AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Antoine Choplin (592)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


La nuit tombée

Jusqu’à présent, je ne connaissais aucun roman d’Antoine Choplin. Cette erreur est heureusement réparée. J’ai découvert "La nuit tombée" dans le cadre de ma formation de bibliothécaire bénévole, en préparant une fiche d’analyse comparative roman court/nouvelle.



"La nuit tombée" donc ! Gouri, le personnage principal, traverse de nuit la campagne ukrainienne sur sa moto. A celle-ci est accrochée une remorque… car il revient, il revient sur une vie ancienne, dans des lieux désertés, une zone sinistrée après le 26 avril 1986, il revient pour accomplir une mission… surtout ne pas aller plus loin pour dire, dire le choc d’une telle lecture, dire l’admiration d’une telle écriture.



L’auteur a l’art de raconter, de transmettre en peu de mots. Les phrases sont courtes, simples, elles percutent. Aucune ostentation pour dire les sentiments, les anciens amis restés sur place, la maladie latente ou profondément installée, tout ce qui suinte de la catastrophe. Pas de plaintes, pas de larmes, pas de cris. Tout est narré avec économie et pudeur : les lieux, les sentiments, les amis. Tout est narré à coups de vodka comme s’ils buvaient pour "faire passer", faire passer la douleur, faire passer les souvenirs, faire passer l’horreur, tout oublier.



J’ai pourtant envie de dire qu’Antoine Choplin fait de cette horreur un roman lumineux, empreint d’humanité, de tendresse, de solidarité. Il parle d’elle, de cette horreur, par suggestion : "Mais, tu vois, ce qui m’inquiète aujourd’hui, c’est ça. Du menton, il désigne son bras couvert de pansements. Cette peau qui part en lambeaux…. Et les médecins, qu’est-ce qu’ils en disent ? demande Gouri. La main de Iakov se soulève de quelques centimètres et retombe sur le drap." Le silence plutôt que les pleurs.

La narration est linéaire même si les souvenirs se mêlent au présent. Les silences succèdent aux dialogues comme pour au lecteur le temps de s’imprégner, de comprendre, de partager. Et à la fin "Gouri retrouve sa moto… Il met le moteur en marche."



Tout en retenue, ce roman est un véritable bijou de dignité.

Commenter  J’apprécie          50
La nuit tombée

On parle souvent dans les medias de la nature après la catastrophe de Tchernobyl mais plus rarement des gens. Recit bref mais emouvant. Je suis totalement rentre dans texte.je dois en savoir plus maintenant. Au travail !
Commenter  J’apprécie          10
La nuit tombée

Le 26.04.86, la nuit tombait en effet sur Tchernobyl, sur Pripiat, sur l'Ukraine, et au-delà sur la planète entière, et 36 ans plus tard, personne n'est capable de dire ce qu'il se passe sous le sarcophage construit à la hâte sur la centrale toxique pour des centaines de milliers d'années, la guerre en Ukraine menaçant en prime de servir de détonateur au feu d'artifice final.





Gouri a vécu le feu nucléaire, avec sa femme, sa fille Ksenia, aujourd'hui malade de l'atome. Ecrivain public à Kiev, deux ans après l'incident mondialement minimisé, il souhaite rentrer chez lui, dans son appartement, d'où il a été éjecté avec tous les habitants de cette ville-modèle. Il a emporté tout ce qu'il a pu, gonflant même ses poches jusqu'au dernier moment de babioles et de menus objets, flacon de parfum, canif, loupe, coquillage, calculatrice. Il veut récupérer un souvenir, qui a peut-être échappé aux pillards, et lui rappelle ainsi qu'à sa fille, ces journées de printemps, aux bruits joyeux de la fête qui se prépare, aux tenues légères des femmes parlant entre elles, aux auto-tamponneuses qui s'apprêtent à tamponner.





A bord d'une vieille moto et d'une carriole, Gouri traverse la nuit, des forêts que la puissance évocatrice de l'auteur rend présentes, menaçantes, infectées au césium, rencontre des amis, des Samosioly, “ceux qui se sont installés d'eux-mêmes”, tels que les décrit Igor Kostine. La plume d'Antoine Chopin est légère et sensible. Ses images poétiques font mal. Un roman bref, fort, émouvant, qui tire des larmes à ceux qui savent que le nucléaire entraîne plus vite le monde à sa perte. Merci à Antoine Choplin !
Commenter  J’apprécie          130
La nuit tombée

Je n’aurai pas grand chose à dire sur La Nuit tombée. Pourquoi? Parce qu’à peine en ai-je tourné la dernière page, j’ai déjà oublié ce que ça racontait, et je suis obligée de me fier au résumé de l’éditeur. Aïe, comme vous le pensez, ça ne sent pas bon. Vous n’avez pas tort.



Je me suis ennuyée. Profondément. Déjà que j’ai du mal avec ce thème de Tchernobyl (j’ai ressenti le même ennui à la lecture du pourtant splendide Un printemps à Tchernobyl, d’Emmanuel Lepage chez Futuropolis) mais là en plus le style, ces phrases courtes, lapidaires, ces dialogues hachés là où j’aime les longues tirades et les bavardages à n’en plus finir, décidément, ça n’a pas fonctionné.



Je réessayerai parce que je sens qu’il y a quelque chose, là. Mais un autre texte, un autre thème, quelque chose auquel je serai moins fermée.
Lien : http://www.readingintherain...
Commenter  J’apprécie          00
La nuit tombée

26 ans après la catastrophe de Tchernobyl, A. Choplin rédige ce petit roman incandescent et magnifique.



Gouri est écrivain public à Kiev, mais il vient d'un petit village, Pripiat, d'où il a été obligé de partir peu après la catastrophe nucléaire qui a ravagé la région. Sa fille, Ksenia, est malade des radiations et pour elle, Gouri part, sur sa moto brinquebalante, rechercher un objet précieux resté dans l'appartement, bravant l'interdiction et les dangers entourant cette zone désormais interdite. Sur sa route, il s'arrête chez d'anciens amis, et, le temps d'une soirée autour de verres de vodka, malgré le mal qui rôde et ronge le corps de plus en plus faible de l'un d'eux, Iakov, on évoque le passé, le monde qui a basculé d'un coup, on raconte, on s'émeut, on rit...



C'est un voyage poignant auquel Antoine Choplin nous convie, dans une langue très personnelle, les personnages parlent sans ponctuation de dialogue, mêlant leurs voix à des descriptions sobres mais imagées, restituant un paysage fantomatique, fascinant et horrifiant à la fois. Le héron de Guernica était déjà très réussi, mais là, j'ai été vraiment scotchée.



"Il n'y a pas longtemps, quelqu'un m'a dit que là-bas, certaines nuits, les arbres se mettaient à rougeoyer.



J'ai vu ça de mes propres yeux. On a vu ça, avec les gars. Un truc étrange. Tu regardes ça et même si t'as une grande gueule je peux te dire que ça te ferme le clapet."
Lien : http://dautresviesquelamienn..
Commenter  J’apprécie          50
La nuit tombée

Un très joli récit sur les conséquences du changement radical de vie des personnes qui habitaient Prypiat (Tchernobyl), leur désir d'y retourner, la vie qu'ils ont perdu et regrettent. Conscients de la dangerosité d'y retourner, certains bravent tout de même l'interdit la nuit tombée.
Commenter  J’apprécie          00
La nuit tombée

Un petit bijou. Gouri se rend à Prypiat deux ans après la catastrophe de Tchernobyl. Nouvelle ville à l'époque, moderne, dont l'activité tait celle de la centrale devint lors de la catastrophe une ville fantôme.

faisant escale parmi ses copains de l'époque, puis terminant son voyage pour trouver ce qu'il venait chercher, un cadeau pour sa fille, Gouri nous fait découvrir l'atmosphère post apocalyptique de ces lieux maudits.

Une tranquillité mortifère, une poétique maladie qui s'infiltre dans la nature même des choses, es relations perdues qui se retrouvent pour un dernier souffle, la vie autrement, la vie après.



C'est un texte délicat, un récit doux comme un bonbon, Antoine Choplin fait montre d'une grande sensibilité et 'une certaine pudeur. Chaque personnage est touchant mais demeure digne dans sa façon d'être et possède même une once d'héroïsme qui n'a rien de désespéré. C'est une autre vision de cette partie dévastée du monde, une autre façon de la décrire moins documentaire, moins tragique, mais avec la tristesse existentielle des personnes hantées par les fantômes d'autrefois.

La perte d'amis, mais surtout celle d'un quotidien jamais retrouvé.



Une vraie belle découverte.
Commenter  J’apprécie          130
La nuit tombée

Antoine Choplin est un magicien!



Il ne se passe rien, ou en tous cas grand chose. C'est très court, rapide à lire. Mais quelle aventure, quel voyage ..



On se retrouve plongés dans les décombres, dans la cendre, dans la peur ...



un roman magnifique. Pas bien gai, mais magnifique.
Commenter  J’apprécie          40
La nuit tombée

J'ai longtemps hésité à lire ce roman pour diverses raisons. La nuit tombée est un court roman d'Antoine Choplin qui m'a entraîné dans le voyage de Gouri sur sa moto qui tire une remorque brinquebalante. Nous sommes en Ukraine. C'est un voyage entre Kiev et Pripyat, deux ans après le drame de Tchernobyl, rappelez-vous c'était un certain 26 avril 1986. Gouri, sa femme et sa fille, comme des milliers de personnes ont dû fuir rapidement la zone contaminée dans les jours qui suivirent l'événement.

Il revient là-bas deux ans après, il revient sur ses pas. Pourquoi revient-il ? Il revient avec une idée dans la tête. Retourner à l'appartement de Pripyat qu'ils habitaient, la grande ville aux abords de la centrale nucléaire, la grande ville effervescente qui étaient grouillantes de vies il y a encore deux ans, où les habitants vivaient de cette proximité.

Sur cette route il fait halte dans un petit village chez Vera et Iakov, un couple d'amis et c'est brusquement une longue rencontre faite de retrouvailles et d'émotions. Il y a de la joie à se retrouver. Les gestes se retiennent, s'effleurent un peu. La vodka coule dans les verres, les langues se délient, les souvenirs aussi s'invitent, les larmes se retiennent cependant encore derrière des digues que l'on sent aussi fragiles que le sarcophage qui recouvre désormais le réacteur de la centrale de Tchernobyl.

Avec l'évocation des souvenirs récents et tenaces, des scènes sidérantes se reconstituent sous nos yeux pour dire ce qui fut l'innommable. Comme cette vieille femme qui ne voulait pas fuir sa maison et que deux hommes sortent de chez elle de force à bouts de bras comme si elle était un cadavre... Comme cette maison qu'on décide de démolir et d'engloutir dans une fosse creusée à cette effet par des pelleteuses.

Le père et le fils contemplent ce désastre, ils pensaient avoir vidé la maison et brusquement surgit parmi les décombres une petite Tour Eiffel dans sa bulle de verre où coulait la neige, souvenir désuet de Paris... Comme cet homme, un de ces volontaires chargés d'accompagner l'évacuation des lieux et qui, une nuit, courut tel un illuminé vers cette forêt dont les arbres s'étaient mis soudainement à rougeoyer. C'était comme le chant des sirènes...

Tchernobyl est une de ses catastrophes violentes et insidieuses dont on ne sent pas le mal immédiatement.

Le paysage au début semble comme n'avoir jamais changé. Les gens aussi. Rien ne se voit dans l'air ni dans le vol des oiseaux. C'est après...

Il paraît que, lorsque l'endroit fut vidé de sa population ou presque, les animaux se réapproprièrent ce territoire y compris dans les rues désertes de Pripyat. Des oiseaux entraient dans les maisons et les fenêtres lorsque les fenêtres étaient restées ouvertes. Et puis vinrent aussi des pillards, par centaines, bien que l'accès fût surveillé et protégé sans cesse par les forces de l'ordre...

Gouri, en revenant sur les lieux du drame, sur ce lieu qui restera contaminé durant des centaines d'années encore et sans doute bien plus encore, risque sa vie pour pas grand-chose... On saura plus tard pourquoi il va là-bas, et pourquoi son voyage ultime doit s'effectuer à la nuit tombée...

Mais peut-être l'instant le plus émouvant dans ma lecture fut lorsque Iakov, qui sait qu'il n'en a plus pour très longtemps à vivre, demande à Gouri de l'aider à écrire une lettre pour Vera, parce qu'il ne sait pas bien poser les mots sur une feuille de papier... C'est peut-être là que les digues que j'évoquais plus haut commencèrent à se fissurer, pas celles qui retenaient ce maudit atome en fission, mais celui d'un coeur en sanglot.

Voilà ! Tout ce texte est ainsi tissé par l'écriture empathique d'Antoine Choplin, pudique, tout en retenue. L'horreur de cet événement est dit par ellipse, le sujet n'était pas facile à aborder, il y a une poésie à la fois lumineuse et saisissante qui ne fuit pas cette horreur, qui ne se complet pas dedans, qui dit simplement avec des mots touchants le drame humain qui s'en est suivi pour des milliers de familles...

La trajectoire de Gouri sur sa petite moto fragile ressemble à un chant crépusculaire. Sa quête est comme un geste aussi dérisoire qu'éprise de sens. Elle est belle.

J'ai été ému jusqu'aux bords des larmes par ce magnifique récit porté par beaucoup d'humanité. En refermant ce livre, je n'ai pas pu m'empêcher de penser au père d'une amie de mon épouse, elle s'appelle Svetlana, habite aujourd'hui dans le Finistère à quelques kilomètres de chez nous, son père était pompier là-bas au moment de « l'accident », dont la cause, il faut le rappeler, n'était rien d'autre qu'un essai technique de sécurité qui fut mal maîtrisé dans l'enchaînement de très mauvaises décisions. Il fut avec une quinzaine de ses collègues les premiers à intervenir auprès du réacteur en fusion. Ils furent aussi les premiers à décéder... Certains dès le lendemain...
Commenter  J’apprécie          7144
La nuit tombée

Gouri au guidon de sa moto quitte Kiev où il habite maintenant pour retourner à Pripiat, dans " la zone" pour récupérer un souvenir dans son ancien appartement.

Ce voyage lui permet de retrouver en chemin des anciens amis et d'évoquer avec eux les bons et le mauvais moments de leur jeunesse et surtout "l’évènement" l'explosion de la centrale nucléaire dans la ville où ils habitaient, la décontamination, l'exode, la peur, les regrets, la maladie.

Un roman poignant, aux accents et à la philosophie slaves où le chant, la musique, la vodka et la poésie sont là pour aider, consoler et se résigner.
Commenter  J’apprécie          80
La nuit tombée

Voilà un tout petit livre de 122 pages, où la phrase est économe, l'écriture discrète, pudique, où les non-dits laissent entrevoir la souffrance et où, au milieu de la désolation, subsiste l'amitié, la fraternité et la poésie.

Le temps est celui d'une nuit au cours de laquelle Gouri retourne dans la zone interdite où il vivait avant la catastrophe et s'arrête chez des amis, Vera et Iakov qui ont été évacués mais sont restés à proximité.

Il est poète, écrivain publique. Depuis deux ans et demi qu'il est parti à Kiev, il écrit un poème tous les jours pour garder un lien avec ceux qui sont restés



"Il y a eu la vie ici

Il faudra le raconter à ceux qui reviendront

Les enfants enlaçaient les arbres

Et les femmes de grands paniers de fruits

On marchait sur les routes

On avait à faire

Au soir

Les liqueurs gonflaient les sangs

Et les colères insignifiantes

On moquait les torses bombés

Et l'oreille rouge des amoureux

On trouvait du bonheur au coin des cabanes

Il y a eu la vie ici

Il faudra le raconter

Et s'en souvenir nous autres en allés" (pages 71/72)



Jamais, le nom de Tchernobyl n'est prononcé. On pourrait être à Fukushima ou ailleurs.

L'important ce sont les hommes, leurs souffrances et l'humanité qui survit à la désolation.



Un vrai coup de coeur.
Lien : http://leslivresdechris.blog..
Commenter  J’apprécie          40
La nuit tombée

J'adore le style d'Antoine Choplin. Je suis toujours impressionnée par sa capacité à faire passer beaucoup d'émotions dans des textes courts, sans bavardages inutiles, parsemés de silences.

Ses personnages sont humains, authentiques et les sujets sensibles (Tchernobyl, Guernica...). L'empathie, la fraternité et la poésie sont présents dans ses romans.

Ici, on est en Ukraine, deux ans après la catastrophe de Tchernobyl, et on suit Gouri qui doit retourner dans la zone interdite afin de récupérer un objet cher à son cœur.

Au cours de son périple, il retrouve les amis qui sont restés sur place et qui en subissent les conséquences tout en restant dignes. C'est un roman émouvant et juste.
Commenter  J’apprécie          30
La nuit tombée

L'écriture pudique, intimiste et retenue, néanmoins poignante,d'Antoine Choplin, m'avait déjà beaucoup touchée pour " Côté cour " et "Le héron de Guernica ". Voilà encore un fait qui aura marqué à jamais l'histoire et bouleversé le cours de la vie, le destin des hommes. Par de courts dialogues, il restitue l'ambiance, suggère les pensées cauchemardesques et l'horreur des souvenirs liés à la catastrophe de Tchernobyl. Gouri a participé à l'enfouissement des déchets dans la zone, il a échappé, pour l'instant, à la maladie, pas sa fille, ni la plupart de ses amis, c'est pour cela qu'il doit revenir à Pripiat, pour y chercher une part intime de ce qu'il y a laissé. Tout est dit, en peu de mots, intenses.
Commenter  J’apprécie          60
La nuit tombée

Un peu plus de 2 ans après l’explosion de la centrale nucléaire de Tchernobyl, Gouri, qui s’est exilé à Kiev avec sa famille, revient dans les villages jouxtant l’ancienne centrale. Il rend visite à des amis qui sont restés là envers et contre tout, malgré la maladie qui commence à frapper. Il prévoit d’attendre la nuit pour s’introduire dans la zone interdite, au plus près de la centrale, et rejoindre le village de Pripiat pour retourner dans l’appartement qu’il habitait au moment du drame.





Je ne sais pas si l’auteur a voyagé en Ukraine pour écrire son roman, mais ce qui est certain, c’est que l’on a l’impression d’y être. Il restitue pour nous le silence qui plane sur les villages qui entourent la centrale, la désolation des maisons abandonnées, l’épaisseur de l’air avec ce « je ne sais quoi » qui s’insinue dans tout votre être, les pillards qui continuent à rôder au péril de leur vie. Cela donne un roman à l’ambiance très particulière, qui m’a beaucoup plue.





Malgré le sujet et la mort qui plane au-dessus des personnages, je n’ai pas trouvé ce roman pesant. Au contraire, il est lumineux, très humain. En effet, autour de Tchernobyl, la vie continue envers et contre tout. Ceux qui sont restés, désormais isolés, combattent la maladie comme ils le peuvent, s’entraident, profitent du temps qui leur reste et ravivent les beaux souvenirs.





Les personnages de ce roman sont pour la plupart en sursis. Après l’explosion, les hommes ont été enrôlés pour enfouir les retombées nucléaires dans la terre, au nom du patriotisme et de la promesse d’une grosse rétribution. Certains sont déjà malades, comme Iakov, d’autres attendent d’être rattrapés. Gouri, lui, s’en est allé quelques jours après l’accident, et on ressent chez lui une certaine culpabilité de les avoir abandonnés. Mais il n’est pas épargné non plus puisque sa fille Ksenia est très malade. J’ai été particulièrement touchée par Iakov qui, aux portes de la mort, se soucie encore de musique et de poésie, et de réussir à dire à sa femme combien il l’aime.





J’ai été séduite par l’écriture d’Antoine Choplin, qui est sensible et poétique. Son style suscite l’émotion, tout en retenue, sans jamais tomber dans un ton larmoyant. C’est une écriture délicate, qui est dans la suggestion. Les descriptions m’ont vraiment parlé, j’ai pu me figurer les paysages de Pripiat.





Ainsi, j’ai été séduite par ce roman qui s’intéresse aux villages qui survivent tant bien que mal aux environs immédiats de Tchernobyl, au bord de la zone interdite. Il est porté par des personnages très humains et une écriture qui suscite avec délicatesse une émotion puissante. Je lirai volontiers un autre titre de cet auteur, et je vous conseille celui-ci sans hésiter !
Lien : http://romans-entre-deux-mon..
Commenter  J’apprécie          100
La nuit tombée

Crépusculaire

1988 : deux ans après « l'incident », Gouri, sa femme et sa fille Ksenia, vivent à Kiev. En 1986, ils habitaient à Pripiat et lorsque le réacteur n°4 de la centrale nucléaire de Tchernobyl est entré en fusion provoquant la catastrophe que l'on connait (« Ils étaient venus ensemble, c'était tout près d'ici, Ksenia et lui, au matin du 26 avril. Voir un peu. le bleu étrange de l'incendie. Les irisations. Cette féerie. Ils avaient même hésité à s'approcher encore. ») … Pourtant, ce matin là, deux ans après, Gouri se prépare à retourner à Pripiat, chez lui. A moto. Il veut récupérer quelque chose dans son appartement, quelque chose d'insignifiant mais si précieux pour lui… Il s'approche de la zone interdite et s'arrête chez de vieux amis, Vera et Iakov. Iakov se meurt, comme tant d'autres, il faisait partie des équipes qui sont intervenues sur le toit de la centrale… Après une soirée passée à discuter, à se souvenir, à chanter, à boire de la vodka, Gouri enfourche sa moto et part pour Pripiat, accompagné de Kouzma, qui sera son guide. Ce court roman est un véritable coup de coeur. Ce n'est pas le premier roman que je lis sur Tchernobyl (j'avais beaucoup aimé « de bonnes raisons de mourir » et « Tout ce qui est solide se dissout dans l'air ») mais cette histoire est poignante à l'extrême, sans jamais verser dans le mélo. Avec peu de mots, dans un espace temps réduit, l'auteur réussit un véritable tour de force en nous immergeant dans cette nuit à la beauté magnifiée par des personnages sublimes.



Commenter  J’apprécie          122
La nuit tombée

Au crépuscule Gouri roule vers le village de Chevtchenko où il est attendu par ses amis Iakov et Vera.

Deux années se sont écoulées depuis l'accident nucléaire qui a dévasté Tchernobyl.

Derrière sa moto une remorque attachée avec un bricolage de fortune. Il a l'intention de se rendre plus tard dans la zone. Quand il s'arrête pour faire le plein le pompiste devine sa destination et le met en garde. Certains partent vers Pripyat et ne reviennent jamais. Les pilleurs et les trafiquants pullulent et le danger est omniprésent.



Oui, mais Gouri a besoin de retourner à tout prix dans sa maison de Pripyat pour ramener quelque chose auquel il tient beaucoup.



Vera est heureuse de revoir Gouri. Ils boivent à leurs retrouvailles et un dialogue s'engage entrecoupé quelquefois de silences.

Son mari, Iakov, est gravement malade ; Ksenia, la fille de Gouri aussi.

Piotr, un gamin du coin recueilli par un couple de personnes âgées, Leonti et Svetlana, est traumatisé et ne parle quasiment plus.



Autour du repas du soir composé d'une soupe et de chou sont réunis Iakov, Vera, Gouri, Leonti, Svetlana, Piotr et Kouzma, un jeune gars arrivé au printemps et qui traficote dans les environs. C'est une soirée ponctuée de poésies, de chants et de musique. D'un peu de joie qui succède à la tristesse après que chacun se soit confié sur les conséquences de la catastrophe.

Après ce repas Gouri partira à la nuit tombée direction Pripyat afin d'en rapporter un objet bien particulier.



Les personnages sont attachants et on éprouve de l'empathie face à ce qu'ils endurent.

Iakov sait que ses jours sont comptés.

Leurs témoignages à tous sont poignants.

Iakov avait été réquisitionné pour nettoyer la zone et " enterrer la terre " après avoir travaillé au contact du réacteur. Quant aux scènes qu'ils a pu voir, j'espère bien que personne d'autre n'aura jamais à les voir. Comme ces arbres qui, dit-il, rougeoyaient, brillaient ; la pluie noire qui tombait sur eux, les centaines de moineaux aveugles qui s'écrasaient sur les pare-brise des voitures pour finir par mourir, les maisons ensevelies, les animaux domestiques abattus. Et au-delà des scènes de désolation, la maladie, la souffrance et la mort.



Réquisitionnés pour faire leur travail de citoyen leur disait-on...

Sacrifiés pour une patrie qui n'informait personne sur les dangers du nucléaire.

Destinés à mourir...



Kouzma, de son côté, a vu la maison de son enfance disparaître dans un énorme gouffre avec tout ce qu'elle contenait. Dont une boule de neige avec une Tour Eiffel à l'intérieur, cadeau d'un ami de son père. Petite chose qui avait surtout une valeur sentimentale.

Quelquefois ces simples objets qui vous ont apporté du bonheur emportent avec eux un morceau de votre coeur en disparaissant.



Pour son livre " La nuit tombée " Antoine Choplin a reçu le Prix France Télévisions en 2012.

Ce prix est mérité. L'auteur met en scène des gens du peuple comme vous et moi, dont les vies ont basculé après l'explosion du réacteur de la centrale nucléaire de Tchernobyl.



" Ils étaient venus ensemble, c'était tout près d'ici, Ksenia et lui, au matin du 26 avril.

Voir un peu.

Le bleu étrange de l'incendie.

Les irisations. Cette féerie.

Ils avaient même hésité à s'approcher encore. Une chose insignifiante -- il ne pouvait se souvenir quoi exactement, une course à faire, un rendez-vous ? -- les en avait empêchés. Ils y seraient allés sinon, main dans la main. Encore plus près. Ils se seraient jetés là-dedans pour de bon, père et fille ensemble, pris par l'intensité du spectacle, le sourire, presque, à leurs visages. Comme ces autres enfants rassemblés du côté de la voie ferrée, offrant leurs chants et farandoles au feu d'artifice. Et envoûtés une fois pour toutes. Aujourd'hui, ou demain, disparus. " ( Citation du livre )



Ce passage je le trouve particulièrement terrible. Toutes ces personnes venues regarder la beauté du spectacle se déroulant devant leurs yeux en ignorant que c'était la mort qu'ils étaient en train de contempler.



Ce que j'ai énormément de mal à comprendre c'est qu'au début du repas, quand Iakov présente son ami à Leonti, il lui dit qu'avant d'être écrivain public à Kiev Gouri travaillait pour ceux de la centrale.

Alors pourquoi ce dernier n'était-il pas au courant des risques de l'atome en cas d'accident ? Je reste dubitative.



Le sujet est traité avec pudeur. Le récit est simple, tout comme le sont les protagonistes. Les phrases sont courtes, les dialogues entrecoupés de silences n'en sont que plus percutants et font mouche.

Ce voyage de Gouri à la nuit tombée est touchant et on ne peut s'empêcher de penser à une scène similaire relatée dans l'excellent livre de Svetlana Alexievitch " La Supplication : Tchernobyl, chroniques du monde après l'apocalypse ".



Une nuit tombée où brillent à présent des milliers d'étoiles. Les âmes des suppliciés de Tchernobyl qui ont été fascinés un jour d'avril 86 par une irisation belle et mortelle dans un ciel bleu étrange.

Commenter  J’apprécie          80
La nuit tombée

Avec une économie de moyens très beckettienne, un sens du visuel méditatif digne de Tarkovski, et une grande tendresse pour ses personnages sortis d'un tableau de Chagall, Antoine Choplin signe un roman essentiel.
Lien : http://www.telerama.fr/criti..
Commenter  J’apprécie          20
La nuit tombée

Lu d'une traite en une (petite) soirée, ce roman évoque la catastrophe de Tchernobyl de manière sobre et poignante : la contamination irrémédiable d'une région, l'exil imposé, la maladie qui ronge les hommes et détruit les familles. Antoine Choplin décrit aussi les habitants de cette région avec beaucoup d'humanité et de bienveillance. Un livre petit en taille mais de grande valeur.
Commenter  J’apprécie          120
La nuit tombée

Dies irae (jour de colère)

Jour funeste que ce 26 avril 1986 !



"L'entrelacs de la nuit et de nos pénombres ".



Gouri va se rendre à moto sur les lieux de sa vie perdue, il va s'arrêter près de ses vieux amis, ceux restés au pays ; ils évoqueront les temps nostalgiques et douloureux de l'avant et de l'après.



Joie des retrouvailles atténuée par les douleurs partagées.



(p.11) Les pensées de Gouri vagabondent, de moins en moins consistantes. Elles gravitent alentour de cette masse sans réalité qui renâcle à renvoyer la lumière. C'est quelque chose comme le sentiment de l'abandon.

Qui recroqueville les bustes, replie les horizons.



Un Requiem lent pour tous leurs morts, et la mort de leur terre à jamais contaminée.



Malgré l'horreur qui est présente au fil des phrases lancinantes , Antoine Choplin m'a touchée avec ses mots

pour dire les maux !



(p.109) C'est un drôle de sang qui a bondi par les allées de chez nous / à l'encontre des roses et des haleines fraîches de femmes / C'est un sable assassin qui pour toujours grimpe aux écorces / et avance comme une langue jusqu'aux portes des maisons.



- Dans le sombre des lieux; de curieuses trouées ...... Inconfort dans le vertige d'un Univers qui dégringole .....



Livre bouleversant !



(p.115)

Le gouffre tend ses lèvres

Vers le sommet des solitudes

Et ce n'est pas une affaire d'homme



Sauf à emprunter à la vigueur du vent

lui qui chahute la chevelure des filles

même sachant

qu'il n'a nulle part ou revenir.



Commenter  J’apprécie          324
La nuit tombée

Il y a ceux qui sont touchés, comme Iakov ou comme Ksenia la fille de Gouri ; ceux qui ont vécu de près l’horreur et, s’ils s’en sortent indemnes physiquement, ont été détruits intérieurement, comme Kouzma qui a vu son univers s’effondrer littéralement devant lui, devant ses yeux incapables de pleurer tant la douleur était grande. Ils ont tous dû abandonner leur maison, leur vie d’autrefois pour survivre ailleurs, en attendant de voir si la catastrophe nucléaire a laissé des stigmates sur eux.







« La bête n’a pas d’odeur



Et ses griffes muettes zèbrent l’inconnu de nos ventres. » (p.72)







Ils forment un groupe uni dans la détresse, une entité soudée, même si Gouri a choisi d’aller vivre ailleurs, plus loin, à Kiev.







Ce court roman nous parle de l’horreur de Tchernobyl, mais il chante surtout l’amour, la fraternité, l’importance des souvenirs et des témoignages, capitales pour ne pas oublier ces êtres démunis, perdus dans un no man’s land anéanti. Gouri poète écrit un poème chaque jour sur la catastrophe parce que « c’est déjà quelque chose » :







« Il y a eu la vie ici



Il faudra le raconter à ceux qui reviendront



Les enfants enlaçaient les arbres



Et les femmes de grands paniers de fruits



On marchait sur les routes



On avait à faire



Au soir



Les liqueurs gonflaient les sangs



Et les colères insignifiantes



On moquait les torses bombés



Et l’oreille rouge des amoureux



On trouvait le bonheur au coin des cabanes



Il y a eu la vie ici



Il faudra le raconter



Et s’en souvenir nous autres en allés. » (p. 71)







Un très beau texte, poignant, simple, direct, essentiel.




Lien : http://www.lecturissime.com/..
Commenter  J’apprécie          70




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Antoine Choplin (1531)Voir plus

Quiz Voir plus

Eragon tomes 1, 2, 3 & 4

Qui est Eragon?

Un paysan
Un dragon
Un nain
Le roi du pays

25 questions
27 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}