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Critiques de Claire Duvivier (388)
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Un long voyage

Placé très jeune à la mort de son père, Liesse s’est si bien débrouillé dans ses fonctions au sein du comptoir commercial de son île que, remarqué par la brillante et aristocratique ambassadrice impériale Malvine Zélina de Félarasie, il en devient le secrétaire attitré : un poste qui va le placer aux premières loges des événements qui mèneront l’Empire à sa perte.





Dystopie mâtinée de science-fiction, le récit nous transporte dans un empire imaginaire, dont les hauts fonctionnaires n’ont pas encore pris la mesure des transformations que d’étranges péripéties récemment survenues ont déjà initiées. Ce bouleversement à première vue incompréhensible tant il remet en cause leur référentiel, va finir par secouer si durement les fondations de leur monde qu’un nouvel ordre verra bientôt le jour, à l’issue d’une éprouvante et dramatique transition.





Après un long démarrage qui pourra sembler rébarbatif et risquer de désorienter un lecteur assez longtemps en mal de repères, l’histoire sort enfin du seul thème de l’administration d’une province reculée d’un vaste et puissant empire, pour s’incarner de manière plus vivante dans les aventures, cette fois captivantes, de Liesse et de Malvine. Tandis que les personnages gagnent en épaisseur et en humanité dans leur confrontation à l’adversité et à l’écroulement de leur univers, puis dans leur acharnement à reconstruire un avenir pour les êtres qui leur sont chers, l’intrigue maintenant en place se développe dans des directions surprenantes qui font apprécier l’imagination de l’auteur et l’habile construction d’un récit original et bien pensé.





Douloureuse fin d’un âge mais aussi début d’un nouvel ordre qui, au passage, aura, quasi par accident, permis l’éradication de l’esclavage, cette épopée aux allures de légende illustre à la fois la fragilité d’une société et son inépuisable capacité d’adaptation et de réinvention, selon l’adage maintes fois vérifié que les crises favorisent les plus grandes transformations. Un grand et long voyage donc, pour les personnages perdus dans l’épaisseur du temps, entre un passé et un futur qui ne cessent de s’entremêler, mais aussi pour l’humanité, dont les progrès s’effectuent parfois par de bien violents soubresauts.


Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Un long voyage

En lisant ce livre vous serez comme ces marcheurs infatigables en quête de leur vérité. Vous suivrez à pas lents le dénommé Liesse qui raconte à « Gémétéous la hiératique » la vie de l’extraordinaire Malvine, et à travers elle, la sienne.

J’ai beaucoup aimé cette longue itinérance auprès de Liesse, cet opportuniste débrouillard, chanceux, toujours en mouvement, et de la déconcertante Malvine, ambassadrice impériale promise à un grand destin politique.

Les 150 premières pages sont déconcertantes. Où nous mène Claire Duvivier dans ce monde onirique ? Vers les inénarrables amours de Liesse ? Vers la froide efficacité de Malvine ? Vers la description d’un monde de marchands et des limites effrangées d’un immense empire ?

Deux personnages très proches car tous deux considérés comme des étrangers et mis à l’écart. Liesse pour ses origines lointaines ; Malvine pour le pouvoir qu’elle détient et son déconcertant anticonformisme.

Un monde aux abois, même si personne n’en prend réellement conscience. Ce monde de marchands aux idées carrés va bientôt s’effondrer, et l’empire n’est en réalité qu’un géant agonisant.

Malvine sera l’héroïne malheureuse de cette brutale glissade vers une étrange guerre. Tout commence par la disparition de tous les habitants sans exception d’une ville. Ils se sont évanouis tout bonnement un jour d’hiver. Et Malvine avec eux qui réapparaitra quelques semaines plus tard, hagarde, épuisée, changée physiquement, et reconnaissant à peine des personnes qu’elle avait pourtant côtoyé.

Surgit alors du diable vauvert une armée inconnue et aux motivations insaisissables pour l’esprit rationnel de nos marchands. Seule Malvine comprendra, et essaiera de sauver ce qui peut encore l’être.

Je ne vous raconterai pas cette histoire tarabiscotée et pourtant si bien construite. Pour ceux qui ont découvert la porte d’entrée, l’espace et le temps n’ont plus guère d’importance, et c’est ainsi que nous voyons ressurgir des fantômes du passé.

Drôle de livre, à l’ambiance lourde et grise, à la tristesse insondable. Le récit d’une grande dame passée à côté de la Grande Histoire ; d’une bâtisseuse oubliée de tous, à l’exception de Liesse.

Un roman à lire, assurément.
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Un long voyage

La magie a opéré.



Pourtant, ce n'était pas gagné : je ne lis pas de fantasy, je ne suis pas attirée par un livre décrit comme « un conte merveilleux ».



Oui, mais j'ai quand même tenté ma chance : David Meulemans, l'éditeur des Forges de Vulcain, fait actuellement des vidéos sur YouTube pour parler de son métier. Or, elles m'ont donné envie de lire toute sa collection les yeux fermés. Il parle de ses auteurs comme de ses Brancusi, dont il serait le forgeron qui travaille à rendre leurs textes parfaits… il parle de son idéal en littérature : non pas produire des livres qu'on fabrique en série pour les vendre à tout prix, mais forger de beaux objets dans l'espoir que l'un d'eux, peut-être, changera un jour la vie de quelqu'un.



Or, en ce printemps très particulier, sa maison d'édition sort un livre, un seul, un premier roman écrit par une autre éditrice, Claire Duvivier. C'est certainement la garantie d'une intertextualité riche (sur Babelio, elle a déjà suscité une référence à Ursula K. le Guin) : n'étant pas du tout familière du genre, je ne peux pas y être sensible, mais la simple idée que ce « conte merveilleux » est situé au carrefour d'un riche réseau de références fait partie de celles qui m'ont donné envie de le découvrir.



Et la magie a opéré. Pourtant, j'ai résisté pendant tout le début du texte. Parce que je me sentais étrangère à ce monde, et aussi parce qu'un conte merveilleux, c'est un livre qui se construit lentement, dont on ne comprend pas tout de suite où il nous emmène ni pourquoi. Il faut s'approprier les personnages, se laisser intriguer par le nom de Gémétous, l'inconnu.e à qui Liesse conte son histoire, et dont on ne saura qu'à la fin quelles émotions contradictoires suscite l'idée que c'est à cette personne, et pas à une autre, que le livre est adressé.



J'ai accepté tout cela, j'ai persisté au-delà des premières pages qui ne me ressemblaient pas, et quel souffle m'a alors rattrapée ! J'ai adoré l'évidence avec laquelle j'ai accepté la manière dont le surnaturel donne la clé de l'expérience extraordinaire et insoupçonnable qu'a vécue Malvine Zélina de Félarasie. J'ai adoré ne pas me demander si c'était l'enfant en moi qui s'était laissée pénétrer de cette évidence, ou la lectrice qui reconnaît les mots qui parlent à son inconscient. J'ai adoré voir le nom poétique de Malvine écrit in extenso tout au long du roman. J'ai adoré que le livre soit parcouru de leitmotivs récurrents (autour de la fonction du toucher notamment), semés légèrement, qui permettent de faire déboucher l'ouvrage sur une des plus belles dernières pages de roman que j'aie jamais lues, peut-être même la plus belle (vraiment).



Pourquoi cette magie a-t-elle finalement opéré sur moi ? Peut-être parce que Claire Duvivier a créé un monde dont le surnaturel n'est pas convenu : elle n'affuble pas ses personnages de chapeaux pointus, de formules magiques et de titres bizarres. Son surnaturel ressemble à celui qui est dans la tête de chacun, d'une manière informe, désordonnée, semi-invisible à nos propres yeux, et qu'elle a rendu cohérent et visible, incarné dans un monde qu'elle a bâti.



Dès lors, son monde ressemble au nôtre, sauf qu'il abolit les frontières entre ce qui est réputé réel et ce qui est réputé imaginaire, et sauf qu'il en profite aussi pour redéfinir les rapports entre les êtres. J'ai particulièrement apprécié que la question du féminisme ou de la place des femmes ne se pose pas : simplement parce que c'est un monde où les femmes occupent une place qui ne dépend ni dans un sens ni dans l'autre du fait qu'elles sont femmes. Pourtant, le viol existe, l'exploitation sexuelle aussi ; mais ils n'essentialisent rien, ils ne créent pas des destins limitants. Ça, c'est intéressant, et c'est peut-être la position de la fantasy qui le permet, puisqu'il est bien entendu que l'auteur crée un monde avec des règles qui n'ont pas de raisons d'être les mêmes que d'habitude.



Est-ce que je lirai encore de la fantasy, pour que la magie opère de nouveau ? Je ne sais pas. Je continue à ne pas avoir envie de naviguer dans un monde de mages et de sorcières. En revanche, s'il existe un pan de littérature qui se situe sur cette ligne étroite de l'imaginaire à la fois clairement imaginaire et pourtant totalement crédible, alors oui, je demande à voir ! En attendant, je répète volontiers les paroles de l'éditeur de Claire Duvivier sur les réseaux sociaux, maintenant que j'ai vérifié par moi-même que je pouvais aimer ce roman : « plus que de la fantasy : un des meilleurs romans de cette année, tous genres confondus ».



Merci aux Editions des Forges de Vulcain et à #NetGalleyFrance pour cette très belle découverte.
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Capitale du Nord, tome 1 : Citadins de demain

Quand l'urbanité se fait épopée littéraire…



Le cycle de la « Tour de garde » est un projet ambitieux dont il convient de rappeler les fondements : deux capitales, deux trilogies écrites chacune par deux auteurs, respectivement Claire Duvivier (présente à de nombreuses tables rondes lors des récentes Utopiales de Nantes) pour la capitale du Nord et Guillaume Chamanadjian pour la capitale du Sud. Deux ambiances totalement différentes, presque opposées, deux façons de vivre et deux cultures antagonistes. Des liens subtils entre les deux villes sont entrevus dès les premiers tomes. Avec une pincée de fantasy dans chaque trilogie apportant son lot de mystères et une ambiance teintée d'étrangeté et d'onirisme. Un projet de fantasy urbaine française qui plus est !



La capitale du Nord est Dehaven, ville inspirée par l'Amsterdam du Siècle d'or, cité bien organisée, traversée par des canaux, ville portuaire prospère économiquement en grande partie grâce à l'exploitation de ses colonies ; la capitale du Sud est Gemina, ville tentaculaire et bouillonnante, ville de la poésie, de la gastronomie et du vin inspirée par Sienne et la Florence de la Renaissance. Une cité chaotique aux rues protéiformes gérée par factions suscitant jalousie et luttes pour le pouvoir.

Alors que le tome 1 de Capitale du Sud était tout en sensualité et sensorialité, c'est un texte logiquement plus froid, moins clinquant et surtout moins poétique, plus structuré à l'image des personnages qui les traverse et à l'image de la ville, qui nous est proposé avec Capitale du Nord.

Nox était la voix de Capitale du Sud, c'est désormais Amalia, intelligente et pragmatique, qui nous guide dans ce premier volume de la trilogie nordiste « Citadins de demain ». Amalia est entourée de deux compagnons, Hirion également noble et Yonas roturier destiné à prendre la suite de son père à l'écluse. Amalia, est en lien avec Hirion depuis la plus tendre enfance, les deux familles nobles projetant l'union des deux jeunes gens, héritiers tous deux des deux familles les plus aisées de la capitale. Yonas, lui, est arrivé plus tardivement et a pu rejoindre Hirion et Amalia et bénéficié de la même éducation, le père d'Amalia étant redevable au père de Yonas d'une chose dont on devine peu à peu les contours.

Les enfants se voient enseigner une très large palette de connaissances pour former les citadins de demain, des citadins éclairés par la science et l'expérience, et éloignés des superstitions, de la religion ou des connaissances uniquement basées sur les mythes et les fausses croyances.

Amalia est vive, intelligente face à un Hirion plus fragile et très affecté par la maladie de sa soeur, chagrin qui va le mener à essayer de trouver des remèdes s'éloignant des remèdes habituels de la médecine traditionnelle.

Yonas est un personnage intéressant à cheval entre les deux mondes, celui basé sur la raison des nobles et celui de la plèbe où les légendes et les mythes sont des éléments importants de transmission.



Les enfants ont grandi ensemble et sont à présent de jeunes adultes, témoins de dissensions politiques de plus en plus nombreuses liées notamment à la gestion problématique des Colonies. Parallèlement à cette montée des tensions, le trio découvre, fasciné, une cité par-delà un simple miroir à main, ville étrange qu'ils vont nommer Nehaved. Une découverte faite au départ par Hirion désireux de soigner sa soeur Delhia par des moyens moins conventionnels. Une découverte d'autant plus fascinante que leur éducation les a toujours totalement éloignés des légendes, de la magie, des mystères. Troublés, ils se demandent si cette ville miroir est une vision du passé de leur propre ville, ou au contraire une vision du futur de leur ville ou enfin un parallèle possible de Dehaven, une voie qu'elle aurait pu suivre.

Cette découverte fait écho à celle de Nox dans Capitale du Sud qui avait découvert de même une sorte de ville parallèle, plus sombre et angoissante, qui lui permettait de se déplacer sans être vu…

A noter que ces éléments de fantasy sont, dans chacune des trilogies, apportés avec subtilité et que l'essentiel reste, pour ces premiers tomes en tout cas, les intrigues respectives bien réelles qui se déroulent dans chacune des villes. La fantasy est distillée avec parcimonie, telle une pincée de sel ravivant les plaies bien réelles dont souffrent la ville et nos protagonistes. Car en effet, à chaque fois que la fantasy intervient, dans les deux trilogies, un événement funeste se déclenche dans la ville. Et à chaque fois cela influe sur l'humeur et l'état psychologique de celui ou de ceux qui sont l'objet de ces événements surnaturels. Lien subtil qui m'intrigue, m'interpelle et me tient en haleine pour le reste des deux trilogies.



Notons que les références à Gemina sont bien présentes et pour tout lecteur de Capitale du Sud, ces références sont plaisantes et nous place en connivence avec le récit. Les deux villes ont un point commun : le jeu de la Tour de garde, jeu stratégique très proche de lui des échecs. On y croise des personnages venant de Gemina, comme Casimux dont nous avions vu le départ de Gemina avec Guillaume Chamanadjian, ou au contraire sont évoqués des personnages de Dehaven partis pour Gemina et que nous avons pu croiser en lisant le tome 1 de Capitale du Sud. On perçoit sinon des tensions dans les deux villes, les événements malheureux de l'une se renvoyant en écho à l'autre ville.



« Dehaven m'apparait plutôt comme ce qu'elle est : le phare de la civilisation. Une mécanique aux rouages parfaitement huilés, même si parfois il peut leur arriver de se gripper, comme ce qui se passe aujourd'hui", ajouta-t-il avec un geste en direction de la porte par laquelle van Hautenluft venait de disparaitre. Toutefois il ne précisa pas sa pensée et enchaina : "Gemina, en comparaison, est l'image du chaos : personne ne sait qui la dirige, rien ne distingue plus les aristocrates de la plèbe ; les clans s'entredéchirent sans cesse. le dessin même des rues est à l'avenant : les chantiers urbains sont aux mains d'un clan occulte qui n'a que son propre intérêt en tête. Vous ne verriez pas une Grille sortir de terre là-bas"

- "il est donc heureux que ces pauvres gens puissent se consoler avec la nourriture" hasardai-je. Moerman sourit de nouveau, amusé cette fois.

- "Et le vin, Amalia. Surtout le vin. C'est le sang, le sang mêlé de cette ville".



Claire Duvivier dans ce premier tome met les éléments en place, prend son temps avec une certaine indolence, insiste sur les liens qui se nouent entre les personnages, creuse en profondeur la psychologie de chacun, le tout dans un style assez épuré, beaucoup plus distant et froid que le tome sudiste de Guillaume Chamanadjian que j'avais trouvé si savoureux et poétique, plein de rebondissements. Si ce style plus axé sur la psychologie des personnages m'a beaucoup gênée jusqu'au tiers du livre (je n'arrêtais pas de comparer ces deux premiers tomes), j'ai ressenti ensuite un réel intérêt d'avoir ainsi deux styles bien marqués, à l'image des villes décrites. C'est cohérent à l'aune du projet à quatre mains, intéressant, et même très bien vu pour donner une coloration propre à chaque trilogie. Une singularité à chacune. Je me suis ensuite laissée embarquée, réjouie et convaincue par ces différences.

C'est par ailleurs une lecture qui fait réfléchir et qui ouvre de nombreuses pistes de réflexions sur la gestion d'une ville, sur le colonialisme, sur l'éducation, sur les inégalités sociales, sur l'ouverture et le progressisme intellectuel, sur le rôle et la place des femmes dans la société (Dehaven est une ville matriarcale contrairement à Gemina), sur l'émancipation des êtres face à leur destin, sur les rapports de domination au sein d'une collectivité.





Le tome 1 de Capitale du Nord « Citadins de demain », est très complémentaire au tome 1 de Capitale du Sud « le sang de la Cité », tant dans le fond que dans la forme. Ces deux textes très différents forment étonnamment un ensemble harmonieux et cohérent. A la poésie et la sensorialité de l'un, répond le style soigné, épuré et fluide de l'autre. A la gourmandise de l'un, l'idée de la gourmandise de l'autre. Ces deux tomes sont très prometteurs pour le reste du cycle urbain de la Tour de garde. Ce sont des récits que même les non férus de fantasy, dont je fais partie, peuvent apprécier, et qui soulèvent d'intéressantes et riches questions sociétales. Un cycle à poursuivre, assurément !

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Un long voyage

Ce roman m'a retourné.



Au début, je suis tombé dans le piège du roman plébiscité et dont on attend trop. Mon plaisir, alors que le héros Liesse grandissait dans l'Archipel (qui a des airs de Tahiti je trouve), n'était pas à la hauteur de mes attentes. Je trouvais que cela manquait de descriptions du décor, que l'on survolait les péripéties.

Ce sentiment a évolué quand Liesse, devenu secrétaire de la « gouverneuse » Malvina, atteint la cité-état de Solmeri (avant cela même). Je me suis régalé à la description de la ville, y retrouvant des lieux que j'ai eu l'occasion de visiter en randonnée : les levadas de Madère, les villes accrochées aux pentes de la côte amalfitaine. Et la pénétration était plus marquée, un peu.

Revenant sur mon ressenti initial, j'ai conjecturé que les descriptions collaient en fait à l'âge de la personne qui les faisait. Car ce roman n'est rien d'autre que le récit de la vie de Liesse, écrit par Liesse. Ses mémoires en quelque sorte. Les descriptions du Liesse gamin ont la profondeur qu'un enfant peut leur accorder. le Liesse devenu vieux n'essaie pas d'analyser rétroactivement les événements de sa jeunesse ; il se replonge dans l'état du Liesse enfant.

Au passage, Liesse ne cesse de nous teaser par de petites phrases du genre « si j'avais su ce qui allait arriver par la suite », entretenant fermement l'intérêt du lecteur.



Liesse est surtout un observateur. Il est proche, du fait de son travail, des gens qui vont compter dans l'histoire. Lui, il va surtout les subir. Subir le rejet de ses compatriotes de l'Archipel, le mépris des Solméritains. Mais aussi faire son trou, se faire des amis, des amours. Celle qui compte vraiment, c'est Malvine Zélina de Félarasie, gouverneuse de l'Empire, chargée d'abord de gérer l'Archipel puis représentante de l'Empire dans la cité de Solméri. Une administratrice donc, et une politique, mais visiblement pas adepte de la communication. Même à travers la voix de Liesse qui est son secrétaire et, osons le dire, son ami, elle conserve une énorme part de mystère et de secret.

Mais comment pourrait-il en être autrement ? On finit par le comprendre quand elle finit par se livrer. C'est l'un des ressorts les plus stupéfiants de ce récit.

L'autre stupéfaction est liée à des disparitions mystérieuses, et des apparitions aussi. En gros blasé, j'ai pensé que Claire Duvivier nous resservait le plat des Marcheurs Blancs (cf. le Trône de Fer de G.R.R. Martin). Mais la vérité est ailleurs, et elle a participé à mon retournement et à mon énorme plaisir.



Pas de grosses batailles ou d'abominables complots. En fin de compte le récit nous montre des gens de différents horizons qui essaient, obligés ou non, de vivre ensemble, qui se méprisent ou s'accordent, s'affrontent ou se lient, que le lecteur déteste ou adore. C'est parfois violent, en paroles ou en actes. C'est parfois aussi très beau, très encourageant. Un large spectre de la nature humaine est déployé avec beaucoup de vraisemblance et de naturel.



Je vais arrêter là. le sentiment de voyager sur un matelas moelleux m'est revenu à l‘écriture de ce billet. Je ne peux que vous recommander d'entreprendre ce – ou ces – longs voyages à ma suite.

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Un long voyage

Cette année j'ai commencé pas mal de livres sans jamais les finir. Il y en a ou cela sera un abandon mais pour d'autres juste une pause plus ou moins longue. le moment où je les ai ouverts n'était pas le bon, je ne parvenais pas à rentrer dedans. Ce fut le cas dernièrement pour ce one shot de Claire Duvivier.



Je l'ai commencé le 17 décembre, j'en ai lu quelques lignes encore le 18 avant de le reposer sans avoir dépassé la page 40. Un long voyage est un roman qui prend son temps. C'est un récit très calme que propose l'auteure durant toute la première partie du roman. Autant le dire, ce début de roman ne m'a pas plu. Long et classique je ne voyais guère d'intérêt à poursuivre ma lecture. C'était trop lent pour moi, il n'y avait pas assez d'action, pas assez de rythme pour me captiver tandis que le personnage de Liesse me laissait assez indifférent. Ne voulant pas me forcer je l'ai laissé de côté pour commencer une autre lecture.



Cela aurait pu en rester là pour ma part. Je ne suis pas sûr que je l'aurais repris un jour du moins dans tous les cas pas aussi rapidement si la fin de l'année n'était pas aussi proche. Je m'étais en effet fixé comme défi de lire 5 lectures bons plans du challenge multi auteures de SFFF 2021 et la fin d'année approchant à grands pas je me suis replongé dedans hier.



Je l'ai alors dévoré d'une seule traite. Je ne saurais vraiment expliquer pourquoi c'est mieux passé hier qu'il y a 10 jours, probablement une histoire d'humeur et de concentration ou tout simplement parce que j'avais déjà lu la partie la plus calme du récit se déroulant sur l'archipel avant le début du voyage que nous promettent le titre et la couverture. Dans tous les cas cette fois-ci je me suis complètement immergé dans ce dernier et je peux vous dire que le voyage fut beau.



Je n'en ai pas lu beaucoup des romans de fantasy se rapprochant de celui que propose ici Claire Duvivier. Les one shots en fantasy sont déjà nettement minoritaires par rapport aux séries, ceux de 240 pages seulement qui s'avèrent au final excellents demeures quant à eux des espèces rares. Vous ne trouverez pas de magie dans ce récit, pas de magicien, sorcière ou tout autre créature magique. Vous n'y lirez pas non plus de passage épique avec des combats hors normes et démesurés ou encore toutes sortes de complots politiques tordus.



Non ce roman de Claire Duvivier n'est pas de cela, il va vous plonger au coeur d'un récit qui une fois réellement démarré s'avèrera passionnant. Son narrateur Liesse s'adresse à une inconnue dont on ne connaîtra l'identité qu'à la fin, il lui raconte sa vie et le chemin qu'il a parcouru auprès d'une femme d'exception. oh quelles histoires il lui raconte ici : la sienne, celle d'une cité, de peuples qui traversent le temps, d'une société qui se transforme, s'adapte, se reconstruit. C'est beau, c'est fort, original et touchant. En bref, c'est une totale réussite.



Une fois entraîné dans ce récit hier il m'a été impossible de le lâcher, bien écrit, bien construit, envoûtant l'auteure nous embarque dans le récit de Liesse qui vous surprendra assurément à certains moments, vous touchera peut-être à d'autres mais qui ne pourra dans tous les cas pas vous laisser totalement indifférent.



Autant vous dire que je ne regrette vraiment pas d'avoir repris ce roman qui s'est avéré être une très belle lecture, d'ailleurs je pense que je le relirai. le seul défaut de ce roman est pour moi son début, l'histoire peinant malheureusement un peu à démarrer. C'est dommage car le reste m'a plus que plu et je ne peux que vivement vous encourager à découvrir ce petit roman qui mérite le détour. Je vais pour ma part rapidement acheter Capitale du Nord que je lirai en 2022 afin de continuer de découvrir ce que propose cette auteure.

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Capitale du Nord, tome 1 : Citadins de demain

Que c'est bien écrit. Même très bien écrit. Trop peut-être au point d'être légèrement indigeste ?



Dans ce tome introductif de la deuxième trilogie de la saga La Tour de garde, écrite à quatre mains, un auteur pour chaque trilogie, la lenteur s'empare du récit pour ne la quitter seulement les cent dernières pages. Mais attention, la lenteur peut être un délice quand la plume étreint le lecteur et l'immerge avec délicatesse dans un nouvel univers. Ou bien dans la tête d'un personnage. Et là est le paradoxe. L'écriture qui m'a paru lourde, pompeuse, s'avère être tout simplement adaptée au personnage principal, Amalia, une jeune femme appartenant à l'élite de son pays. C'est elle qui nous raconte son histoire avec le registre approprié à son rang dans la société décrite. Et Amalia, elle peut se montrer...franchement pénible avec sa condescendance et sa prétention de petite princesse ! Pourtant, elle est fascinante!



Qu'en conclure alors ? Que Claire Duvivier parvient néanmoins, avec un son style rigoureux, conceptuel, maîtrisé et intimiste, à déployer un univers complexe, certes austère, mais qui s'habille progressivement de mystère. L'intrigue et les personnages se mêlent à une profonde réflexion sur l'éducation et les élites nobles et bourgeoises. Le tout manque cependant, à mon goût, d'un brin de fantaisie et de poésie. Mais quel final ! Brutal et explosif !



Je lirai donc la suite, avec curiosité et davantage d'émotion je l'espère. Veuillez me pardonner le caractère "pompeux" de ma chronique,mais que voulez-vous, je ne suis qu'un humain...avec son cortège de contradictions !



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Capitale du Nord, tome 1 : Citadins de demain

Entreprise de fantasy ambitieuse à la française, le cycle de la Tour de Garde entrelace deux trilogies dans le même univers mais écrit par deux auteurs différents. D’un côté, Guillaume Chamanadjian et sa Capitale du Sud (Gemina), de l’autre Claire Duvivier et sa Capitale du Nord (Dehaven).

Après une première incursion en avril dernier en compagnie de Nox, voici cette fois que nous arrive Amalia, jeune héroïne de Citadins de Demain, premier volume de la trilogie prenant place dans la Capitale du Nord, Dehaven.

Aux manettes, Claire Duvivier que l’on a découvert chez le même éditeur avec le sublime Un Long Voyage. Inutile de dire que l’on attendait beaucoup de ce nouveau roman toujours superbement illustré par Elena Vieillard.

Mais qu’en est-il vraiment ?



Former la jeunesse

S’éloignant de la tentaculaire cité de Gemina, Claire Duvivier nous fait découvrir une autre ville portuaire avec Dehaven. Première différence avec sa cousine du Sud, Dehaven n’est pas divisée entre maisons nobles, ou du moins de manière bien moins ostentatoire que pour Gemina. Pas de système à la Game of Thrones ici mais un monde plus classique et certainement moins excitant de prime abord. Claire Duvivier nous présente un trio de personnages avec Hirion, héritier de la famille De Wautier, Amalia, héritière de la famille Van Esqwill et Yonas, roturier destiné à prendre la suite de son père à la tête de l’écluse.

Deux nobles pour un petit bourgeois, deux mondes qui pourtant se côtoient grâce aux idées progressistes de la famille Van Esqwill qui tient à enseigner à leurs enfants la plus large palette de connaissances pour en faire de véritables « citadins de demain ». C’est ainsi que dans leur grande mansuétude, Yonas bénéficie quasiment des mêmes largesse qu’Amalia et son meilleur ami, Hirion.

Les années passant, les enfants grandissent et entrent dans l’âge adulte, découvrent les interdits et les problèmes d’une vie compliquée dans une cité en proie aux dissensions politiques, notamment autour de la question épineuse des Colonies qui n’en finissent pas d’attiser les convoitises des uns et des autres. En parallèle de l’apprentissage de la vie d’adultes, les jeunes trublions vont finir par découvrir d’étranges possibles alors qu’Hirion, fasciné par le mystère et les légendes — choses que leurs parents ont toujours refusé de leur enseigner — découvrent une cité par-delà le miroir : Nevahed.

Une ville antérieure à la leur ? Une projection du futur ? Une réalité parallèle ?

Alors que l’exploration de Nevahed commence, les évènements se bousculent dans la vie d’Amalia qui nous raconte le sinistre chemin emprunté par son ami Hirion …

Nous le savons depuis Un Long Voyage, Claire Duvivier n’aime pas le spectaculaire et le clinquant. Elle préfère s’attarder sur l’intime et les relations qui se nouent entre les personnages, tricotant une humanité poignante entre les lignes, dévoilant du bout des lèvres les secrets les plus profondément enterrés de ses personnages. Citadins de demain renouvelle l’expérience de son précédent roman tout en mêlant l’intime de ses protagonistes aux évènements politiques qui entourent ce joyeux petit monde.



L’attrait des légendes

Là où Guillaume Chamanadjian affrontait son récit avec des artifices narratifs plus classiques, jouant sur les rivalités entre maisons nobles, dégainant régulièrement l’épée et offrant à sa ville un caractère fort, Claire Duvivier délaisse un tantinet ce côté pour se concentrer sur les états d’âme de la jeune Amalia et sur l’influence des évènements extérieurs sur la relation entre elle et son futur promis, Hirion. Claire Duvivier tisse avec lenteur l’histoire de ces jeunes privilégiés, esquive les évidences et dissémine les indices sur nombre de penchants et de rumeurs entourant tantôt Hirion tantôt Yonas.

Dehaven, même si elle manque certainement de la fantaisie de Gemina, devient un terrain de jeu parfait pour une intrigue fondée sur les sentiments et sur les renversements, entre fiançailles d’intérêt, sacrifices parentaux et folles espérances pour l’avenir. Ce qui intéresse Claire Duvivier, ce sont les coups qui pleuvent sur la tête de ce trio pourtant promis à un grand avenir et comment ils y font face… ou pas, accablés par certaines blessures, certains non-dits.

Amalia a pour elle l’intelligence et le réalisme tandis qu’Hirion n’arrive pas à se dépêtrer de la souffrance qui le ronge lui et sa famille devant la maladie qui affecte sa sœur, Delhia. C’est d’ailleurs cette blessure qui le pousse à chercher des chemins de traverse, fasciné par les légendes et par le surnaturel.

Hirion va finir par déterrer des artefacts qu’il ne comprend pas tout à fait et jouer avec des forces qui le dépasse largement. Claire Duvivier, comme à son habitude, distille le fantastique dans son récit et n’y saute pas à pied joints comme Nox le fait dans sa propre histoire à Gemina. Le côté surnaturel n’est ici qu’entraperçu, la plupart du temps en regardant au-delà d’un miroir, cherchant un Lapin Blanc pour pénétrer dans Nevahed, cette ville-reflet de Dehaven que l’on soupçonne emplit de terreur. Entre les lignes, Citadins de demain parle également de l’autre, qu’il soit dans les colonies, exploité sans vergogne et finissant par se révolter, ou qu’il soit roturier, syctes, éclusier, tous ces petites gens que, finalement, Hirion et Amalia ne connaissent qu’en surface. Et puis pour compléter le trio, on trouve Yonas, un pied dans chaque monde, celui des nobles et celui du peuple, qui connaît les légendes et l’utilité de leur morale et qui connaît le fardeau de la responsabilité, du pouvoir, aussi limité soit-il pour lui.



Que ferons-nous du changement ?

Bien sûr, Citadins de demain propose pas mal de connections avec Le Sang de la cité. On y mentionne plusieurs fois Gemina, on y retrouve la fameux jeu de stratégie de la Tour de Garde, on y perçoit des échos d’évènements funestes qui causent mort et malheur. Mais là où Le Sang de la cité semble davantage se concentrer sur un jeu de pouvoirs et sur un fantastique évident, Citadins de demain s’avère plus feutré, plus proche d’un récit de littérature générale avec une ambition différente mais pas moins fascinante, au contraire même.

Claire Duvivier s’interroge sur l’éducation et ses buts, sur la connaissance des matières qui ne sont pas « nobles », sur l’influence du fantastique sur le réel, sur la condition d’une femme dans un monde qui change et où d’autres femmes lui ont ouvert la voie, montrant que les positions de pouvoir ne sont pas réservées qu’aux seuls hommes. Au fond pourtant, la question n’est pas tant sur le plan du genre que sur celui du pouvoir. Pourquoi changer et éduquer différemment si c’est pour conserver un statu quo social ?

Citadins de demain jette de nombreuses pistes de réflexion, sur le colonialisme, sur le progressisme intellectuel et sur la fragilité d’une société inégalitaire.

Mais surtout, Citadins de demain parvient à suggérer, à jouer avec les non-dits et les tabous pour sous-entendre que même dans les milieux les plus progressistes de Dehaven, le chemin sera encore long pour faire bouger réellement les lignes…



Essai transformé pour Claire Duvivier avec cette première histoire prometteuse autour de Dehaven et de ces trois personnages attachants et émouvants confrontés à une société en pleine mutation. Citadins de demain renoue avec cette veine intimiste qui sied si bien à l’écriture de son autrice pour nous emmener sur ces terres rudes où l’âge adulte vient chasser les restes de l’enfance.


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Un long voyage

Qu’arrive-t-il quand une éditrice prend la plume ?

C’est à cette question qu’Un Long Voyage tente de répondre.

Premier roman de Claire Duvivier, l’une des co-fondatrices des excellents éditions Asphalte avec Estelle Durand, Un Long Voyage se range dans la catégorie fantasy mais pas n’importe laquelle : une fantasy dénuée de créatures fantastiques et autres mages qui jalonnent habituellement ce genre d’histoires.

Trouvant son chemin auprès des Forges de Vulcain, Un Long Voyage tente à présent de se faire une place dans les rangs de la fantasy française en évitant les pièges du premier roman. Un exercice pour le moins complexe.



Un voyage inattendu

Loin des stéréotypes habituels, Un Long Voyage s’ouvre sur un tabou.

Celui qui entoure Liesse, petit garçon du village de Roh-henua, l’une des îles de l’Archipel, dont le père décédé laisse la charge écrasante de trois enfants à une mère désormais seule. Les sages du peuplement décide alors que le cadet de la famille sera retiré de la garde de sa mère pour alléger son fardeau.

C’est ainsi que Liesse est confié au comptoir impérial de Tanitamo, capitale de l’Archipel situé sur l’île de Tan-henua.

Vendu comme un esclave, il atterrit donc au sein de la communauté impériale, occupant et souverain de l’Archipel, dont les membres vont l’élever comme l’un des leurs par la force des choses.

Au sein de cette concession, Liesse va rencontrer une figure importante de l’Empire, une jeune régisseuse promise à un avenir particulièrement brillant : Malvine Zélina de Félarasie. Au fil du temps, le jeune homme se lie d’amitié avec Malvine jusqu’à accepter de l’accompagner à l’autre bout de l’Empire dans la Cité-État de Solmeri, la plus petite province impériale.

Il n’a alors aucune idée que sa vie en sera changée à jamais et qu’il devra, un jour, raconter les terribles événements qui s’abattirent sur les habitants de Solmeri pour que les générations futures connaissent la vérité sur leur propre passé.

Histoire intimiste dès les premières lignes, le récit de Claire Duvivier emprunte la plume de son personnage principal, Liesse, qui couche en réalité ici les différentes étapes de son existence dans un but affiché dès le début : témoigner au sujet de Malvine, grand personnage historique du monde où évolue notre modeste héros.

Avant toute chose, Un Long Voyage explique la jeunesse d’un gamin qui, toute sa vie durant, se sentira étranger, pris entre les mâchoires de ses propres origines et des diverses influences étrangères qui s’exerceront sur lui au fil du temps, des îles de son enfance à la Cité-État de Solmeri en passant par la capitale de l’Empire, Grande-Quaïma. Avec une langue remarquablement subtile et d’une fluidité déroutante, l’autrice française décrit non seulement un monde sobre et crédible par petites touches mais surtout un voyage, celui de Liesse (et de Malvine au passage) à la fois sur le plan matériel mais aussi, et surtout, sur le plan psychologique. Le lecteur devient ainsi l’invité d’une existence, suivant les remous qui viennent secouer Liesse et les gens qu’il croisera.



Perpétuer l’Histoire

Surtout, Un Long Voyage parle du temps et de l’histoire, celle avec un grand H et celle, plus méconnue mais toute aussi importante, qui utilise une minuscule pour une vie que l’on pourrait croire entre parenthèse.

Liesse livre non seulement son autobiographie mais également la biographie de Malvine, cette grande servante de la Timonerie (le nom donné à l’Administration de l’Empire) qui finira injustement dans l’ignominie.

Ce Long Voyage est aussi celui de la réhabilitation, celle d’une femme qui aura voulu vivre sa vie de la façon la plus droite possible malgré les épreuves et qui aura donné jusqu’à son dernier souffle pour son peuple assiégé.

Claire Duvivier explique l’importance de l’historien et de la vérité transmise à travers les âges. Entre les lignes, Liesse se fait témoin de son époque, témoin d’une société qui se termine et d’une autre qui commence. Il contemple avec horreur le passé se heurtant au présent avec tous les dangers que cela suppose…

Si le nœud de l’intrigue pourrait se situer dans la mystérieuse disparition de Malvine, c’est à côté qu’il faudra pourtant chercher, dans le regard d’un homme qui affronte les mêmes tourments que les gens du peuple et qui les comprend donc d’autant mieux. En se mettant à hauteur humaine, l’autrice porte un regard tendre sur les personnages que croisent Liesse. Elle dissèque les rapports sociaux et les ambitions des uns et des autres, les rancœurs et les joies, les peines et les amours déçus. D’une façon qui rappelle furieusement Ursula K. Le Guin, Claire Duvivier soigne l’intime et en fait une parabole sur l’être et l’existence pour croquer le temps qui passe tout en rappelant que le souvenir doit respecter la vérité historique.

Construire des ponts

Mais au final, c’est un message d’une profonde et vibrante humanité qui irrigue l’ensemble du roman. Pont entre les peuples et les générations, entre les empires et les époques, le récit de Liesse offre enfin une place au personnage d’à côté, celui qui n’est ni le grand guerrier ni le politicien reconnu. Claire Duvivier permet de suivre un héros de l’ombre, un petit scribe, un bras droit, un ami, un confident, un père. Liesse ne sera jamais celui qui fera l’Histoire mais son rôle à l’intérieur n’en reste pas moins primordial, aussi primordial qu’une simple main posée sur un bras frissonnant peut l’être.

Tout au long de ce voyage, l’autrice nous montre des peuples différents mais qui arrivent toujours, d’une façon ou d’une autre, à établir entre eux des ponts. Cela ne se fait jamais facilement, n’arrive jamais sans errements ou sans drames, mais la vie trouve toujours une façon d’unir ceux qui, hier encore, pensaient ne jamais pouvoir vivre ensemble.

Roman plein de tolérance et magnanime jusqu’à la dernière ligne, Un Long Voyage traverse les âges et les générations, montre que malgré la fin des Empires et malgré les désastres, tout continue, à commencer par l’humain.

En nous réside toujours une part de vérité, celle qui fera un jour se lever un soleil nouveau sur le passé de générations autrement oubliées, voilà le plus bel enseignement d’Un Long Voyage, celui du cœur qui se souvient.



Sous la plume de Liesse, Claire Duvivier donne chair et âme aux petits héros, ceux dont on ne parle jamais et qui, pourtant, font aussi l’Histoire. En évitant l’esbroufe et les clichés inhérents au genre, Un Long Voyage parle de tolérance, d’humanité, de vérité et de modestie, sanctifiant le rôle de l’historien et du souvenir.

Simplement l’un des plus beaux romans de fantasy française de ces dernières années.
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Capitale du Nord, tome 1 : Citadins de demain

Autant l'avouer de suite, Dehaven la Capitale du Nord m'a beaucoup moins envoûtée que Gemina la Capitale du Sud.

Peut être parce que Gemina a des allures plus féodales et que Dehaven, avec son port de commerce et ses aristocrates portés sur le bien-fondé de la science au détriment du magique se fait bien plus progressiste.

Mais, il n'y a pas que cela, je crois.



Si les personnages principaux m'ont bien plu, j'ai eu tout de même plus de mal à les suivre dans leurs aventures. A vrai dire, j'ai eu un peu de mal à comprendre leurs faits et gestes. Ici, tout est effleuré. Rien n'est vraiment dit clairement et cela m'a perturbé. Les relations entre les personnages restent un peu nébuleuses et j'ai eu souvent l'impression qu'il me manquait un certain nombre d'éléments pour bien comprendre l'histoire et les réactions de certains personnages.

Le voile sera peut être levé dans les deux tomes suivants... à voir.



J'enchaîne d'ailleurs directement avec la suite de Capitale du Nord afin de mieux saisir les allusions à ce qu'il s'est passé dans le premier. Déjà que je m'y perds alors si je laisse passer trop de temps, j'ai bien peur de tout oublier.



Ceci dit, j'aime beaucoup le mystère qui entoure les deux villes. On sent bien qu'il y a là une intrigue commune et c'est ce qui le charme de ces deux trilogies.





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Capitale du Nord, tome 1 : Citadins de demain

Des enfants élevés dans un but scientifique. Pas d’histoires ni de récits. Que des faits, prouvés, vérifiés. Voici l’éducation proposée aux quatre fils et filles de deux familles de la haute noblesse de Dehaven, capitale du Nord. Fruits d’une expérience promettant des êtres supérieurs, elle se solde, bien évidemment, par des échecs, plus ou moins graves selon les individus. La narratrice, Amalia Van Esqwill semble la moins touchée. Cela ne l’empêche pas de se retrouver au centre d’un maelström de plus en plus puissant, qui va entraîner la cité entière. Et plus encore, peut-être ?



Et l’on découvre donc l’existence de cette jeune fille et de son meilleur ami et comparse d’expérience, Hirion De Wautier. Les deux autres enfants n’ont qu’un rôle mineur : la première, Delhia, sœur d’Hirion, a perdu l’esprit et ne parvient même plus à communiquer avec les autres ; le second, demi-frère d’Amalia, est parti faire carrière militaire et ne reviendra qu’au milieu du roman. Pour éviter le tête-à-tête, Claire Duvivier adjoint à cette paire Yonas, simple roturier, mais meilleur ami du couple aristocrate. Elle est assez banale en fait. Et cette mise en place des personnages m’a semblé un peu longue. Il faut le temps d’installer tout le monde : les personnages principaux, leur entourage, la ville et sa structure (et on sait combien la ville est importante, quand on a lu Le Sang de la cité de Guillaume Chamanadjian ; même si Claire Duvivier n’utilise pas ce ressort de la même façon, ne serait-ce que parce que Dehaven, la capitale du Nord, est bien moins vertigineuse que Gemina, la capitale du Sud). Et ensuite, seulement ensuite, l’action démarre vraiment.



Peut-être ce sentiment de lenteur est-il également dû à moi. On sait bien que le lecteur apporte beaucoup à un livre et je n’étais peut-être pas suffisamment disponible. En tout cas, ce sentiment a vite été effacé quand l’action s’est lancée. Car Hirion, malgré une éducation de scientifique, fait des expériences faisant appel au surnaturel. Il « envoûte » des objets. Et cela fonctionne. Trois objets, trois pouvoirs. Dont, pour le miroir, celui de laisser apercevoir une autre ville, que les jeunes gens surnomment Nevahed, la ville-miroir. Cette dernière fait penser, indiscutablement, à cette ville parallèle dans laquelle se rend Nox, le héros du Sang de la cité. Elle est déserte, quasiment sans végétation, vaste, inquiétante. Et elle induit des effets qui se font sentir peu à peu, délétères. L’irruption de ce côté fantastique est fort bien réussie : dans ce cas, le rythme m’a paru idéal, faisant progresser, sans précipitation, le malaise. Quelques signes avant-coureurs, un ou deux indices, et le drame qui se noue, brutal, violent. Une réussite.



Citadins de demain est donc le premier tome de « Capitale du Nord », deuxième partie de la double trilogie initiée par Guillaume Chamanadjian avec Le Sang de la cité, premier tome de la trilogie « Capitale du Sud », paru en début d’année. Comme le précise David Meulemans, le directeur de la maison d’édition Aux forges de Vulcain, s’embarquer dans cette série de six volumes au total n’est pas un pari en l’air. En effet, à la différence de certains cycles en cours d’écriture, « au moment où les Forges se sont engagées dans cette aventure, les six volumes étaient déjà écrits : je savais donc que la série avait une fin, que les volumes allaient crescendo ». Et pour le lecteur aussi, c’est rassurant. Rassurant de savoir que l’histoire a une fin (on peut penser à « Game of Thrones » dont les aficionados sont plus ou moins en deuil, tant George R.R. Martin semble être passé à autre chose). Rassurant de savoir que l’histoire a un arc défini, avec une cohérence pensée. Rassurant enfin de savoir que cela va aller crescendo car, comme je l’ai écrit plus haut, j’ai trouvé que ce roman de Claire Duvivier mettait du temps à démarrer. Mais que quand l’action était enclenchée, le rythme était trépidant.

David Meulemans a, selon moi, placé sa confiance au bon endroit, lui qui se dit « confiant : je crois que personne d'autre qu'eux deux n'aurait pu entreprendre cela. » Autrement dit, écrire une série pour les amateurs de fantasy, mais aussi pour les autres, ceux que les éditeurs de littérature de l’imaginaire cherchent à attirer, enfin, dans leur filet, ces lecteurs occasionnels que les mots « science-fiction » ou « fantasy » rebutent et font fuir en courant. Alors que parfois, ils en lisent sans réellement se l’avouer, tant les éditeurs généralistes en publient, en douce, sans trop le dire. Ne serait-ce que, secret de polichinelle, le prix Goncourt de l’année, L’Anomalie d’Hervé Le Tellier. En tout cas, David Meulemans fait confiance à Guillaume Chamanadjian et Claire Duvivier pour cela : « Il y a dans cette série une ambition chez ces deux auteurs, de ne pas écrire pour les happy few, les vieux routards de l'imaginaire, mais d'écrire une vraie œuvre grand public - ce qui n'est pas aisé car, écrire pour toutes et tous, tout en restant ambitieux, c'est extrêmement difficile. » Et c’est parfaitement réussi. Même un vieux lecteur de SFFF comme moi a trouvé du plaisir dans cette histoire. Car, malgré mes réserves, le bilan est tout à fait positif.



J’ai aimé découvrir le destin de la jeune Amalia, cobaye des idées révolutionnaires de ses parents, apprentis sorciers maladroits et inconscients. J’ai aimé cette ville où les tensions gagnent du terrain malgré la volonté des habitants de sauvegarder les apparences. J’ai aimé l’irruption du surnaturel et du double de Dehaven, en me demandant bien où tout cela va nous mener. Et j’ai vraiment hâte de lire la suite de ces deux histoires, espérant qu’elles vont trouver un point commun plus fort que les bribes entraperçues jusque-là. Vivement avril et octobre 2022 !
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Un long voyage

La couverture de ce roman se déroulant dans un monde imaginaire est particulièrement belle, et promet du rêve. Il s’avère que les engagements sont tenus, et c’est un grand plaisir de découvrir une nouvelle plume féminine de la Fantasy française.



Dans un univers prétechnologique, Liesse naît dans une famille de pêcheurs vivant sur un archipel d’une province éloignée de l’Empire. Après la mort de son père, sa mère est contrainte de le vendre à des fonctionnaires royaux. Ceux-ci, gênés par l’esclavage officiellement aboli, vont l’éduquer et pour certains, lui apporter de l’affection. Arrive la nouvelle gouverneuse Malvine, jeune femme talentueuse et visionnaire d’une lignée descendant des cousins des Empereurs.



Liesse écrit ses mémoires, retraçant sa vie et par-là même le destin extraordinaire de Malvine, pendant que l’Empire vit ses derniers instants. Liesse la suivra lors de sa nouvelle affectation à Solmeri. Il est impossible d’en raconter plus sans divulgâcher des éléments importants de l’intrigue.



Le parti-pris d’une longue lettre de Liesse relatant les événements personnels et politiques qu’il a vécus permet à l’auteure de nous offrir une plume littéraire qui reste très agréable à lire. Claire Duvivier a un pouvoir évocateur pour conter un monde imaginaire qui a son passé, ses paysages, ses coutumes et ses sociétés diverses. Liesse devient attachant au fil des pages, et si Malvine nous paraît parfois étrange, si nous ne comprenons pas toutes ses actions, c’est parce qu’elle cache ses vraies motivations. Le scénario est bien construit et cohérent, avec un aspect page turner bienvenu.



Une belle Fantasy, dont le grand retournement du roman est… un thème de science-fiction, qui se marie très bien avec l’univers créé. Je ne peux évidemment pas vous en dire plus sans vous gâcher le plaisir de la découverte, mais l’auteure a eu le talent de mêler harmonieusement cet élément science-fiction avec un monde où l’Histoire se transforme au fil des siècles en contes et légendes.



Un très bon moment de lecture, et je suivrai la carrière de Claire Duvivier, si elle compte publier d’autres œuvres !



Je remercie NetGalley et les Éditions Aux Forges de Vulcain pour l’envoi de ce livre.
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Capitale du Nord, tome 2 : Mort aux geais !

Sous bien des aspects, j'aime le projet de la Tour de Garde. L'idée que deux auteurs entrelacent leurs deux mondes vers une fin commune me séduit. Pour autant, je dois reconnaître que si j'aime beaucoup Capitale du Sud, j'aime bien moins Capitale du Nord.



La plume de Claire Duvivier n'est pas en cause en tant que telle. Je la trouve soignée, bien maniée. On sent son talent de conteuse, talent qui rend hommage à notre belle langue.



Malgré tout, je dois avouer que Dehaven et Amalia n'ont clairement pas mon intérêt. Je trouve l'héroïne froide. Son détachement fait que je ne m'attache pas du tout à elle et que je n'ai pas du tout envie de savoir ce qui peut lui arriver. Quant à Dehaven, je trouve qu'elle souffre de la comparaison avec Gemima. Et pourtant j'adore la fantasy politique. Mais là l'intrigue ne m'a pas plus emballée que cela. Je l'ai trouvée longue, avec un peu un éloignement de la politique réelle de la ville. On sent qu'il y a du grabuges imminents mais comme Amalia, on est à la marge.



Comme pour le premier tome, j'ai dû me forcer à lire les premiers chapitres et un réel intérêt a fini par poindre sur la toute fin uniquement, ce que je trouve véritablement dommage. La lecture de ce tome a surtout eu lieu parce que je veux savoir la fin de Capitale du Sud et que je craignais qu'il me manque des éléments de compréhension. C'est maintenant chose faite, je vais pouvoir savourer le dernier tome de Capitale du Sud mais je me demande honnêtement si je lirais la suite de Capitale du Nord.
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Capitale du Nord, tome 2 : Mort aux geais !

J'ai déjà évoqué ici que ma lecture de Capitale du Nord m'avait moins bien séduite que sa série parallèle Capitale du Sud. À la lecture du second tome , ce sentiment perdure.

La narration y est certainement pour beaucoup. Ici, c'est toujours Amalia , une jeune noble qui raconte. Après le drame survenu à la fin du 1er tome, Amalia et Yonas n'ont plus d'autre choix que de vivre cachés. Mais, le désir de vengeance devient plus fort que le danger auquel ils s'exposent en voulant l'assouvir.

Le ton est sans doute intentionnellement froid et propre au caractère d'Amalia, une jeune fille très cérébrale et peu sentimentale. C'était déjà ce qui m'avait gênée dans le 1er tome. Ce manque de profondeur dans les émotions.

Cela m'a tenue éloignée des personnages et j'ai parfois décroché...

Pour autant, j'aime beaucoup l'atmosphère particulière qui se dégage de cette série La Tour de garde. Un univers historique fantasy et steampunk qui sert de décor à des luttes de classe et à des considérations politiques et commerciales avec un brin de magie inventif.

Je vais donc en poursuivre la lecture avec intérêt. D'autant plus que les deux tomes qui m'attendent vont me replonger à Gemina, la Capitale du Sud, que j'avais beaucoup aimé.



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Capitale du Nord, tome 3 : L'Armée fantoche

Nous y voilà ! Depuis plusieurs mois, plusieurs années, je suis, avec beaucoup d’autres, cette superbe aventure que représente La Tour de Garde. Deux trilogies intimement mêlées, habilement liées. L’histoire de Capitale du Sud et de son héros, Nox, s’est achevée dans Les contes suspendus de Guillaume Chamanadjian. L’Armée fantoche de Claire Duvivier vient clore, brillamment, le récit dont Amalia est le centre, celle de Capitale du Nord.



Amalia est à la Tour de Garde, dans la petite communauté que Nox met en place progressivement. Cette idée de vivre ensemble sans chef, sans grade, sans hiérarchie. Mais elle reste un peu en dehors du cercle. Car elle encore emplie d’une volonté de vengeance. Tout son monde s’est écroulé. Sa famille a été détruite. Sa ville est une quasi dictature depuis que leur tentative de révolte a échoué, menant à la mort la plus grande partie des conjurés. Et Amalia a trouvé un des responsables du chaos qui fait trembler la capitale du Sud comme la capitale du Nord. Cet être magique qui a pris possession du corps de Delhia, sœur d’Hirion, son ancien ami qui s’est étrangement suicidé après avoir commis un massacre à la fin du premier volume, Citadins de demain. De plus, elle pense connaître un moyen de se venger, grâce à la magie. La voilà donc hésitante, perdue entre deux voies possibles : tenter d’oublier en se plonger dans la nouvelle aventure d’une société plus égalitaire, ou tenter d’achever ce qui a été commencé et mettre fin à la menace que représente le Héraut.



Mais elle ne va pas avoir le choix finalement. Car, une fois de plus, les évènements vont décider pour elle. Et Claire Duvivier nous entraîne là où on ne l’attendait pas. En dehors de la communauté qui s’est tissée autour de la tour de Garde. Vers des ennemis en apparence nombreux et puissants. Vers un passé qui explique bien des choses. Amalia ne reste pas finalement à ressasser ses doutes. Isolée, volontairement (c’est son caractère, elle a du mal à parler en société, à être en confiance, à s’intégrer à un groupe, à une communauté), elle finit par prendre le taureau par les cornes et à prendre le parti de l’action. Et de la magie.



Mais, du début à la fin de ce roman, qu’on soit plongé dans les tergiversations d’Amalia ou qu’on la suive dans ses déplacements, aucun ennui, aucun temps mort. Claire Duvivier a su, encore plus dans ce tome que dans les autres je trouve, nous entraîner à sa suite. J’ai plongé dans ce roman et n’en suis ressorti qu’à la dernière page. Je me suis même forcé à ralentir un peu le rythme pour ne pas gâcher mes derniers moments dans ce monde qui m’a porté si longtemps. Tout le temps on est sollicité par un personnage, un nouvel évènement. Et tout cela de façon naturelle. L’histoire coule du début à la fin sans que l’on se surprenne à en sortir. Immersion totale.



En abordant ce dernier tome, j’avais un peu peur de redites, de passages trop proches du roman de Guillaume Chamanadjian, Les contes suspendus. Je craignais un peu de m’ennuyer par moments. Mais c’était sans compter sur le talent de ces deux auteurs. Car Claire Duvivier et son compagnon d’écriture ont construit des histoires qui se complètent et s’interpénètrent parfaitement. Les évolutions d’une trame vont nourrir celles de l’autre, sans que le lecteurice n’éprouve aucune lassitude. Au contraire, on recherche les clins d’œil, les allusions à l’autre trilogie, aux autres personnages. On voit les parallèles, les différences. Cette complémentarité saute aux yeux et participe de la joie de lecture. Merci à Claire Duvivier et Guillaume Chamandjian pour leurs superbes récits (et Aux forges de Vulcain pour les avoir édités) qui sont capables de faire vivre, pour nous, des femmes et des hommes si pleins de sève, si vrais, qu’ils semblent se dresser devant nous avec leurs sentiments, leurs envies. J’ai attendu les parutions des six tomes à chaque fois avec impatience car j’ai aimé me promener dans les rues de ces capitales et de partager les émotions de Nox, d’Amalia et de tous les autres. Et je les porterai longtemps avec moi.
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Capitale du Nord, tome 1 : Citadins de demain

Amalia et Hirion sont deux jeunes gens aristocrates de Dehaven, la ville la plus importante du nord, qui sont étroitement liés à Yonas, un roturier, avec lequel ils ont reçu une éducation très ouverte, basé sur les sciences et l'humanité.

Mais on a pourtant l'impression qu'ils ne sont pas "des citadins de demain", leur destin semblant déjà scellé....Jusqu'à ce qu'Hirion se prête à des expérimentations magiques qui vont bouleverser leur avenir.

J'avoue qu'en commençant cette lecture, je ne m'attendais pas à ce type d'univers, proche du notre au XVIII -ème siècle. J'ai été très vite immergée dans cette ville de Dehaven, qui sert de cadre à l'intrigue. On découvre les principaux quartiers au fur et à mesure, tout comme les enjeux commerciaux et politiques, sans être noyés. C'est bien écrit, plusieurs trames sont menées, nous permettant de ne pas nous ennuyer une seconde. Quelques petites allusions par rapport à Hirion et leur séjour sur une île je crois me semblent encore flous et je ne sais pas si c'est moi qui ai raté quelque chose ou si on en saura plus après. En tout cas j'adore l'ambiance et j'ai vraiment hâte de lire la suite. En attendant je vais lire Capitale du sud qui m'attend depuis un moment.

Merci à Babelio et aux éditions Aux forges du Vulcain !

Challenge Mauvais genres 2021
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Un long voyage

il s'agit de l'histoire d'un fils de pêcheur promis à un grand destin.

L'écriture est belle et évocatrice (les paysages font penser à l'Indonésie).

Une civilisation entière est recréé par l'autrice : quelle imagination !

L'humanité est dépeinte dans tous ses aspects, bons ou mauvais (ostracisme, effondrement,...).

Ce récit cependant me semble un méli-mélo historique et géographique et prend parfois un tour vraiment trop macabre (mais c'est un peu le reflet de toutes les époques, hélas !).

Il manque une carte de cet univers et c'est bien dommage

Ce roman poétique et étrange vaut tout de même la peine d'être lu.
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Capitale du Nord, tome 1 : Citadins de demain

Côté nord.



Amalia Van Esqwill est une jeune aristocrate de Dehaven. Elle et deux autres enfants suivent une instruction rationnelle sans mention de contes et légendes. Mais un rite ancien pourrait faire resurgir la magie à Dehaven.



Cette fois-ci l'action se déroule à Dehaven au nord. Elle est inspirée de Bruges. Celle-ci est plus "raisonnée" que Gemina. Tout est cadré, droit. L'ambiance est plus calme, voire froide. Ce sont les intérêts politiques et économiques qui prédominent ici.



J'ai eu plus de mal à m'attacher à Amalia. Son éducation rationnelle la rend froide et elle semble ne pas ressentir d'émotions. Par moment elle m'a donné l'impression d'avoir un complexe de supériorité. J'ai trouvé son compagnon d'études Yonas bien plus sympathique.



Plusieurs personnages voyagent entre Dehaven et Gemina. Ainsi certains personnages apparus dans le premier tome apparaissent ou sont mentionnés. Il en va de même pour les événements qui se déroulent en parallèle à Gemina.



Bref, je suis impatiente de voir comment les événements des deux cités vont faire avancer l'histoire.
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Capitale du Nord, tome 1 : Citadins de demain

Une saga fantasy qui me tentait depuis longtemps et l'occasion s'est présentée via NetGalley ! Après l'avoir commencé j'ai vu qu'il était préférable de lire les volumes dans l'ordre de parution donc que celui-ci est le second du Cycle de la Tour de Garde !



Dehaven est la Capitale du nord, identique dans l'esprit aux villes de la Ligue Hanséatique où le commerce est est roi. C'est une ville portuaire tirée au cordeau, prospère grâce à l'exploitation des colonies et où les strates sociales sont préservées.



Amalia est de haute naissance et c'est par elle que nous allons découvrir Dehaven et ses habitants. Ses compagnons d'études sont Hirion, de même classe sociale et Yonas, fils d'éclusier, qui les a rejoints car le père de l'une est redevable au père de l'autre.



Amalia est intelligente et pragmatique et de fait plutôt rigide, leur éducation éludant les histoires, contes et légendes, ne considérant comme profitables que les faits avérés ! Yonas leur apporte cette liberté d'imagination donnée par la fiction. Ils sont éduqués de façon à devenir les citadins de demain, but affirmé de parents trop idéalistes et peu au fait des évolutions humaines.



Petit à petit Hirion est aspiré vers une magie ancienne en cherchant des solutions pour les problèmes qui se présentent et découvre une cité miroir.



Malgré tout l'intérêt que j'ai éprouvé pour l'histoire et en sachant qu'il fallait prendre le temps de présenter les personnages et le contexte, j'ai trouvé quelques longueurs qui, combinées à un langage soutenu à la formulation parfois obscure, m'ont un peu lassée !



J'aurais apprécié une plume un peu plus nerveuse tout au long du déroulé et non pas une précipitation sur les dernières pages. J'ai eu l'impression que des sujets, certes à priori secondaires, avaient été écartés un peu rapidement.



J'ai très envie de savoir comment les choses vont se poursuivre et je vais devoir lire le tome 1 de Capitale du Sud avant de poursuivre plus avant.



#Citadinsdedemain #NetGalleyFrance #rentreelitteraire2023



Challenge Féminin 2022/2023

Lecture Polar Thématique octobre 2023 : de l'eau sur la couverture
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Le futur de la cité

Le festival des Imaginales va avoir lieu du 25 au 28 mai à Épinal, sous une nouvelle direction artistique, celle de Gilles Francescano. Et l’anthologie qui lui correspond vient juste de sortir. L’occasion de découvrir des nouvelles francophones d’horizons très divers, qui mêlent plusieurs générations d’auteurices. Tout cela pour s’interroger sur notre avenir urbain.



Nouvelle direction, nouvel éditeur. Les Imaginales ont connu une passation de pouvoir assez agitée, avec des mois sombres et des reproches dans les deux camps. Difficile, de mon côté, de prendre parti pour l’un ou l’autre, même si Stéphanie Nicot avait été particulièrement convaincante. Mais là n’est plus le sujet. Je ne suis jamais allé à ce festival. Je me contente de lire les anthologies qui paraissent à l’occasion. Et de noter que les éditions Mnémos ont laissé la place, cette année, aux éditions Au diable vauvert. Plongeons-nous à présent dans le contenu de ce livre : 14 textes (et non nouvelles, j’en parlerai ensuite) précédés d’une préface. Du beau monde, assurément. Des auteurices plus anciens aux plus récents. Un sommaire alléchant.



Si j’ai aimé dans l’ensemble la lecture (rapide) de cette anthologie, je n’en ressors pas empli d’espoir pour l’avenir. La plupart des auteurs, même s’ils ont des points de vue très différents et des approches très variées, n’imaginent pas des cités épanouissantes pour l’être humain. Comme souvent dans le domaine de l’imaginaire, les auteurices cherchent à pointer ce qui fait mal : le passage du temps qui abîme (« Tokyo 2115 ») et détruit, parfois de façon définitive au détriment de l’humanité même qui a causé les dégâts (« Histoire de Rome de nos jours à la fondation », « Tempus edax, homo edacior ([In]dispensables) », « L’histoire des oiseaux ») ; la tentation des sociétés à se tourner, comme ultime réponse, vers la dictature, la tyrannie, la poigne d’un homme (rarement une femme) fort et sans pitié, au nom du bien commun, mais destructeur de toute individualité, de tout rêve, de tout espoir (« Entartage », « 2084 ») ; un duel entre hommes et machines, les I.A. prenant le pouvoir ou non, suivant les instructions des humains ou non (« Le dernier jour de Paris », « Histoire de Rome de nos jours à la fondation ») ; l’humain changeant de peau, car le corps que nous avons à notre naissance ne suffit pas ou ne correspond pas ce que nous avons dans la tête, et car la technique le permet dorénavant (« Garou 2.0 ») ; l’être humain continuant à cramer le monde et à user de ses semblables comme d’objets (« Mobipolis ») dans une cité délétère (« Kontrol’za kacestvom »). Seule Sara Doke, ou presque, apporte un léger rayon de soleil en évoquant, dans « Phra au soleil », une société qui pourrait respecter l’autre et se rapprocher de celle que je découvre ces mois-ci dans différentes lectures (Un pays de fantômes de Margaret Killjoy, Cité d’ivoire de Jean Krug, Le monde de Julia d’Ugo Bellagamba & Jean Baret, Un psaume pour les recyclés sauvages et Une prière pour les cimes timides de Becky Chambers et même Les terres closes de Robert Jackon Bennett). Un panorama incomplet, certes, mais riche d’images d’un monde futur.



Cette lecture du Futur de la cité a été très agréable, alternant entre le vraiment passionnant et l’anecdotique, comme souvent dans une anthologie. Certains textes m’ont surpris, d’autres m’ont juste distrait (ce qui est déjà très bien). J’ai aimé me projeter dans ces multiples avenirs ainsi proposés, imaginés. Un bon cru, comme on dit.



Comme d’habitude, j’ai parlé de chaque texte individuellement, mais comme c'est un peu long, je n'ai placé cette partie que sur mon blog.
Lien : https://lenocherdeslivres.wo..
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