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Citations de Georges-Olivier Châteaureynaud (78)


Le roi habite la plus vaste de ces maisons. Les rares provinciaux de passage déposent devant sa porte des offrandes qui tiennent lieu d'impôts : un couffin de légumes, une volaille, un quartier de viande, un carré de tissu… C'est ce qui fait qu'il est le roi. On le laisse régner pourvu qu'il ne se mêle pas des affaires de ses sujets. De temps en temps, au fil des siècles, un roi parle de tracer des routes, de dresser les cadastres des propriétés, de recenser la population. Alors on l'égorge et on assied sur le trône de jonc tressé un villageois connu pour son indolence ou sa pusillanimité. On place entre ses mains un spectre en moelle de sureau, et on lui dit : "Ne trouble pas la paix du royaume, sinon gare à toi !"
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Violette était libre ou paraissait l’être. Lui, le travail occupait dans sa vie toute la place, mais il était prêt à changer ça aussi, si c’était ce qu’elle voulait. À vrai dire, elle lui plaisait tant qu’il était disposé à se régler sur elle. Grand amour, amourette, liaison aussi longue, aussi brève qu’elle voudrait, il se portait preneur.
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Est-ce qu'on avait comme ça un "vrai destin" qu'on épousait ou non, qu'on attrapait ou qu'on ratait comme un train, et d'autres destins de raccroc, de moins en moins nécessaires, de moins en moins légitimes, sur lesquels on se rabattait, dans lesquels on dégringolait toujours plus loin de sa vérité ?
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En nous entourant de livres, nous nous efforçons de délimiter autour de nous un enclos d'éternité. Une telle compulsion signe notre appartenance à l'espèce humaine : nous le savons jusque dans nos gênes, rien n'est impérissable, et nous tentons désespérément d'apurer notre éternel débit sur les registres du temps. Dans notre lutte contre la perte et l'oubli de tout, nous usons d'armes paradoxales. Le fragile papier dure plus que le granit. (p. 12)
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En quelques semaines, indifférent au tumulte anodin de l'époque, Hugo accomplit le pèlerinage intérieur des agonisants. Il revisita ses lieux saints, ses catacombes et ses belvédères. Il buvait comme un trou et dans ce trou peu à peu il disparaissait. Il fumait à pleins poumons, et il s'en allait lui-même en fumée. Il n'était plus là qu'à moitié, à demi et plus qu'à demi transparent, bientôt fantôme, ombre en chemin vers la limpidité de la mort. Il n'était plus que mémoire.
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Il s'était parfois efforcé de réfléchir au rôle que jouait dans sa vie l'amour des livres. Car enfin, qu'il s'agît de ceux qu'il manipulait à longueur de temps sur son lieu de travail, de ceux qu'il ne cessait d'acheter pour son propre compte, ou encore de ceux qu'il avait rêvé d'écrire et dont un seul, ce malheureux petit volume de contes, avait vu le jour, les livres avaient toujours constitué sa seule passion, son seul plaisir, son obsession. Il vivait plus envahi, plus imprégné de livres qu'un banquier d'argent, ou qu'un boucher de sang ! Non content des caisses de nouveautés qui déferlaient chaque semaine sur son service, il courait encore les quais ses jours de congé, et passait régulièrement chez quelques libraires d'occasion... Enfant unique entre deux vieillards, il s'était vite réfugié dans la lecture. Ou bien fallait-il dire au contraire qu'il s'y était risqué ? Le livre était la porte de l'Aventure. Dans la maison silencieuse de ses grands-parents, il suffisait de pousser cette porte pour déboucher sur le tumulte de la vie, qui paraissait un instant plus tôt si lointain. Passé cette porte, Hugo foulait au pied la grève de l'île au Trésor, arpentait la lande d’Écosse avec Rob Roy, sillonnait la steppe au côté de Michel Strogoff : la vraie vie était dans les livres.
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On condamne les mauvais parents alors qu'il faudrait les plaindre ainsi qu'on plaint les pauvres: comme eux ils ont les mains vides. Moi, ma ménagerie me prenait tout. Une pisseuse et un merdaillon ne pesaient pas lourd à côté de mes tigres beaux comme des dieux. Devant eux, j'étais en adoration. Huit tigres!
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…l’imagination de l’être humain ne peut avoir d’autre fonction que d’exprimer sa vision du monde à travers une projection du moi sur une scène fantasmatique, cette projection s’accompagnant de travestissements .évidemment variables à l’infini. Ce que la fiction véhicule au-delà de la « tare » idéologique, c’est l’être. L’être tout entier chez l’artiste accompli, et, faute de moyens techniques et de lucidité sur les tenants et les aboutissants de l’écriture, un être embryonnaire, ou une esquisse d’être, chez le profane.

(p. 127)
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Savez-vous que les seins d'Aïda sont parmi les plus belles choses que j'aie vues au monde, à égalité avec les tigres adultes et les petits chiens ?
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Il me sert une petite pension qui suffit pour le shit et l'ouzo. Pour la coke il faudrait que je me prostitue et, regarde-moi : je ne trouverais pas preneur.
En fin de compte, c'est l'anorexie qui me sauve.
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Quentin n'occupait dans la société qu'une place bien étroite, à peine un strapontin, et pourtant il avait fallu qu'on l'aidât à s'y hisser. Ouvrier spécialisé. On assigne à un homme une tâche simple, en quelques heures et parfois moins encore on lui montre comment l’exécuter. S'il ne donne pas satisfaction dans la journée on le renvoie. Quentin était O.S., par protection, car il devait son emploi à un ami.
Il ne pouvait s'en prendre qu'à lui-même ; il le savait. Aussi loin qu'il s'en souvint, le courage de tout lui avait toujours manqué. Il s'était laissé dériver doucement, nageur lassé dès les premières brasses, et il se retrouvait, à trente ans bientôt, homme de peine et fainéant.
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Un homme qui n'a de souvenirs communs avec personne côtoie la folie chaque jour.
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Il se vit dans la situation d'un prisonnier dans sa cellule, ressassant des rêves d'évasion face à une porte massive,hérissée de serrures formidables, mais qu'un geôlier pervers aurait sciemment omis de verrouiller. Une poussée suffirait à ouvrir cette porte, cependant le prisonnier persuadé du contraire ne songera jamais à l'appliquer. Enfermé dans la fiction de sa captivité, il finira par mourir de désespoir à trois pas de la liberté.
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Avec un bruit sec, le premier grêlon vivant s'abattît au pied de Benoit. Il se pencha pour mieux voir. Au centre d'une étoile de sang irrégulière, il distingua le corps disloqué d'une minuscule salamandre. Aïe aïe aïe ! Les averses de salamandres, c'était ce qu'il y avait de pire avec les pluies de crapauds-buffles, heureusement très rares. En éclatant, les jolies petites bêtes noires tâchées de jaune répandaient, mêlée à leur sang, l'humeur corrosive secrétée par leur épiderme ; ça vous brûlait la peau, ça attaquait les étoffes, c'était une malédiction ! On avait même vu des réactions allergiques aiguës, des œdèmes de Quincke en pleine rue. Il était plus que temps de se mettre à l'abri pensa Benoit.
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Ecoute-moi; tu n'es qu'une petite fille, tu ne sais pas quel poids écrase le cœur des adultes, à l'instant même où ils abattent leur besogne en chantant. Tu l'ignores, mais ils comptent les jours, ils mesurent en secret le temps écoulé et celui qui reste à venir. Chaque instant leur est retranché... Pour eux tout printemps est un printemps de moins !
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Ce siècle à peine entamé serait-il le dernier qui verrait pulluler l'humanité à la surface du globe? On se le demandait. Entre réchauffement, pollutions et épidémies, crises et pénuries, guerres et menées terroristes, les motifs d'inquiétude étaient légion.
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Signez, et mourrez comme bon vous semble ! Mieux encore, faites de votre fin une apothéose, une "performance", dirait-on outre-Atlantique. Est-on coupable de mourir ? Non, bien sûr ! Alors il faut rompre avec des pudeurs d'un autre âge comme avec les pratiques misérables qu'elles éternisent : l'attente angoissée du dernier souffle, le lit d'hôpital et le paravent des agonies, tout cela est inconfortable et indigne. De plus en plus on vit et on aime au grand jour. Pourquoi ne mourrait-on pas sous les feux de la rampe ?
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Plus tard, quand il fut en situation de se remémorer la suite, celle-ci se présenta à lui sous un jour paradoxal, partagé entre des impressions violemment contrastées. Sa cheville lui faisait mal, et Ekaterina sentait très bon.
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L'homme sain n'écrit pas ; il agit et jouit du réel.
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C'est un jour, vers midi, à la fin de l'hiver. Il n'y a pas eu de convoi hier au soir, et les nettoyeurs ne sont pas passés ce matin. La neige tarde à fondre, par endroits, sous le ciel jaune. L'enfant s'ennuie dans son verger, ainsi qu'il lui arrive de plus en plus souvent. L'herbe pousse aussi verte et drue que toujours, comme avant les poissons se renouvellent dans la mare et les pommes sur l'arbre, mais lui ne chante plus et il joue moins.
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