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Citations de Assia Djebar (173)


Tu n'es qu'à une heure de la capitale...tu vis en ermite, comme dans un désert. As-tu réalisé que tout près de toi, le pays est devenu un volcan : les fous de Dieu, ou plutôt les nouveaux Barbares s'agitent, occupent des places publiques, mobilisent les jeunes chômeurs, et surtout, surtout, maîtrisent les nouveaux médias....tu sais, j'ai l'impression qu'ils vont gagner les élections."(P. 155)
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Par dessus tout, je déteste leur danse du ventre !

J'aspire à une danse de chasseresse, si possible d'antilope ( pour
les fuir avec leur passivité ?) (...)
Je ne tiens pas à danser seule, devant les autres, car la danse noble n'est pas spectacle, elle est méditation, jusque dans la trépidation !
J'aime danser pour me sentir loin d'ici (...) (p. 218)
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Dernières paroles publiques, donc, d’Albert Camus venu en personne au centre même de l’arène :
« Mon appel sera plus que pressant. Si j’avais le pouvoir de donner une voix à la solitude et à l’angoisse de chacun d’entre nous, c’est avec cette voix que je m ‘adresserais à vous. En ce qui me concerne, j’ai aimé avec passion cette terre où je suis né, j’y ai puisé tout ce que je suis et je n’ai jamais séparé de mon amitié aucun des hommes qui y vivent ; de quelque race qu’ils soient. Bien que j’aie connu et partagé les misères qui ne lui manquent pas , elle est restée pour moi la terre du bonheur et de la création. Et je ne puis me résigner à la voir devenir la terre du malheur et de la haine » C’était le 22 janvier 1956 à Alger.
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Aube de ce 13 juin 1830, à l’instant précis et bref où le jour éclate au-dessus de la conque profonde. Il est cinq heures du matin. Devant l’imposante flotte qui déchire l’horizon, la Ville Imprenable se dévoile, blancheur fantomatique, à travers un poudroiement de bleus et de gris mêlés. [...] Premier face à face. La ville, paysage tout en dentelures et en couleurs délicates, surgit dans un rôle d’Orientale immobilisée en son mystère. L’Armada française va lentement glisser devant elle en un ballet fastueux, de la première heure de l’aurore aux alentours d’un midi éclaboussé. Silence de l’affrontement, instant solennel, suspendu en une apnée d’attente, comme avant une ouverture d’opéra.
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La Révolution, ce n'est pas seulement le départ et la foi, ce sont aussi les peines, les massacres, la mort, tout cela à regarder en face, à affronter...
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En ce temps-là, dans les intérieurs musulmans, y compris même de la petite classe moyenne citadine, les seules photographies affichées dans les salons n'étaient que masculines. On ne concevait pas d'exhiber le portrait d'une soeur- jolie fille, pourquoi pas-, d'une épouse que d'autres yeux eussent risqué de convoiter: c'est à peine si certains montraient leurs fillettes de cinq ou six ans; mais le plus souvent, n'avait le droit d'être affichée, encadrée et posée sur un guéridon, que l'image du vénérable visage de l'aïeule qui venait de mourir... (p. 64)
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A dix-sept ans ,j'entre dans l'histoire d'amour à cause d'une lettre .Un inconnu m'a écrit par inconscience ou par audace ,
il l'a fait ouvertement .Le père, secoué d'une rage sans éclats
a déchiré devant moi la missive Il ne me la donne pas à lire ;
il la jette au panier .
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C'était l'époque où je me répétais : «il n'y a de héros que mort!»
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La fillette, au fond de la chambre, dépose ses poupées au sol. Elle se met à chantonner faiblement, lointaine, rêveuse et pourtant si présente. Cette gaieté qui l'habite tous ces jours !
"Ainsi, songe le père, l'insouciance bénie de l'enfance s'accélère en elle !"
Seule à ne pas parler, à ne pas écouter, elle regarde et ses yeux rient, comme s'ils s'emplissaient du secret des adultes, non pas d'un mystère, plutôt d'une lumière, d'une évidence.
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Ainsi, notre amitié se révéla être celle de deux lectrices également passionnées, l'émulation venant de surcroît, ainsi qu'une curiosité presque jumelle, avivée par la même boulimie de livres. (p. 146)
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Un jour, ils me reconnaîtront, au square ou dans un supermarché, ils m’abattront le lendemain, devant le hall de l’immeuble, quand je sortirai (car je ne laisse passer aucun jour sortir pour le soleil, pour le printemps, le désir de parler en moi, avec mon air d’anonyme vieillie mais dehors !) (P. 78)
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Nourrir les fils le jour, nourrir l'époux la nuit, et qu'ils puissent tous boire la lumière du vaste jour! Les nourrir inlassablement, les nouer irrémédiablement pour maintenir nos rênes invisibles. Là aboutit notre destin d'enfanter dans le vide de l'enfermement.
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(…)C’est justement Camus le premier qui a senti la fissure étrange, au cœur même d’une guerre pourtant coloniale, de vivre celle-ci comme une guerre civile, comme un déchirement dans la poitrine.
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Qui suis-je ? J'avais répondu au début : d'abord une romancière de langue française .... Pourquoi ne pas terminer en me reposant la question à moi-même ? Qui suis-je ? Une femme dont la culture est l'arabe et l'islam ... Alors , autant le souligner : en islam , la femme est hôtesse , c'est à dire passagère ; risquant à tout moment , la répudiation unilatérale , elle ne peut réellement prétendre à un lieu de la permanence .
Ainsi , dans une religion qui commence avec une émigration quasiment sacralisée , la femme devient une émigrante constante , sans point d'arrivée , et pour cela créature méritant le meilleur et le pire ! Le meilleur symboliquement , le pire historiquement .
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(...) à lui, le père-gardien, le père-censeur, le père intransigeant ? Non, le père qui m'a résolument accordé ma liberté !
je finis toutefois par aimer écouter , moi, préadolescente, les menues confidences de Jacqueline au dortoir : sa liberté me paraît de l'audace, une transgression, certes, peut-être même une véritable aventure ! encore un peu, et je la transformerais en héroïne d'un roman occidental, c'est-à-dire "de chez eux" ! Elle que , dans la journée, je suis de loin, dans la cour ou au réfectoire, parmi son groupe d'Européennes, tandis que j'aime rester seule, avec un livre ou rejoignant le petit clan des "musulmanes", séparées ainsi, même au pensionnat. (p. 199)
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Non, décidai-je, ce que je pouvais rapporter à Mag, c'était plutôt ma décision de commencer mon journal, et cela pour comprendre quels livres, parmi ceux que je lisais en désordre, se déposaient dans ma mémoire, m'apprenaient-m'apprenaient quoi ? A vivre ? Non...tous ou presque tous à imaginer la vie des "Autres" ! (...) Mes rêves, que nourrissait toute lecture, en avais-je besoin pour réduire la dichotomie des deux mondes où je vivais (...) (p. 222)
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Jean Sénac qui signait ses poèmes, ses missives, par un soleil à cinq rayons, vivait ses amours - de la terre natale, de la vie, des garçons – dans un éblouissement qui fit ombre soudain violente à une société où l ‘homosexualité si prégnante pourtant, évite de se dire haut.
Jean aimait parfois se nommer Yahia el-Ouah-rani : Jean l’Oranais, est mort de sa vérité dite, écrite, parfois criée.
Et le poète Salah Guermriche de s’exclamer :
Ecoutez-moi, gens des rues, écoutes-moi en vérité, je vous le dis,
Yahia n’est pas mort assassiné
Yahia est mort
Achevé !

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[entre la mère veuve et sa fille]

Plus de mains pour caresser, pour tenir, pour se tenir ! Elle aurait pu conclure-et j'ai senti que, moi seule, je devenais un peu l'ombre de son mari pas encore enterré: "Prends-moi dans tes bras, redonne-moi, parce que tu lui ressembles, un peu de sa force ou, même , de sa présence. (p. 107)
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Je regardais , un matin , sur une vitrine de boutique , l'inscription en majuscule " TOUT DOIT DISPARAÎTRE " ..... Tout doit-il disparaître dans l'Algérie actuelle ? C'est certes bien une formule pour un risque de prochaine liquidation . Le risque de disparition , son immanence , et presque , pour certains , sa nécessité ( "Tout doit " ) , cela concernait , évidement pour moi , la culture algérienne , plus précisément sa littérature ...... Oui, pour moi , première évidence , la nation algérienne se retrouve , concentrée , dans sa culture aussi bien collective que dans son écriture , et donc dans sa littérature contemporaine .
1962 marque l'indépendance politique , après sept ans de guerre meurtrière . En littérature , il faudrait prendre la date de 1956 , parution du roman " Nedjma " de Kateb Yacine , plutôt naissance d'une littérature qui explose , d'un coup , dans la modernité .....
Or , près de quarante ans après , des écrivains sont tués physiquement , mais aussi des journalistes , des enseignants , des médecins : tués , tant d'autres persécutés , et cela par des algériens .... Ce sont ces algériens meurtriers - instrumentalisés par une propagande dite intégriste , au nom de l'islam politique qu'a favorisé une nouvelle inquisition religieuse , digne de ce que connaissait l'Europe catholique de la fin du Moyen Age - Ce sont ces meurtriers d'écrivains et de journalistes qui peuvent dire , dans mon pays , à leur manière : " tout doit disparaître ! "
Tout ? Entendez : la culture , la contestation , la plume qui se veut individuelle , qui emprunte son chemin de hasard , qui trace sa pensée sur le mode de la dérision , de l'ironie ou de la colère . Cette écriture là , oui , il se trouve des jeunes hommes , souvent des gueux , des désespérés révoltés , qui en font leur cible ; ces " fous de dieu " qu'on a suffisamment drogués , manipulés , tordus et retournés pour être lancés contre .... des intellectuels - ceux-ci parmi les plus modestes , quelquefois les plus discrets , en tout cas des altruistes , qui écrivent par conviction , qui revendiquent le droit de chercher leur propre vérité , et leurs erreurs aussi ....
voilà l'aberration et voilà le scandale : le " tout " risquant de disparaître concerne en premier lieu la pensée , et non les biens mal acquis , l'iniquité d'une classe de nantis qui , derrière le rempart de l'argent et de ses armées qui grossissent , exploite son peuple , prenant dans l'illégitimité , le relais du colonialisme d'hier .
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Oui, je l'avais reconnue, cette exaltation chaque fois assassinée et qui renaissait chaque fois en moi, comme si j'avais toujours dix-sept ans, que j'étais révolté et allumé d'orgueil. Ainsi hier devant les réfugiés qui attendaient, depuis trois ou quatre ans, ou ce matin, face à l'arc de triomphe romain surgi noblement au milieu des sables, devant ces hardes et ces ruines ou à cause d'elles, j'aurais pu, pourquoi pas, m'appuyer sur ce romantisme d'adolescent pour le débiter en discours, parler moi aussi de la lutte, de la victoire à venir, de la souffrance et, surtout, Dieu comme j'étais naïf, de la chance que nous avions d'être nés à une époque où notre pays allait accoucher de sa libération. Mais je m'étais tu, ou presque, tout le long du voyage. Voici même que je cherchais à déterrer contre moi, contre nous, une lacune convaincante, un défaut amer. L'humour, en effet, nous en étions démunis, mais ce rire englouti quelque part dans des siècles d'esclavage et de sommeil, un jour, qui sait bientôt, resurgirait noir.
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