Il y a énormément de choses diverses dans ce recueil que j'ai vraiment beaucoup aimé. le point commun a tous ces textes est indéniablement la poésie. La poésie, c'est dire la forme de littérature la plus proche des autres arts, la peinture et la sculpture en particulier. Un poème (comme un tableau ou une sculpture) vous met pendant quelques minutes devant un potentiel d'émotion ; si vous avez le potentiel attractif correspondant, l'émotion est très forte ; s'il est négatif, vous mal à l'aise ou au mieux, l'indifférence l'emporte.
Dans Babel, je n'ai pas accroché aux références explicites à la drogue (même si son influence est probablement souvent présente ailleurs), ni aux textes religieux ou mystiques (sauf le poème Pâques - il n'y a pas de majuscules dans ce livre) et je n'ai pas non plus saisi les histoires de néo boy. Au passage, la traduction d'une telle poésie est un véritable tour de force ; même en parlant correctement anglais, je ne suis pas sûre de ressentir les mêmes choses devant le texte original.
Les textes sur Rimbaud sont vraiment intéressants et Patti Smith se pose en héritière, non pas parce qu'elle "fait" du Rimbaud, mais parce que, comme Rimbaud, ses formes poétiques dynamitent les conventions.
Les expériences d'écriture automatique restent magiques avec des moments lumineux et des passages abscons, ou mornes comme des temps de repos dans l'écriture. Un autre effet est cette impression de créer des pièces de puzzle qui auraient la propriété de s'assembler de différentes manières pour donner un ensemble chaque fois différent. Le jeu serait donc d'essayer de mélanger les vers automatiques de Patti Smith pour créer de nouveaux poèmes.
Sans vouloir tout citer, je retiens les deux portraits de Edie Sedgwick et Georgia O'Keeffe et la dernière partie Babel qui donne son nom au recueil, avec le long poème en prose s'appelant lui aussi Babel et les poèmes Soleils et le pré babel.
La poésie de Patti Smith est une mine d'or (tout comme la nôtre si on se décidait à l'exprimer !) dans laquelle on peut piocher dans le désordre en tombant bien, en tombant mal.
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dans le désert de l'attente/ tente
per/sonne n'obtient rien
je te supplie de me laisser partir
ne m'ensevelis pas même alors que ton royaume
va de temple en voyage
ne me laisse pas de place
dans ta petite barque
pour passer de vie en vie en vie
contente-toi de cette lettre
et d'une poignée de plumes
ne viens pas me sauver
j'aspire à un autre destin
les fantômes de ton amour
se dessèchent
ou se meurent
ou pire
ceux qui ont souffert comprennent la souffrance et donc tendent la main. la tempête qui déchire blessé rend aussi fertile. bénie soit l'herbe et les herbes et le buisson d'épines et de lumière.
Oh pleure pas. allez debout. viens danser sur l'herbe
(...)
viens au birdland viens parader
viens rocker viens rouler
viens faire sauter tes baleines
désodoriser la nuit.
dans le désert de l'attente/ tente
personne ne l'obtient
l'essence l'ordure absolue
et les vignes
aiguës de l'existence
nous passons beaucoup de temps à vivre en imagination et pour l'inadapté c'est la lumière, l'ensorcelant alternative. l'inadapté est celui qui est véridique et confus et plein de sang éclatant.
A l'occasion de la sortie de "Arthur Rimbaud : Une saison en enfer", aux éditions Gallimard, Augustin Trapenard a rencontré Patti Smith à Chuffilly-Roche, dans la maison où Arthur Rimbaud a écrit "Une saison en enfer". L'artiste américaine se confie à l'animateur sur son lien avec le poète, ce qu'il lui a appris, ce qu'il représente pour elle, encore aujourd'hui et depuis son adolescence.
Retrouvez l'intégralité de l'interview ci-dessous :
https://www.france.tv/france-5/la-grande-librairie/