Mélange de personnages hétéroclites prisonniers d'un car en difficulté. Les esprits s'échauffent et chacun va un peu au bout de lui même compte tenu des circonstances. Chacun révèle ses failles à son insu. Les masques tombent et derrière le personnage que chacun joue apparaissent les pulsions et les aspirations secrètes.
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Quel plaisir de lire un livre de Steinbeck !
Au détour d'un simple voyage en car, Steinbeck peint des personnages qu'il étoffe peu à peu de couleurs et de formes. Tous plus différents les uns que les autres, on s'amuse à les voir se côtoyer, se découvrir au fil des discussions, des évènements. Avec une franchise et une sensibilité accrues qui lui sont propres, Steinbeck nous offre ici de rafraichissants éclats de vie. On rit de moments parfois cocasses, on compatit avec les personnages, on est surtout touché par leurs conditions de vies d'un comique parfois dramatique. Chacun a droit à son développement, à la révélation de son passé, à la description de ses rêves et de ses espoirs enfouis. C'est toute leur humanité qui se révèle et c'est ce qui les rend si attachants. Ils paraissent si vrais qu'ils semblent évoluer tout seuls, comme si Steinbeck lui-même les avait découvert en les écrivant. C'est l'impression que j'ai eue et elle est très agréable. L'écriture est ainsi fluide, maniée avec une parfaite simplicité. le texte est si vivant que l'on se croirait parfois dans un film.
Quelques mots lui suffisent notamment pour mettre en place un environnement estival, avec délicatesse et charme, menant à une ambiance douce et en même temps propice à l'agacement. de fait, au fur et à mesure, le côtoiement n'est plus possible, chacun s'énerve, se bouscule, dit tout haut ce qu'il pensait jusque là tout bas. Les complications s'enchaînent : le bus tombe en panne, s'arrête, Camille dévoile des tentations cachées chez certains, de la jalousie chez d'autres, la réalité du couple Pritchard est mise à nu, etc. Chaque situation, chaque dialogue complexifie les personnages, les humanise. La fin, plus chaotique dans sa construction, est le reflet de sentiments, d'individualités qui se croisent et se décroisent.
C'est avec regret que j'ai laissé ces voyageurs partir pour se séparer et mener de nouveau leurs vies d'avant. Steinbeck leur aura au moins donné l'occasion de se libérer et de se révéler, aux autres et à nous-mêmes, le temps de quelques heures seulement. C'est toute la condition humaine, dans ses ambiguïtés et dans sa richesse, qui nous est ainsi décrite, dans un moment enchanteur que je vous invite grandement à découvrir.
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Je suis consterné. C'est donc ça Steinbeck ?, et bien quelle déception. Non vraiment, au bout de 70 pages de supplice, j'abandonne. Pour moi, aucun intérêt, le vide sidéral. Il ne faut pas se forcer quand même ?
Si l'on aime l'écriture américaine, on passera un moment 100 fois plus agréable avec Famille modèle de Puchner.
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Ce roman est un film. Immédiatement le lecteur est propulsé dans le décor, un décor qui ressemble fort à la couverture de l'édition Folio.
Ça commence à un carrefour à soixante-deux kilomètres au sud de San Ysidro, en Californie dans une station service qui fait aussi bar et station de bus.
Suite à une panne, une dizaine de passagers a été obligé de passer la nuit dans cet établissement tenu par Juan Chicoy et son épouse Alice.
Âgé d'une cinquantaine d'années, Juan est bel homme et c'est lui qui conduit le vieux bus à quatre cylindres jusqu'à San Juan de la Cruz. Alice dirige le restaurant et devient de plus en plus nerveuse à mesure qu'elle vieillit, anxieuse que son mari la quitte un jour.
Au matin le bus et ses passagers repartent mais la météo va compliquer le voyage.
Le talent de Steinbeck saute aux yeux dès les premières pages de cette chronique d'un bus parcourant les routes secondaires de Californie, transportant les perdus et les solitaires, les bons et les gourmands, les stupides et les intrigants, les beaux et les méchants, loin de leurs rêves brisés et, éventuellement, vers la promesse de l'avenir.
En 260 pages l'auteur décortique chaque personnage. Chaque ligne de dialogue, chaque pensée et chaque action est représentative des troubles émotionnels et des angoisses sociales de ce groupe, de leurs besoins et de leurs rêves, tous bouillonnant alors qu'ils sont forcés d'interagir dans une situation inhabituelle.
Il ne se passe pas grand chose dans cette peinture caustique (mais tout de même très tendre) de la société américaine d'après guerre, et pourtant… c'est encore une fois magistral. Vous ai-je déjà dit que j'aimais Steinbeck ?
Traduit par Marcel Duhamel et Renée Vavasseur
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