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Critiques de Georges Minois (55)
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Abélard, Héloïse et Bernard

La société médiévale du XIIe siècle est secouée de remous et de violence. Là comme ailleurs, les sentiments s’expriment avec force. L’histoire vraie d’Héloïse et Abélard sous le règne du roi Louis VI se résume à celle d’une passion charnelle qui se transforme en un lien indéfectible empreint de spiritualité, malgré les épreuves traversées. Héloïse, née en 1100, est élevée et instruite à l’abbaye d’Argenteuil, monastère réservé aux femmes, puis à la cathédrale Notre Dame de Paris où son oncle est chanoine. Jeune nonne pertinente, sa vivacité d’esprit et sa beauté sont troublées par la présence d’un nouveau professeur, Pierre Abélard, philosophe, intellectuel surdoué, dialecticien et, de surcroît, séduisant. Admiré par tous, ce dernier entreprend de rationaliser la foi et d’en dissiper les mystères par la dialectique. Son objectif part de l’idée qu’il importe de comprendre pour mieux croire. De son côté, le futur saint Bernard, pratique un ascétisme rigide, hostile à la libre interprétation, et encourage chacun à la rigueur et à la probité. Son autorité morale pèse sur certains dévots. Lorsque la liaison d’Héloïse et Abélard éclate au grand jour, le scandale est énorme. Le maître et l’élève s’aiment envers et contre tous. La passion les consume. Afin de punir le fautif, des sbires sont chargés de l’émasculer. Tous deux finissent respectivement dans un couvent, séparés l’un de l’autre, mais continuent de s’écrire. Cette passion n’a évidemment pas d’âge et, un peu comme le récit de « Roméo et Juliette », est devenue universelle. Dans leur tragédie, les deux amants puisent la source intarissable de leur relation bien au-delà du charnel. Georges Minois restitue ici la puissance dramatique de cette passion et insiste sur le poids des dogmes, de l’obscurantisme et l’ombre inquiétante qui planait sur la société, visant à étouffer toute velléité d’indépendance intellectuelle au profit d’une religion intangible et scellée par le clergé dans un socle d’acier. Autant que sexuelle, la relation d’Héloïse et Abélard se voulait chargée de réflexion et de philosophie, appelée à atteindre une apogée pour le bonheur de chacun des deux partenaires. Raison et religion peuvent-elles faire bon ménage ?
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Abélard, Héloïse et Bernard

Georges Minois a publié de nombreux ouvrages chez Perrin, dont les biographies de Charlemagneet de Charles le Téméraire, ainsi que La Guerre de Cent anset une magistrale Histoire du Moyen Âge, chef-d’œuvre de synthèse, de rigueur et de précision. Avec son dernier livre, le médiéviste revient sur les destins croisés de trois personnages illustres - Abélard, Héloïse, Bernard - qui expriment les conflits socioculturels agitant les bases de la civilisation médiévale au XIIèmesiècle.



L’auteur définit le cadre de son étude. Il s’agit « d’un drame au demeurant fort banal : un brillant professeur séduit une étudiante et la met enceinte, puis se fait castrer à l’initiative de l’oncle de la jeune fille, qui veut venger l’honneur familial. Les deux amants entrent au couvent, Héloïse devenant une abbesse modèle, et Abélard composant des traités que Bernard fait juger hérétiques par le Concile de Sens en 1140. Abélard meurt en 1142, Bernard en 1153, Héloïse en 1164 ».



Minois estime que tout cela n’a « rien d’extraordinaire ». Pourtant, il écrit : « Certes, une liaison amoureuse entre un professeur et une élève était un fait plus rare au Moyen Âge qu’aujourd’hui, car les filles étaient normalement éduquées au couvent, et uniquement dans les milieux aristocratiques. » Mais alors, questionne-t-il, « pourquoi ce fait divers a-t-il acquis une célébrité telle que les deux protagonistes sont devenus, à l’instar de Tristan et Yseut ou de Roméo et Juliette, un couple emblématique dans l’histoire littéraire et amoureuse ? » La réponse se montre extrêmement convaincante : « C’est que poètes et romanciers s’en sont emparés et, à force de l’embellir, de l’amplifier, de le modifier, en ont fait un mythe dans lequel le rôle de Bernard a été éclipsé. »



Cependant, Minois s’empresse de constater que « le résultat est catastrophique pour la vérité historique : la fiction et la réalité se mélangent au point de devenir inséparables ». Il précise même l’idée suivante : « le fait n’est pas rare, poètes et romanciers sont une véritable calamité quand ils se mêlent de jouer les historiens, utilisant leur talent littéraire en guise de critère d’authenticité : c’est beau, donc c’est vrai ! » L’auteur replace les protagonistes dans leur contexte et restitue avec une puissance dramatique les péripéties de ce trio devenu mythique. Minois écarte les hypothèses farfelues, les documents douteux, la rumeur et le roman, pour nous livrer un récit le plus précis possible d’un point de vue historique.



Rappelons les grandes lignes de notre sujet. Sous le règne du roi Louis VI, Pierre Abélard, issu de la noblesse, est un intellectuel à la mode et au caractère volontiers provocateur. Destiné au métier des armes, il décide d’enseigner la philosophie et la théologie à la cathédrale Notre-Dame de Paris. Cependant, son talent et ses prises de positions nouvelles en font une cible. Cela n’empêche pas le chanoine Fulbert de lui confier l'éducation de sa nièce, Héloïse, âgée de 17 ans, alors qu’Abélard en a déjà 36. En réalité, il se trouve également honoré qu’une personnalité de premier plan s’occupe de sa nièce pour lui administrer des leçons au sein de sa demeure. Il regrettera très vite son choix…



Effectivement, Abélard tombe rapidement sous le charme de sa nouvelle élève instruite à l'abbaye d'Argenteuil, un établissement réservé aux femmes. Héloïse et Abélard vivent alors une passion charnelle à l'opposé de l'éducation qu'ils ont reçue et de leur état. Au cours de leurs jeux érotiques, Abélard peut se montrer quelque peu violent, aussi bien par les mots que par les gestes. Les lettres échangées témoignent de cette relation si particulière à laquelle s’adonnent les deux amants.



Héloïse en vient à porter la vie, et les deux amants se réfugient en Bretagne, au Pallet, où naît leur fils Astrolabe. Le choix de ce prénom relève de la provocation dans cette chrétienté médiévale. Nous sommes loin du calendrier des saints. Les deux parents ne peuvent l’ignorer. Comme chacun sait, l’astrolabe est un instrument astronomique d'observation et de calcul analogique. Concrètement, l’oncle Fulbert furieux de la trahison d’Abélard décide de se venger. Il envoie des hommes de main punir Abélard par là où il a péché. Résultat : celui-ci est castré… Par la suite, Abélard, devenu moine et prieur, attire l’attention sur lui avec ses textes et commentaires religieux. Son travail intellectuel conduit Bernard à se pencher sur son cas.



Ce feuilleton romanesque, mélangeant amour et religion, sentiments et politique, a vraiment marqué les esprits, car plusieurs siècles après, Fréron (1718-1776) dit : « Jamais histoire amoureuse n’a tant fait de bruit que celle d’Abailard (sic) et d’Héloïse. Il n’y en a jamais eu non plus qui ait coûté tant de larmes aux cœurs sensibles et tant de vers aux poètes. » Néanmoins, cette chronique dépasse la classique et habituelle histoire romantique à laquelle nous sommes habitués. Elle ne peut pas non plus être réduite à une simple question d’honneur familial. Nous lisons avec intérêt : « Comme on le constate à travers toutes ces vicissitudes, l’histoire d’Abélard et Héloïse est beaucoup plus qu’une banale histoire d’amour et de castration. C’est un épisode emblématique de l’histoire socioculturelle du Moyen Âge, mais aussi, par les diverses interprétations qui ont été données par la suite, un révélateur de l’évolution intellectuelle de la civilisation occidentale. »



Ces trois individus incarnent assurément trois courants majeurs, à l’aube du XIIèmesiècle, qui s’affrontent au sein de l’élite médiévale : « Les exigences d’une pensée rationnelle, armée de la dialectique, qui cherche à percer les mystères de la foi ; les exigences de la sensualité, qui s’exprime par un érotisme libéré des conventions morales ; et les exigences de la foi traditionnelle, qui impose une vie exclusivement consacrée à la recherche du salut éternel. »



La correspondance entre les deux tourtereaux continue de faire couler beaucoup d’encre. Aujourd’hui encore, beaucoup l’étudient afin de déterminer si tout ou partie s’avère authentique. Minois se livre à une véritable enquête. Et le rendu est passionnant ! Il évoque également les joutes intellectuelles entre Abélard et les autres professeurs de son temps - notamment la fameuse querelle des universaux -, ainsi que l’opposition entre Abélard et Bernard. Bernard, ce moine et futur saint, est considéré comme l’autorité morale et doctrinale de son temps. Il défend une foi rigoureuse, fondée sur l’Ecriture. Lui et Abélard ne peuvent raisonnablement s’entendre, comme l’expose avec talent Minois. L’un est novateur, l’autre défend une orthodoxie stricte.



Pour résumer, nous nous retrouvons face à trois impératifs qui s’attaquent, se concurrencent et se jalousent : raison, passion, religion. Ils sont incarnés par le professeur Abélard, sa femme Héloïse, et le moine Bernard. De ce fait, Minois décrit très bien cette époque en pleine effervescence intellectuelle. Son travail net et précis, aux explications et aux analyses subtiles, nous permet de comprendre les véritables enjeux de ce « drame fort banal ». L’auteur nous offre une véritable plongée dans le monde médiéval, et dépeint avec brio les rapports de force entre les différentes communautés intellectuelles et sociales, dans les jeunes années de la France Capétienne…



Franck ABED
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Anne de Bretagne

Georges Minois nous remet dans le droit chemin en ce qui concerne Anne de B. Non, ce n'est pas à elle qu'on doit la gratuité des autoroutes bretonnes. Non, la légende de la bonne duchesse n'est pas étayée. Non, elle n'a pas passé sa vie à tenter de sauver les bretons du joug français.

Anne a tenté de sauver ses propres intérêts et ceux de ses enfants survivants avec des principes mediévaux un peu hasbeen à la fin du xveme. Une femme trop autoritaire, trop pieuse, morte trop jeune.

Cela ne doit pas l'empêcher d'être l'idole des bretons.

Gloire à notre bonne duchesse.
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Blanche de Castille

De Blanche de Castille, je n'avais qu'une connaissance très vague comme ces noms célèbres de l'histoire derrière lesquels se cache en fait un grand vide.

L'ouvrage de Georges Minois m'a donc permis de combler ce vide, autant que possible, car l'une des révélations de ce livre, c'est que les archives concernant Blanche sont très inexistantes pour tout une part de sa vie.

En tant que femme, elle n'intéresse pas les chroniqueurs, ou si peu, avant de jouer un rôle important dans les affaires de l'État.

Je retiens entre autres, deux éléments importants de l'enquête menée par l'historien. D'abord la véritable coroyauté exercée par Blanche et son fils Louis IX jusqu'à la mort de Blanche, fait unique dans l'histoire. Après la régence, Blanche reste aux affaires, joue un rôle capital, au point que c'est à elle parfois que le pape s'adresse plutôt qu'au roi.

Et ensuite la personnalité du futur saint Louis, trouble et illuminée, au point d'abandonner la France six années durant pour mener une croisade catastrophique.

Ce qu'il y a de terrible, c'est aussi la façon dont les chroniqueurs de l'époque évoquent la force de caractère et les qualités politiques de Blanche : elle est femme, cerres mais dotée des qualités d'un homme !!

Un livre passionnant.
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Blanche de Castille

Une belle biographie qui se lit très agréablement et qui nous plonge au cœur du XIème siècle. Reine mal connue, Blanche de Castille est une sacrée personnalité qui s'est révélée au pouvoir en tant que régente puis mère de Saint Louis un peu étouffante parfois. Un livre qui m'a appris beaucoup de choses sur cette femme et son contexte de vie, une belle découverte que je vous recommande
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Blanche de Castille

Georges Minois a publié de nombreux ouvrages réputés chez Perrin, notamment Charlemagne, Philippe le Bel et une Histoire du Moyen Age. Son dernier livre revient sur Blanche de Castille. Cette dernière est la mère de Saint Louis. Voici l’image très réductrice que la mémoire collective retient de cette illustre reine du XIIIème siècle. Or, Blanche de Castille eut un destin d’exception. Elle fut, à l’instar de sa grand-mère Aliénor d’Aquitaine, une femme de pouvoir.



Qui fut réellement Blanche ? L’épitaphe qui se trouve sur ton tombeau, érigé en 1252 quelques jours après sa mort en l’abbaye de Maubuisson, nous présente une réponse éclairante : « cette Blanche, que la nation française pleure, est sortie de toi, ô Castille, comme une étoile radieuse au firmament. Elle eut pour père le roi Alphonse, pour époux le roi Louis. Devenue veuve de lui, elle gouverna comme régente, afin que la nation pût jouir de la tranquillité. Pendant le voyage d’outre-mer de son fils, elle gouverna comme auparavant. Enfin, celle sous le gouvernement de qui la nation française acquit tant de puissance, se consacra à Jésus-Christ dans son monastère. Si grande auparavant, elle gît aujourd’hui ici sous l’habit d’une pauvre religieuse ». Comme l’écrit si bien l’auteur : « tout est dit ou presque ».



Cependant, nous ne pouvons nous contenter de cette élogieuse mais juste présentation, car il manque quand même des repères chronologiques. Il est donc utile d’en donner quelques uns : « née en 1188, fille du roi Alphonse VIII de Castille et d’Aliénor d’Angleterre, mariée à douze ans au prince capétien Louis VIII, elle fait son éducation politique à la cour de son redoutable beau-père, Philippe Auguste. Reine en 1223, mère de douze enfants, veuve à trente-huit ans, elle devient régente du royaume au nom de son jeune fils, Louis IX ». Toute sa vie n’y est pas résumée, pourtant cette courte notice biographique nous montre déjà l’ampleur de son histoire.



Une fois veuve, les barons - comprendre les grands du royaume - n’entendent pas être gouvernés, ou plus exactement « mal gouvernés » selon leurs propos, par une reine, de surcroît étrangère. Effectivement, comme le rappellent et le montrent Hervé Martin dans les Mentalités médiévales et Jean Dulumeau dans ses différentes études, « une partie de la littérature théologique médiévale est remplie d’affirmations misogynes ». Citons un propos parmi d’autres pour montrer les idées de certains à l’endroit de la gente féminine, sans laquelle les hommes ne sont rien : « la femme est un mâle déficient conjuguant l’imbécilité physique et la débilité mentale ». On pourrait presque croire, qu’il s’agit du Code Civil…



Cependant « l’Espagnole » comme la désignent alors ses adversaires politiques « fait preuve de qualités politiques inattendues, subtil mélange d’autorité et de souplesse qui lui valent l’admiration des chroniqueurs ». Les barons finissent par se soumettre à leur légitime reine. Belle et intelligente, elle n’entend pour rien au monde amoindrir l’autorité royale dont elle est pourvue par la volonté de Dieu.



Femme de savoir, de lettres, elle sait s’entourer d’artistes comme son père le faisait en Castille. Par ailleurs, Alphonse VIII fonde la première université espagnole, le studium generale de Palencia et l'ordre d'Alcántara. Blanche est catholique pratiquante. Ses dévotions et ses croyances sont sincères. Sa garde rapprochée est constituée d’ecclésiastiques qu’elle n’hésite pas à solliciter pour différentes affaires liées à la couronne ou pour des questions plus personnelles voire familiales. Comme l’énonce clairement Minois, Blanche est « l’éducatrice puis l’inspiratrice de la politique de Saint Louis, qui lui confie la couronne pendant la septième croisade, elle conserve une place particulière jusqu’à sa mort en 1252, avant de compter parmi les plus illustres femmes de pouvoir du roman national ».



Selon les chroniqueurs de l'époque, Blanche accomplit ses fonctions avec une fermeté admirable, supportant toutes les injures, les calomnies, les attaques inouïes contre sa vie privée et sa conduite des affaires du royaume. Célèbre autant par sa beauté que par sa sagesse, certains racontent qu'elle inspire une vive passion à Thibaut de Champagne, à tel point qu’il la chante dans ses vers et la soutient dans sa politique. D’aucuns n’hésiteront pas à les imaginer en amants et à propager des calomnies, au mépris de la réalité historique. Effectivement, Blanche avait en horreur le péché, notamment le péché mortel, et son fils saura se souvenir des enseignements maternels quand il deviendra roi. Le catholicisme de Blanche ne peut être considéré comme de la bigoterie. Elle relaie l'œuvre réformatrice de Bernard de Clairvaux et fonde les abbayes de Royaumont (1228), de Maubuisson (1236) et du Lys (1244).



Minois réussit merveilleusement bien à nous présenter une biographie de très grande qualité. Pendant longtemps, aux yeux des historiens, et nous le regrettons comme l’auteur, Blanche « reste dans l’ombre de son père, de son époux, de son fils, elle est le fantôme à propos duquel on ne peut que faire des conjectures ». C’est dommageable pour la recherche historique mais « la biographie d’une reine se réduit bien souvent à l’histoire du règne du roi son mari ». Blanche est fille de roi, femme de roi, mère de roi, grand-mère de roi, mais elle fut régente du royaume, puis reine-mère. Son action politique se montre réellement décisive. Minois insiste sur cet aspect, alors que beaucoup ne retiennent que son action « d’éducatrice du héros ». De plus, « Blanche de Castille est la première reine de France dont on a conservé les comptes de sa maison », pièces utiles pour analyser et comprendre réellement sa vie. L’auteur explique à ce sujet que « les dépenses mêmes les plus banales peuvent donner de précieuses indications sur les occupations, les intérêts, les déplacements, les fréquentations de la reine, à condition de les interpréter avec prudence et discernement », ce qu’il accomplit sans aucun doute possible.



L’auteur étudie avec brio Blanche de Castille pour elle-même et « non plus comme simple faire-valoir de son fils ». Il faut savoir que la Castillane, devenue pleinement française, « a été un personnage important de l’histoire de France, assurant la continuité du pouvoir royal à travers trois règnes au profit desquels elle a trop longtemps été laissée dans l’ombre ». Minois poursuit : « il est temps de la mettre en lumière, non plus comme fille, belle-fille, épouse et mère de rois, mais comme une reine dotée d’une volonté propre et d’une individualité attachante ». A nos yeux les objectifs sont atteints.



Nous avons pris un réel plaisir à lire cette biographie qui rend hommage à une femme extraordinaire dont les mérites et les talents devraient inspirer la classe politique…







Franck ABED
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Bossuet

L'historien et le polémiste. Le prédicateur contre les casuites: il rédige des instructions à l'adresse des protestants nouvellement convertis, et des sermons sans fin, malgré son caractère rigoureux, la remarquable unité de son oeuvre, Jacques Bénigne Bossuet avait la certitude de posséder la vérité et de la faire triompher. À l'intérieur du catholicisme il s'est montré méfiant à l'égard des critiques bibliques. Il admet que Dieu laisse les événements se combiner selon les lois de l'économie et de la psychologie humaine, déterminant les grands changements arrivés dans les Empires, et son discours sur l'Histoire universelle délibérément orientée, a été critiquée par Montesquieu et Voltaire, lui reprochant ses lacunes historiques... Enfin, il porte une condamnation impitoyable et sans nuances sur le théâtre et les comédiens.

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Bossuet

Jacques-Bénigne Bossuet (1627-1704), a incarné mieux que personne l'esprit du Grand Siècle, avec son éclat, sa vigueur et sa part d'ombre. Ce roturier, fils de magistrat bourguignon, a fréquenté tous les grands personnages de son temps. Il a sermonné Louis XIV, éduqué le Dauphin, confessé toute l'aristocratie, été l'oracle de l'Eglise de France et porté l'art oratoire à son incandescence. Acteur essentiel et témoin clairvoyant d'un siècle dont il a su voir la grandeur et les misères, il nous parle aussi bien des courants spirituels que des maîtresses royales, du pouvoir politique que de la direction de conscience. Partisan, contre les protestants, de la persuasion plutôt que de la persécution, même s'il s'enchante de la révocation de l'Edit de Nantes, il se montre impitoyable contre les concurrents directs comme Fénelon et le quiétisme de Mme Guyon. Evêque exemplaire, l'"Aigle de Meaux" cache derrière une façade autoritaire des interrogations sur les rapports entre foi et raison. Très discret sur lui-même, il fut un profond connaisseur de l'âme humaine. Personnalité éminente, représentative et complexe, prodigieux communicateur et prélat infatigable, Bossuet fut à la mesure de son époque, c'est-à-dire immense.
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Charlemagne

Une nouvelle biographie sur Charlemagne pourrait-on dire ! Et ce ne serait pas faux du tout. Des "Charlemagne", on en a tout un chariot, mais force est de constater qu'aucun n'est très récent désormais. George Minois a donc le mérite de remettre au goût du jour le thème de l'empereur carolingien en synthétisant les dernières recherches à son sujet. Rien d'énorme ou de novateur donc ici, c'est finalement le fait qu'elle soit récente qui fait de cette biographie un livre potentiellement à lire, mais au moins le genre de la biographie historique, après avoir failli disparaître dans les années cinquante et soixante, vit encore... Un bien, un mal ?
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Charlemagne

Remarquable livre d'histoire qui fait le point sur les dernières recherches et découvertes relatives à cette époque très lointaine.

Ce n'est pas un roman, c'est ardu, mais adieu les icônes véhiculées par l'Histoire ... je mets un grand H parce que de tous temps des rois ou plus tard des hommes politiques se sont appropriés une certaine image d’Épinal ... et comme beaucoup de nos concitoyens j'avais une mauvaise idée de qui était de grand homme, son oeuvre, sa vie, ses guerres, sa politique.

Très intéressant ... mais long à lire !
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Charles le Téméraire

Georges Minois n'est pas assez connu du grand public amateur d'Histoire selon moi. Un Jean-Christian Petitfils l'est beaucoup plus pour les XVIIe et XVIIIe siècle, alors qu'il a sans doute moins de talent et surtout de rigueur scientifique.



Minois est principalement un auteur de biographies (Charlemagne, Philippe le Bel, Charles VII, ou plus récemment Richard Coeur de Lion et Blanche de Castille), mais aussi d'essais (sur la censure ou encore l'athéisme) et de réels ouvrages d'histoire (sur la Guerre de Cent Ans ou l'Histoire du Moyen-Âge, par exemple). En 2014, il a publié un ouvrage sur la bataille de Poitiers (1356), défaite française.



Sa biographie du Téméraire est bien écrite, même si ce n'est pas forcément grand public. Les citations d'auteurs sont dans le style du temps, c'est-à-dire un français difficile à lire. Je trouve cela plaisant, à titre personnel, parce que cela replace le personnage dans son contexte. Toutefois, cela casse le rythme de la lecture et oblige parfois à remettre en français plus moderne. Du coup, le lecteur que je suis a eu tendance à sauter les citations (nombreuses, longues et pas toujours utiles au propos).



Mais la période est passionnante et, malgré tout, peu connue. Bien sûr les figure sde Charles VII ou Louis XI, les rois de France contemporains, ne sont pas des inconnus. J'ai toujours été intrigué par la figure de Louis XI et j'ai pu ici découvrir ses rapports ambigües avec Charles le Téméraire. Le duc de Bourgogne dirige un territoire morcelé, qui s'étend de la frontière Suisse actuelle à l'Alsace, et rejoint la mer du Nord. J'ai eu l'occasion de visiter l'une des villes principales des ducs, celle de Bruges.



Charles le Téméraire hérite des relations de son père avec Charles VII. Elles sont complaisantes et diplomatiques. Charles VII préfère céder du terrain à Philippe le Bon pour pouvoir finir de battre les Anglais et mettre un terme à la guerre qui ravage le royaume depuis des décennies. Le Dauphin Louis, dans son conflit avec son royal père, se réfugia en Bourgogne et entretint de bonnes relations avec Philippe le Bon (jusqu'à sa mort en 1467).



Par la suite, Louis XI tente de racheter les villes nordistes cédées par Charles VII à la Bourgogne. Il n'aura de cesse de jouer un double jeu avec Charles le Téméraire (qui ne fut pas dupe, ce qui entraîna la guerre entre les deux). L'intérêt du règne du Téméraire c'est son côté européen. Car le duc, pour contrebalancer le pouvoir de Louis XI, a cherché à s'allier avec le roi Edouard IV d'Angleterre, mais aussi l'empereur Frédéric III.



Alors, si sur le fond, c'est du Georges Minois : rigueur, érudition, bonne synthèse des connaissances récentes, etc., ça reste laborieux sur la forme. Bref, une petite déception, alors que j'ai beaucoup des biographies de Minois.
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Charles le Téméraire

est une figure incontournable du Moyen Age finissant. Il est presque une légende. C'est à ce personnage hors du commun que G.Minois, qui avait déjà écrit une biographie de Philippe Le Bel et Charles VII, consacre un ouvrage important.

Charles est né en Bourgogne en 1433. Son père Philippe Le Bon est une forte personnalité. «  Il est libéral, généreux, courtois et de bonne compagnie. ». Il aime le faste dans ses demeures et ses vêtements. Il aime les femmes et a de nombreux bâtards. Il dépense en grand seigneur sans compter. Il fonde la Toison d'or, un ordre de chevalerie dans lequel tous les membres sont égaux et peuvent se critiquer les uns les autres dans le but de s'améliorer. Charles est fasciné par son père mais aussi il le déteste. Jamais il ne le quittera ou le trahira. Sa mère Isabelle du Portugal joue un grand rôle politique. Son époux lui confie des négociations diplomatiques. Elle est très proche de son fils, cas exceptionnel au Moyen Age. Philippe Le Bon associe son fils pendant les dernières années de son

règne. Charles a de plus en plus de mal à contenir son impatience, à supporter l'influence des Croy sur son père et la relative soumission de celui ci au roi de France. Enfin, en 1467, à 37 ans, Charles devient duc de Bourgogne. Il est à la tête d'un immense état : la Bourgogne mais surtout les Flandres jusqu'aux Pays Bas, pièce maîtresse de ses territoires. Un territoire considérables, un territoire riche grâce à l'industrie textile des villes flamandes, un territoire que Charles parcourt sans cesse. Un territoire qu'il faut administrer et faire plier. Pendant toute la durée de son règne, Charles est en lutte avec les villes flamandes. Il ne comprend pas et déteste la bourgeoisie urbaine. Le siège de Liège est l'illustration de cette guerre terrible que se livre Charles et les Flandres. Autre affrontement : le roi de France Louis XI. Les deux hommes se connaissent bien. Le dauphin Louis s'est réfugié à la cour de Bourgogne. Deux personnalités opposées. «  L'invisible araigne« ne cesse de prendre Charles dans sa toile et de tisser des alliances pour piéger Le Téméraire. Face à ce redoutable adversaire, Charles s'efforce de s'assurer l'appui de l'Angleterre. Mais, ses plus dangereux ennemis se révèlent être les suisses. Ils ont ces armes redoutables : les piques ( les carrés de soldats constituent des hérissons ) et les hallebardes. Charles en fait l'amère expérience à Granson et à Morat.

Mais, le but et l'intérêt du livre n'est pas de raconter des batailles déjà bien connues. G.Minois traque la personnalité du Téméraire , essaie de comprendre cet homme si complexe, sinon étrange. Et en cela, il excelle. Il s'appuie sur le témoignages de ses contemporains tels Olivier De La Marche et Commynes. Charles, c'est d'abord un chevalier, d'une grande résistance physique, qui aime les campagnes militaires. C'est un prince flamboyant qui parle bien. Il aime se donner en spectacle dans des fêtes somptueuses et des tenues extravagantes. Il affectionne en particulier les chapeaux extraordinaires et de plus en plus ridicules. Il ne faut pas oublier que la cour de Bourgogne est la plus luxueuse de l'époque. Elle étale un luxe et une richesse qui contrastent avec les campagnes ravagées par les guerres. Charles aime la musique. Mais, il est peu sensible à la peinture, cette peinture flamande qui avec Van Den Weyden, Hans Memling ou Petrus Christus est à son apogée. «  Charles a un tempérament porté aux extrêmes « . Cela se traduit par des colères terribles dans lesquelles il ne se contrôle plus. Sa rage à se venger en est une autre manifestation. Ses explosions de joie ou de tristesse sont exagérées et lui attirent les remontrances des chevaliers de la Toison d'Or. Le calme, il ne le trouve qu'en navigant sur les eaux bordant les Pays Bas. C'est un travailleur infatigable «  Charles le Travaillant «  dit de lui Olivier de La Marche. C'est un homme de dossier. Tout est minutieusement réglé dans le moindre détail, mais sur le papier. Car Charles le Législateur est décontenancé par la réalité. Son armée, rigoureusement organisée par des ordonnances, se laisse surprendre dans les batailles. Charles ne remporte aucune grande victoire . Pourtant, son orgueil démesuré lui fait croire qu'il est un grand stratège. Très obstiné, c'est son principal défaut, il n'écoute aucun conseil. Son ambition forcenée l'entraîne dans des rêves irréalisables. Il n'a pas les moyens de ses ambitions. Son attitude bornée et autoritaire explique les sièges interminables et inutiles de villes comme Liège et Neuss. Sa cruauté est sans limites. Son moyen de gouvernement est la peur. «  J'aime mieux être haï que méprisé « . Sa sexualité a soulevé des questions même chez ses contemporains. Charles n'a pas d'aventures sexuelles comme la grande majorité des princes ce l'époque y compris son père . Il reste fidèle à ses deux épouses Isabelle de Bourbon et Marguerite d'York qu'il rencontre néanmoins peu souvent. Alors, problèmes pathologiques ou homosexualité ?. G.Minois penche pour la deuxième hypothèse. Cette homosexualité pourrait expliquer son caractère tourmenté . Un autre trait de sa personnalité est une profonde mélancolie. Charles est profondément triste. Il ne rit jamais. La mort qu'il redoute et recherche l'obsède. On a pu parler d'une véritable tendance suicidaire. Certains diagnostiquent même une maladie paranoïaque.

Ce sont ces traits de caractère qui expliquent d'abord les erreurs et ensuite les désastres. Charles est battu par les Suisses à Morat. Son armée est en déroute. Lui même est méconnaissable. Mais, il s'obstine, veut faire plier le duc René II de Lorraine. Et malgré le conseil de ses proches, il met le siège devant Nancy. «  Il est fou «  dit Louis XI. Le siège dure. C'est l'hiver. Le cadavre de Charles est retrouvé enseveli sous le neige, dévoré par les loups.

Héros romantique, personnage détesté et détestable ? G. Minois nous retrace de manière vivante, sans érudition inutile, le portrait d'un homme qui a marqué son temps et l'Histoire.

Laissez vous , à votre tour, fasciner par le dernier grand duc de Bourgogne  Charles Le Téméraire.,le dernier grand prince du Moyen Age.

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Charles Martel

Charles Martel est connu des écoliers pour avoir stoppé les Arabes à Poitiers en 732. Une victoire qui occulte toutefois le reste de son existence, mal connue par le quidam. Puis, on le sait, le temps agit pour glorifier ce qui ne le mérite peut-être pas vraiment. Aujourd’hui, les historiens s’interrogent. Que s’est-il réellement passé lors de cette fameuse bataille ? S’agissait-il d’une escarmouche, d’un authentique triomphe militaire ou d’un choc des civilisations ? Georges Minois revient sur cette figure légendaire et nous raconte son parcours en s’appuyant sur des sources historiques avérées, les conclusions de ses propres recherches et un avis intime. Pour ce faire, il replace l’homme dans son contexte temporel et s’attache à tout ce qui l’entoure pour lui redonner vie. Il ressort le portrait assez saisissant d’un monarque obligé d’assurer la transition entre la dynastie mérovingienne et celle des Carolingiens. Naturellement, il a dû porter sur ses épaules l’ombre de son grand-père Charlemagne, entré dans les annales.
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Charles Martel

Votre mission, si vous l’acceptez : écrire la biographie d’un gars dont on ne connait pas grand chose.



Georges Minois annonce d’emblée la couleur : les sources sur lesquelles s’appuyer pour écrire la vie de Charles Martel sont très pauvres et très orientées. La chronique du continuateur de Frédégaire (c’est son frérot Childebrand, en fait), des vies de saints, quelques rares sources arabes. Du coup l’auteur emploie des techniques qui ont fait leurs preuves dans ces cas-là : il élargit le sujet.

Il va par exemple nous relater tous les Mérovingiens sur 250 ans à la vitesse d’un cheval au galop ; on dirait un film qui passe en accéléré. Il remplit plusieurs pages avec les listes de dons de terre aux monastères ou celles des spoliations. Vu sous un autre angle, cela montre le soin que l’auteur a pris à décrypter en détail ses sources.

Si j’ai trouvé certaines parties lassantes à la lecture, le temps pris pour établir le cadre socio-religio-économique du temps de Charles Martel laisse son empreinte et permet de bien appréhender les événements historiques proprement dits, d’en rendre le cadre confortable. Je n’avais pas réalisé à quel point les monastères et leurs abbés étaient à l’époque impliqués dans le siècle, en tant que conseillers ou comme fournisseurs d’éradicateurs du paganisme. Créer des monastères, supporter l’expansion du christianisme sont des atout politique de très grand poids qu’exploitent à fond la famille des Pippinides (mais aussi leurs rivaux).

Pippinides car le nom le plus « fort » dans la famille est Pépin : Pépin de Landen, Pépin de Herstal (le papa de Charles) et Pépin le Bref (le fiston, à noter que les terres ancestrales des Pippinides sont en Belgique). La famille deviendra « carolingienne » à partir de Charlemagne. Au temps de Martel, le prénom Charles est pour les seconds couteaux comme lui, fils d’une seconde épouse. Des hasards de l’Histoire – son grand-frère Carloman qui préfère le monastère au pouvoir sans qu’on l’y pousse à la pointe de l’épée – et quelques victoires sur le terrain, le chemin s’éclaircit devant lui et il unifie Neustrie et Austrasie). Il passera sa vie à guerroyer pour soumettre les grandes provinces frontalières – Bourgogne et surtout Aquitaine – et les pays encore païens et agités, Frisons et surtout Saxons (un travail de Sisyphe pour ces derniers, dit l’auteur), en s’appuyant sur des moines comme Willibrord et Boniface qui n’y vont pas de main morte pour les convertir au christianisme.



Évidemment, de nos jours Charles Martel est surtout connu pour la bataille de Poitiers. Georges Minois passe en revue les conquêtes fulgurantes Arabes du siècle passé et précise que, si côté musulman il s’agit d’une guerre sainte, d’un djihad destiné à étendre l’Islam au monde entier, le monde Francs n’y voit qu’une guerre de plus contre des Barbares, des envahisseurs. Il connaît peu la religion musulmane qui, chez certains auteurs, est même confondu avec l’arianisme. La notion de guerre sainte contre l’islam attendra les croisades.

L’auteur rappelle aussi que les Arabes restèrent installés longtemps encore en Septimanie et firent des incursions en Provence et même en Bourgogne que Charles Martel repoussera sans pitié. Élément choc, il s’appuie aussi sur le livre de Dario Fernandez-Morena « Chrétiens, juifs et musulmans dans al-Andalus » pour casser le beau mythe de la coexistence quasi paradisiaque des trois religions dans ce pays, sur lequel se sont appuyés de nombreux romanciers. Non, l’Islam n’a jamais été très tendre avec ceux qui refusaient de se convertir.



La dernière partie du livre est consacrée à la façon dont l’image de Charles Martel a été présentée à travers les siècles ; une véritable balle de squash. Parfois très dénigrée – au Moyen-Âge par exemple où on ne lui pardonne pas d’avoir spolié l’Église ; saint Eucher d’Orléans l’imagine même en Enfer à cause de cela – et parfois mise en avant comme sauveur de l’Occident ou de l’Europe. Martel apparaît et disparaît de l’Histoire en fonction de ce qu’on veut faire dire à cette dernière.



L’auteur tente d’être le plus objectif possible mais laisse percer parfois son opinion qui ont l’air très fermes. Celle qui m’a le plus choqué est sa certitude que « Tout ce qui arrive, arrive nécessairement, et l’Histoire est une suite de faits inévitables ». Donc pas vraiment de libre arbitre, aucune possibilité pour un individu de détourner le flot de l’Histoire. L’auteur tient l’uchronie en horreur. Une vision presque mystique.

Georges Minois fustige aussi le roman historique : « Mais comme toujours quand les romanciers s’emparent d’épisodes historiques, ils prennent des libertés avec les faits, et par là sèment la confusion dans l’esprit des lecteurs ». Sur l’éducation historique, il parle de « régression catastrophique de la culture générale » et regrette la vision moderne du politiquement correct qui incite les historiens à s’autocensurer.



La longueur de ce billet montre que ce livre est très intéressant à lire, même si son intention d’origine est un peu détournée vu la petitesse des sources sur Charles Martel. Il est peut-être un peu long, mais vous pouvez faire comme moi et interrompre votre lecture de temps en temps pour passer à des textes plus romancés (ne serait-ce que pour faire rager Georges Minois, lol).

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Charles Martel

J’avais découvert Georges Minois à travers son Charlemagne, et je constate d’ailleurs que je n’avais pas pris le temps d’en faire la critique, mea culpa. Alors quand il a sorti une biographie de Charles Martel, je me suis jeté dessus. Comme l’explique très bien l’auteur, il y a eu peu d’études fouillées sur ce personnage qui revient pourtant dans les débats pour un fait majeur, la fameuse bataille de Poitiers de 732. Accessoirement, il revenait aussi longtemps dans les débats pour son rapport ambigu avec l’Eglise, mais ce n’est plus actuellement un sujet en vogue. Car, et c’est ce que j’avais apprécié dans Charlemagne, Georges Minois prend bien le temps de nous faire comprendre que notre perception de ces hommes des temps lointains, si lointains, est souvent embrumée par les contes et légendes. L’auteur explique bien la difficulté de trouver des sources fiables, et pose bien le contexte pour faire comprendre, autant que possible, ce qui n’était ni plus ni moins qu’un autre monde. De Charles Martel, on sait de source sûre peu de choses, mais par la connaissance, lacunaire, que nous avons de son époque, on peut esquisser les contours de celui qui fut roi sans être roi, et sans contestation possible le plus grand chef de guerre de son temps. Et c’est en tant que chef de guerre protégeant un royaume qu’il va rester dans l’histoire, en repoussant la dernière grande attaque d’envergure des Arabes de Cordoue, en 732, donc. Après, l’auteur rappelle tout le débat autour de l’envergure ou non de la campagne d’Abd al-Rahmân, et si on pouvait supposer si Charles Martel avait conscience de l’importance, à plusieurs niveaux, de cette fameuse bataille. Pour avoir une réponse à cela, je vous laisse lire le livre, qui a pour atout majeur de nous replonger dans un passé aussi terre à terre qu’incroyable, tout en détaillant les faits, leur délicate interprétation, et la richesse des mythes.
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Charles VII

Georges Minois a écrit l'ouvrage le plus complet sur Charles VII (1403-1461).

On a un beau portrait du roi dans les différents âges de sa vie et dans les mues que le cours des événements lui permit de faire : cela va des désarrois du début aux éclatants succès des dernières décennies de son règne (on part du choc subi avec la "trahison" de sa mère Isabeau de Bavière et de son mari, Charles VI le Fou, qui le renient et lui préfèrent Henry V de Lancastre, vainqueur à Azincourt en 1415 et conquérant de la Normandie, avec lequel est conclu en 1420 le traité de Troyes qui prévoit qu'à la mort du monarque, c'est le roi d'Angleterre qui, marié à Catherine, la fille du souverain Valois ajoutera la couronne de France à la sienne ; le Dauphin sembla dépossédé de tout et, même s'il lui restait beaucoup de fidèles, notamment au sud de la Loire, où il avait trouvé refuge chez sa belle mère Yolande d'Aragon, duchesse d'Anjou, on l'appela avec mépris dans le camp ennemi le "roi de Bourges" ; il était d'autant plus contesté que, parmi ceux qui le combattaient, on trouvait le duc de Bourgogne, Philippe le Bon, et qu'on le soupçonnait de n'être pas étranger à la mort du père de ce dernier, Jean Sans Peur, et qu'il avait beaucoup de mal à se laver de cette tache longtemps indélébile).

Puis il y eut le roi "aidé" par la Providence au travers du personnage emblématique de Jeanne la Pucelle, laquelle donna un coup d'arrêt aux entreprises anglaises pour traverser la Loire et mettre fin aux prétentions du Dauphin sur la couronne de France (Charles VII était en fait déjà roi depuis la mort de son père en 1422, mais il lui manquait l'onction et le sacre, et c'est à Jeanne qu'il dut cette reconnaissance à Reims en 1429).

Après cette étape, essentielle, il lui restait à reconquérir les parties de son royaume qui étaient tombées dans les mains des Anglais, et, pour y parvenir il s'employa d'abord à se réconcilier avec Philippe le Bon, duc de Bourgogne, à s'entourer de conseillers efficaces au point qu'on le surnomma "le Bien Servi" (l'auteur nous brosse le portrait de plusieurs d'entre eux et montre en quoi ils surent se rendre utiles), à reprendre aux Anglais Paris, la Normandie et l'Aquitaine, à constituer une armée permanente et un véritable parc d'artillerie qui lui permirent d'être appelé "le Victorieux".

Minois montre admirablement comment cet homme a su prendre tous ces tournants, aidé par la chance et des hommes et femmes de qualité qui lui permirent de faire de son règne un succès.

Seule ombre au tableau, dans la dernière partie de son existence, les démêlés qu'il eut avec son fils, le futur Louis XI, mécontent de la place prise dans le coeur de son père par la maîtresse de ce dernier, Agnès Sorel, et surtout, avec le temps, impatient de lui succéder et de régner à son tour.

On pense beaucoup à Charles VII quand l'on se rend à Chinon - lieu de sa rencontre avec Jeanne -, à Loches et à Mehun-sur-Yèvre, où il mourut.



Charles VII fut, contre toute attente, le roi d'un grand et incroyable redressement de son royaume. C'est grâce à lui que les hostilités avec l'Angleterre, un temps extrémisées, finirent par conduire à une vraie libération.

La Guerre de Cent Ans arriva ainsi à sa fin. Et la France allait renouer avec la prospérité et la paix, même si la "question bourguignonne" restait encore pendante et en attente de solution.



François Sarindar, auteur de : Jeanne d'Arc, une mission inachevée (2015)
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Dictionnaire des athées, agnostiques, sceptiq..

Deux siècles après Sylvain Maréchal, c'est au tour de Georges Minois de recenser les athées du monde entier. Tout en récupérant une partie du travail de son prédécesseur, il l'enrichit de nouveaux personnages plus récents. Anaxagore y côtoie Onfray, et Démocrite Kant.



Aux sourcils qui viennent de se lever, il convient de dire que Minois brasse aussi large que Maréchal. Dans ce dictionnaire sont bien présents des athées purs et durs, mais aussi des théistes, des déistes ou même des croyants sincères dont les œuvres ont inspiré plus tard des critiques contre les religions.



Ce dictionnaire permet d'avoir une petite idée de la manière dont était vue l'incroyance au cours des siècles : bûchers, procès, mise à l'Index, scandales, mais aussi bons mots et lettres de protestation un peu ridicules.



Le travail réalisé est colossal, mais sans doute un peu vain aussi. À lire entrée par entrée, ce dictionnaire lasse rapidement. Je doute que peu de gens aient le réflexe de le consulter à chaque auteur peu connu. Son intérêt consiste sans doute à proposer toute une liste de lectures pour les passionnés du sujet.
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Du Guesclin

C'est un "personnage" de l'histoire. Bertrand Du Guesclin a eu une vie si trépidante, brutale et aventureuse à une époque où peu de témoignages subsistent. Ses faits d'armes ont pourtant impressionné son époque. De ce fait, son histoire se lit avec délectation.
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Du Guesclin

Il était habituel avant cette biographie de Bertrand du Guesclin d'insister sur les prouesses du guerrier, sans voir qu'il avait surtout agi pour se faire un nom, profiter des avantages offerts par ses mariages avec des femmes ayant de bons moyens financiers, collectionner les titres, et monter dans l'échelle sociale en devenant connétable de France sous Charles V. On lui doit d'avoir repris aux Anglais un certain nombre de places fortifiées perdues sous les règnes de Philippe VI de Valois et Jean II le Bon et il fut un bon exécutant des volontés politiques de Charles V, qui voulait reconquérir, parcelle par parcelle, le royaume de France sans tomber dans le piège des batailles rangées, si meurtrières pour la chevalerie française ; la leçon de Crécy et de Poitiers-Maupertuis avait porté ; pragmatisme et efficacité étaient devenus les maîtres-mots de la stratégie de Charles V et de la tactique employée par Du Guesclin.

Le petit noble était devenu un homme à qui même les grands seigneurs et princes qui combattaient pour le roi acceptaient de remettre, plus ou moins, le commandement effectif dans les opérations militaires ou sinon, s'ils continuaient de diriger les troupes, ils consentaient tout de même à écouter ses conseils et à suivre sa logique. On voyait bien que ses méthodes payaient.



Il lui était plus difficile d'obtenir des résultats égaux dans les batailles en rase campagne : victorieux à Cocherel en1364 face au captal de Buch, il fut défait la même année à Auray face à Jean de Montfort et, fait prisonnier, dut racheter sa liberté ; de même, poussant vers la Castille les grandes compagnies, bandes de soudards inemployés et dangereux pour les provinces françaises sur lesquelles elles vivaient lors des trêves franco-anglaises, il les utilisa pour essayer de renverser le roi de Castille, Pierre le Cruel, mais il fut battu à Najera, en 1367, et son vainqueur, le Prince Noir, fils du roi d'Angleterre, allié du roi de Castille, fit monter les enchères de la rançon à payer pour permettre à Bertrand du Guesclin de recouvrer sa liberté ; le chef breton fut plus heureux dans sa deuxième tentative et permit à Henri de Transtamare de battre Pierre le Cruel, de le tuer à Montiel en 1369 et de monter sur le trône de Castille.



Du Gesclin mourut peu avant Charles V, en 1380, alors qu'il mettait le siège devant Châteauneuf-de-Randon, et il eut l'insigne honneur d'être inhumé dans la nécropole des rois, près de son maître Charles V, à Saint-Denis.

Cette biographie du capitaine breton est l'une des plus éloignées de la légende, et cependant elle ne dévalorise aucunement le personnage.

François Sarindar, auteur de : Lawrence d'Arabie. Thomas Edward, cet inconnu

(2010)
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Henri VIII

Je ne sais pourquoi mais j'ai toujours été fascinée par la personnalité complexe, aux multiples facettes, du roi d'Angleterre Henri VIII. Grâce à cet ouvrage, bien documenté,écrit par un professeur d'histoire spécialiste de l'Angleterre et la fin du Moyen-Age, j'ai pu satisfaire ma curiosité et pénétrer dans l'univers du 15e siècle anglais.

Loin des clichés, l'auteur nous dépeint une cour toute entière tournée vers la personnalité hors du commun de cet homme qui a défrayé la chronique pour avoir bravé le pape à cause de son divorce de sa première épouse Catherine d'Aragon, pour avoir fondé une religion nouvelle, et pour avoir imposé un mode de vie raffiné.

Passionnant !
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