AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de François Jullien (142)


Comme ne cessent de le répéter les Chinois, si "tout le monde est à même de distinguer les différentes saveurs", l'insipidité du "centre" (ou du "Tao") est "ce qu'il y a de plus difficile à apprécier". Mais elle s'apprécie sans fin.

(p.18)
Commenter  J’apprécie          370
Il convient donc de se former à cet art de la lecture, celui de laisser INFUSER le sens : loin du pointage impérieux du discours (démonstratif) et de tous ses marquages insistants laisser dissoudre librement en soi tout le sens possible, se prêter à ses sollicitations secrètes et s'engager ainsi dans un itinéraire qui se renouvelle toujours, à l'infini.

(p.27)
Commenter  J’apprécie          340
La fadeur est CONCRÈTE - même si elle est discrète.

(p.27)
Commenter  J’apprécie          310
La fadeur des choses appelle au détachement intérieur. Mais elle est aussi une vertu, notamment dans notre rapport à autrui, parce qu'elle est gage d'authenticité ; elle doit être aussi à la base de notre personnalité puisque, seule, elle permet de posséder également toutes les aptitudes et de faire preuve, en chaque occasion, de la faculté requise.

(p.19)
Commenter  J’apprécie          290
[les arts chinois] peuvent rendre plus SENSIBLE cette insipidité fondamentale – ils ont donc mission de la révéler : à travers le son, le poème, la peinture, la fadeur devient expérience.

(p.21)
Commenter  J’apprécie          260
[...] la fadeur est au départ de tous les possibles et les fait communiquer.

(p.17)
Commenter  J’apprécie          250
François Jullien
La philosophie repose sur ce geste de refus, qui permet d'avancer dans la pensée, de la renouveler.
Commenter  J’apprécie          210
"Paysage", à vrai dire, est un terme bien venu en français. Mieux encore peut être que dans d'autres langues européennes à composition similaire, mais où la liaison phonétique est plus rude, le glissement à l'intérieur du mot moins aisé : "paysage" se glisse à l'aise hors de "pays", et s'épanouit à partir de lui, comme de son corps informe de larve la chrysalide évadée. "Pays" - "paysage". (p. 137)

Chapitre VI - Mise en tension
Commenter  J’apprécie          171
     
Ils se sont croisés, et même cela toute leur vie, mais ils ne se sont jamais abordés. Comme on aborde, sur la mer, un autre navire, venant d’ailleurs, ou comme on aborde un matin dans une île ; ou comme on aborde au port, un rivage. Avec ce que cet abord suppose toujours d’inattendu : on « aborde », définit le dictionnaire, « un lieu inconnu ou qui présente des difficultés » – n’effaçons pas plus ce péril vis-à-vis des êtres que vis-à-vis des choses. Pour aborder, on vient de plus loin, on émerge de son étrangeté et l’on s’enfonce dans celle de l’autre.

     
On peut répondre, ou non, à l’appel de l’intime. S’il n’y a pas faute (et « mal », par conséquent) à ne pas exploiter cette ressource de l’intime, il n’en n’est pas moins vrai que ceux qui n’ont pas su développer d’intime ont raté quelque chose ou plutôt l’essentiel. Peut-être ont-ils tout raté : ils sont passés à côté. Or le mal, disait déjà Plotin, n’étant pas quelque chose d’effectivement voulu, délibérément intentionnel, est toujours un « raté ».
On répondra néanmoins que l’intime ne peut être une catégorie morale puisqu’il est lié à la rencontre adventice, donc à l’aléatoire, donc à la chance. Mais, là encore, jusqu’à quel point est-ce vrai ? Il est certains que j’aurais pu ne pas la croiser de ma vie. Mais, en même temps, ce n’est pas la croiser qui fait la rencontre et creuse de l’intime entre nous. Et même ce n’est pas tant l’un ou l’autre de nous qui compte, en tant que tel et tel qu’il est, avec ses qualités qu’on dénombre et plus ou moins fantasmées, c’est ce que nous sommes conduits à faire en commun pour engager et « entretenir » cet intime. La question est donc, en fait : jusqu’où risquons-nous – misons-nous – l’un et l’autre (version désormais strictement humaine du fameux pari) pour sortir de notre isolement-côtoiement (le parallélisme des solitudes) et basculer « d’un même côté » face à « l’autrui du monde » ? Comptent moins la vertu ou les dons de l’un ou de l’autre que le point – le stade – où chacun, dans sa vie, est arrivé et est prêt à oser. Car c’est toujours vis-à-vis d’un « premier venu », qu’on le veuille ou non, comme le disait déjà Rousseau de ses parents, qu’on s’ouvre à l’intimité.
De là, la question devient plus radicale encore : serait-ce donc envers n'importe qui que je peux engager cet intime? Peut-être...
Peut-être tant l’intime est différent de l’amour, n’est pas question de préférence et de séduction, n’a pas en vue notre propre satisfaction, mais est plutôt la décision progressivement mûrie de s’enfoncer ensemble dans ce fond sans fond d’un dedans partagé.
     
La question encore se retourne. Dite à l’envers (et devenant brutale) : est-on donc coupable de sa solitude ? Car l’alternative est simple : on est intime ou on est seul (seul y compris dans son « amour »). Car, si l’on dit que la solitude est une malchance, qu’on n’a pas « rencontré », ou bien qu’on n’avait pas les « qualités qu’il faut », il est facile alors de rétorquer que tout le monde, dans sa vie, a croisé quelqu’un qu’il suffisait d’aborder. On est responsable de sa solitude du fait de ne pas avoir su pousser la porte de l’Autre, s’adresser et accéder à lui, lui parler comme à un « Toi » – on est resté en deçà, on a respecté la frontière, on a craint de s’exposer ou, aussi bien, d’agresser.

De quelque nature qu’elle soit, une séparation ne détruit pas l’intime. Car l’intime n’est pas de contact (coudoiement), mais d’intériorité, ou plutôt d’un « plus intérieur que l’intérieur ». C’est pourquoi il n’exige pas la présence, peut se développer dans l’absence. Dans l’absence on peut rester « auprès ».
     
     
pp. 115-117
Commenter  J’apprécie          150
les anciennes stratégies sont désormais désuètes, car le terrorisme, la violence ne sont pas interprétables seulement en termes moraux.
Commenter  J’apprécie          152
Que le problème posé par la vie, et sa douleur, n'est pas tant que le bonheur soit "inatteignable", ( nous placerions la barre trop haut) mais qu'il soit insupportable: non pas que le bonheur soit impossible, mais qu'il soit ennuyeux.
Commenter  J’apprécie          130
Car qu'on se souvienne que la peinture de paysage apparaît, en Europe, en lisière de la peinture officielle, de commande et de commerce, et comme en aparté : dans les planches des Herbiers, dans l'illustration soucieuse d'environnement réaliste des Traités d'hygiène et de pharmacopée ou bien encore dans le décor saisonnier, enluminé des Riches Heures ; puis, plus ouvertement, dans la "fenêtre" percée dans le fond du tableau et laissant apparaître, dans son encadrement, des rivières qui sinuent et des monts bleuâtres - on mesure alors ce qu'il a fallu de patience, ou mieux de persévérance, de la part du peintre européen, pour accéder au paysage. (p. 66)

Chapitre III - D'un paysage à vivre
Commenter  J’apprécie          120
S’il peut y avoir une identité singulière du sujet — en tout cas se constitue-t-il par identification — il ne peut y avoir d’identité culturelle, c’est-à-dire qui soit à la fois objective et collective. Le propre d’une culture n’est-il pas de muter ? Sinon, c’est une culture morte. De plus, un tel classement des cultures selon des traits qui seraient spécifiques (à la Huntington) est stérile, car le plus intéressant, c’est-à-dire le plus significatif d’une culture échappe à ces rangements identitaires qui tournent si vite au cliché.
Commenter  J’apprécie          120
Notre époque est celle de la standardisation des cultures, du "zapping" entre civilisations et des "digests". Or le sens se perd dès que cesse d'être patiemment pris en compte son cheminement historique et singulier.
Commenter  J’apprécie          110
Tout change quand on regarde à deux un paysage, ce n'est pas tant qu'on se parle, qu'on commente, mais nous ouvrons à deux un paysage contemplatif, le paysage s'instaure en tiers avec nous.
Commenter  J’apprécie          110
Un événement, en effet, n’est pas n’importe quel instant, mais fait saillie et se détache par rapport à ce renouvellement continu d’où naît la durée. En lui attribuant un être propre, non seulement isolable mais autoconsistant (”c’est un événement!…), c’est-à-dire en lui reconnaissant la capacité de “se” produire, comme s’il détenait en lui une initiative ou du moins sa propre individualité, on lui fait introduire une faille dans la continuité du changement ; ainsi que refouler dans l’ombre, devenant secondaires ou dépendants, tous les moments adjacents. Non seulement il est exceptionnel, mais il suscite aussi, dans son irruption, un bouleversement reconfigurant par son incidence tous les possibles investis. Qu’on le dise “survenir” sous-entend toujours quelque part une effraction qui le fait déborder – excéder – le moment présent : “Il semble, écrit Proust dans La prisonnière, que tous les événements soient plus vastes que le moment où ils ont lieu et ne peuvent y tenir tout entiers.” C’est pourquoi, aussi attendu ou justifié après coup que soit l’événement, aussi explicable qu’il devienne par son contexte, l’événement contient un inassimilable, ou fait signe vers un dehors, qui transcendent toute explication simplement causale et appellent le secours d’une interprétation : tant demeurerait encore fascinante en lui l’énigme de son origine. Son apparition est à “déchiffrer”, aiment à dire les phénoménologues ne renonçant jamais complètement au langage de l’épiphanie.

Or j’en viens à douter : un tel événement existe-t-il effectivement, c’est-à-dire autrement que sur le mode d’une représentation fictive et mythologique ? Ou ne serait-il pas que l’affleurement visible, tel un trait d’écume, de transformations demeurant invisibles comme le mouvement enfoui, de fond, d’une lame d’eau ? Il est vrai que c’est de l’événement dont on parle, et même on ne parle que de lui ; ou, dit à l’envers et valant déjà définition : dès qu’on en parle, cela “fait événement”. Mais, s’il
Commenter  J’apprécie          110
François Jullien
Une culture qui ne change plus est morte.
Commenter  J’apprécie          100
Le sage sait prêter l'oreille au silence et c'est à ce stade qu'il perçoit l'harmonie.
Commenter  J’apprécie          80
Or une présence qui n'apparait plus, ni non plus n'est cachée (à chercher), est une présence qui se défait.
Commenter  J’apprécie          70
D’où vient que ce qui se produit inlassablement sous nos yeux, et qui est le plus effectif, est patent, certes, mais ne se voit pas ?
Commenter  J’apprécie          70



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de François Jullien (397)Voir plus

Quiz Voir plus

Un pays, un animal

Dans quel pays Barbara rêvait-elle quand elle a soudain vu surgir un aigle noir ? (PS : ce n'est pas dans la chanson, on demande le pays à l'emblème de l'aigle noir)

Allemagne
Suisse
Italie

10 questions
655 lecteurs ont répondu
Thèmes : animal totem , animaux exotiques , animaux sauvages , pays étrangers , pays , symboles , animaux , géographieCréer un quiz sur cet auteur

{* *} .._..