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Critiques de Alejandro Jodorowsky (785)
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Bouncer, Tome 7 : Coeur double

Je me demandais si après « La veuve noire » Jodorowsky allait pouvoir continuer dans sa surenchère gore. Cet album répond à cette interrogation mùétaphysique : le western devient Grand Guignol Les affreux enfants tueurs et tués , leur papa psychopathe , la Veuve qui massacre ses prétendants façon Odyssée,et le sommet : les sœurs siamoises désiamoisées ! Avec , en prime , une histoire de coucougnettes de chinois et un épisode façon Manon des Sources. N’en jetez plus la cour est pleine !
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Le lama blanc, tome 2 : La seconde vue

Tout ce qui devait arriver apres le tome 1 arrive avec le tome 2... donc pas de surprise ! Quelques écarts de détails, quelques résistances, mais tout se déroule comme prévu pour Gabriel.

On perd un peu de vue toutes les intrigues secondaires et c'est dommage ! C'est très dur pour le jeune Gabriel, mais son destin le veut ! Donc il ne lui reste plus qu'à suivre l'initiation programmée, et de faire le dos rond dans sa quête de.... on ne sait pas trop quoi.

La couleur rougeâtre et assez sombre alourdissent un peu l'ambiance.

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Bouncer, Tome 6 : La Veuve noire

Thème classique de base l’appropriation des terres indiennes par alcoolisation et massacre opéré par les tuniques bleues. Le Bouncer flingue et cuit un certain nombre de ces derniers en bon défenseur de l’indianité( au passage on apprend que les Apaches pratiquaient le seppuku en cas de défaite , c’est dire le sérieux des références ) . Mais Jodorowsky passe un cran avec le personnage de Carolyn Harten qui vit dans une réplique western de Petra , a pour prétendants (et esclaves) un capitaine de cavalerie , un médecin fou vérolé , et un invraisemblable tueur nanti d’un fer de hache comme percing crânien et éleveur d’enfants assassins. Ah j’oubliais il y a une nouvelle institutrice ( on use autant que dans les REP dans ce bled) un poil exhibitionniste et sœur de la précédente (à noter une dernière vignette particulièrement « Me too ») . Curieux de voir ce qu’il va trouver de nouveau le Jodo !
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Bouncer, Tome 5 : La Proie des Louves

On commence par une exécution : la famille veut empêcher la pendaison du frangin débile , s’en prend à la bourrelle (hé oui tout se féminise brave gens) qui montre qu’elle a le look de Fantômas et la souplesse létale de Jet Li . Sauvée par le Bouncer elle le récompense par une séance sado-maso ( parfaitement gratuite ) . Pendant ce temps le papa du Bouncer White Elk continue son éradication des génocideurs d’Apaches à coup de serpents . Par ailleurs les trois tueurs mexicains ,malgré leur nom musical, étripent , torturent au service d’un grand propriétaire à gueule de Landru et de sa charmante compagne découpeuse de doigts. Tout cela finit par le massacre des méchants par le manchot , la bourrelle et les brigades rouges. Pour conclure Lord Diablo , le catcheur mexicain , lève le masque , raconte sa vie . Une once de mystique indienne et c’est fini. Bref c’est du Jodorowsky , je continue pour voir jusqu’où il va pousser l’outrance et la caricature
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Bouncer, tome 4 : La Vengeance du manchot

On retrouve le tueur manchot qui cumule les emplois sanglants : videur de saloon et bourreau . Il s’est mis en tête d’aider une famille en butte à la persécution d’un grand propriétaire avide , d’où une longue séquence à la « Rio Bravo » qui finit en carnage. La suite est plus chaotique : apparaissent la belle chinoise (moins marrante que Mme Li dans « Undertaker ») , le vieil indien , un avatar de Huggy les bons tuyaux , une femme bourreau au look de Fantômas et des tueurs mexicains sosies de « Machete » .En prime des aperçus sur le passé du Bouncer avec sa Ma’Dalton de mère (Bouncer est au sens propre un fils de pute) et son noble apache de père. Toujours le même problème de l’excés et du stéréotype chez Jodorowsky.
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Bouncer, tome 2 : La pitié des bourreaux

Après avoir apprécié la série « Undertaker » j’ai voulu tâter d’une autre dans le même genre « Bouncer » . J’ai commencé par le 2 (le 1 ne se trouvait pas à ma médiathèque) . Donc plongée dans une sordide vengeance familiale : Seth cherche à tuer le meurtrier de son papa ,son oncle , aidé par son autre oncle « Bouncer » le manchot . Le folklore de l’ouest y est : diligence attaquée, la mignonne nouvelle institutrice ,les méchants notables , le saloon champ de bataille ,les duels ,l’alcool et la violence. Autre classique du scénario :l’initiation du jeunot par le vieux sage (son fantôme plutôt) et un souvenir du « Cid » « il est joli garçon l’assassin de papa ». . Ensuite il y a la touche Jodorowski qui est d’être toujours dans la surenchère (cela m’avait dégoûté de la série Borgia) avec une forte appétence pour le gore et le sordide ( la cachette du fameux diamant) . Quant au dessin , si j’apprécie les plans larges et les paysages je n’aime pas beaucoup les visages chez Boucq ? Avis : pour le moment c’est très inférieur à « Undertaker »
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Le Lama blanc, tome 1 : Le premier pas

Le savoir faire scénaristique de Jodorowski, pour cette trilogie, sans métaphysique excessive, le dessin précis et réaliste de Bess, sont associés pour nous proposer ce beau livre qui se déroule dans un Tibet au bord de l'invasion anglaise.

L'histoire, qui rappelle un peu Thorgal, est classique, entre la légitimité du grand Lama (réincarné dans un enfant blanc) et un imposteur assoiffé de pouvoir, abruti et sans scrupules, mais bien dosée entre surprises du scénario, magie et apparitions... l'histoire nous tient en haleine du début à la fin.

On peut regretter les couleurs (tout simplement datées) et des paysages qui ne rendent pas la puissance de la montagne !
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Les fils d'El Topo, tome 3 : Abelcaïn

Il en résulte un très bel album, magnifiquement servi par le dessin de Ladronn, mais un album qu'il faut aussi dompter dans sa lecture !
Lien : http://www.sceneario.com/bd_..
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Mu : Le maître et les magiciennes

MU, LE MAÎTRE ET LES MAGICIENNES d’ ALEXANDRO JODOROWSKY

Autobiographie romancée des années mexicaines de Jodorowsky, essentiellement celles passées avec son maître (zen rinzaï) Ejo Takata. Accessoirement quelques aventures avec des magiciennes, guérisseuses et autres. Les séquences avec les koans d’une absurdité apparente sont hilarantes. Pour ceux qui connaissent Jodo, homme de théâtre, de cinéma, qui a relancé et révolutionné le tarot de Marseille, animateur du cabaret mystique, écrivain, ce livre est particulièrement intéressant. On y retrouve Castaneda, Gurdjieff et pour ceux qui ont cherché un éveil spirituel à un moment ou à un autre, c’est une belle lecture.

Pour ceux qui n’ont pas de sensibilité sur ces sujets c’est sans intérêt.
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La folle du Sacré Coeur - Intégrale

Bon, d'accord, Moebius restera dans les annales de la BD comme un génie du graphisme. Et il force ici comme d'habitude mon admiration.

Quant à Jodorowsky, son complice scénariste décomplexé, c'est sûrement lui aussi un surdoué mais chez moi il ne force que...l'indigestion.



Pour moi il est l'incarnation foireuse de cet esprit révolutionnaire qui s'insurgea, à juste titre, contre la toxicité des idéologies ayant mené aux totalitarismes puis aux trente glorieuses. Cet esprit de liberté qui gueula Mai 68, la contre-culture et tutti quanti. Mais qui n'a pas su gueuler contre les dangers de l'hyperconsommation !

Il est brillant et foisonne, comme ces gens (trop) inspirés pour qui il était "interdit d'interdire", qui pratiquaient et prônaient la recherche de toutes les expériences, le bannissement de toutes les censures mais aussi le chacun sa gueule, ces gens toxiques pour le monde si souvent !



L'association de deux surdoués a donné entre autres ce pavé, que j'ai fait l'erreur de vouloir "lire" dans sa version intégrale.

Erreur. Je n'ai pas réussi. J'ai survolé les délires et la logorrhée de Jodorowsky même si j'ai bavé devant la virtuosité de Moebius comme toujours.

J'ai regardé mais, assez vite, trop vite peut-être je n'ai plus vraiment lu. La virtuosité de Moebius, pour moi, est étouffée par les délires de son alter ego, qui gonflent ses bulles jusqu'à l'éclatement.

Indigestion je disais, et je maintiens...



C'est impressionnant mais c'est donc un échec de lecture pour moi. Et mes deux étoiles ne sont que pour Moebius bien sûr.
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L'incal - Intégrale

Un Star Wars pour adultes à offrir à noël. Non seulement cette épopée de science-fantasy est fascinante de loufoquerie, les auteurs aimaient bien les champignons mexicains, et le scénariste a eu un vécu particulièrement violent.

Et il faut aussi préciser que le graphisme choisi par moebius, du crayonné de Blueberry encré comme Tintin, a eu une énorme influence sur les dessins animés des années 80, on peut citer notemment les oeuvres de Jean Chalopin et Nina Wolmark.
Lien : http://punkcoders.free.fr/
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Les Technopères, Tome 1 : La Pré-école Techno

Les mémoires d'Albino, l'un des triplés surdoué. Dans la lignée des métabarons, des technopapes, un autre épisode de la mythologie de Jododrowski et son style inégalé. Le dessin de Janjetov donne vie à la saga des tâchons. Ce premier tome évoque sa naissance et son enfance. Comme toujours, se cache une quête spirituelle dans cette technologie avancée au coeur d'un monde où voyager dans l'univers est simple.
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Griffes d'ange

Cette BD pour adultes, met en avant une femme qui vient de perdre son père. Elle cherche à se reconstruire en d’analysant sexuellement en passant par plusieurs phases.



L’auteur apporte plusieurs sujets sexuels interdits ou non par la société, comme découverte de soi-même et pas juste l’acte de la jouissance.

L’histoire est troublante et au début incompréhensible, mais permet d’avoir une autre vision de l’humanité.
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La Caste des Méta-Barons, Tome 7 : Aghora le ..

Frissen et Jodorowsky savent mettre en place le drame qui s'annonce et nous réservent bien des surprises. L'intrigue nous captive et nous renvoie aussi à d'autres périodes de la saga des Meta-Barons.


Lien : http://www.sceneario.com/bd_..
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La légende du lama blanc, tome 3 : Le Royaume..

Le mal est l'oubli du bien.

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Ce tome fait suite à La légende du lama blanc, tome 2 : La plus belle Illusion (2016) qu'il faut avoir lu avant. Il faut avoir commencé par le premier tome car il s'agit d'une histoire complète en trois tomes. La parution initiale de celui-ci date de 2017. Il comporte 46 planches en couleurs réalisées par Alejandro Jodorowsky pour le scénario, et Georges Bess pour les dessins et les couleurs avec l'aide de Pia pour ces dernières.



Une balle traverse le crâne d'un Tibétain en train de manifester pacifiquement en agitant son moulin à prière. Les soldats chinois ont ouvert le feu avec des rafales de mitraille et des jets de grenade, sur la foule qui manifeste en lançant des chaussures et des chapeaux : c'est un carnage. Les Tibétains sont massacrés sans pitié. Dans le ciel au-dessus du palais du Potala apparaît un engin volant : une soucoupe volante peinte en camouflage, avec une croix gammée sur le fuselage. Elle atterrit sur le toit d'un des bâtiments du palais. Trois soldats nazis en descendent en portant une caisse. Il faut qu'ils se dépêchent car il ne restera bientôt plus un Tibétain en vie, et les Chinois commenceront alors à fouiller le palais. Le responsable du trio estime qu'ils en ont pour moins de cinq minutes. Ils entrent dans le bâtiment et descendent. Ils trouvent le stupa doré qu'ils recherchent et font sauter le cadenas qui en ferme l'intérieur. Ils y trouvent le vase sacré qui contient les restes du cinquième dalaï-lama, et le brisent. Ils transfèrent les restes dans la caisse et retournent à leur soucoupe avant d'avoir été détectés. Mission accomplie.



Les Chinois pénètrent dans le palais en défonçant la porte à grands coups de pied. Les moines sont assis en tailleur à même le sol, sans aucune intention de résister encore moins de se battre. Le général exige qu'ils lui indiquent sur le champ où se cache le dalaï-Lama, ou il leur fait sauter la cervelle. Un moine répond que lui et le panchen lama se sont enfuis et qu'ils veulent se rendre en Inde. C'est tout ce qu'ils savent. Le général l'abat à bout portant d'une balle dans la tête, et il ordonne qu'ils soient tous mis à mort. Il ordonne également de contacter immédiatement les postes frontières et il veut des policiers sur chaque route, chaque chemin, chaque sentier. Les deux fuyards sont accompagnés par les quatre moines Tzu, Dondup, Topden et Tsöndu. Les six hommes constatent qu'ils n'arriveront jamais à traverser ces montagnes à pied sans chevaux. Ils décident de s'assoir en tailleur et de prier les divinités pour leur aide. Au même instant, derrière les fugitifs en prière, sur les hauteurs, Mandarava et Issim utilisent leurs pouvoirs et bientôt un groupe de chevaux sauvages se dirige vers les fuyards qui les enfourchent sans peine. Le nouveau dalaï-lama déclare qu'ils ne font pas de miracles, mais que ce sont les miracles qui les font. Entretemps, le général Chuan-Lao arrive en trombe avec sa jeep à l'école anglaise de Lhassa. À l'intérieur, le père Williams et Léna en fauteuil roulant les voient arriver. Elle déclare au père qu'il doit châtier le général. Elle sait qu'elle est mourante et qu'elle va rejoindre Mister Donovan dont les soldats chinois ont écrasé la tête à coups de pied, Laughton qui a été empalée sur un pieu, Samy le cuisinier qu'ils ont noyé la tête dans les latrines. Elle-même a été violée par quarante soldats ricanant et jetée ensuite dans la rue, avec une bouteille de whisky entièrement enfoncée dans le sexe par Lao. Ils l'ont déchirée. Ils ont dévasté son âme.



En entamant le premier tome de cette deuxième (et peut-être dernière) saison, le lecteur avait eu l'impression de bien cerner la direction générale de l'intrigue : assez similaire à la première saison avec l'avènement progressif d'un nouvel avatar du lama, succédant ainsi à Gabriel Marpa. Avec le deuxième tome, il était déjà moins sûr de lui, à la fois par la mise en scène de Tenzin Gyatso le dalaï-lama depuis le 17 novembre 1950, à la fois par la présence d'Adolf Hitler (né en 1889) ayant visiblement survécu et alors âgé de soixante ans. Avec ce troisième tome, il comprend qu'il avait fait fausse route dans sa projection. Ses derniers doutes s'envolent avec l'arrivée des nazis en soucoupe volante. Il est vrai qu'il aurait pu s'en douter car l'apprentissage des nouveaux lamas progressait beaucoup plus rapidement et plus facilement dans le tome 2. Dans un premier temps, il retrouve bien la suite de l'invasion du Tibet par la Chine, avec le massacre des civils. À nouveau les deux premières pages s'avèrent d'une grande force, baignant dans des nuances de rouge, avec une représentation de la violence descriptive et percutante. La première image montre le moine de profil, sans arrière-plan, sur fond blanc, crachant un filet de sang par la bouche, et de la matière cervicale expulsée par l'arrière du crâne, le cadrage de profil met en évidence la trajectoire de la balle permettant à l'artiste de s'affranchir de la représenter. Les cases du dessous montrent les Tibétains se faire faucher par les balles dans un ballet morbide, et celle en bas de la page montre la détermination hargneuse des soldats à mener à bien leur besogne.



L'arrivée de la soucoupe volante s'effectue en bas de la deuxième planche, sur fond de nuage blanc, mais de ciel d'une teinte rouge orangé, évoquant le rouge de la boucherie précédente. Comme dans les tomes précédents, l'artiste se montre un coloriste sophistiqué, navigant entre approche naturaliste et expressionisme. Le récit se prête remarquablement bien à cette vision artistique, entre les moments qui montrent comme un reportage, et ceux où l'émotion prend le dessus, soit comme conséquence d'une action, soit comme moteur d'un individu. Bess l'utilise également comme effet spécial, par exemple pour l'apparence du corps astral de Gabriel Marpa et des deux autres lamas. La connivence entre scénariste et artiste est manifeste quand Hitler se roule dans le sang de ses soldats qui se sont sacrifiés pour lui : Bess le colorie alors en rouge des pieds à la tête, plus comme un symbole que comme la réalité du sang ayant imbibé ses vêtements et ayant séché sur sa tête, ses cheveux ou ses mains. De même, l'irruption des soldats d'Agartha dans le monde de la surface induit que les décors prennent une teinte jaunâtre, comme s'ils étaient contaminés par la présence de ces conquérants. Une fois que son regard est attiré par cet usage des couleurs, le lecteur remarque que l'approche naturaliste est minoritaire, alors qu'il était persuadé qu'elle était majoritaire.



Le lecteur ajuste donc son horizon d'attente à la réalité de ce que raconte ce troisième tome. Il s'avère aussi riche que les précédents : l'invasion du Tibet par la Chine et le sort du général Chuan Lao, le devenir des personnages secondaires (ledit général et ses deux soldates, le père Williams, Léna, les quatre moines, le dalaï-lama et le panchen lama, Lin-Fa), le plan d'Adolf Hitler, et bien sûr le devenir des deux nouveaux lamas. Il est vraisemblablement pris totalement au dépourvu par le développement sur Agartha. Certes il avait été question de ressources extraordinaires dans les caves de la lamaserie où Gabriel a été moine, mais c'était dans le premier cycle, et le lien n'est pas clairement établi entre ces armes et Agartha. Le scénariste semble s'inspirer de loin des ouvrages ayant rapproché Agharta au nazisme après la seconde guerre mondiale, par exemple ceux de Louis Pauwels et Jacques Bergier, de Jean-Claude Frère et de Jean Robin. Le lecteur y voit surtout une péripétie en provenance directe d'un roman d'aventures de la fin du dix-neuvième siècle ou début du vingtième, et l'occasion pour l'artiste de réaliser un splendide dessin en double page pour montrer ladite cité, puis une scène dans laquelle la nuée des soldats d'Agartha se déverse sur le monde. La résolution de cette partie de l'intrigue laisse le lecteur comme deux ronds de flan, du fait d'une faiblesse qui s'apparente fort à un deus ex machina et un clin d’œil à un célèbre roman de Herbert George Wells (1866-1946).



Le lecteur repense à ce qu'il vient de lire. L'invasion chinoise du Tibet est un fait historique, et l'auteur préfère entremêler son récit à la réalité historique plutôt que de la bouleverser, à l'exception de la survie du Führer. La survie de ce dernier peut se voir comme une allégorie de la perpétuation de l'esprit belliqueux, de la volonté d'exterminer d'autres humains, une soif de pouvoir qui ne supporte pas la résistance. Avec cette façon de voir en tête, le lecteur se rappelle la page d'ouverture de ce tome, du visage fermé des soldats chinois exterminant les Tibétains pacifistes, et il se rend compte que c'est l'auteur qui exprime son point de point de vue sur cette invasion. Les séquences impliquant Agartha montre comment Hitler est accepté comme chef temporel et spirituel, grâce à sa capacité à commander le suicide sacrificiel de ses propres soldats. Une mise en scène glaçante de l'ego démesuré, de l'obéissance aveugle jusqu'au sacrifice, qui s'empire encore avec le fait que le dictateur parade couvert du sang de ses hommes, complètement ivre de sa puissance mortifère. Indépendamment de la résolution anti-climatique du conflit contre Agartha, le lecteur constate que la vie triomphe, plus pérenne que la volonté d'exterminer.



La clôture de ce deuxième cycle s'avère des plus déroutante, ne serait-ce que parce qu'elle ne correspond en rien à ce que pouvait s'imaginer le lecteur. Pourtant, la narration visuelle est toujours aussi habitée et entraînante, impressionnante par son intensité, que ce soit dans des passages spectaculaires pour le paysage ou l'environnement, ou dans ceux submergés par les émotions. Le scénario est imprévisible, virant vers le fantastique teinté d'ésotérisme. Le suspense est neutralisé par un déroulement improbable, mais pas dépourvu de sens. Le thème principal s'impose progressivement : l'inhumanité de toute conquête, de toute invasion, la morbidité d'une telle entreprise, et les souffrances qu'elle génère, bien sûr chez les peuples exterminés, mais aussi chez les agresseurs.
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Sang royal, tome 1 : Noces sacrilèges

Un roi blessé au cours d'une bataille. Son cousin lui ressemblant énormément, il demande à ce dernier de prendre sa place le temps de remporter la victoire.

Mais celui-ci y voit l'opportunité de sa vie et va réellement endosser le rôle, laissant le vrai roi mourir.

Il va cependant être sauvé par une paysanne mais perdra la mémoire pendant 11 ans.

Le début de l'histoire était prometteur.

Malheureusement seulement le début...

Cela aurait pu être une histoire de vengeance, classique certe mais bien menée, il aurait pu y avoir des bons sentiments parfois. Mais non. Tous les protagonistes ont des caractères puissants, égocentriques, orgueilleux et méprisables.

Bien qu'assez sombre le dessin est joli sans être exceptionnel.

Bref, déçu.
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La légende du lama blanc, tome 2 : La plus be..

Rien n'est permanent. Tout se transforme.

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Ce tome fait suite à La légende du lama blanc, tome 1 : La Roue du temps (2014) qu'il vaut mieux avoir lu avant. C'est le deuxième tome d'une trilogie qui constitue une seconde saison pour la série. La parution initiale de celui-ci date de 2016. Il comporte 46 planches en couleurs réalisées par Alejandro Jodorowsky pour le scénario, et Georges Bess pour les dessins et les couleurs avec l'aide de Pia pour ces dernières.



Dans une région aride du plateau tibétain, le yéti Ah-Iou et son fils Kr-El sont à la recherche d'un gibier : rien. Trois jours sans même apercevoir une proie. Il ne reste plus beaucoup d'animaux. Avec leurs explosions, les chercheurs de minerai ont empoisonné l'herbe. Soudain une antilope court vers les deux chasseurs, mais elle a une demi-douzaine léopards à ses trousses. Les dieux envoient-ils une antilope aux chasseurs, ou se moquent-ils d'eux ? Un yéti se place sur la trajectoire de l'antilope et la tue d'un coup d'épée. Les jaguars le rejoignent et l'attaquent : il se défend bientôt aidé par son compagnon. Le combat fait rage. Dans une autre partie du plateau tibétain, tout aussi désertique, les moines Tzu, Dondup, Topden et Tsöndu continuent d'entraîner Mandarava & Issim à la découverte et à la maîtrise de leurs pouvoirs. Ce que l'on nomme réalité est un rêve, des formes imaginaires, des vibrations. Les moines ont appris à l'esprit des adolescents à vibrer comme le rêve. Leur vibration intérieure et celle du rocher en face d'eux sont au diapason : ils avancent et ils traversent le rocher comme s'il s'agissait d'une forme immatérielle. L'exercice suivant consiste à transformer des cailloux.



Un peu plus tard sur les hauteurs de Chomolungma, Ah-Iou revient au campement des yétis, avec l'antilope sur son épaule droite, et le corps de son fils Kr-El sur l'épaule gauche. Ils les déposent à terre, alors que les autres yétis viennent à sa rencontre, ainsi que les adolescents et les moines. Le fils est mort, et les adolescents perçoivent que le cœur du père va éclater de chagrin. Ils décident de réaliser une tricherie sacrée : pénétrer à l'intérieur du cadavre de Kr-El et parler comme s'ils étaient lui. Ils vont doucement pénétrer dans son cadavre et le faire revivre, le ranimer quelques instants. Kr-El se redresse et s'adresse à ceux qui l'entourent. Il leur demande de ne pas souffrir, car il est fier d'être mort en défendant son père. Il leur enjoint de manger l'antilope savoureuse, puis d'offrir son corps aux vautours. Seulement alors son esprit pourra s'envoler libre, pour rejoindre sa demeure céleste. Il leur tend les bras pour qu'ils viennent l'embrasser avant son départ. Les autres yétis accourent et l'étreignent. Le corps finit par se relâcher sans vie, les futurs lamas l'ayant quitté. À Lhassa, une répression féroce, impitoyable s'est abattue depuis des années sur la population tibétaine. Les citoyens manifestent dans la rue, avec des pancartes portant le slogan Libérez le Tibet. Un moine s'immole par le feu dans la rue. Les soldats chinois l'abattent froidement. Le père William est amené devant le colonel Lao, toujours en compagnie des deux soldates, pour qu'il traduise un avis en tibétain.



D'une certaine manière, le lecteur s'attendait à ce que les auteurs reprennent à peu de chose près la même trame que celle du premier cycle. C'était oublier de quel scénariste il s'agit. Il est donc déstabilisé par la première séquence, en quatre pages, entièrement consacrée à deux yétis. Il n'y a que cinq brefs cartouches de texte évoquant la dégradation du milieu naturel engendrée par l'exploitation de ses ressources, et le fait qu'il serve ensuite de poubelle aux activités humaines. Dans le même temps, ces deux créatures luttent pour leur survie, cherchant de la nourriture, luttant pour leur vie contre d'autres animaux prédateurs. La narration visuelle est extraordinaire. Une première page avec quatre cases de la largeur de la page, le format panoramique rendant compte de l'immensité du paysage. Une deuxième page avec une case verticale de la hauteur de la page, une vue du ciel qui montre la distance qui sépare les yétis de l'antilope, puis des cases horizontales comme accrochées en drapeau au mat qu'est la case verticale pour l'enchaînement des actions qui en découlent. Les deux autres pages reviennent à des bandes de case, la dernière étant de la largeur de la page pour une dernière vision panoramique. Le lecteur est submergé par la violence de l'affrontement entre les prédateurs et les yétis, une lutte primale pour rester en vie. S'il y prête attention, il remarque que l'artiste continue à utiliser des couleurs surprenantes, comme différentes teintes de rose, ainsi qu'il le faisait de manière marquée dans le premier cycle, pour une touche discrète évoquant un faible relent de psychédélisme, ou plutôt pour attirer l'attention sur la dimension spirituelle de cette scène.



La séquence suivante revient aux jumeaux qui sont la nouvelle incarnation du lama Gabriel Marpa. Dans la droite continuité du premier cycle, ils bénéficient du mentorat des moines qui leur font découvrir leurs pouvoirs et les aident à les maîtriser. Gabriel leur apparaît également pour les guider quant aux actions à entreprendre. Attentif, le lecteur remarque cette utilisation particulière des couleurs, sous forme de nuances présentes de manière chronique, rappelant de façon subliminale que ce récit ne peut s'entendre qu'en gardant à l'esprit sa dimension spirituelle. L'artiste épate par sa maîtrise de la mise en couleurs, allant d'une teinte dominante pour baigner une scène dans une ambiance particulière, à une mise en couleurs de nature réaliste, ou pouvant passer en mode expressionniste sans rapport direct avec les couleurs de la réalité. Tout du long du récit, il adapte son découpage de planche à la nature de la scène, pouvant passer d'une page avec quatre cases (planche 17) à une planche qui en compte quatorze (planche 44), ou faire dépasser un personnage des bordures d'une case (par exemple planche 8). Il peut passer en mode fantastique (planches 20 & 21, quand Mandarava et Issim discutent avec Gabriel, sur le plan astral), et aller jusqu'au mode le plus descriptif et réaliste (la magnifique vue d'ensemble du temple de Potala à Lhassa, planche 22). Dans ce dernier registre, le lecteur est saisi d'effroi en voyant un moine s'immoler par le feu (planche 11) ce qui peut lui rappeler des reportages sur ces pratiques au Vietnam, par exemple celui de Thich Quang Duc (1897-1963).



Grâce à la qualité des dessins, le lecteur identifie sans peine deux personnages historiques : le dalaï-lama Tenzin Gyatso, et plus surprenant Adolf Hitler. Le scénariste montre la domination chinoise sur le peuple tibétain, incarnée par le général Lao, avec ses deux aides de camp féminins, dont une à la vareuse toujours ouverte, montrant sa poitrine dénudée. Il fait venir le père William pour qu'il traduise et écrive en tibétain un avis général à la population. Il y rappelle qu'il est mandaté par l'invincible sauveur du peuple Mao Tsé-Toung, et il y déclare l'éradication des quatre vieilles empoisonneuses : les vieilles idées, la vieille culture, les vieilles habitudes, et les vieilles tenues. La loi martiale est instaurée et sont interdits les chants, la musique d'envoûtement, les danses chamaniques, les mandalas de sable, la chasteté des religieux et des religieuses, le thé au beurre de yak, l'orge. Seul le blé est autorisé. Le lecteur voit bien là à l'œuvre une politique d'éradication de la culture autochtone pour contraindre à adopter la culture de l'occupant. L'auteur raccroche donc son récit à la réalité historique avec l'intronisation de Tenzin Gyatso comme quatorzième dalaï-lama, tout en aménageant la personnalité et les actes du régent Réting. L'autre personnage historique n'arrive pas comme un cheveu sur la soupe. Il y avait cette petite troupe de nazis à la recherche d'un trésor dans le premier tome, et il s'avère qu'elle a une base dans la région avec ce chef emblématique. Le lecteur y voit une convention romanesque de série B, au même titre que la représentation des pouvoirs parapsychiques de Gabriel Marpa, et de ses réincarnations. Il peut également y voir une métaphore de la dictature, de la propension de l'être humain à détruire, et établir un parallèle avec le général Lao, et les méthodes de l'occupation chinoise.



Le scénariste prend le lecteur par surprise en ne reproduisant pas le même schéma narratif que le premier cycle. L'artiste le prend également par surprise en étant encore meilleur que dans le premier cycle, une narration visuelle d'une qualité remarquable, d'une diversité aussi étonnante que discrète, adaptant avec fluidité son niveau de description, utilisant avec subtilité des teintes inattendues pour porter un sens supplémentaire. D'une manière sophistiquée et romanesque, le récit entraîne le lecteur au cœur de l'occupation du Tibet par la Chine, à assister à la répression d'une culture, à l'avènement d'un nouveau chef spirituel et temporel pour le Tibet, avec un récit qui lie ces deux facettes de l'existence, spirituelle et temporelle.
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La légende du lama blanc, tome 1 : La Roue du..

Ne restez pas enfermés dans vos prisons mentales.

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Ce tome fait suite à Le lama blanc, tome 6 : Triangle d'eau, triangle de feu (1993) qu'il vaut mieux avoir lu avant. C'est le premier tome d'une trilogie qui constitue une seconde saison pour la série. La parution initiale de celui-ci date de 2014. Il comporte 54 planches en couleurs réalisées par Alejandro Jodorowsky pour le scénario, et Georges Bess pour les dessins et les couleurs avec l'aide de Pia pour ces dernières.



En 1950, sous prétexte que des agents étrangers complotaient contre la République Populaire de Chine, Mao Tsé-Toung envoie 80.000 soldats envahir le Tibet. Les chars chinois avancent sur la neige, le drapeau flottant au-dessus de la tourelle. Les camions à plateau portent un immense portrait de Mao, encadré de rouge, avec les drapeaux chinois flottant de part et d'autre. Le général Loa voyage à l'arrière d'une voiture avec chauffeur, avec une soldate assise à sa gauche et une à sa droite : Shing-Den et une autre. Il ne voit pas trop quelle révolution culturelle il y va mener dans ces contrées peuplées de lamas impuissants, mais il compte bien détruire l'ancien monde, et en profiter pour s'en mettre plein les poches. Le convoi arrive face à une armée tibétaine et il s'arrête. Le général Lao descend de voiture et avance vers les tibétains pour s'adresser à eux : il énonce son nom et expose l'évidence. Deux mille Tibétains armés de vieux fusil ne sauraient vaincre quatre-vingt mille soldats communistes armés de Mitrailleuses et de chars d'assaut ! La discipline du parti impose à la minorité de se soumettre à la majorité ! En face le général Densen Galpo répond : Une multitude de soldats, de chars, et des mitrailleuses ne sauraient vaincre leurs déesses et leur magie.



Le général Densen Galpo fait avancer trois groupes d'hommes qui portent chacun une plateforme en bois sur laquelle se tient une déesse : Tara bleu sur l'une, Tara verte sur l'autre, et enfin la Tara jaune sur une troisième, des femmes en tenue de cérémonie à l'effigie de la déesse. Ces Taras vont les protéger, dévorer leurs ennemis, exterminer ces rouges impies. Le général Lao ordonne aux tanks de faire feu. Les trois Tara volent en éclat. Galpo clame que Tara est immortelle, qu'aucun envahisseur ne peut la vaincre. Il ordonne à ses hommes de charger sur l'envahisseur. Les communistes font feu : c'est un carnage. L'armée chinoise reprend son chemin. Le soir, elle établit son campement, et le général Lao fête la victoire avec une table bien fournie, et en passant la nuit avec les deux soldates. À Lhassa, un Lung-gom-Pa, un chaman messager, arrive épuisé, après avoir couru plus de cent kilomètres sans s'arrêter. Il apporte une terrible nouvelle : les Chinois envahissent le Tibet. Dans l'enceinte de l'église anglicane, monsieur Donovan donne un cours d'anglais aux petits tibétains. Une fois la classe terminée, il se rend dans la maison du pasteur pour déguster le repas préparé par Samy : des perdrix bien cuisinées, afin qu'elles n'aient pas donné leur vie en vain.



Le premier cycle s'achevait avec Gabriel Marpa, le lama blanc annonçant des bouleversements destructeurs. Ce deuxième cycle commence cinq plus tard avec l'invasion du Tibet par la Chine. Le scénariste prend le temps d'installer sa nouvelle histoire : Gabriel Marpa, le lama blanc, n'apparaît qu'à la planche 35. Il vaut mieux que le lecteur ait lu le premier cycle pour comprendre qui sont les personnages, car l'auteur ne les présente pas à nouveau. C'est ainsi que le lecteur retrouve les quatre moines Tzu, Dondup, Topden et Tsöndu, le pasteur William, miss Léna, et le chat Lin-Fa. Chacun d'entre eux a continué sa vie sur sa lancée, sans qu'il soit besoin de détailler ce qu'ils ont fait pendant les années qui se sont écoulées. C'est un vrai plaisir que de retrouver Lin-Fa et ses remarques critiques. Les retrouvailles avec le pasteur William sont placées sous le signe de l'ambivalence : la démarche coloniale à l'œuvre avec les cours de la mission qui apprennent aux enfants tibétains à devenir de bons petits sujets de l'empire britannique, mais il sera lui aussi victime de l'oppression de l'envahisseur chinois. C'est encore plus déchirant pour la pauvre miss Léna, une femme en surpoids d'une cinquantaine d'années, perpétuant la culture anglaise sans avoir l'idée de la remettre en question et soumise à la torture.



Les deux auteurs ne font pas les choses à moitié pour montrer la violence de l'invasion, la révolution culturelle nécessitant de terroriser les peuplades en place. Le récit est à charge contre les communistes du début à la fin. Le lecteur retrouve la narration visuelle de Georges Bess, en apparence très réaliste. En prenant le temps et en y prêtant attention, il peut, s'il le souhaite, remarquer que les visages des personnages peuvent présenter des traits un peu trop marqués, qu'une posture peut être dramatisée de temps à autre, que certains éléments du décor sont représentés plutôt dans un registre impressionniste que descriptif ou photographique, que l'usage des couleurs verse lui aussi de temps à autre dans un registre expressionniste plutôt que naturaliste. Pour autant, la narration visuelle donne une impression de réalité concrète et normale. Le choc n'en est que plus violent en voyant les exactions des militaires chinois. Cela commence pourtant doucement avec les trois déesses qui volent en éclat avec l'explosion d'un obus. De même, le lecteur peut ne pas être trop impressionné par les cadavres tibétains jonchant le sol du champ du bataille car le dessinateur les a noyés dans une couleur marron déclinée en nuances, sans attirer l'attention sur les blessures. En revanche, il assiste à un double viol en bande, sans voyeurisme, sans que les deux nonnes n'adoptent un comportement de victime, pourtant insoutenables du fait du comportement immonde du violeur et de la passivité des autres soldats, ne faisant montre d'aucune émotion. Plusieurs pages plus loin, miss Léna subit le même sort avec des violences en plus, hors case, mais le lecteur se souvient des planches précédentes et il est horrifié par l'état dans lequel elle revient dans sa cellule, même s'il n'a en fait pas assisté à la scène du viol. De ce point de vue, il y a une condamnation sans appel de l'invasion chinoise. Avec un peu de recul, cette condamnation s'applique à n'importe quelle force d'invasion quelle qu'en soit la nationalité, et ne constitue pas une attaque uniquement contre les Chinois.



L'auteur introduit de nouveaux personnages comme le général Lao et ses deux aides militaires, les deux nonnes Setsun Lochen & Dungri. Il ouvre ainsi le récit de ce second cycle. Il ne se limite pas non plus à aux forces armées chinoises, puisque le lecteur a la surprise de découvrir un petit groupe d'individus en gabardine en cuir portant un brassard rouge avec une croix gammée dans les planches 26 & 27. Il se demande ce qu'il en est puisqu'il est précisé sur la première page que l'action se situe en 1950. À partir de la planche 24, l'intrigue se focalise d'un côté sur le devenir des deux nonnes dont la route croise celle d'un personnage récurrent de la première saison, et de l'autre côté sur la quête des quatre moines allant à la recherche de leur lama pour lui demander son aide. Ce fil narratif rassure le lecteur qui obtient ainsi l'assurance et la confirmation qu'il sera bien question de l'avenir du lama blanc, de sa légende même à en croire le titre. C'est l'occasion de cheminer avec les moines en pleine montagne sur des sentiers escarpés, sous la neige, de trouver refuge dans des cavernes, de sentir son pied déraper sur un caillou de découvrir un petit temple juché au sommet d'une montagne, de redescendre dans la vallée. Le dessinateur se montre extraordinaire pour décrire ces environnements, l'aridité du paysage rocheux, le contraste avec quelques zones arborées. Le lecteur peut retrouver les sensations de la montagne dans ce qu'elle a de plus majestueuse et de plus désolée et imposante.



Comme dans la première saison, les deux créateurs mettent en scène la culture tibétaine, au travers des constructions, des décorations, des paysages, des tenues vestimentaires, sans attirer l'attention dessus, des informations visuelles en toile de fond. La religion est également au cœur du récit. Comme précédemment, il ne s'agit pas de décrire les pratiques du culte, encore moins de développer le crédo ou de faire du prosélytisme. Le bouddhisme est présent au travers des lamaseries, des nonnes, des moines et du lama. En termes de foi, il y a le détachement dont Jetsun parvient à faire preuve, le refus de consommer de la viande (ce qui renvoie à un passage où Gabriel Marpa refusait de manger de la viande, un écho évoquant la répétition d'un cycle), l'intime conviction des quatre moines que le lama dispose de capacités lui permettant de venir en aide à son pays, la mise à l'épreuve de l'esprit, l'évocation des cinq cercles de la conscience ordinaire (celui de l'esprit, celui de la parole, celui des sentiments, celui des désirs, celui des besoins du corps), et la réincarnation. Sur le plan visuel, les auteurs montrent des phénomènes spirituels sans donner d'explication : l'aura de la nonne Jetsun qui est perçue par ses agresseurs, la réalisation d'un mandala de poudres, l'apparition d'un puissant gardien de la brume à l'allure démoniaque pour défendre l'accès au temple d'or, et un phénomène de décorporation avec corps astral. À nouveau, il s'agit de prendre pour argent comptant ces phénomènes montrés comme étant surnaturels.



Ainsi donc surviennent les premiers malheurs prophétisés par Gabriel Marpa : les forces armées chinoises envahissent le Tibet en massacrant les populations. La narration visuelle est toujours aussi convaincante, intemporelle, dépaysante, enchanteresse et d'une grande justesse dans les drames et la violence insoutenable. Alejandro Jodorowsky entraîne le lecteur dans un nouveau cycle : s'il a lu le précédent, il accorde toute sa confiance aux auteurs, sinon il s'interroge sur les choix parfois curieux, en particulier en ce qui concerne l'absence de profondeur dans l'évocation de la religion bouddhique et la présence de nazis. Dans les deux cas, il est vite subjugué par cette aventure qui mêle dépaysement, guerre, violence, résilience, courage, spiritualité.
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Le pape terrible, Tome 1 : Della rovere

Malgré la couverture qui annoncé la couleur, je m'attendais à des intrigues et des manigances hautement ficelé... bon c'est un peu râpé. Pour la finesse du récit en général : on repassera.

Les intrigues semblent surtout tourné autour du sexe, ça se lit vite, c'est divertissant, mais jesperais quelque chose de plus costaud d'un point de vu historique...

Les graphismes sont beaux. Malgré tout, en tournant la dernière page on a quand même envie de lire la suite, comme je l'ai dit c'est divertissant, ça se lit sans prise de tête.
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Le lama blanc, tome 6 : Triangle d'eau, tri..

Un criminel repenti est plus utile qu'un pêcheur mort.

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Ce tome fait suite à ‎Le lama blanc, tome 5 : Main fermée, main ouverte (1991) qu'il faut avoir lu avant. Ces 6 tomes forment une saison complète et il faut avoir commencé par le premier. La parution initiale de celui-ci date de 1992. Il comporte 54 planches en couleurs réalisées par Alejandro Jodorowsky pour le scénario, et Georges Bess pour les dessins et les couleurs. La série comporte une deuxième saison en trois tome qui commence avec La légende du lama blanc, tome 1 : La Roue du temps.



Les rapaces volent dans le ciel et les pauvres paysans du village qui accueillit Gabriel encore enfant travaillent une terre aride, sèche et craquelée, se demandant pourquoi ils s'acharnent à labourer cette terre maudite. Un ancien répond qu'ils sont les enfants de cette terre, et que si elle meurt, ils mourront aussi. L'un d'eux aperçoit un homme qui vole dans le ciel. Conformément à sa décision, Gabriel Marpa revient une dernière fois à cet endroit où il a détruit le village en provoquant des tremblements de terre, et où il a soulevé la terre, la rendant stérile, et massacrant tous les animaux. Il apparaît comme un individu émacié, assis dans la position du lotus, volant dans les airs. Les paysans s'en prennent à lui, lui jetant des cailloux, le ridiculisant en pointant du doigt qu'i a consacré tous ses efforts à devenir un saint pendant que, eux, meurent de faim. Gabriel prend conscience qu'ils ont raison. Il décide de mettre pied à terre, et leur déclare qu'il leur vient en aide. Il est identifié par tante Detchéma et oncle Késang qui indiquent aux paysans que c'est lui qui a détruit le village, leurs récoltes et leurs bétails : c'est un magicien noir. Les villageois se ruent sur lui et commencent à le rouer de coups de bâton. L'un d'eux a l'avant-bras transpercé par une flèche. C'est Péma qui l'a décochée et qui se rue sur Detchéma pour la frapper.



Gabriel Marpa intervient. Il lui demande de l'épargner. Grâce à la méchanceté de cette pauvre femme, il a connu la misère. C'est grâce à la misère qu'il a connu le grand éveil. Péma et lui sont dans une quête qui est située à l'opposé de celles que suivent la plupart des êtres de ce monde. Il faut avant tout apprendre à pardonner. Ces paysans ont raison : il a détruit ce pays en provoquant une catastrophe, en provoquant la grêle et par voie de conséquence la sécheresse. Le temps est venu de réparer les préjudices et non de les châtier. Que cesse la haine ! Gabriel Marpa se tient bien droit, il écarte les bras et il en appelle aux esprits de l'eau, aux esprits du feu. Le vent se lève, les nuages s'amoncellent, les éclairs déchirent le ciel. La pluie se met à tomber abondamment. Les animaux reviennent, les plantes renaissent. Ils arrivent de partout : les moutons, les chèvres, les yacks, tout le bétail disparu. L'orge pousse à vue d'œil. Les paysans sont comblés et ils repartent vers leurs habitations. Péma constate qu'aucun d'eux n'a été capable de remercier Gabriel. Ce dernier demande à Péma de le conduire à sa mère Atma, et il ordonne à Detchéma et Késang de les suivre. Après quelques heures de marche, Gabriel se tient devant le cadavre desséché de sa mère : il ne reste que la peau sur les os.



Gabriel Marpa est en pleine possession de ses pouvoirs, sa gloire étant révélée, dans un état de plein Éveil. Que lui reste-t-il à accomplir ? Il lui reste à revenir dans le monde matériel, et à prendre sa place dans la société civile. Il est venu le temps des hauts faits et des miracles. Il renoue avec les paysans qu'il avait maltraités, à nouveau pas dans une approche de culpabilité catholique, mais avec une reconnaissance de son acte criminel qui les a plongés dans la misère. Il ne fait pas pénitence, ou acte de d'expiation : Gabriel Marpa vient faire amende honorable et réparer ses torts, comme un individu responsable mettant à profit ses capacités extraordinaires. Il ne demande pas pardon à un dieu, mais vient en aide à son prochain. Son attitude capte l'attention du lecteur, encore sous le coup de l'acte barbare qu'il a commis dans le tome précédent : la suite de son comportement n'est pas celui d'un croyant catholique repenti. De ce point de vue, le scénariste reste dans une culture bouddhique avec le principe que les mauvaises actions ne peuvent pas être effacées (elles doivent être équilibrées par une quantité équivalente d'actions bonnes et utiles). L'individu observe les règles morales et religieuses de bonne conduite pour se libérer du cycle des réincarnations. La réalité matérielle n'est qu'illusions. L'homme saint ne recourt jamais à la violence, et faire du mal aux autres est faire du mal à soi-même, du fait de l'interdépendance universelle entre les êtres vivants. Ainsi, si les religions du Livre et la religion bouddhique partagent des valeurs morales communes, le lecteur ressent bien que l'usage des mots Saint, Miracle dans le contexte de cette histoire prend un sens différent car la culture est différente. En fonction de sa sensibilité, le lecteur peut estimer que la notion de pardon fait plus sens dans le contexte du bouddhisme, avec l'exemple du sort que Gabriel Marpa réserve à Tsöndu, celui qui a tué ses parents. Quelques pages auparavant, parlant de lui, un moine déclare qu'un criminel repenti est plus utile qu'un pêcheur mort. Ici ce sont les êtres humains qui pardonnent, et pas Dieu.



Gabriel Marpa a acquis la pleine maîtrise des pouvoirs qui accompagnent son statut d'homme saint. Il en acquiert encore un autre au cours de ce tome. Il est maintenant un individu à l'apparence assez maigre, à la longue chevelure négligée, uniquement vêtu d'un pagne. L'artiste le représente de manière descriptive et factuelle, ne jouant que sur la couleur quand il réalise un miracle. Le lecteur voit donc un simple être humain, avec des capacités extraordinaires. Visiblement, il maîtrise son métabolisme au point de ne plus souffrir du froid, ce qui était déjà le cas dans le tome précédent. Il lui suffit d'étendre les bras pour faire pleuvoir, et il dispose toujours de cette faculté de sortir de son corps sous forme d'ectoplasme spirituel, et même de faire apparaître d'autres formes ectoplasmiques. Les dessins sont en phase avec le choix du scénariste de présenter les capacités extraordinaires de Gabriel, comme des sortes de superpouvoirs, sans s'appesantir sur leur logique de croyance, ou sur les tenants de la Foi bouddhique. D'un côté, cela reste dans la continuité des tomes précédents : de l'autre, le lecteur voit un individu doté de capacités surnaturelles, parce que c'est comme ça, ce qui peut s'avérer un peu frustrant.



Dès la scène introductive, Bess a plus à représenter que des zones désertiques rocheuses et des paysans en haillons. Il commence par mettre en scène le conflit entre le saint descendant littéralement du ciel pour revenir parmi le commun des mortels. La mise en scène est remarquable dans sa gestion de l'espace, du placement des personnages du relief montagneux, de l'intervention des différents protagonistes : tension narrative, lisibilité parfaite, enchaînement des actions logique et naturel. Lors des miracles (pluies et retour du bétail), le lecteur se rend compte que l'artiste continue à jouer sur les couleurs, s'écartant du naturalisme pour souligner le caractère extraordinaire de cet individu qui devient jaune pâle, ou le ciel qui devient violet quand les éclairs se déchaînent. La scène suivante est tout aussi extraordinaire, alors qu'il ne reste plus que quatre personnages dans cette zone montagneuse désertique, et que Gabriel découvre le cadavre de sa mère. Gabriel réalise une autre forme de miracle, ce qui se reflète dans le comportement de Detchéma et Késang, dans leur langage corporel, autant que dans l'expression de leur visage. La scène suivante est extraordinaire : Gabriel fait face aux moines soldats du monastère de Chapkori. L'artiste adapte sa narration visuelle en conséquence, en particulier le découpage, usant aussi bien d'un nombre élevé de cases par page (jusqu'à 11), que d'une case panoramique étalée sur deux pages en vis-à-vis pour rendre compte du massacre. Une fois l'autorité de Gabriel Marpa restaurée dans le monastère, Bess représente à nouveau la caverne contenant le cristal et les huit cercueils de pierre. Comme la fois précédente, il ne se contente pas de vagues formes de pierre pour aller plus, il investit le temps nécessaire pour montrer chaque roche, sans oublier les cordes tendues avec les tissus accrochés dessus. La suite est tout aussi remarquable sur le plan visuel, que ce soit l'architecture du monastère et l'aménagement des pièces intérieures, ou les scènes de rassemblement des moines.



Le lecteur peut se projeter dans chaque lieu pour une sensation de pleine immersion, et avoir l'impression de côtoyer les personnes présentes. Il se laisse porter par le scénario curieux de découvrir les nouvelles épreuves que Gabriel Marpa va affronter, en plus du parachèvement de son ascension spirituelle. Rétrospectivement, il se dit que le scénariste mène fort logiquement son récit à son terme. Il se demande comment Gabriel va pouvoir gérer l'affrontement inéluctable contre les moines soldats bien déterminés à l'occire, comment il va traiter le tulkou imposteur et le lama illégitime. À nouveau, Jodorowsky se montre un conteur extraordinaire, que ce soit dans la mise en scène du combat qui permet au lecteur de croire à ce qui arrive aux moines soldats, à la fois dans la façon de mettre en scène les valeurs morales associés au bouddhisme, en particulier le pardon, avec cette très belle maxime : Un criminel repenti est plus utile qu'un pêcheur mort. Il mène ainsi son récit à son terme avec une clôture très habile, à la fois ouverte sans avoir à expliciter ce qu'il advient de Gabriel Marpa, à la fois historique avec l'annonce de l'invasion du Tibet par les forces militaires chinoises, à la fois de manière cyclique en bouclant sur la scène d'ouverture du premier tome avec une élégance rare.



Le lecteur referme ce dernier tome de la première saison, repus et content. Il ne s'attendait pas forcément à une narration visuelle aussi aboutie et intemporelle : Georges Bess réalise une reconstitution historique remarquable, avec des personnages plausibles et naturels, et des mises en scène claires et exprimant avec conviction le propos du scénariste. Alejandro Jodorowsky raconte une histoire déconcertante, celle d'un enfant blanc qui devient un saint homme, accédant au degré le plus élevé de l'éveil bouddhique, sans trop développer la Foi associée, tout en évoquant les valeurs morales avec pertinence, et en conservant les miracles spectaculaires. Le lecteur n'a d'autre choix que d'accepter cette forme s'apparentant au roman d'aventures, tout en reconnaissant que le dogme principal de l'interdépendance universelle est présent du début à la fin. Une histoire originale qui n'a pas pris une ride et qui se lit avec un plaisir immédiat, sans nécessiter de recontextualiser l'œuvre dans la production de l'époque.
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