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Huy Duong Phan (Traducteur)
EAN : 9782848050911
320 pages
Sabine Wespieser (04/11/2010)
3.63/5   55 notes
Résumé :
Paru pour la première fois en France en 1992 aux Éditions des Femmes, Roman sans titre est aujourd'hui réédité chez Sabine Wespieser éditeur où sont publiés depuis 2006 les livres de la grande romancière vietnamienne.
Premier des romans de Duong Thu Huong à avoir été interdit de publication au Vietnam, il met en scène la dérive hallucinée d'un combattant au cour de la guerre contre les Américains. Quân, capitaine d'une unité de combat, est envoyé dans la loi... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
Ce roman a pour toile de fond la guerre américaine, comme ils l'appellent au Viêt Nam. Après avoir refermé @Le sympathisant qui débutait avec la prise de Saïgon, j'ai remonté le temps et me suis enfoncée dans la jungle avec les combattants du peuple. Ces hommes jeunes sont partis au front remplis d'idéaux, aveuglés par les promesses du communisme d'en finir avec l'oppression du colonialisme et de l'impérialisme. Je rassure celles et ceux qui, comme moi, n'aiment pas les récits de guerre. Les batailles ici sont évoquées, mais jamais décrites. le roman nous dépeint plutôt la vie de ces jeunes paysans minés par les maladies, la dénutrition et la folie, véritable chair à canon, enrôlés dans une guerre sans fin. L'autrice sait bien de quoi elle parle puisqu'elle-même était sur le front avec les brigades communistes. On comprend bien aussi pourquoi ses romans ont fait d'elle une dissidente et une paria dans son pays puisqu'elle y dénonce l'hypocrisie de la guerre et la corruption, les enfants envoyés à l'abattoir, les vies gâchées de ceux qui restent. J'ai beaucoup aimé cette lecture qui donne à voir la grande Histoire par ceux qui l'ont vécue et pas sous le prisme occidental. L'autrice règle ses comptes -- "Tu peux m'envoyer au tribunal militaire. Mais ça n'y changera rien, j'ai malheureusement appris la vérité, je ne pourrai plus voir les choses autrement..." fait-elle dire à l'un de ses personnages à la fin du roman--. Elle dénonce la désillusion, l'immense tromperie de cette guerre qui, sous le prétexte de chasser un envahisseur a installé un persécuteur au pouvoir.
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Autant vous l'avouez tout de suite, je n'aurai sûrement jamais acheté ce livre si on ne me l'avait pas offert. Quelle surprise ! Cela aurait été une vraie bêtise de passer à côté. Je n'avais jamais lu de livre sur la guerre au Vietnam. Au début, j'étais inquiète de m'y perdre car bien qu'aimant l'Histoire et ayant une bonne connaissance de certains conflits, celui-ci n'en faisait pas partie. Pourtant, ce ne fut pas un problème du tout. Ici, on ne raconte pas le conflit opposant les vietnamiens aux américains, on raconte ce qui se passait en dehors des champs de batailles. Bien entendu, certains affrontements sont décrits mais il y en a très peu et à chaque fois ceux-ci sont résumés en très peu de lignes car la préoccupation de l'auteure ne s'attardait pas là. La parole n'est pas donnée aux américains, en fait on ne se préoccupe pas d'eux car cela n'a pas d'intérêt dans le roman. On se concentre sur les soldats vietnamiens, leurs conditions de vie, leurs ressentis. Leur quotidien difficile et pesant est mis en évidence et on se rend d'ailleurs compte que ce n'est pas le présent qui compte pour eux mais le futur. Comme si demain s'envisageait comme un rêve, il ne pense qu'à l'avenir, à la fin de cette guerre.
C'est Quan, un soldat vietnamien élevé au rang de capitaine qui raconte l'histoire, sa propre histoire, ce qui importe le concerne. On fait des allées-venues entre le présent, le passé et les souvenirs de Quan ce qui donne encore plus de profondeur à l'histoire. J'ai réellement appréciée cela. C'est un jeune homme comme les autres, il n'a que 28 ans et pourtant il semble déjà si exposé à cette douleur que provoque la guerre. Ce n'est pas un héros, c'est un homme qui essaye d'être aussi efficace qu'il le peut. On le suit posément. Il est assez juste et a un sang-froid hors pair. J'ai eu de la peine pour lui, beaucoup. Sa vie me semblait si injuste. C'est un soldat me direz-vous, la guerre fait des ravages quel que soit les camps et une grande partie de la population perd des proches à la suite de celle-ci. C'est évident mais la vie de Quan était difficile déjà bien auparavant mais il ne s'en plaint jamais dans le roman. Il pense énormément et se pose un nombre conséquent de questions sur ce qu'il aurait pu faire pour éviter une chose ou une autre. Son passé le rattrape souvent mais je crois que c'est ce qui l'aide à garder son mental. Il a des valeurs et des principes qu'il applique et cela même s'il doit en souffrir. Par moment, j'ai d'ailleurs pensé que tôt ou tard, il risquerait de craquer ; cela a d'ailleurs bien failli arriver (pensez à Hoa, vous comprendrez) mais Quan est fort. C'est un personnage vraiment impressionnant.
Ensuite, de manière plus ou moins implicite, l'auteure glissait, une notion très importante. En effet, on entrevoyait au fur et à mesure du livre l'enrôlement que subissait les soldats dès leur plus jeune âge pour s'engager à combattre ; soldats à qui on faisait voir la guerre comme la défense de leurs idéaux communistes. La guerre pour la patrie et pour faire reconnaître le Vietnam à sa juste valeur. La guerre pour le peuple. On retrouve cet embrigadement quel que soit les conflits et son évocation de plus en plus sincère dans le livre était époustouflante. Certaines scènes le souligne très crûment comme celle de l'échange entre les deux bourgeois dans le train où on entrevoit vraiment la domination des plus puissants sur le reste de la population. Ce roman est interdit de parution au Vietnam, tout comme tous les autres de Duong Thu Huong pour cette raison, c'est certain. En effet, l'auteure raconte une histoire mais aucun cas, elle ne vante les mérites du gouvernement vietnamien dans cette guerre bien au contraire, elle met en avant ce que les gens ont tendance à enfouir. Je salue son acte.
Enfin autre point captivant du roman, il nous adonne à l'imagination en nous peignant une nature luxuriante mais typique des pays d'Asie du Sud-Est. Tantôt belle et apaisante, tantôt hostile, on s'abandonne à des paysages inconnus qui sont décrits avec une grande précision. C'est une palette de couleur infinie qui se présente à nous bien que celle-ci soit quelque fois dure à regarder. C'est effrayant de voir comme la beauté des espaces verts, si vivants, s'opposent à la barbarie de la guerre. Des cadavres couchés au milieu du paradis.
Sur ces mots, je vous incite donc sincèrement à lire ce livre d'une grande justesse.
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L'histoire en 2 phrases courtes : Dans ce roman nous suivons un jeune officier vietnamien qui après 10 ans de service prend quelques jours de permission…C'est son voyage de retour au pays, et ensuite son retour sur le terrain des conflits, qui nous est conté ici, un peu comme une longue suite d'épreuves initiatiques qui le mèneront vers lui-même.

Résumé : Sur la guerre du Vietnam nous connaissions (si nous avons plus de 50 ans) ce que la presse de l'époque nous en racontait.Bien souvent vu du côté américain. Il y eut ensuite une série de films américains, sorte de travail de purification mené par une société mal à l'aise avec une guerre longue, effroyable, et dramatique , menée sans scrupule contre un peuple si peu menaçant . Une guerre pour justifier la fabrication d'armes… La guerre du Vietnam fut une boucherie. Personne ne l'ignore plus. Mais rarement on a vécu ce triste volet de l'Histoire raconté par un Vietnamien au coeur des hostilités : la peur, la famine, la dévastation des paysages, la campagne de propagande communiste,le sacrifice de la jeunesse sur l'autel d'une politique imbécile, … C'est tout cela que nous conte Duong Thu Huong dans son « Roman sans titre ». Quân a une vingtaine d'années. Il est officier. Il est parti à la guerre à 18 ans , armé d'un idéal aveuglant. Il en a maintenant 28 et a passé toute sa jeunesse sur le front. Il a quasiment tout perdu : sa mère, son frère, sa fiancée, ses amis, … et ses illusions. Lors d'une permission il revient voir les siens dans son village natal. Mais rien que d'arriver jusque chez lui s'avère aussi difficile que de combattre l'ennemi : bombardements intempestifs, traversée de régions désertiques sous un soleil de plomb, passage dans des forêts immenses et inextricables, …Sur son chemin il croise beaucoup de très jeunes enfants (les plus grands ont été enrôlés), des femmes et des vieillards. Ils souffrent tous depuis tant d'années de cette guerre. Ils seront peu nombreux à s'en sortir sans blessure ni stigmate.

Mon avis: C'est un roman très dur, très masculin,très triste .. Assez démoralisant. Cela se déroule durant la guerre du Vietnam. L'originalité c'est que cette histoire est celle de la guerre racontée par un Vietnamien, combattant vietqong. Mais cette histoire est, en fin de compte, très attachante. Au moment de recevoir ce livre j'ai eu peur de son contenu. Ce n'est pas le genre de littérature qui m'accroche habituellement. Mais l'histoire est réellement prenante et le héros très attachant. C'est bien écrit.Je n'avais, auparavant, pas entendu parler de ce livre nulle part (ni blog, ni presse, ni étal de librairie) et c'est dommage. Il faut lui faire plus de publicité. C'est un livre très instructif en bien des aspects et surtout les dégâts provoqués par la poursuite d'idéologies imbéciles, la vanité de la guerre et le cynisme de ses instigateurs.
Un petit bémol toutefois : c'eut été bien d'avoir glissé dans le livre une carte pour suivre le voyage de Quän, et un rappel en quelques dates de l'histoire de cette guerre dont , en fin de compte, on connaît peu de choses.


Pour convaincre de lire ce livre ?

La guerre du Vietnam racontée par un Vietnamien. Roman philosophique sur la poursuite d'idéaux ravageurs et imbéciles.Un roman sans titre, très actuel et amorçant une réflexion profonde sur la guerre, ses dirigeants et … ses innombrables victimes !

Trois bonnes raisons de lire ce livre ?

- le sujet
- le style
- personnage central attachant
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Ce roman, que j'avais choisi avant de me rendre au Vietnam, n'est pas une lecture facile. Mais j'ai admiré , encore une fois, l'écriture de Duong Thu Huong, à la fois extrêmement réaliste et toujours poétique. J'avais déjà aimé deux autres de ses livres.La guerre au Vietnam a longtemps fait partie du quotidien de ses habitants, il ne faut pas l'oublier même s'ils semblent aujourd'hui résolument optimistes quand à l'avenir!
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C'est justement parce que je l'ai beaucoup aimé que j'avais et j'ai encore aujourd'hui beaucoup de difficultés à traduire par écrit cette lumière qui émane de ce livre alors que le contexte y est si noir.

En effet l'auteure a choisi de suivre le cheminement d'un combattant,un « homme de guerre » Quân, pendant la guerre du Vietnam , de sa quête personnelle mêlée à ses obligations militaires. Elle choisit à travers ses yeux et ceux de ses camarades (qui sont parfois comme lui issus du même village et amis d'enfance), d'évoquer avec une grande finesse d'écriture voire une grande douceur de l'écrit proche de la poésie parfois , ce minuscule espoir très lointain d'un meilleur avenir pour son pays. Cette espérance largement entachée par la mise en lumière des destructions morales et matérielles de la guerre au Vietnam « un rêve paisible suivi d'un cauchemar sanglant », du cynisme des autorités «  un idéal, voilà tout simplement le pain béni qu'il faut à nos jeunes adolescents . On n'a besoin de rien d'autre pour les transformer en moines, en soldats, ou en policiers », de la vanité des uns qui envoient les autres mourir pour une patrie exsangue dans une guerre qui jamais ne cesse. « du fond de l'ignorance, l'ambition l'emportait . Mon père voulait réserver sa place au futur banquet de la victoire »  « - Autrefois , sur dix individus, il y en avait au moins sept d'honnêtes, de civilisés. Même impliqués dans les pires manigances, on craignait la honte.Maintenant , ce sont des ignorants qui n'ont jamais appris le moindre précepte moral qui tiennent les rênes. Ils apprennent le marxisme-léninisme, pillent potagers et rizières avec la bénédiction de Marx et couchent avec les femmes des autres au nom de la lutte des classes ».

Le périple de Quân est longtemps resté dans mon esprit tant il est intéressant à découvrir pas à pas , lignes après lignes mais aussi grâce à Duong Thu Huong qui s'est si bien glissée dans sa peau à tous les stades de son évolution morale et physique , (...)

La suite par ici :

http://melimelopetitsbonheurs.over-blog.com/article-roman-sans-titre-mais-de-grande-qualite-de-duong-thu-huong-110612500.html
Lien : http://melimelopetitsbonheur..
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Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
Le banquet ne s'acheva que vers minuit. Je me glissai alors vers les collines pour rendre visite à Hoa. Elle m'attendait, assise dans la cour, ses longs cheveux couleur de nuit ruisselant dans son dos. Je lui donnai un peu d'argent pour l'accouchement. Elle pleurait.
- Ne pleure plus. Moi aussi j'ai pleuré, j'ai vu pleurer. Rien que des larmes de soldats habitués au feu et à la mort. Je voudrais que tu cesses de pleurer, que je puisse éprouver une seconde de paix.
Mais, au lieu de se calmer, elle sanglota de plus belle comme si on l'avait battue à tort. Je m'immobilisai, furieux. Qui comprendrait jamais les femmes ? Puis, calmement :
- Écoute, cela ne sert à rien.
Elle bondit, s'enfuit dans la hutte et s'affaissa sur le lit.
- Hoa, écoute.
Je me précipitai auprès d'elle. Mon visage heurta de plein fouet un pilier, juste sur l'arrête du nez. Je vis des milliers d'étincelles s'éparpiller en cercles multicolores sur fond de nuit. Je pris mon visage dans mes mains. Une langue de glace perçait mon crâne. Du fond de ma douleur, une vague de rage me submergea. Je reconnu avec effroi l'ivresse des combats, la haine, une envie irrépressible de tuer, anéantir. C'était comme un brasier traversant mon corps, mon cerveau. Je saisi le pilier central pour le briser. Soudain, j'imaginai la hutte s'effondrer, une femme enceinte errant parmi les ruines, le lendemain, quand je serais parti. Je m'arrêtai, terrifié, incapable de réprimer le désir de destruction qui me ravageait. Mes mains se tordaient, avides de carnage. Briser une nuque, plonger une baïonnette à travers un corps, lâcher une rafale de mitraillette sur quelqu'un, sur tout ce qui me rappelait cette saloperie de vie, tout ce que j'avais perdu, toutes les forces invisibles qui avaient saccagé, piétiné mon existence en lambeaux.
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- En voilà une contradiction ! Vous voulez en même temps jouir du confort de la civilisation et ne pas avoir à la construire !
- Édifier une civilisation est une chose difficile. Mais assurer une existence civilisée à un petit nombre, rien de plus aisé. Je vous l'ai déjà dit, la civilisation, c'est un chemin ardu et long, où l'on doit de surcroît partager le pouvoir. Pour un peuple aussi primaire que le nôtre, une religion adéquate pour le guider par les plus courts chemins vers la gloire, voilà qui est cent fois plus efficace que de leur instiller des notions de civilisation …
Le grand myope plissa les paupières :
- Mais c'est totalement cynique, ce que vous dites !
Le petit gros, hilare :
- Est-il une vérité qui ne soit pas cynique ?
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- Autrefois, sur dix individus, il y en avait au moins sept d'honnêtes, de civilisés. Même impliqué dans les pires manigances, on craignait la honte. Maintenant, ce sont des ignorants qui n'ont jamais appris le moindre précepte moral qui tiennent les rênes. Ils apprennent le marxisme-léninisme, pillent potagers et rizières avec la bénédiction de Marx et couchent avec les femmes des autres au nom de la lutte des classes.
- Allons, cesse de chercher des histoires. Ce sont eux qui détiennent le pouvoir. On n'y peut rien...
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Vous, moi, et bien d'autres encore, nous avons tout abandonné pour un idéal. C'était la conscience de nos dix-sept ans. La cinquantaine passée, ce ne sont plus que des souvenirs moisis. Cet idéal, eh bien, c'est simplement la nourriture sacrée distribuée à la jeunesse. Pour leur faire endosser la soutane, l'uniforme ou la casquette de policier, c'est tout ce dont on a besoin.
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Le festin des bêtes avait alors commencé. Les rapaces d'abord, puis les corbeaux. Ensuite, les fourmis, les insectes et les vers. Enfin, la pluie. Elle avait dissous ce qui restait du cadavre en un engrais liquide. Nourris de cette chair qui avait été la fierté et le chef d’œuvre de la création, les colocasias avaient vite grandi.
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Videos de Duong Thu Huong (7) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Duong Thu Huong
Duong Thu Huong, Les collines d'eucalyptus .Lorsque Duong Thu Huong, romancière vietnamienne, parle de son livre Les collines d'eucalyptus ( éditions Sabine Wespieser) et du destin d'un adolescent fugueur, c'est tout le Viet nam qu'elle évoque. Et l'ancienne combattante anti-colonialiste, aujourd'hui dissidente et exilée, ne mâche pas ses mots. Entretien Dominique Conil, video de Nicolas Serve.
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