard, pourquoi la représentation d'un animal de face est presque toujours péjorative, l'ours qui perd sa place prépondérante grâce à l'influence de l'église qui le diabolise, le dompte et le ridiculise. le sanglier, le cerf …
Les végétaux ont aussi leur symbolisme : certains arbres sont bons comme le tilleul, d'autres mauvais comme l'if ou le noyer. La fleur de lis que l'on trouve déjà sur des cylindres mésopotamiens, les bas-reliefs égyptiens, les poteries mycéniennes, les monnaies gauloises, les étoffes sassanides, les vêtements amérindiens, les armoiries japonaises, avec une symbolique différente selon les cultures : pureté, virginité, fertilité, insigne de pouvoir et de souveraineté. Avec ses trois pétales : Foi, Sapience et Chevalerie, trois vertus envoyées à Clovis lors de sa conversion.
Ensuite vînt la Réforme et le triomphe du noir et blanc, le succès de la gravure. Mais le chapitre le plus étonnant concerne la couleur rousse : couleur des démons, du goupil, donc de l'hypocrisie, du mensonge et de la trahison. Judas est roux à partir de la seconde partie du IXème siècle, en particulier dans les pays rhénans à la suite d'un jeu de mots « l'Iscariote » ou, en allemand : « Ist gar rot ». Comme Caïn, Esaü, Saül, Caïphe, Ganelon, Mordret (dans la légende arthurienne), comme les hérétiques, les cagots, les lépreux, les Juifs, les suicidés, les mendiants, les suicidés, les vagabonds, tous les déclassés. Une seule exception à cette règle : David !

D'autres découvertes : l'évolution du jeu d'échecs, la technique de conception des armoiries et des drapeaux, la lecture des cimiers, le choix des prénoms, le bestiaire de Jean de la Fontaine, une lecture du poème De Nerval « El Desdichado » au regard du Codex Manesse, manuscrit allemand aux merveilleuses enluminures (...Le prince d'Aquitaine à la Tour abolie ...).
Comme toujours, la lecture de Michel Pastoureau passionne et apprend à « lire » les représentations médiévales en découvrant les sens cachés parfois surprenants.

Enfin, je peux répondre à la première question posée : ce n'est pas son nom qui a provoqué l'intérêt de l'auteur pour le Moyen-Âge mais le film de Richard Thorpe "Ivanhoe" et je lui réponds par là-même à la question qu'il pose à la fin de son livre : oui, j'ai lu la "fiction" de Walter Scott dans une édition originale il y a cinq ans, et j'ai beaucoup aimé. Savoir que le film qui en a été tiré est conforme à ce que fut l'époque me réjouit !
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Un ouvrage passionnant et très dense, qui explore la symbolique en plusieurs thèmes : animal, végétal, couleurs, héraldique, jeux...
Au fil de la lecture des différents chapitres, outre le fait d'apprendre des détails étonnants : sur la perception et le traitement des couleurs, ou à propos des personnages-archétypes des contes et des fables. Michel Pastoureau donne des clés pour une compréhension nouvelle non seulement d'une époque que nous ne comprenons pas, ou très mal, mais aussi de ce qui s'est transmis jusqu'à nous, au gré des transformations et des interprétations naïves ou simplistes. Car l'histoire est une matière vivante.
Très envie de continuer ma lecture de cet auteur, trop longtemps différée.
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Michel Pastoureau nous fait remonter le temps pour atterrir au Moyen-âge. Ce n'est aborder de manière habituelle, ou en tout cas, je n'en ai pas l'habitude ; c'est une autre manière de raconter bien plus immersif faisant intervenir un soupçon de passion. Michel Pastoureau ratisse large et aborde des thèmes nombreux, détaillés et rarement décrie aux novices et simples curieux avec un tel niveau de détails.

Il développe par exemple quelques métiers (charbonnier, bûcheron, tanneur, teinturier ...) avec leur valeurs, leur fonctionnement et ce qu'ils incarnent dans la société et le quotidien de l'époque. La foule de détails sur ce simple sujet (matériaux utilisés, lieux de production, dates et évolution, etc.) est fascinant. Je ne vous parle pas des couleurs et du dossier que nous livre Michel Pastoureau avec les évolutions techniques, scientifiques et théologiques de celle-ci et des détails qui fourmillent à chaque page. Ces exemples des métiers et des couleurs sont quelques sujets du livre mais tous sont passionnant.

L'auteur a réussi à écrire un livre d'histoire vraiment exceptionnel. C'est bien sur par la qualité de son travail (le nombres d'annotations et de références bibliographiques élevé justifiant quand même qu'il a bûcher son sujet) mais c'est aussi par le ton qu'il emploie. Il n'est jamais hautin envers d'autres domaines (au contraire. Alors que son domaine de prédilection, l'héraldique, a souvent été moqué), explique toujours en détails et ainsi vulgarise des sujets pointus.

Je me souviens d'une note expliquant les pièces des boucliers du XI eme siècle (formes, héraldique, pièces…). Je ne sais pas pourquoi mais j'ai été fasciné de connaître ces détails dans mon bus en sortant de mon travail. Sur bien des sujets, il se permet de faire des écarts et exprime en quelques mots un avis sur des études antérieurs manquant de rigueurs, ou bien à l'inverse, regrette que des études n'ont pas déjà été effectuées sur tel sujet (par exemple, emploi et mise en scène des couleurs dans les églises). Ces phrases subjectives amènent un ton honnête au livre. Elles ferait presque avouer à Michel Pastoureau sa déception au vue de l'attrait que porte certains sur le Moyen-Âge (c'est ici mon impression personnel).

Pour finir, je terminerais sur l'architecture du livre. Au début, les gros dossiers sont entamés à propos des animaux, des couleurs, des échecs et leur foules de détails ; alors qu'à la fin du livre, pointe trois petits chapitres de quelques pages chacun ( le bestiaire des fables De La Fontaine, El Desdichado de De Nerval et ivanhoé de Walter Scott ). Il était agréable de les lire. Beaucoup moins lourds à appréhender, ils ne sont pas en reste de détails et d'analyses et le travail de recherche de l'écrivain se fait tout aussi sentir que sur les autres chapitres plus conséquents. Ces « résonances » clôt formidablement bien le livre avec quelques sentiments personnels de Michel Pastoureau.

« Histoire symbolique du Moyen Âge occidental » est un très bon ouvrage à qui souhaite creuser cet époques pleines d'idées reçues. Il faut porter un minimum d'intérêt a cet période, tout de même. le livre donne un autre point de vue sur la société et les échelles de valeurs de l'époque. L'auteur n'oublie pas d'appliquer aussi un regard bienveillant que ce soit au lecteur ou à l'Homme du Moyen-Âge. Novice curieux , je sais que j'ai terminé un livre sur l'époque médiévale mais ce livre a réussi à vouloir m'en faire lire d'autre.
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C'est en écoutant la radio que j'ai découvert Michel Pastoureau.

Lors d'un voyage en France, je me suis procuré son ouvrage "histoire symbolique du Moyen-Âge occidental" et que je l'ai littéralement dévoré.

Composé de petits articles sur différents thèmes, ce livre est introduit par un mot de l'auteur dans lequel il précise que le contenu est une compilation de ses textes. J'ai donc une sorte de "best of" entre les mains, un best of assez épais, illustré (un petit cahier en couleurs au milieu de l'ouvrage montre des armoiries, des écus de chevaliers) et commenté par une partie de notes en fin d'ouvrage, avec références, ouvrages-sources, explications et descriptifs. En soi, on se dit qu'on a là un ouvrage complet, sérieux et solide. Ce n'est pas qu'une première impression!

La lecture est fluide, le texte se déroule et les informations, bien que parfois répétées, sont toutes instructives. On y découvre l'histoire du jeu d'échecs; les motivations qui ont fait que les moines clunisiens s'opposaient aux moines cisterciens quant aux choix des couleurs de bure; on décrypte les cortèges animaux qui, dans les peintures, entrent ou sortent de l'arche de Noé; on y lit les problèmes liés à certaines professions considérées comme impures (bouchers, meuniers, charbonniers, bourreaux,...); on explique pourquoi Judas Iscariote a peu-à-peu vu sa chevelure devenir rousse; on fait un détour jusque dans le jardin de Jean de la Fontaine; on discute des prénoms des chevaliers de la table ronde; et on étudie l'apparition des armoiries familiales, d'abord sur les écus des guerriers, puis sur d'autres supports.

Je découvre quelques historiettes amusantes (Jésus chez le teinturier par exemple), mais je constate aussi que Michel Pastoureau se plaint: il faudrait que des historiens se penchent sur tel ou tel thème, il demande des études de patronymie pour l'Europe entière; des archéologues devraient se pencher sur ceci ou celà... Pour lui, le niveau de connaissances est bas. Certes, il est louable de vouloir en savoir plus, mais est-il obligé de termienr chaque chapitre par une demande dans ce sens?

Je relève un autre point négatif à l'option "best of", c'est la chance de retomber sur un même article dans un autre livre de Pastoureau. Motivé, je me suis offert un autre "best of" du bonhomme et j'ai eu de la chance: un seul chapitre est présent dans les deux livres.

Méfiance donc! Pastoreau a beaucoup publié et certains ouvrages reprennent des textes en changeant le titre de la compilation (il y a par exemple une collection sur les couleurs prises individuellement, "bleu", "rouge", "jaune"... et un livre qui reprend en grande partie ces couleurs primaires).

Cette Histoire symbolique du Moyen-Age est un bon livre et il est suffisant pour approcher les principales idées, comprendre les différences entre des notions proches (symbole/emblême), découvrir la complexité de l'héraldique etc. Je le conseille donc vivement à chacun, car nous sommes tous, dans notre vie quotidienne, menés à voir de l'héraldique (nos panneaux de circulation routière par exemple), nous rencontrons des images et apprécions des couleurs. Pourquoi et comment en sommes-nous arrivés là?
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Citations et extraits (23) Voir plus Ajouter une citation
Plus pauvre encore (que le bûcheron), plus sale, plus chétif et plus inquiétant est le charbonnier. Ne maniant pas le fer mais le feu – le plus grand ennemi du bois -, il est réellement diabolique. Le charbonnier ne se marie pas et n’a pas de postérité. Il ne quitte la forêt que pour s’enfermer dans une autre forêt, afin d’y continuer son œuvre de destruction et de crémation. En toutes régions, les villageois ont peur du charbonnier. Dans les textes littéraires, notamment dans les romans courtois, les auteurs mettent quelquefois en scène un preux chevalier perdu au cœur de la forêt et contraint de demander son chemin à un horrible charbonnier. Pour les lecteurs du XIIe et du XIIIe siècle, cette rencontre constitue celle des extrêmes ; c’est le contraste social le plus fort qui puisse être imaginé. Dans ces textes, le charbonnier est toujours décrit de la même façon : petit, noir, velu, les yeux rouges et enfoncés, la bouche tordue et cruelle ; c’est l’archétype de l’homme situé au plus bas de l’échelle sociale : il est à la fois misérable, animal et démoniaque.

511 - [Points H465, p. 99]
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… à la fin de l’année 1314 (Philippe Le Bel) mourut des suites d’un accident de chasse causé en forêt de Compiègne par un sanglier. Deux ou trois siècles plus tôt, une telle mort aurait été perçue comme héroïque, et même vraiment royale. Mais au début du XIVe siècle, ce n’est plus le cas. Même si elle est due à un porc sauvage, cette mort rappelle l’étrange mort du prince Philippe, fils de Louis VI Le Gros, près de deux cents ans auparavant : dans une rue de Paris, au mois d’octobre 1131, un vulgaire porcus diabolicus, comme l’écrit Suger, s’était jeté dans les pattes du cheval du jeune prince, provoquant une chute mortelle et souillant la dynastie capétienne d’une flétrissure indélébile que même les fleurs de lis virginales des armoiries royales ne pourront jamais tout à fait effacer. (…) Un simple cochon girovague fut cause de la mort de ce rex junior coronatus, et cette mort fut, dans toute la chrétienté, ressentie comme particulièrement honteuse. Rien de tel pour Philippe Le Bel au mois de novembre 1314. Et pourtant, chroniques, libelles et pamphlets ne manquèrent pas de souligner qu’une fois encore la monarchie française était victime d’un porc et que le roi honni payait là toutes ses trahisons et ses turpitudes.

508 - [Points H465, p. 82-83]
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Cependant, l'opposition bois/pierre concerne deux matériaux valorisants et valorisés. Elle n'est pas aussi violente que l'opposition bois/métal qui met en relation un matériaux pur et sanctifié par l'image idéale de la Sainte Croix, et un matériau inquiétant, pervers, presque diabolique. Pour la sensibilité médiévale, le métal - qu'il soit vil ou qu'il soit précieux - est toujours plus ou moins infernal : il a été arraché aux entrailles de la terre puis traité par le feu (lequel est le grand ennemi du bois). C'est un produit des ténèbres et du monde souterrain et c'est le résultat d'une opération de transformation qui a quelque peu à voir avec la magie. Par là même, dans les systèmes de valeurs concernant les métiers, tout oppose le forgeron et le charpentier. Le premier est certes, sur le plan social, un homme puissant et indispensable, mais c'est aussi une sorte de sorcier qui manie le fer et le feu. Le second, au contraire, est un artisan modeste mais respecté, parce qu'il travaille un matériau noble et pur. Ce n'est pas un hasard si de bonne heure la tradition a fait de Jésus un fils de charpentier, alors que les textes canoniques restaient vagues quant au métier exact de Joseph.
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Les armoiries sont apparues dans le courant du XIIe siècle, mais ce n'est qu'à partir des années 1200-1220 que leur usage atteint un réel développement, touchant l'ensemble des classes et catégories sociales (en certaines régions, il existe de bonne heure des armoiries d'artisans ou de paysans), et que le code du blason, désormais stabilisé, entre dans sa phase classique. Au sein de ce code, les couleurs jouent un rôle essentiel. Elles n'existent qu'au nombre de six (blanc, jaune, rouge, bleu, noir et vert) et sont désignées, dans la langue française du blason, par un terme spécifique : argent, or, gueule, azur, sable, sinople.
Dans l'Occident de la fin du Moyen Age, la diffusion matérielle des armoiries est telle que ces couleurs tombent sous le regard en tous lieux et en toutes circonstances. Elles font partie du paysage quotidien, y compris au village car n'importe qu'elle église paroissiale, à partir du milieu du XIIIe siècle, devient un véritable "musée" d'armoiries. Et ces armoiries sont toujours porteuses de couleurs : même lorsqu'elles sont sculptées (sur des clefs de voute ou des pierres tombales) elles sont peintes, car ces couleurs sont un élément indispensables pour les lires et les identifier.

514 - [Points H465 - p. 144-145]
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... (La) valorisation du noir (qui s'accompagne également d'une promotion du gris) se prolonge fort avant dans l'époque moderne et exerce ses effets jusque dans nos pratiques vestimentaires contemporaines. D'une part, en effet, la cour ducale de Bourgogne, qui codifie et catalyse toutes les pratiques protocolaires du Moyen-Age finissant, transmet à la cour d'Espagne cette mode du noir princier ; et, par le relais de la fameuse "étiquette espagnole", c'est ce noir qui envahi les cours européennes du XVIe au XVIIIe siècle. D'autre part, et surtout, l'éthique protestante s'empare de bonne heure de ce noir moralisé par les lois vestimentaires et en fait, jusqu'à l'âge industriel, et même plus avant, le pôle premier de tous les systèmes de la couleur.

516 - [Points H465, p. 178-179]
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Videos de Michel Pastoureau (49) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Michel Pastoureau
Rencontrer Michel Pastoureau, c'est être frappé en premier par son regard amusé et malicieux. L'historien, diplômé de l'école des chartes, est archiviste paléographe, spécialiste de la symbolique des couleurs, des animaux, d'héraldique. Il a reçu de nombreuses aides du CNL, notamment pour son livre « Symboles du moyen-âge : animaux, végétaux, couleurs, objets » en 2012, des aides à la traduction pour ses ouvrages sur les histoires des couleurs « Noir », « Bleu », « Vert », « Rouge », « Jaune », en 2014, 2016, 2018, et en 2020, ainsi qu' une bourse de création relative à l'histoire du nuancier sur les cartographies de couleurs et d'imaginaires. Sa curiosité est sans limite, son raisonnement implacable, le grand entretien avec Michel Pastoureau dans Son Livre, c'est parti.
Michel Pastoureau est professeur à la Sorbonne et à l'école pratique des Hautes Etudes où il est titulaire de la chaire d'Histoire de la symbolique occidentale. Il a reçu de nombreux prix littéraires, dont le Prix Medicis essai en 2010 pour son ouvrage « La couleur de nos souvenirs » paru aux éditions du Seuil, mais aussi, le Prix Broquette-Gonin (histoire) de l'Académie française pour l'ouvrage La vie quotidienne en France et en Angleterre au temps des chevaliers de la Table ronde (1977).
Passionnant !
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