Eliette Abecassis

J'adore Eliette Abécassis pour tous ses écrits mais je l'attendais depuis longtemps pour un nouveau polar (j'avais adoré Quram) et je n'ai pas été déçue! Un livre dans la tradition du polar à la française, plein d'érudition, avec ce qu'il faut de suspens, de meurtres sanglants et de sentiments.
Un livre qui mérite une suite, je voudrais savoir ce que deviennent les protagonistes principaux!

Alors j'ai compris, à sa détermination calme, que Paul M était venu pour savoir si mon père -son père - les avait abandonnés, lui et sa mère. Mais surtout, il voulait savoir s'il l'avait aimé.

p 108
Une véritale création ne vient pas de soi : mais de savoir recevoir avec humilité ce qui advient.

p 107
Tracer un mot, n'est-ce pas parler ? C'est comme faire un trait d'union avec l'univers.

p 48
Immédiatement, je crois que j'avais su que je l'aimais, même si je l'avais enfoui au fond de moi durant de trop nombreuses années, au mileu de mille tourments.

C'était comme si le coeur, bien avant la raison, pressentait la vérité profonde des choses, oublliée et masquée par les préjugés de la vie.

p 31
Je revenais toujours vers ce désert de Judée, nanti d'un semblant de végétation, de quelques troupeaux et de dattes multicolores, comme un appel du large, comme un marin qui toujours retourne à la mer.

J'admirais cette grande plongée vers l'endroit le plus bas du monde, et la sensation que le temps s'arrête ou recule lorsque les oreilles se bouchent et la vue se brouille.

Poussière du désert : la seule qui enveloppe d'un chaud manteau les coeurs les plus froids.

Je lisais la plupart du temps. La lecture était mon refuge, mon château intérieur, mon rempart contre le monde. Les livres m'ont tout apporté: la passion, l'amitié, la fantaisie, l'aventure.
La joie de partager, le temps d'une journée, d'une semaine ou d'un mois, une destinée et la faire sienne.
A travers eux je me construisais un univers qui n'appartenait qu'à moi.

Ce n'est pas ça l'amour, vous savez, dis-je. On ne vous a pas donné une belle image de l'amour. L'amour, c'est dormir dans le même lit, c'est s'enlacer, se caresser, s'embrasser, c'est prendre soin l'un de l'autre, c'est penser à l'autre, à chaque moment de la journée, c'est être présent, dans les moments joyeux et dans les moments difficiles, c'est prendre plaisir à parler avec l'autre, l'écouter quand il parle, l'attendre quand il s'absente, c'est avoir du désir pour lui, c'est chercher le contact de son corps, c'est vouloir son bien, le respecter, le protéger, le chérir. L'amour c'est l'appeler au téléphone pour voir s'il va bien, s'il a besoin de quelque chose, c'est lui faire des cadeaux, c'est l'emmener en vacances, au restaurant, au cinéma, c'est partager chaque moment de la vie, c'est se réveiller le matin et s'émerveiller de voir l'autre. Et Papa et moi, on ne fait rien de tout ça. Au lieu de ça, on ne fait que se disputer.

Autrefois les gens mentaient, mais en faisant bien attention, ils ne laissaient pas de preuve. Aujourd'hui, les preuves sont partout : les ordinateurs, les téléphones portables, les agendas électroniques sont des mouchards quotidiens, des traceurs qui colportent toutes les données de nos vies. Auparavant, le mensonge maintenait l'équilibre des couples, préservait la vie des enfants et l'orgueil des femmes. Aujourd'hui il n'y a plus aucune place pour lui. Nous sommes dans l'époque de la traçabilité et du retour de l'écrit. Tout est gardé, consigné, documenté. On peut brûler les papiers, on peut perdre un ordinateur, mais on ne peut jamais effacer le virtuel. Le virtuel, c'est le réel. C'est donc une époque d'espionnage que la nôtre.

si la liberté d'une femme a un prix ..., ce n'est pas 5000 euros qui vont faire sauter une banque : si votre mari accepte de vous donner le guet contre cette somme, pourquoi pas

Il y a peu d 'occasions de prouver son amitié .Le divorce est de celles-ci .

On peut tout savoir d'un couple en regardant un relevé bancaire.

La haine dévoile ce que l'amour cache ,déshabille ce que l'amour couvre .

" Et pendant plusieurs années, elle s'est contemplée dans ce regard, car elle a besoin du regard de l'homme pour se sentir belle, aimée, pour exister. "

Que valaient les mots, si ce n'était pas de l'amour? L'amour sans la fidélité, quel espoir donne-t-il? Que se passait-il dans sa tête? A quoi pensait-il, que savait-il, que faisait-il? Quel coeur, quel corps, quelle âme? Fallait-il lui donner encore une chance? Quelle était ma part de responsabilité dans cette déchéance, qu'avais-je fait de mal, de faux, de médiocre, pourquoi et comment l'avais-je perdu? A quel moment, à quelle heure, à quelle seconde? Etais-je devenue trop mère, ou pas assez? N'étais-je plus drôle, plus folle, plus suffisamment exotique pour lui? Ma faute était-elle de l'avoir choisi ou de l'avoir perdu?
De toutes la chansons qui parlent d'amour, aucune ne pouvait répondre à mes questions. Pourquoi, alors que je le haïssais, le désirais-je encore? Pourquoi, alors que je contemplais avec horreur cette image de lui en train de me trahir, avais-je envie qu'il me prenne dans ses bras? Pourquoi, lorsqu'il disait qu'il m'aimait, étais-je prête à y croire quand bien même je n'y croyais plus? Pourquoi un jour l'amour avait-il choisi de déserter nos deux coeurs? Pourquoi étais-je incapable de le jeter dehors, cependant que mon plus cher désir était de ne plus le revoir? Pourquoi un jour avais-je été amoureuse de lui, m'étais-je mariée avec lui, avais-je eu deux enfants avec lui? (...) Comment avais-je pu m'aimer si peu? Comment avais-je pu l'aimer? Et comment ne plus l'aimer?

Il ne me regardait plus, il ne me posait plus de questions, ne m'aimait plus. Le plus terrible, dans la fin de l'amour, ce n'est pas cesser d'aimer, c'est de ne plus être désirée. Et, même quand on n'aime plus, la blessure narcissique reste ouverte, telle une plaie béante.

Tordu, tout ici était tordu. Moi aussi, je l'étais. Tordue par la souffrance, la tristesse et le regret, à tenter de comprendre pourquoi et comment j'étais devenue une femme trompée. Je me mis à tourner dans mon appartement biscornu, théâtre de l'effondrement de ma vie. (...)
C'est ainsi : il y a des moments dans la vie où tout bascule. En l'espace de cinq minutes, j'avais changé d'atmosphère, d'époque, de caractère. On m'avait jeté une grand bassine d'eau glacée pour me réveiller d'un long sommeil.

Comment était-ce possible? Je n'y croyais pas. J'attrapai une bouteille de whisky à moitié vide et en avalai une grande rasade. A ce moment même, il avait tout désacralisé. Il avait trahi nos serments, écrasé mon coeur : il n'avait pas seulement déserté ma couche, ma compagnie et celle de nos enfants, il avait foulé aux pieds ce que nous avions de plus précieux.
Dix ans de vie commune. Deux enfants. L'érosion du temps, l'ennui et la rancoeur avaient-ils remplacé la béatitude des premières amours? Ce n'était pas un simple désamour, lorsque la relation s'effiloche et se dissout dans l'ennui, c'était un ravage de nos vies construites ensemble, entremêlées par les enfants que nous avions faits.
Il était marié, mais que lui importait? Sans se remettre en cause, il avançait dans le secret de son coeur serein, impénétrable, dégagé de tout remord. Parfois la haine l'envahissait, il se disait alors qu'il se vengeait. Avait-il simplement envie de se rassurer sur lui-même, sur sa virilité, sa capacité à séduire, largement entamée par ces années de mariage et de paternité, où il ne se reconnaissait plus dans mon regard, ni dans celui qu'il portait sur lui-même?

Il n'y a pas beaucoup d'occasions dans la vie où on peut prouver qu'on est là pour ceux qu'on aime. C'est la seule chose qu'apportent les moments de détresse. De savoir qu'on peut compter sur ses proches.

Le temps est un meurtrier qui efface les traces sur les lieux d'un crime parfait. Il ne se fait jamais prendre, même si tout l'accuse.