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Citations de David Graeber (399)


Nous sommes devenus une civilisation fondée sur le travail, mais pas le travail « productif » : le travail comme fin et sens en soi.
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Du point de vue économique, le Moyen Age fut bien l'époque du "revenu cible", où la réaction typique à une bonne période économique, même parmi les artisans et la plus grande partie de la proto-bourgeoisie, était de prendre quelques jours de congé en plus. (...) Quand le Pays de Cocagne devenait réalité, c'était sous la forme de festivals populaires comme le carnaval; presque toute amélioration de la richesse se trouvait reverser dans des fêtes communales, des parades et des vices collectifs. Ainsi, ce qui a rendu le capitalisme possible, c'est ce qui pourrait être appelé la privatisation du désir.
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En d'autres termes, le seul élément constant dans toutes ces définitions, est que le désir (à la différence des besoins, des pulsions ou des intentions) implique nécessairement l'imagination. Les objets du désir sont toujours des objets imaginaires, et la plupart du temps, d'une façon ou d'une autre, des totalités imaginaires - puisque la plupart des totalités sont elles-mêmes des objets imaginaires.
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Tout cela a évidemment contribué à établir les structures définitoires du capitalisme : à savoir un moteur de production infinie qui ne peut maintenir son équilibre que par une croissance continue. Des cycles infinis de destruction semblent alors constituer nécessairement l'autre face de ce processus. Pour ouvrir la voie à de nouveaux produits, il faut se débarrasser de ces rebuts; les détruire ou au moins les écarter comme démodés ou dénués d'intérêt. Et c'est bien cela la structure qui permet de définir la société de consommation : une société qui écarte toute valeur durable au nom du cycle sans fin de l'éphémère.
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La plupart de jobs à la con, par leur insignifiance même, exacerbent la dynamique sadomaso que porte déjà en germe toute relation hiérarchique verticale.
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Ce n’est pas le manque d’imagination qui pose problème, ce sont les systèmes de dette et de violence créés pour étouffer le potentiel de l’imagination humaine ou pour qu’elle ne serve qu’à créer des produits financiers dérivés, de nouveaux systèmes d’armements.
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Question : Combien faut-il d’électeur pour changer une ampoule ?
Réponse : Aucun. Les électeurs ne peuvent rien changer.
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On pourrait aller plus loin. La gauche "acceptable", je l'ai dit, a embrassé simultanément la bureaucratie et le marché. La droite "libertarienne", au moins, a une critique de la bureaucratie. La droite fasciste a une critique du marché : en général, elle est favorable à des politiques de bien-être social ; elle veut seulement les restreindre aux membres de son groupe ethnique favori.
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Si l'on donne un pouvoir social suffisant à un ensemble de gens qui professent certaines idées, mêmes les plus extravagantes, ils finiront, délibérément ou non, par produire un monde organisé de telle façon qu'il persuadera ceux qui y vivent, par mille biais subtils, de l'évidence absolue de ces règles.
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Aux yeux d'un Grec antique, la distinction entre un esclave et un travailleur salarié endetté aurait sûrement fait figure, au mieux, de subtilité juridique.
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Prenez les villes. On a longtemps pensé qu’elles marquaient une sorte de point de non-retour historique : une fois le pas franchi, et s’ils tenaient à éviter le chaos (ou la surcharge cognitive), les hommes devaient renoncer pour toujours à leurs libertés fondamentales et se plier aux décisions de bureaucrates anonymes, de prêtres rigoristes, de rois protecteurs ou de politiciens va-t-en-guerre. Envisager l’histoire de l’humanité à travers ce prisme, c’est un peu remettre au goût du jour les préceptes du roi Jacques, en postulant que la violence et les inégalités de nos sociétés modernes sont des conséquences naturelles des structures de gestion rationnelle et de soin paternaliste – des structures conçues pour ces populations devenues subitement incapables de s’organiser toutes seules parce qu’elles seraient devenues trop grandes.

Outre qu’elles n’ont aucun fondement psychologique solide, ces interprétations sont contredites par la recherche archéologique. De nombreuses villes à travers le monde ont d’abord été des expériences civiques de grande envergure, bien souvent exemptes de la hiérarchisation administrative et de l’autoritarisme attendus. Il nous manque encore une terminologie adéquate pour les définir. Dire qu’elles étaient égalitaires peut renvoyer à toutes sortes de réalités différentes : un parlement local et des projets de logement social coordonnés, comme dans certaines civilisations précolombiennes ; des familles indépendantes organisées en quartiers et en assemblées citoyennes, comme dans les mégasites préhistoriques du nord de la mer Noire ; l’introduction de principes égalitaires explicites fondés sur l’uniformité et la similitude, comme dans la culture d’Uruk en Mésopotamie…

Cette diversité n’a rien d’étonnant quand on sait à quoi les villes ont succédé dans toutes ces régions. Le paysage pré-urbain n’était pas dominé par des sociétés rudimentaires isolées les unes des autres, mais par de vastes réseaux connectant des groupes écologiquement très variés, entre lesquels les personnes, la faune et les idées circulaient selon d’infinis et tortueux méandres. Les unités démographiques de base, qui restaient plutôt modestes, surtout à certaines périodes de l’année, s’organisaient généralement en coalitions ou confédérations assez lâches. Sous la forme la plus basique, celles-ci correspondaient à une mise en acte de la première des libertés humaines : la liberté de quitter son lieu de vie, avec la certitude que l’on sera accueilli, bien traité et même respecté dans un autre pays.

Lorsqu’elles accédaient à un stade supérieur, elles se rapprochaient des amphictyonies de l’Antiquité grecque, ces fédérations religieuses et politiques de cités ou de peuples voisins chargés de l’entretien des lieux sacrés. Marcel Mauss avait probablement raison de soutenir que le terme « civilisation » devait être réservé à ces grandes zones d’hospitalité. Alors que notre réflexe est de faire des civilisations une émanation des villes, il paraît plus réaliste, compte tenu de ce que nous avons appris, de renverser la définition et d’envisager les premières cités comme de vastes confédérations régionales comprimées à l’intérieur d’un espace restreint.
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Le postulat d`un lien nécessaire entre hiérarchies spatiales et hiérarchies sociales - c`est-a-dire l`idée que l`accroissement démographique engendrerait fatalement des structures de domination - ne semble guere questionné dans le monde de la recherche ni dans d`autres champs. On tient pour acquis que l`étendue et la densité d`un groupe social sont forcément corrélées a la "complexité" de son organisation.

(...) Comme nous l`avons vu, non seulement ces hypotheses ne sont pas vraiment cruciales sur le plan théorique, mais elles sont tres rarement corroborées par les faits. Tous les systemes complexes ne sont pas verticaux, pas plus dans la nature que chez l`etre humain, comme l`a montré Carole Crumley, anthropologue spécialiste de l`age du fer européen. Le fait que nous accrochions a cette fausse croyance en dit probablement plus long sur nous-memes que sur les peuples ou phénomenes étudiés.
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La valeur d’un esclave est celle de l’honneur qu’on lui a pris.
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Tout système qui réduit le monde à des chiffres ne peut être maintenu que par les armes, qu’il s’agisse d’épées et de gourdins ou de « bombes intelligentes » portées par des drones sans pilote.
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On peut s’interroger par exemple sur la relation spécifique qu’entretiennent les connaissances ésotériques et les connaissances bureaucratiques sur le continent américain. Au premier abord, le lien entre les unes et les autres n’est pas flagrant. Autant on comprend assez bien comment la brutalité pure peut s’incarner, sur le plan institutionnel, à travers la souveraineté ou l’affirmation d’un certain charisme dans l’arène politique, autant la voie conduisant de la maîtrise de l’information (comme forme générale de domination) au pouvoir administratif paraît plus tortueuse. Que peut-il bien y avoir de commun entre le savoir ésotérique que mobilisaient les bâtisseurs de Chavín de Huántar, souvent ancré dans des expériences hallucinatoires, et les méthodes comptables des sociétés incas du XVe siècle ? Rien, serait-on tenté de répondre – avant de se rappeler que, à des époques beaucoup plus proches de nous, les candidats à des postes administratifs se devaient de maîtriser des connaissances qui n’avaient pratiquement aucun rapport avec leurs activités futures et qui n’étaient valorisées que pour leur dimension occulte. Dans la Chine du Xe siècle ou l’Allemagne du XVIIIe, par exemple, on demandait aux aspirants fonctionnaires de prouver leur aptitude à lire des textes classiques rédigés dans des langues anciennes, et même mortes. Leurs homologues modernes, eux, sont tenus de passer des examens portant sur la théorie du choix rationnel ou la philosophie de Jacques Derrida. Ce n’est que dans un second temps qu’on leur enseigne l’art de l’administration proprement dit par le biais de méthodes plus traditionnelles, comme les exercices, les stages ou le tutorat.
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Comme nous le verrons, la pratique même de l’inhumation ne concernait que certains individus atypiques, les autres n’étant pas enterrés du tout.
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C’est le scandale secret du capitalisme : à aucun moment il n’a été organisé essentiellement autour d’une main-d’œuvre libre.
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La politique est la dimension de la vie sociale où les choses deviennent vraies quand ceux qui y croient sont assez nombreux.
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Être un aristocrate, c’est essentiellement faire valoir que, dans le passé, on a été traité par les autres en aristocrate, et que cela doit donc continuer (les aristocrates ne font rien de particulier, la plupart passent leur temps à exister, tout simplement, dans une sorte d’état présumé supérieur).
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Les deux parties à une transaction prenaient une petite branche de noisetier, l’entaillaient pour indiquer le montant dû, puis la coupaient en deux. Le créancier gardait la moitié qu’on appelait « the stock », « la souche » (c’est l’origine du terme stock holder, « actionnaire », littéralement « détenteur de souches »), et le débiteur gardait l’autre, « the stub », « le bout » (d’où l’emploi en anglais de l’expression ticket stub)
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