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Françoise Flamant (Traducteur)
EAN : 9782073014160
128 pages
Gallimard (07/09/2023)
3.85/5   50 notes
Résumé :
« C'était le temps de la jeunesse, de la gaieté et du bonheur, le temps des espoirs infinis et des forces invincibles, et si ce fut un rêve, alors ce fut un rêve merveilleux.»

Dans la campagne russe, au coeur de l'été, on passe le temps en bonne société en jouant aux cartes, en se promenant aux bords du lac, en buvant du thé fumant ou en allant au bal. C'est là que Vladimir Serguéïtch Astakhov, arrivé de Saint-Pétersbourg pour inspecter le village do... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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«Quel art vous avez! Quel mélange d'attendrissement, d'ironie, d'observation et de couleur! Et comme tout cela est combiné!»
Flaubert avait raison. Il y a une très belle finesse dans l'écriture de Tourgueniev, c'est à la fois âcre et doux, tendre et ironique, et plus j'y pense plus je suis séduite par cette «sensibilité profonde et cachée» dont parle le créateur d'Emma, et plus j'ai envie de monter ma note - je crois bien que finalement ce sera 4,5 et pas 4 comme je pensais en refermant le livre. Merci mh17, de m'avoir donné l'envie de faire cette lecture.

Pour un homme instruit, il n'y a que Saint Pétersbourg qui vaille, c'est ce que pense Vladimir Serguéïtch, alors les eaux tranquilles de son domaine de Sassovo, il n'a pas l'intention d'y rester plus que le temps nécessaire à l'inspection de l'exploitation. Mais son voisin Ipatov l'invite à dîner, il hésite, et puis finalement, bon, pourquoi pas?
Des «eaux tranquilles», vraiment? C'est Ipatov qui caractérise ainsi les lieux:
«Nous ne sommes pas ici dans un trou perdu, si j'ose ainsi m'exprimer, mais dans des eaux tranquilles, oui, vraiment des eaux tranquilles, dans une retraite protégée, c'est bien cela!».
Le moins qu'on puisse dire, c'est que l'auteur ne semble pas partager l'opinion de son personnage et que sa nouvelle n'a de cesse de lui apporter un cinglant démenti.
Mais Vladimir Serguéïtch saura-t-il saisir la chance qui lui est ici offerte, saura-t-il s'abandonner à l'attirance qu'exercent sur lui aussi bien la grave et farouche beauté de Marie Pavlona que l'énergie joyeuse et si charmante de Nadiejda Alekséïevna? C'est que Vladimir Serguéïtch est un homme raisonnable, qui se méfie de tout ce qui sort de l'ordinaire, qui certes veut faire «un mariage d'inclination» mais qui tient à ce qu'il soit «en même temps avantageux».
Et puis au fond y a-t-il moyen, là comme ailleurs, comme partout, d'échapper à la vieille malédiction: «il n'y a pas d'amour heureux», y a-t-il moyen d'échapper à l'amertume de vivre sa vie pour rien, bêtement, médiocrement?
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Cette nouvelle a été publiée en 1853 on la retrouve sous les titres : Coin tranquille ou encore Antchar.
Tourgueniev évoque la vie en société, dans les salons nous ne sommes ni à Saint-Pétersbourg, ni à Moscou mais un été dans la campagne russe.
Tourgueniev nous décrit des scènes de vie d'une de plume légère avec une pointe d'humour à peine perceptible et nous sommes embarqués. Dans les salons on babille, on joue aux cartes on prend le thé, on chante et on déclame de la poésie, on danse, et, dans une campagne fraîche et inondée de lumière on se promène au bord de l'étang ou la nuit au clair de lune.
Notre héros Vladimir Serguéïtch, célibataire, courtise. C'est un homme charmant mais hésitant et un tantinet velléitaire et indécis dans ses entreprises amoureuses. Pourtant les coquettes virevoltent ostensiblement ou plus timidement.
L'atmosphère est romantique, poétique, parfois gaie, insouciante alors qu'un drame se prépare.

Tourgueniev est brillant, il nous conte à merveille l'ambiance de ces réunions mondaines. Il nous peint admirablement la nature et les sentiments profonds de ces personnages.
C'est savoureux à lire.
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La nouvelle raconte une passion vénéneuse. Mais avant le drame passionnel que je ne vous raconterai pas, l'auteur prend son temps pour présenter ses personnages. Nous avons droit à une petite chronique satirique de la vie provinciale chez les hobereaux russes aux alentours de 1850.
Nous suivons d'abord les pas de Vladimir Astakov propriétaire de six cents âmes, dont la préoccupation essentielle dans la vie consiste à passer pour un homme comme il faut. A vingt-sept ans, il désire rencontrer une femme à grandes relations, estimant qu'il n'en a pas assez. Or donc, à son arrivée sur ses terres, notre gentleman est invité par son voisin, le vieillard Ipatov à dîner. Celui-ci lui vante l'esprit extraordinaire des invités, des hommes de science et de culture ainsi que l'extrême simplicité de la vie campagnarde...
La nouvelle quoique très prenante est curieusement composée en deux parties. On ne voit pas du tout le drame arriver car le point de vue est le plus souvent celui d'Astakov. Et Astakov a le coeur sec. Rétrospectivement, on peut comprendre que ce qui a rapproché les deux amants, c'est d'être au dessus de cette société provinciale médiocre, vulgaire et prétentieuse. Mais leur lucidité commune leur a apporté la passion et la passion leur a été fatale. Astakov, le médiocre auto-satisfait, a eu ce qu'il voulait. A la fin de la nouvelle, il parade sur la perspective Nevski avec une épouse à grandes relations.
Cette nouvelle est aussi intitulée l'Antchar dans d'autres éditions.
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Étonnamment raffiné, ce petit roman de Tourguéniev s'impose comme un classique de la littérature luxuriante et stylisée - donc parfaitement inutile, dénuée de messages ou d'anathèmes incrustés dans le miroir déformant de notre société vulgaire. Les personnages vagabondent dans une campagne russe paisible, intemporelle, parsemée de natures ondoyantes et humides. Loin de la vérité, les hommes et les femmes se découvrent des antagonismes brodés de faux-semblants ; on parcourt quelques verstes dans un beau costume rustique, à cheval, avec un domestique ; on ne parle jamais de politique et la jeunesse danse sans penser à la révolution, encore lointaine.

On pourrait y voir une parabole du temps qui passe, inéluctable, particulièrement dans le dernier chapitre : un alcoolique trivial s'emballe sur sa jeunesse perdue, ses regrets ; il se voit vieillard et se met à penser, bêtement. Mais qu'on ne s'y trompe pas ! Ce roman a été publié il y a plus de 150 ans et s'achève idéalement sur les détails vestimentaires d'un valet anonyme, comme pour se souvenir que les eaux ne sont tranquilles que parce que tout est en ordre ; à la ville comme à la campagne.
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Écrite en 1854, cette nouvelle (en russe: затишье, accalmie, dans le sens de «calme après la tempête», de за, au-delà et тихий, calme) est inhabituellement complexe. Elle comporte sept chapitres, dont un chapitre supplémentaire en 1856 absent de certaines éditions (le troisième ou le quatrième, suivant les versions: celui où Vérétiev fait la cour à Macha). Elle a d'abord été traduite en français en 1858 sous le titre L'Antchar (Анчар), titre d'un célèbre poème de Pouchkine longtemps prohibé par la censure, que Tourguéniev amène dans ce récit d'un amour tragique car c'est le nom d'un arbre toxique. La nouvelle a aussi été publiée sous le titre Un Coin tranquille, en anglais A Quiet Backwater, et en allemand Stilles Leben (Vie tranquille) et Stille Winkel (Coin tranquille).

Vladimir Astakhov, 27 ans, amateur de musique et de livres, arrive de Saint-Pétersbourg dans le village de Sassovo dont il est propriétaire, près de Toula, pour inspecter les terres que cultivent ses serfs et vérifier les comptes. C'est l'occasion pour Tourguéniev d'une fine observation de la vie rurale. Vladimir est invité par un voisin, Mikhaïl Ipatov, chez qui les circonstances l'obligent à séjourner quelques jours. On passe le temps comme on peut le faire à la campagne (thé autour du samovar, conversations à la lumière des bougies, jeux de carte, promenades au bord du lac, sous les saules, discussions sur le temps, poèmes, chants,…). Tout cela se répète dans une certaine monotonie avec quelques personnages secondaires comme le pontifiant Pomponski calqué sur un haut fonctionnaire réel, et Ivan Bodriakov, un peu poète et l'un des multiples «hommes de trop» tourguéniéviens qui n'a «pas une ombre de volonté» et hésite sur tout.
Il y a surtout deux jeunes femmes, la belle Maria Pavlovna (Macha), belle-soeur de son hôte, et une amie de cette dernière, Nadjeda Alexandrovna qui lorgne d'emblée Vladimir Astakhov. Maria, réplique d'une jeune ukrainienne dont Tourguéniev a été amoureux dans sa jeunesse, n'aime pas la poésie, sauf quand Vladimir Astakhov lui fait lire L'Antchar de Pouchkine qui la fascine et qu'elle va apprendre par coeur. L'attirance mutuelle n'ira pas plus loin. En revanche, l'autre femme, Nadejda, multiplie les avances envers Vladimir Astakhov. Elle lui propose de rester, puis de lui donner la réplique comme jeune premier dans une comédie, de danser la mazurka avec elle, et finit par lui tendre un emballage de bonbon où est écrite la maxime «Qui me néglige me perd». On ne peut être plus clair mais le velléitaire ne veut pas comprendre et part le lendemain malgré de nouvelles avances de Nadejda qui l'invite à prolonger son séjour. Toujours le thème de l'amour esquivé. Il y a aussi - avant cela - un risque de duel finalement évité, car lors du bal champêtre chez un voisin, Nadejda avait promis la même mazurka à Vladimir et à l'irascible Steltchinski. Ce bal provincial est décrit d'une manière qui rappelle quelque peu le bal d'Eugène Onéguine.
Dans un chapitre ajouté en 1856, Piotr Véretiev, le frère de Nadejda, qui rappelle Karataïev des Mémoires d'un chasseur, courtise en vain Maria Pavlovna. Pour lui plaire, il se déclare son esclave et se dit prêt à devenir pour elle peintre, poète, sculpteur, danseur, agronome,… n'importe quoi («Je vous le prouverai un jour»), mais il ne peut promettre d'arrêter de boire. Plus il en rajoute et moins elle l'écoute.
Trois mois plus tard, en automne, Vladimir revient à Sassovo, et apprend par un voisin que Nadejda a épousé Steltchinski par dépit, et l'a chargé de lui rappeler le petit mot sur l'emballage du bonbon. Très vite, les époux vivront séparés. Quant à Maria, elle s'est mystérieusement jetée dans l'étang, sans avertir personne (Contrairement au reste du récit, cette noyade n'est pas historique). Encore une «mort stupide» !
Huit ans après, Vladimir Astakhov, entretemps mal marié, rencontre le vieux Veretiev, de plus en plus ivrogne et lui demande ce que sont devenus les autres, mais son interlocuteur n'en sait rien. Il évoque sa jeunesse trop vite passée, époque de rêves non réalisés. La vie est passée morne, sans rien laisser, sauf l'amertume : «C'était le temps de la jeunesse, de la gaieté, du bonheur. C'était le temps des espérances infinies et des forces indomptables. Si ce fut un rêve, il était bien beau… La vie est passée sans laisser de traces, platement, bêtement. Voilà ce qui est amer, voilà ce qu'il faudrait pouvoir chasser comme un rêve».
L'édition française contient des passages que la censure russe n'aurait pas autorisés, sur la pratique des pots de vin et le mépris de Vérétiev pour les lois russes.
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Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
c'était le temps de la jeunesse, de la gaité et du bonheur, le temps des espoirs infinis et des forces invincibles, et si ce fut un rêve, alors ce fut un rêve merveilleux. Et voici que nous sommes, vous et moi, devenus vieux et bêtes, maintenant, et nous nous teignons la moustache, et nous traînons sur la perspective Nevski, et nous ne sommes plus bons à rien, comme de vieilles roses éreintées ; nous sommes usés, nous sommes fanés, que nous prenions de grands airs et fassions des manières, ou que nous nous tournions les pouces et noyions, à l'occasion, notre chagrin dans le vin : c'est cela, plutôt, qui est un rêve, un rêve horrible.
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Dans une assez grande pièce récemment blanchie à la chaux de la petite maison des maîtres du village de Sassovo, district de***, gouvernement de T***, devant une vieille table bancale, un jeune homme était assis sur une étroite chaise en bois; il avait sur lui son manteau, il examinait les comptes.
Deux bougies de stéarine dans des chandeliers de voyage en argent brûlaient devant lui: dans un angle, sur un banc, il y avait un nécessaire de voyage ouvert: dans un autre angle, un domestique était en train de dresser un lit de fer.
Derrière la demi-cloison grognait et sifflait un samovar : un chien se retournait sur du foin que l’on venait d’apporter.
Dans l’encadrement de la porte se tenait un paysan vêtu d’un armiak neuf ceinturé d’une bande de tissu rouge, ayant une longue barbe et un visage intelligent, de toute évidence le staroste; il regardait attentivement le jeune homme assis. Contre l’un des murs se dressait un tout petit piano fort vétuste auprès d’une commode tout aussi antique où des trous remplaçaient les serrures ; entre les fenêtres, on pouvait voir une petit miroir obscur; à la cloison était accroché un vieux portrait presque tout écaillé représentant une femme en crinoline, aux cheveux poudré, dont le cou mince était entouré d’un étroit ruban noir.
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Vladimir Serguéïtch s'approcha de la fenêtre et appuya son front contre la vitre froide. Son propre visage fixa sur lui, du dehors, un regard trouble, comme si ses yeux s'étaient heurtés à un rideau noir, et ce ne fut qu'au bout d'un certain temps qu'il put distinguer sur le ciel sans étoiles les branches des arbres tournoyant par à-coups au milieu des ténèbres. Elles étaient secouées par un vent impétueux. (p. 112)
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Au terme de cette lumineuse journée d'été, une soirée claire et calme était tombée : le crépuscule flamboyait ; inondé de sa pourpre sur toute une moitié, le large étang était un miroir immobile, reflétant d'une manière grandiose dans les ténèbres argentées de ses eaux profondes tout à la fois l'abîme aérien du ciel, les arbres renversés devenus comme noirs, et la maison. Tout, alentour, s'était tu. Il n'y avait plus de bruit nulle part. (p. 40)
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Dans la maison, il ne rencontra déjà plus personne, tous s'étaient précipités dans le jardin ; seules les fillettes lui tombèrent sous les yeux dans la corridor; elles étaient là, debout, dans leurs jupons blancs, les mains jointes, leurs jolis pieds nus, près d'une veilleuse posée sur le sol.
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