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Critiques de Alexandre Soljenitsyne (392)
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Une journée d'Ivan Denissovitch

Qu'est-ce qu'une journée dans une vie ? Pas grand-chose, non ?

Alors, qu'a-t-elle de particulier cette journée dont il est question dans ce livre ?



Tout d'abord, ce n'est pas celle d'un homme ordinaire, mais celle d'un zek, c'est à dire d'un prisonnier du goulag en URSS.

Cette journée laborieuse que l'auteur nous décrit par le menu, sans temps mort, d'une seule traite, nous semble sans fin.

Et surtout on perçoit qu'elle est semblable aux milliers qui l'ont précédée et aux milliers d'autres qui la suivront.

Tout l'art de Soljenitsyne est là : en peu de pages, faire sentir au lecteur la lenteur de l'écoulement du temps, la répétitivité des tâches effectuées par les zeks, l'absence d'espoir devant une durée de peine qui n'autorise aucun rêve.



Ne pouvant songer à l'avenir, les zeks ne sont préoccupés que par l'instant présent et ne pensent qu'à deux choses : manger et se protéger le mieux possible du froid sibérien.

Dans cette misère commune, ils font preuve d'une entraide virile, rugueuse et forcément touchante. Mais ils savent aussi se montrer très égoïstes et personnels par moments lorsque se présente l'occasion d'obtenir un peu plus de nourriture, de meilleurs vêtements contre le froid, une meilleure place où dormir ou une petite faveur auprès des gardiens.

Sojenitsyne décrit là une dualité qui peut paraître étonnante à première vue, mais qui est tout à fait logique compte tenu des conditions de vie dans le camp.



Dans un texte court et percutant, l'auteur fait comprendre l'arbitraire des arrestations, la longueur démesurée des peines infligées, l'inhumanité des goulags : toutes les horreurs du stalinisme, qu'il ne faut surtout pas oublier.

Il le fait avec une grande sobriété, et le résultat est d'autant plus fort, plus saisissant.

Avec ce premier roman (écrit en seulement deux mois !), Sojenitsyne fait preuve d'emblée d'un immense talent d'écrivain.
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L'Archipel du Goulag

Ce deuxième tome nous raconte les Camps.



Leur naissance, dès 1920, dans les îles Solovki d'abord puis leurs métastases, comme les appelle l'auteur, qui créeront cet Archipel qui finira par recouvrir tout le pays.







De ces camps, Alexandre Soljenitsyne va nous expliquer la création destinée d'abord à exterminer les "Ennemis du Peuple" puis à les faire travailler comme esclaves pour toujours plus de profit.



Il va ensuite nous narrer la vie quotidienne de tous ceux qui y vivent ainsi que ceux qui gravitent autour de ces camps.



Il y a bien sûr les gardiens dont il va nous expliquer la sélection pratiquée pour garder les plus " sadiques".



Il y a surtout les prisonniers dont à travers des témoignages, il va essayer de

décrire les vies et notamment celles des femmes et des enfants qui sont particulièrement effroyables.







C'est une lecture particulièrement éprouvante remplie d'abominations, l'auteur essaye parfois de mettre en valeur certains moments d'espoir, voire d'élévation de l'esprit qui lui auraient permis de tenir mais il faut avouer que l'ensemble est plutôt noir et souvent sans avenir pour ces ZEK.



Pour tous ceux qui s'intéresse au Goulag, c'est, à mon avis, une lecture

indispensable et qu'il ne faut pas lâcher malgré les 500 pages.

La question est : " Comment un pays peut-il en arriver là, à tuer ses propres enfants ?"



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L'Archipel du Goulag, tome 1

Ce livre est avant tout un témoignage, un récit contre l'oubli, un livre pour que vous ayez une pensée pour ces millions de personnes, souvent anonymes, disparues, avalées par le Goulag.



L'auteur nous explique pourquoi et surtout comment un pays en est arrivé, à partir d'une idéologie, à déporter, exterminer ses propres compatriotes.





Pour cela, il va nous raconter les arrestations, évoquer les grands procès puis parfois à titre personnel, les prisons ( comme la célèbre Loubianka ), les transferts puis les camps de transit tout en nous précisant que toutes ces étapes étaient un " paradis " par rapport à ce qui les attendait dans les camps du grand nord.



On ne peut pas résumer un livre comme celui ci, il faut le lire pour avoir un début d'explication sur ce que fut cet archipel du Goulag.



Nous avons à l'heure actuelle beaucoup d'informations sur le Goulag mais la parution en Occident de cet ouvrage fut un choc voir un traumatisme chez ceux qui croyaient encore dans la grande URSS et j'imagine que certains mirent en doute ces témoignages plus effroyables les uns que les autres.



Un ouvrage indispensable pour tous ceux que cette période de l'histoire intéresse, une lecture-hommage à ces hommes disparus et oubliés.

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L'Archipel du Goulag

Livre hautement intéressant d'un point de vue historique car l'auteur reprend la création et l'organisation des premiers goulags en Russie,puis il nous décrit les différents types de goulags ainsi que les types de population qui y sont enfermés.

L'auteur nous y décrit les terribles conditions de vie et de travail.

Tout comme d'autres ouvrages qui traitent des systèmes d'emprisonnement,de détention;surtout sous les régimes totalitaires,cet ouvrage est très dur à lire mais je crois sincèrement qu'il faut aller jusqu'au bout de l'innomable et de l'abaissement à cette cruauté qui n'est finalement qu'humaine.

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Une journée d'Ivan Denissovitch

... Car l’époque se prête à lire ou relire Soljenitsyne !

Plongée l’espace d’une journée dans le petit monde carcéral du goulag, Ivan Denissovitch nous raconte la journée type d’un condamné. Parce qu’il a écrit des mots ou tenu des propos qui sont jugés inconvenables aux idées du parti, ou eu une attitude anti patriotique, il en prend pour dix ans de bagne dans la plus clémente des sentences. C’est la règle dans ce pays rongé par le soviétisme, défécation d’un communisme qui vous veut du bien. En général, quand une idéologie religieuse ou politique vous veut du bien ou agit en tant que tel, à l’arrivée vous perdez une part non négligeable de vos libertés individuelles.

Alexandre Soljenitsyne écrit « Une journée d’Ivan Denissovitch » en 1962. Il profite de la « déstalinisation » du pays par Khrouchtchev pour le faire publier. Il y met néanmoins les formes. Il ne faut par heurter la sensibilité du polit bureau. C’est écrit dans le langage du moujik à dessein de toucher un large public et peut-être de montrer des bagnards au bord de l’analphabétisme : qui les plaindrait ? ça permet aussi au pouvoir de montrer les risques d’une trop forte contestation et que l’on ne badine pas avec la doctrine du parti...

Ça n’en rend que la lecture plus rugueuse et mal grès l’horreur qui règne dans ces camps de concentration ou de « rééducation », on sent parfois l’auteur avoir un certain sens de la dérision tant certaines situations sont désespérées. Il y a une pointe glacée d’humour, de sarcasme.

Une journée suffit car elles se suivent et se ressemblent toutes, amenant chacune sa pierre à l’édifice du malheur de toute cette communauté de victimes du soviétisme.

« Une journée d’Ivan Denissovitch » est une raison suffisamment argumentée pour que l’Ukraine écrase l’envahisseur mafioso-soviétique et que la démocratie l’emporte sur l’hégémonie des extrémismes, sur l’aliénation d’un dictateur.

Traduction de Lucia et Jean Cathala.

Editions Robert Laffont, Pavillon Poche, 226 pages.

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Le clocher de Kaliazine

J'ignorais que l'auteur de l'Archipel du Goulag avait écrit des poèmes. Et quels poèmes ! Ce petit ouvrage m'enchante et m'émeut. Il ne parle pas uniquement de la Russie mais s'adresse à tous avec simplicité et sincérité.

Soljenitsyne passe d'une brève description lyrique à une réflexion bien sentie, bien vivante et très libre. Et le poème tout entier est comme enluminé d'un profond mysticisme. le clocher de Kaliazine qui donne son titre symbolique au recueil fait référence à un édifice bien réel. Il survécut à la submersion partielle de la ville, située au bord de la Volga, lors de la construction d'un grand barrage au début des années quarante. Ce clocher servit temporairement de phare pour les navires.



Le recueil comprend deux séries de courts poèmes en prose écrits à trente ans d'intervalle.

Les dix-sept premiers ont été écrits entre 1958 à 1960, à une époque où Soljénitsyne explorait à bicyclette la Russie centrale. Ils diffusent une fraîcheur printanière, l'ivresse de la liberté retrouvée et en même temps l'amertume devant les scandaleuses destructions naturelles et patrimoniales. On peut aussi trouver ces poèmes, traduits par Lucile Nivat , dans l'ouvrage « Zacharie L'Escarcelle ».



Ensuite Soljénitsyne est contraint de s'exiler. Loin du contact de sa terre natale, il ne parvient plus à écrire de poèmes.



Avec le retour au pays natal, Soljénitsyne écrit les onze textes suivants, de 1996 à 1998. Ils sont publiés pour la première fois en 2004, quelques années à peine avant sa mort (2008) . Ils sont traduits par Nikita Struve. Ces miniatures sont également mélancoliques mais plus apaisées. Elles témoignent de sa sérénité à l'approche de la mort.

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Le pavillon des cancéreux

Riche et belle lecture que ce roman à la fois fresque sociale des années 50 soviétiques et incursion auprès de malades du cancer. Dans ce qui n'était pas encore (ou plus) l'Ouzbékistan, un hôpital accueille des personnes atteintes du cancer venus d'un peu partout en URSS. Le roman donne tour-à-tour la parole à Oleg, ancien prisonnier du goulag et à Roussanov, haut fonctionnaire pro-stalinien, ainsi qu'à d'autres personnages, géologues, médecins et infirmières, à la fois confrontés à la mort et aux débuts de la déstalinisation. L'une des forces de ce roman est cette introspection dans les pensées des protagonistes, opposées ou complémentaires, qui nous donnent un vaste aperçu de ce que pouvait représenter le parti communiste sous Staline pour les soviétiques. Au passage, Alexandre Soljenitsyne évoque pour la première fois sans doute dans un roman les dénonciations souvent arbitraires et intéressées entre voisins et la vie au goulag dans les années 40 - 50. L'auteur part bien sûr de sa double expérience de déporté et de cancéreux, à travers le personnage d'Oleg Kostoglotov.



Au début assez peu rassurée et par la taille de ce pavé et par le thème peu joyeux, j'ai en fait été happée par ce récit. Kostoglotov, en personnage meurtri et pourtant toujours plein d'espoir et de révolte, est vraiment attachant, et ceci jusqu'à la fin. Mais les autres personnages, Roussanov notamment, qui est l'exact opposé de Kostoglotov, est captivant aussi par sa vision conformiste à l'extrême du Parti.

Petit-à-petit, on s'installe dans ce pavillon bien vivant contrairement à ce qu'on pourrait imaginer car on y résiste avec passion et derniers sursauts d'espoir à la maladie.

Encore une très belle et riche découverte d'un Prix Nobel!
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Une journée d'Ivan Denissovitch

"Une journée d'Ivan Denissovitch" ne se lit pas comme n'importe quel livre. On sait quelle place très particulière il occupe dans la littérature mais aussi dans l'histoire du XXème siècle. En effet, témoignant "de l'intérieur" de l'horreur du Goulag, ces camps de concentration du régime soviétique, la parution de ce livre (le premier publié par Alexandre Soljenitsyne) a contribué fortement à la prise de conscience de l'arbitraire et de l'ignominie du régime stalinien et par ricochet à déconsidéré tous ceux qui se réclamaient encore du "petit père des peuples", le terrible Joseph Staline. On peut dire que ce livre a eu bel et bien une fonction "performative" pour reprendre une expression chère à Laurent Binet, l'auteur de "La septième fonction du langage".



S'il est incontestablement un témoignage extraordinaire sur la vie des zeks, ces prisonniers du Goulag (qui pour la plupart de savaient même pas quand prendrait fin leur détention) je suis moins persuadé de la qualité littéraire de l'ouvrage. Il y a eu quelques moments où j'ai vraiment été intéressé par cette lecture (le tout début et la toute fin, notamment) mais le reste du temps j'avoue m'être plutôt ennuyé et j'ai trouvé que l'écriture manquait de grâce. Je m'attendais à récit plus fort et j'ai été quelque peu déçu.
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Une journée d'Ivan Denissovitch

J'ai du temps. Il parait que c'est une denree rare et moi je la gaspille comme si elle etait intarissable. Pauvre de moi, je me crois riche en temps. Mais je me ressaisis. J'ai decide de renouer avec d'anciens amis, des vieux de la vieille dont j'avais perdu la trace. Je leur rends visite. Ca me fait un deplacement benefique pour le physique et pour le moral.

J'ai passe une excellente journee avec Leopold Bloom. Nous n'avons pas arrete de deambuler. Il a rate sa vocation: il aurait pu faire un excellent guide touristique de sa ville et au lieu de ca il a passe sa vie a denicher des publicites pour une feuille locale. J'ai ete voir aussi Geoffrey Firmin. Lui, il est devenu insupportable. Il est dans une mauvais pente et, tetu comme une mule, il ne veut ecouter les conseils de personne. Il finira mal. Il m'a attriste. Heureusement que cette semaine mon vieux pote Ivan a reussi a m'insufler son optimisme.



Cet Ivan! Quelle vie! Que ne lui est- il arrive! Mais rien n'a reussi a aneantir sa rage de vivre, a abattre son energie. J'etais hebete par ce qu'il m'a raconte. Pendant la grande guerre il a ete accuse a tort de trahison et a passe dix ans dans un camp de travail, une prison de travail. Il avait tout ce temps peur qu'on ne le laisse jamais sortir, qu'on lui rajoute 10 ans supplementaires a la fin de sa peine en invoquant n'importe quel grief. C'etait monnaie courante parait-il. Mais ca ne l'a pas empeche de faire son travail (on l'a institue macon) consciencieusement, avec un certain plaisir, le plaisir du travail bien fait. Ca ne l'a pas empeche pas de rester optimiste, se nourrissant d'espoirs simples: espoir qu'il fasse moins froid (il travaillait meme quand il faisait -30), qu'il arrive a se demerder une deuxieme ration de kacha, qu'on ne l'envoie pas a des travaux qu'il n'aime pas, qu'il ne s'affaiblisse pas, espoir de continuer a vivre, tout simplement espoir de ne pas mourir trop tot d'aneantissement.



Il m'a raconte dans le detail une de ses journees la-bas, une journee objectivememt insupportable, atroce, mais qu'il finit par signaler, une fois finie, comme une bonne journee. Dure, mais pour une journee de camp, endurable, et meme bonne, avec de petites, infimes, joies. Debrouillard, il s'est procure du rab de pain et de kacha, il a fume une cigarette de tabac passablement pur, un detenu a qui il a rendu service l'a gratifie d'une rondelle de saucisson. Parce qu'il aide les autres, Ivan, et il est respecte pour cela et aussi parce qu'il ne se laisse pas marcher sur les pieds. C'est qu'il n'est pas de ceux qui se laissent abattre, il ne se rend pas. Il ne se rendra jamais. Meme apres huit longues annees, m'a-t-il dit, il gardait l'espoir (fou!) que dans deux ans, une fois finie sa peine, on accepterait en haut lieu sa liberation, on le laisserait sortir. Et il est sorti. Et maintenant il raconte. A qui veut l'entendre. Sans pathos. Sans s'appesantir sur la cruaute de la situation, sur la barbarie. Avec une sorte de neutralite. Sans hausser le ton. Sans jeremiades. Il est surement amer, mais tient a ne pas le montrer. Et c'est moi qui, du coup, me suis empli d'amertume, de degout. Il est revolte, mais il ne le crie pas. Et son recit me revolte, moi, aujourd'hui.



Il m'a dit qu'il a couche sur le papier ses souvenirs. Il a appele ca "Une journee". J'espere que le damne regime qui l'avait enferme finira par lui donner l'imprimatur, l'autorisation de publier. Si cela arrive jetez-vous sur le livre. On a deja assez ecrit sur le goulag, peut-etre mieux (Soljenitsyne dans L'archipel du goulag, Chalamov dans Recits de la kolyma, entre autres), mais le recit d'Ivan sera une reference morale, un monument a la dignite humaine, surmontant l'horreur.
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L'Archipel du Goulag, tome 1

Écrit dans la clandestinité en une vingtaine d’années à partir de sa propre expérience d’emprisonnement et de témoignages d’anciens détenus, ce livre a eu, à partir de sa publication en 1973, un impact déterminant dans les milieux intellectuels de gauche qui refusaient toujours de condamner les dérives infernales du stalinisme.

Ayant miraculeusement survécu au Goulag, Soljenitsyne prend la voie en son nom, mais aussi en celui des compagnons d’infortune qui n’ont pas pu s’en tirer, par devoir de mémoire envers les morts et pour éviter au plus grand nombre possible d’innocents de connaître un pareil péril.

On y trouve une dénonciation en règle d’un système qui partait du doux rêve d’un paradis égalitaire pour aboutir en cauchemar kafkaïen, l’exposition minutieuse des mécanismes staliniens qui ont fini par paver un enfer à partir des bonnes intentions humanistes de Marx et de Lénine.

Toute la rationalité anti-humaine du système est exposée minutieusement, implacablement : l’appareil de délation, le mécanisme de tortures, l’injustice des condamnations politiques, les conditions ignobles d’emprisonnement, tout y passe.

Le résultat donne un livre fascinant, très lourd à lire, mais difficile à quitter, qui me semble propre à briser même les plus profonds sommeils idéalistes.

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Le pavillon des cancéreux

L'histoire se déroule en Ouzbékistan quelques mois après la mort de Staline. Paul Nikolaievitch Roussanov intègre le pavillon des cancéreux pour une tumeur au cou. Fonctionnaire modèle, il est presque outré qu'une tumeur ose s'attaquer à un cadre du parti. Le manque d'empressement des médecins à son chevet le scandalise, puis l'angoisse quand il se rend compte que cette fois-ci, ses nombreuses relations ne pourront l'aider en rien. Les bouleversements dans la société ne le calment en rien : les anciens camarades qu'il a courageusement, et anonymement, dénoncés risquent d'être réhabilités. L'anniversaire de la mort de Staline est célébrée de manière extrêmement discrète, à la stupeur de certains malades pour qui il représentait toute leur vie.



À côté de Roussanov se trouve Oleg Kostoglotov. Son parcours est diamétralement opposé : il a passé plusieurs années dans les goulags, et en est sorti uniquement pour se faire soigner. Il tente alors de reprendre un peu de contrôle sur sa vie en contestant les choix des médecins et en essayant de peser sur leurs décisions : il se documente lui-même sur le cancer pour tenter de connaître précisément son état, il tente de convaincre les médecins de le laisser partir pour qu'il profite des derniers mois qu'il lui reste à vivre, il s'oppose aux injections d'hormones qui le rendront impuissant.



Autour de ces deux personnages gravitent plusieurs autres personnalités intéressantes : Ephrem Poddouïev qui a vécu en égoïste et qui s'interroge sur le sens de la vie quelques jours avant de mourir; Vadim, persuadé d'avoir la mission de faire une découverte scientifique importante, et qui craint de mourir avant de la mener à bien; Chouloubine, qui a renié tous ses principes et toutes ses convictions pour se protéger, mais qui en souffre terriblement; Chaly, qui parle fort, boit de la vodka, et joue au poker, pour se convaincre lui-même que ce qu'il a n'est pas grave; Lioudmila Afanassievna Dontsova, médecin qui se spécialise depuis des années dans le cancer avant de s'apercevoir qu'elle en ressent les premiers symptômes; Vera Kornilievna Gangart, infirmière écarsée par la solitude, qui préfère se faire passer pour mariée par peur d'affronter les regards des autres.



L'intérêt de l'histoire se situe à deux niveaux : humain tout d'abord, en découvrant tous ces hommes devenus égaux par la maladie, partageant les mêmes craintes et les mêmes espoirs fous (commme cette course au champignon de bouleau qui aurait le pouvoir miraculeux de guérir le cancer), et qui s'interroge sur le sens de leur vie. Et politique ensuite, où partisans et adversaires du stalinisme s'affrontent. Le changement qui s'annonce peu de temps après la mort de Staline rend encore plus dérisoires tous les efforts consentis et les sévices subis pendant cette période.



Le pavillon des cancéreux est un livre magnifique. Et curieusement, malgré la noirceur des thèmes abordés, c'est avec un sentiment d'espoir et de joie de vivre que j'ai refermé ce chef-d'œuvre.
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Une journée d'Ivan Denissovitch

Court roman grandement censuré parut en 1962 dans le magazine littéraire Novy Mir, sous l'effet de la déstalinisation, puis sous la même forme censurée en France. En 1973 paraîtra l'intégrale française. Il aura fallu 20 ans de l'idée à la publication !



Pour la première fois l'existence des goulags arrive à la connaissance du public avec ses règlements, les conditions de détention et de travail et la déshumanisation qui va de pair. Ivan Denissovitch Choukhov raconte une journée type de sa vie, manifestement positive, homme simple qui ne perd pas d'énergie à s'insurger contre son enfermement arbitraire, qui fait preuve d'une adaptation à toute épreuve avec le fatalisme inhérent au peuple russe !



Même non censuré, ce témoignage donne l'idée de conditions moins rudes et inhumaines que dans la Kolima, bien que restant abjectes !



Que 3 étoiles parce que malgré sa brièveté, ce texte n'a pas été des plus faciles à lire, le style, si style il y a, est haché assez ennuyeux alors que j'ai beaucoup aimé Choukhov. Je ne sais pas si c'est le fait de la traduction ou si c'est l'écriture de Soljenitsyne, mais j'ai le souvenir de ne pas avoir aimé sa prose avec ses premiers livres.



Quelles qu'en soient les qualités littéraires, c'est un texte qu'il faut avoir lu en gardant en tête que ce fut le premier !



Challenge MULTI DEFIS 2021

Challenge RIQUIQUI 2021

Challenge SOLIDAIRE 2021

Challenge ATOUT PRIX 2021

Pioche dans ma PAL juillet 2021
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Zacharie l'escarcelle et autres récits

Alexandre Soljenitsyne nous a accoutumé aux longs et intimidants pavés, comme L’archipel du goulag et Le pavillon des cancéreux. Eh bien, il a réussi à me surprendre avec ce court recueil d’à peine cent pages. Mais il y a plus. Passé la surprise de la brièveté inhabituelle, il y a le style qui est diamétralement à l’opposé de ses autres écrits très réalistes. D’abord, des études et miniatures très, très succinctes (parfois seulement d’une page) mais ô combien jolies. Rarement l’évocation d’un mignon petit animal, d’un arbre ou d’un paysage couché sur papier ne m’a autant inspiré. J’ai découvert à son auteur des élans poétiques insoupçonnés.



Puis vient la nouvelle éponyme, Zacharie l’Escarcelle. C’est à la fois un portrait et… je ne saurais trop dire quoi. Dans tous les cas, je l’ai trouvé bien réussie. Lors d’une randonnée à la campagne, des amis tombent sur cet homme, un gardien, à l’air mi-paysan mi-brigand. Cet homme veille autant qu’il le peut sur quelques arpents de terre oubliés de tous, le Champ-des-Bécasses. Ce site d’une bataille historique que les Russes ont gagné sur les Hordes contient entre autres un mémorail vandalisé et une église dévastée et remplie de graffitis. C’est un peu triste, nostalgique.



Pourquoi j’aime cette nouvelle ? Il y a le portrait de ce vieil homme, fier, probablement un vétéran d’une guerre quelconque, qui prend sa tâche très sérieux malgré la décrépitude des lieux qui auraient dû inspirer le respect. La narration, qui fait des bonds dans le passé (presque comme la réminescence de vieux souvenirs), rend à ces lieux leur gloire d’antan, avec les hauts faits d’armes des Russes des siècles précédents. Un certain hommage aux héros de la Seconde guerre mondiale ? Et il y a ces extraits de poèmes d’Alexandre Blok, parsemés ici et là, qui ajoutent à la beauté et è la majesté des lieux. Tellement que l’écriture de Soljenitsyne s’en trouve, selon moi, elle-même embellie.



Les deux dernières nouvelles, d’environ vingt ou trente pages chacunes, m’ont un peu moins plu. Elles sont écrites dans un style assez semblable mais leur sujet m’a moins intéressé alors elles me sont peu restées en mémoire : des blessés dans un hôpital et une procession qui tourne mal. N’empêche, pour des écrits de jeunesse, c’est tout de même assez réussi. Belle petite découverte!
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Une journée d'Ivan Denissovitch

Ce livre tient une place primordiale dans la littérature mondiale. Premier récit du goulag. Dénonciation des camps soviétiques. Soljenitsyne fut un pionnier. A ce titre, ce livre mérite les 5 étoiles. Je ne reviendrai pas sur le récit, d'autres lecteurs l'on déjà très bien fait. Juste mon ressenti. J'en ai parcouru la plus grande partie en diagonale. A notre époque, nous ne sommes plus surpris par ces dénonciations. Partout, de la maltraitance humaine et des atrocités peuvent s'observer. Je repense à la description des camps de ouigours par les chinois dans le Xinjiang par Sayragul Sauytbay, pour ne citer qu'un exemple. de plus, la traduction de l'édition de 1974 que j'ai lue m'a parue très pauvre et ne met pas le récit en valeur. Beaucoup de redondances également, même si elles sont justifiées par le déroulement de la journée. Et j'ai senti une certaine distance avec ce que je pense être la réalité. Comme si le fait de l'écrire en diminuait la portée. Mais, tout cela n'est que mon impression qui compte vraiment très très peu. Je pense que ce livre paru en 1963 en français devait avoir une toute autre portée à l'époque.
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Le clocher de Kaliazine

Suite à ma lecture du livre sur la Russie d’Irina Volkova, j’ai cherché des infos sur le fameux clocher immergé de Kaliazine. C’est ainsi que je suis tombée sur ce petit recueil d’Alexandre Soljenitsyne.



Il s’agit de 28 textes publiés entre 1958 et 1998. Ils sont très courts mais ils en disent beaucoup sur l’espoir, les petits bonheurs du quotidien et autres moments d’éternité comme j’aime les appeler.



Je n’ai pas vraiment satisfait ma curiosité sur Kaliazine mais j’ai trouvé ce recueil excellent.









Challenge littérature slave orientale
Lien : https://www.babelio.com/grou..
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Une journée d'Ivan Denissovitch

La journée d’Ivan Denissovitch Choukhov n’est pas une journée pleine de rebondissements ; c’est une journée comme les trois mille six cent cinquante autres journées qu’il passera dans un bagne d’Asie Centrale, dix-sept très longues heures régies par un froid inhumain, la faim lancinante et la peur omniprésente. Ne pas tomber malade, ne pas se couper, ne pas se faire prendre par un garde, ne pas faiblir, pour ne pas finir au mitard, ne pas finir au mitard pour ne pas sortir du camp les pieds devant. Il faut composer, ruser, simuler et calculer pour survivre, supporter l’horreur et l’abjection avec le mince (très très mince) espoir de voir arriver le dernier des trois mille six cent cinquante jours…

Lorsque par une circonstance extraordinaire et ahurissante (c’est Khroutchev lui-même qui l’a fait publier, y voyant une dénonciation du culte de la personnalité de Staline !) La journée d’Ivan Denissovitch fut publiée, le monde entier découvrit la réalité de l’univers concentrationnaire soviétique, un environnement particulièrement inhumain, même si Soljenitsyne ne fait pas dans la caricature: le goulag était une arme du totalitarisme dont les conditions d’internement n’avaient rien à envier à celles des camps nazis, mais ne visait pas systématiquement à la négation de l’humanité comme ce fut le cas des nazis ; il existait des solidarités, certains gardiens étaient moins inhumains que d'autres, si bien que l’espoir pouvait subsister.

Ce fut donc une bombe littéraire que ce texte inoubliable écrit dans la langue vive, truculente et lyrique qui recréait l'argot des camps, une langue qui sonnait si vrai pour la bonne raison qu’Alexandre Sojenitsyne lui-même y avait passé huit ans.

Ivan Denissovitch a maintenant 50 ans et ce texte résonne toujours comme un hymne à l’Humanité, avec un grand H.

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Une journée d'Ivan Denissovitch

De l'art de survivre ou comment l'univers impitoyable des camps génère ses propres règles. Ici cependant, sans vouloir atténuer la monstruosité de ces camps, le totalitarisme n'a pas encore atteint son summum. A la différence des camps de concentration décrits par Primo Lévi, la négation de l'humanité, ou selon Hannah Arendt la transformation de la personnalité humaine en une simple chose n'est pas totale. Les hommes sont résignés, mais l'humanité, la fraternité à l'intérieur de la brigade, la lueur d'espoir d'une fin de peine ne sont pas éteintes. Les derniers commentaires de Choukhov sur cette journée « presque de bonheur » sont à la fois terribles et réconfortants.
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La maison de Matriona

La maison de Matriona est une nouvelle bouleversante.

A l'été 1956, Ignatitch, le narrateur, vient de passer dix ans dans un camp de relégation ( goulag ). Il aspire à " pénétrer et se perdre dans les entrailles de la Russie". Il demande et obtient un poste de professeur de maths dans un bled perdu, sans charme, où l'on produit de la tourbe. Non loin de là, il trouve à se loger chez la vieille Matriona. Elle vit seule dans une isba misérable infestée de souris et de cafards. Elle ne perçoit pas de pension de retraite et ne réclame rien. Elle semble vivre en dehors du monde et n'avoir rien à dire. Pourtant, Ignatitch se sent bien auprès d'elle et de son beau sourire. Il lui raconte ce qu'il a vécu. Matriona se révèle alors à lui, à nous...

La nouvelle est en partie autobiographique. Elle a été écrite en 1959 et publiée en 1963 suite au triomphe d'Une journée d'Ivan Denissovitch .C'est un témoignage vivant et précis sur la Russie rurale très pauvre des années cinquante mais ce n'est pas un livre politique ni un roman à thèse. Ce qui touche c'est la profonde humanité du texte. La bonté naïve de Matriona, sa générosité lumineuse et les autres tout autour qui abusent d'elle parce que c'est comme ça, que le bois est rare etc. On ne sort pas indemne de la nouvelle, on n'oublie pas Matriona.



Intitulée Chez Matriona sur le blog de Michel Tessier, traduite par ses soins en 2019.
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Une journée d'Ivan Denissovitch

La journée banale d'un bagnard banal dans un camp Russe ...



Une longue journée que nous raconte Soljenitsyne.

Celle d'Ivan Dessinovitch Choukhov.



Il se retrouve là, car il a été fait prisonnier pendant la guerre, et donc aussitôt soupçonné d'espionnage.

Il est devenu un simple matricule , sans histoire.

Il fait ce qu'on lui demande de faire, se soumet à la discipline et à la rigueur absolue de l'hiver, ne se révolte pas, ni ne se plaint vraiment.

C'est un doux parmi les brutes, qui se réjouit du moindre petit plaisir, du moindre instant volé , car il sait ( le sait- il ou est-il vraiment naïf , ) qu'il y en a si peu et qu'il faut en profiter, comme un Sage .

C'est cette abnégation, cette soumission totale qui m'ont le plus étonnée.

Il y a même une certaine forme de gratitude dans ce pauvre bougre.

Il trouve le moyen de se contenter de ce qu'il a , et trouver qu'une journée où l'on travail en mettant tout son cœur à l'ouvrage... c'est pas si pire...

Se coucher le soir en ayant pas grand chose dans le ventre, c'est mieux que rien....

Une belle lecture que je recommande.

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Le pavillon des cancéreux

J"ai lu ce livre alors que j'étais encore assez jeune, et j'en ai été marqué.

Je découvrais alors tout un tas d'idées de notions, avec lesquelles je n'étais pas familier : La dictature, le totalitarisme, l'emprisonnement, la maladie, la promiscuité, la misère, mais aussi la solidarité, l'amitié, l'instinct de survie.



Quand on entre dans cette lecture, on ne se doute pas que l'on va y passer autant de temps, ni que ses effets seront aussi durables.

Bref, c'est un incontournable de la littérature russe, mais j'oserais dire aussi de la littérature en général.

Il faut l'avoir lu. Donc je ne peux que écourter cette critique pour la terminer par : Lisez-le !

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