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Citations de David Graeber (399)


L’État démocratique a toujours constitué une contradiction.
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En cet âge final et abêtissant du capitalisme, nous passons des technologies poétiques aux technologies bureaucratiques.
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Le samedi 1er octobre 2011, la police de New York a arrêté 700 militants d'Occupy Wall Street qui tentaient de manifester sur le pont de Brooklyn. Le maire, Michael Bloomberg, a justifié cette décision en faisant valoir qu'ils entravaient la circulation. Cinq semaines plus tard, le même Bloomberg a fermé au trafic automobile deux jours entiers un pont voisin, celui de Queensbroro, pour permettre le tournage du dernier film de la trilogie de Christopher Nolan sur Batman, The Dark Knight Rises.
Beaucoup ont relevé l'ironie de la chose.
Il y a quelques semaines, je suis allée voir le film avec quelques amis d'Occupy - dont la plupart avaient eux-mêmes été arrêtés sur le pont en octobre. Nous savions tous qu'il constituait sur le fond une longue tirade de propagande anti-Occupy. Peu nous importait. Nous allions au cinéma en comptant nous amuser, un peu comme un spectateur qui n'est pas raciste ni nazi irait voir Naissance d'une nation ou Le Triomphe de la volonté. Nous nous attendions à un film hostile, et même insultant. Mais aucun de nous ne pensait qu'il serait si mauvais.
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Sans Athènes, il serait impossible d'affirmer que la " tradition occidentale " contient quelque chose d'intrinsèquement démocratique. [...] Durant les deux derniers siècles, les démocrates ont tenté de greffer les idéaux du gouvernement direct du peuple sur l'appareil coercitif de l'État. Au final, ce projet s'est révélé tout simplement impossible. Les États, en raison de leur nature même, ne peuvent pas être véritablement démocratisés. Ils ne sont rien d'autre que des moyens de réguler la violence. Les fédéralistes américains étaient très réalistes quand ils affirmaient que la démocratie ne convient pas à une société fondée sur des inégalités de richesse, dans la mesure où un appareil de coercition est nécessaire pour protéger les richesses et pour tenir en respect cette " populace " à laquelle la démocratie prétend donner le pouvoir. Athènes fut un cas unique à cet égard, parce qu'elle représenta en fait un moment de transition. Il y avait certainement des inégalités de richesse et même, vraisemblablement une classe dirigeante, mais il n'y avait pas d'appareil de coercition institutionnalisé. C'est la raison pour laquelle les historiens ne s'accordent pas sur la question de savoir s'il s'agissait véritablement d'un État.

Chapitre Conclusion : L'impossible mariage de la démocratie et de l'État.
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L'opposition à l'expansion européenne presque partout dans le monde, et cela dès ses débuts, semble avoir été menée au nom même de ces " valeurs occidentales " que les Européens en question n'avaient pas encore faites leurs. Enseng Ho par exemple, a attiré notre attention sur la première formulation de la notion de " jihad " contre les Européens dans l'Océan Indien, dans un ouvrage intitulé " Gift of the Jihad Warriors in Matters Regarding the Portuguese " écrit en 1574 par un juriste arabe nommé Zayn al-Din al Malibari et adressé au sultan musulman de l'État du Bijapur. Dans ce texte, l'auteur démontre qu'il est juste de financer la guerre contre les Portugais dans la mesure où ils ont détruit la société tolérante et pluraliste dans laquelle musulmans, hindous, chrétiens et juifs avaient toujours réussi à coexister.

Chapitre 5 : Récupérations croisées.
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À ce moment-là, les démocrates avérés [...] étaient considérés comme une poignée d'agitateurs, et cela au sein même des régimes révolutionnaires. Les choses n'ont commencé à changer qu'au cours du siècle suivant. Aux États-Unis, à mesure que le droit de vote s'élargissait dans la première décennie du XIXè siècle et que les hommes politiques se voyaient progressivement contraints d'attirer les suffrages des petits fermiers et des travailleurs des villes, certains commencèrent à adopter ce terme. Andrew Jackson ouvrit la voie en se présentant comme " démocrate " dans les années 1820. En vingt ans, presque tous les partis politiques — et pas seulement les partis populistes, mais les plus conservateurs aussi — firent de même. En France, c'est dans les années 1830 que les socialistes commencèrent à se réclamer de la " démocratie ", avec des résultats comparables. En dix ou quinze ans, ce terme fut aussi repris par les républicains modérés et les conservateurs, contraints de se confronter aux premiers pour conquérir les voix des milieux populaires. Cette période fut également marquée par un regain d'intérêt pour Athènes. À partir des années 1820, celle-ci commença à ne plus être représentée sous la forme d'un cauchemar manifestant la violence propre à la psychologie des foules, mais comme l'incarnation d'un noble idéal de la participation publique.

Chapitre 4 : Sur l'émergence de " l'idéal démocratique ".
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Et c'est bien cela la structure qui permet de définir la société de consommation comme on la décrit habituellement : une société qui écarte toute valeur durable au nom du cycle sans fin de l'éphémère. Il s'agit d'une société du sacrifice et de la destruction...
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La légitimité de tout ordre légal réside donc en dernière instance sur des agissements illégaux – le plus souvent, des actes de violence illégale.
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Au premier chef se trouve le principe selon lequel personne ne fait jamais rien par souci des autres ; quoi que l'on fasse, l'objectif est d'en tirer un bénéfice pour soi-même. En langage courant, il existe un mot pour désigner cette attitude : on appelle ça le “cynisme“. La plupart d'entre nous essayent d'éviter les personnes qui le prennent trop à cœur. En économie, apparemment, on appelle ça la “science“.
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Rome a largement justifié son pouvoir en prétendant imposer un système équitable de droit rationnel. Mais ces mêmes magistrats ont organisé des formes de divertissement pour transformer les masses en une foule lyncheuse, pour attiser des passions folles, des alternances de soif de sang et de prestations somptuaires, de factionnalisme, de culte des idoles, de bouc émissaire… tout cela fut conçu pour convaincre que la démocratie elle-même serait un désastre, qu'il fallait la confiner aux jeux, et laisser les professionnels s’occuper du droit et de la gouvernance. Ce fut extraordinairement efficace. 
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J'ai moins cherché à proposer des solutions politiques concrètes qu'à inviter à la réflexion et au débat sur cette question essentielle : à quoi pourrait ressembler une société authentiquement libre ?
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Quelles qu'en soient les raisons historiques, il semble que les bureaucraties publiques et privées soient organisées de façon à garantir qu'un important pourcentage des acteurs ne seront pas en mesure d'accomplir leur tâche comme prévu. C'est en ce sens qu'il me parait juste de dire que les bureaucraties sont des formes utopistes d'organisation. Après tout, n'est-ce pas ce qu'on nous dit toujours des utopistes, qu'ils ont une foi naïve dans la perfectibilité de la nature humaine et refusent de traiter avec les humains tels qu'ils sont ? Et que cela les conduit à fixer des normes impossibles, puis à reprocher aux gens d'être incapables de s'y conformer dans leur vie ? Or, c'est ce que font toutes les bureaucraties. Elles posent des impératifs en jurant qu'ils sont raisonnables ; puis elles découvrent qu'ils ne le sont pas (puisqu'un grand nombre de gens seront toujours incapables de se conduire comme elles l'attendent) ; elles concluent alors que ce ne sont pas les impératifs qui posent problème, mais l’insuffisance individuelle de chaque être humain, qui n'arrive pas à se hausser à leur niveau.
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[Un] chasseur de morses [...] s'était senti offensé quand l'auteur avait voulu le remercier de lui avoir donné de la viande - parce que les humains s'entraident et que, lorsque nous considérons quelque chose comme un cadeau, nous nous muons en êtres infra-humains : "Ici, nous disons qu'avec des cadeaux on fait des esclaves et qu'avec des fouets on fait des chiens."
"Cadeau" ne désigne pas dans cette phrase quelque chose qu'on donne gratuitement ; il ne s'agit pas de l'aide mutuelle des êtres humains entre eux, sur laquelle nous pouvons généralement compter. Remercier quelqu'un, c'est suggérer qu'il aurait pu ne pas agir de cette façon, donc que le geste qu'il a choisi de faire crée une obligation, un sentiment de dette - et par conséquent d'infériorité.
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Les anthropologues n'ont pas pu trouver d'explication simple et convaincante des origines de la monnaie parce que rien ne porte à croire qu'il pourrait y en avoir une. La monnaie n'a jamais été "inventée", pas plus que la musique, les mathématiques ou l'orfèvrerie. Ce que nous appelons "monnaie" n'est absolument pas une "chose", c'est une façon de comparer les choses mathématiquement, proportionnellement - de dire que 1 de X équivaut à 6 de Y. À ce niveau, elle est probablement aussi ancienne que la pensée humaine.
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Les différents “exploits“ ou actes de transgression par lesquels un roi marque sa rupture avec la morale ordinaire ne font généralement pas de lui quelqu'un d’immoral, mais une créature au-delà de la morale. En tant que tel, il peut être considéré comme le principe constituant d'un système de justice ou de morale – puisqu’en toute logique, aucune créature capable de créer un système de justice ne saurait se trouver elle-même déjà soumise au système qu’elle crée. 
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Un jour, l’empereur convoqua Nasreddin à la cour.
– Dis-moi, tu es un mystique, un philosophe, un homme qui pense hors des sentiers battus. Je m’interroge sur le problème de la valeur. C’est une question philosophique intéressante. Comment établit-on la vraie valeur d’une personne, ou d’un objet ? Moi, par exemple. Si je te demandais d’estimer ma valeur, que dirais-tu ?
– Eh bien, je dirais environ deux cents dinars.
L’empereur fut sidéré.
– Quoi ? ! Mais cette ceinture que je porte vaut deux cents dinars !
– Je sais, dit Nasreddin, j’ai tenu compte de la valeur de la ceinture
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John Adams , le deuxième président des Etats-Unis : " Il y a deux manières de conquérir et d'asservir une nation , l'une est par les armes , l'autre par la dette "
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Un job à la con est une forme d’emploi rémunéré qui est si totalement inutile, superflue ou néfaste que même le salarié ne parvient pas à justifier son existence, bien qu’il se sente obligé, pour honorer les termes de son contrat, de faire croire qu’il n’en est rien.
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Le secteur de la finance, paradigme de la création des jobs à la con :
Les postes de larbin apparaissent au sein d’une organisation parce que, pour les détenteurs du pouvoir, les subalternes sont des insignes de grandeur. L’embauche du porte-flingue répond à une dynamique de surenchère (si vos rivaux engagent les services d’un cabinet d’avocats prestigieux, vous devez faire de même). Le besoin de rafistoleurs se fait sentir parce qu’on trouve parfois plus compliqué de régler un problème que de gérer ses conséquences. Les cocheurs de case, dans les grosses structures, permettent la production d’une paperasse attestant que certaines mesures ont été prises, une certification souvent vue comme plus important que les mesures elles-mêmes. Quant aux postes de petits chefs, ils sont le corollaire de diverses formes d’autorité impersonnelle.
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Là où les relations de plaisanterie tendent à être mutuelles, à constituer un échange paritaire de mauvais traitements soulignant une égalité de statut, l’évitement est généralement hiérarchique. 
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