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Critiques de Gustave Le Rouge (53)
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Mystéria

Ceci n'est pas une défaillance de votre ordinateur.

N'essayez donc pas de régler l'image.

Nous contrôlons les horizontales et les verticales.

Nous maîtrisons à présent toute retransmission.

Nous pouvons vous noyer sous un millier de sites, dilater l'image jusqu'à lui donner la clarté du cristal ou vous transporter dans le futur, dans le passé, dans des mondes pleins d'aventures et d'exotisme.

En février 1921, les établissements Louis Aubert présentaient sur le grand écran les quatre premiers épisodes d'un nouveau ciné-roman produit par la Sascha-film : "Mystéria" ...

En même temps que paraissait, pour la modique somme d'un franc quatre-vingt quinze centimes, un grand roman complet illustré par le film aux éditions "Ciné-Collection".

Le fascicule se composait de 95 pages articulées chacune de deux colonnes de texte, et d'une quinzaine de photos pleine-page du film.

Le dessin de la couverture, splendide, annonce le mystère et la péripétie.

Il est signé par Armand Rapeño.

L'écriture de ce grand roman d'aventures exotiques a été confiée à Gustave le Rouge.

"Mystéria" !

Au cercle nautique de San Francisco, le jeune yachtman Lionel Brady annonce qu'il renonce à participer à la traditionnelle course-anniversaire du club.

Ayant recueilli un appel au secours dans une bouteille à la mer, il a décidé de partir en expédition à la recherche du professeur Silas Parker qui a disparu en Amérique du Sud au cours d'un voyage d'exploration .

La comtesse Sarah semble s'intéresser plus qu'elle ne le devrait à ce message surgi d'entre les océans et les lointains continents.

La comtesse Sarah est la veuve anglo-indienne de lord Glocester qui est mort de la peste à Bénarès deux ans auparavant.

C'est une femme mystérieuse sur laquelle court les plus folles rumeurs.

Ainsi, la calomnie prétend que la tragédie partout accompagne sa présence, que le territoire anglais lui est interdit et qu'elle tire le plus clair de ses revenus du crime et de l'espionnage.

Elle est surnommé "Mystéria" par les prétendants évincés et les femmes jalouses ...

Ce récit est pittoresque, exotique et classique.

Il est aussi très marqué par le style de Gustave le Rouge, et c'est principalement ce qui fait son intérêt.

Le roman s'ouvre sur un repas.

Le menu, comme toujours extravagant, est dressé par un chef de cuisine français, le célèbre Boniface.

Et, ici, comme souvent chez le Rouge, la cuisine régulièrement va venir se glisser entre les lignes de ce ciné-roman.

Gustave le Rouge, en parfait bibliophile, émaille également sa narration de courtes notes explicatives et descriptives.

Mais tout ceci sans jamais venir ralentir, ni endommager le cours de son récit.

"Mystéria", la comtesse Sarah, est le chef d'une redoutable confrérie criminelle, "la Mygale".

Cette société secrète aux ramifications internationales a pour but de chasser la race blanche d'Asie et l'invasion progressive de l'Europe et de l'Amérique.

Le monde occidental agonise.

Et le monde oriental est appelé à gouverner l'univers !

Une course poursuite va s'engager entre le jeune yachtman lionel Brady et l'impitoyable Mystéria qui pourtant ne peut s'empêcher d'éprouver un vif sentiment pour son adversaire.

Cette course au trésor va les porter jusqu'à la contrée la plus sauvage et la moins connue du globe, jusqu'aux précipices de la cordillère des Andes, dans les ruines d'un grand temple aztèque dont personne n'est jamais revenu ...

De l'action, de l'aventure et de l'exotisme !

A pied, à cheval, en train et en aérostat ...

Gustave le Rouge s'y entend à décrire, à évoquer, à suggérer.

Cette aventure est racontée par les quatre premiers épisodes, conjointement par le film et le roman.

Deux épisodes ont été rajoutés dans le fascicule.

Ont-ils été accompagnés d'une sortie en cinéma ?

Un document contient le secret du diamant de Boudha, une série de dessins hiéroglyphes représentant un éléphant, des fleurs, un poignard et toutes sortes d'autres objets.

Cette pierre précieuse est indispensable pour provoquer la grande révolte, le soulèvement du peuple asiatique contre l'occident.

Le grand yoghi Ali-Mah, à travers ses visions, peut remonter le temps pour retrouver l'actuel propriétaire de l'énorme pierre taillée en brillant au centre de laquelle sourit un boudah.

Des flots de sang se sont répandus pour sa possession !

A Londres, John Terry détiendrait le diamant.

Sa fille Ellen va être enlevée pour servir de monnaie d'échange ...

Dans ce roman de Gustave le Rouge, pas de science-fiction, peu ou prou de fantastique et de magie mis à par cette vision du yoghi hindou.

Mais d'ailleurs est-on sûr que ce yoghi ne soit pas un imposteur ?

Écrit quelques années après l'apparition du "Fu Manchu" de Sax Rohmer, ce ciné-roman est très caractéristique de ce premier tiers du vingtième siècle.

Le méchant est l'asiatique.

Quelques années plus tard, il sera allemand puis russe durant la "guerre froide".

Ainsi va le monde, ainsi va la littérature populaire qui toujours se cherche des méchants pour provoquer l'aventure ...

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Le mystérieux docteur Cornélius - Le prisonnier..

Ce livre est un véritable cadeau offert à la littérature populaire.

Car Gustave le Rouge en est assurément l'un des maîtres.

L'homme est méconnu, même si Blaise Cendrars, dans "L'homme foudroyé" en a fait un portrait idéalisé et fantasmé.

L'écrivain, sous-estimé et méconnu, est aujourd'hui presque oublié.

Et pourtant sa vie fut un roman, et son oeuvre est un véritable fourre-tout plein d'idées, de belles lettres, de fantaisie débridée, de poésie et de précieux témoignages.

Ce "Bouquin" contient "Le mystérieux docteur Cornélius", "Le prisonnier de la planète Mars", "La guerre des vampires", "L'espionne du grand lama", "Les poèmes du docteur Cornélius" découpés par Cendrars dans la prose de Le Rouge et cinq nouvelles retrouvées :

"Spectre seul" (1892)

"Notre-Dame la guillotine" (1893)

"Le spectre rouge" (1895)

"Le navire de Jules César" (1896)

"Dans le ventre d'Huitzilopochtli" (1924)

C'était assez pour faire de ce livre un de ceux que l'on conserve, et que l'on relit.

Mais ce n'était pas assez pour Francis Lacassin qui déjà, dans "Passagers clandestins" avait fait un portrait de Gustave le Rouge.

Il l'y représentait comme l'ami des alchimistes, des mandragores, des utopistes et des gitans, comme l'ami intime de Paul Verlaine dont il partagea le dernier repas, comme un naufragé du mouvement symboliste.

Gustave le Rouge fut journaliste, écrivain, poète, dramaturge, scénariste de cinéma, animateur de cirque.

Il fut l'un des pionniers de la la science-fiction.

Dans ce livre, Francis Lacassin, en une longue introduction et de passionnantes préfaces, explique, raconte et décrypte la vie de l'homme et ce qu'il reste de l'oeuvre de le Rouge.

Car de la somme de ce qui a été écrit bien des pages ont été perdues.

Ce qui reste est truffé de petites pépites littéraires.

De plus ce "Bouquin" se clôt par une série de documents qui, en une cinquantaine de pages, cernent encore un peu mieux Le Rouge :

Deux sont signées par Blaise Cendrars :

- "Gustave Le Rouge et les homuncules" et "Un très grand poète antipoétique" ...

Un par Paul Verlaine :

- "A Gustave Le Rouge" ...

Trois par respectivement le Dr Marcel Hamon, Raymone et Nino Frank :

- "Un épieur de monstres", "Un soir avec les serpents et les fées" et "Un ami de Gustave Le Rouge : le mystérieux docteur Ferral" ...

Les trois derniers sont signés par Le Rouge lui-même :

- "Les plantes télépathiques", "La traversée de la Manche sans pont ni tunnel" et "Villiers de L'Isle-Adam et le cinéma" ...

Pour moi, ce qui définit le mieux l'écrivain qu'est Gustave le Rouge, ce sont "Verlainiens et décadents", "Le quartier latin" et bien sûr "Les derniers jours de Paul Verlaine".

Ces trois livres sont les plus précieux.

Mais le reste de sa production, tissé d'une littérature plus populaire quand elle n'est pas oeuvre de journaliste, n'est pas à négliger.

Souvent sous-estimé, parfois méprisé, il contient en filigrane une pensée profonde, un véritable engagement politique, une fantaisie poétique et l'expression, sans cesse renouvelée, de menus plaisirs.

Il faut lire ce livre pour réaliser à quel point Gustave le Rouge n'est pas seulement le "Jules Verne des midinettes" comme il a pu être parfois présenté.

Il faut pénétrer son oeuvre, et parvenir à la lire entre les lignes pour en apprécier toute la saveur littéraire ...

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Le secret de la marquise

Ce récit, "Le secret de la marquise", est un roman de cape et d'épée où le lecteur devra tirer, couper et se fendre afin de parer les bottes napolitaines et espagnoles auprès desquelles la botte de Nevers n'est somme toute qu'enfantillage et jeu d'apprenti.

"Le secret de la marquise" est la première partie d'un roman de Gustave le Rouge, paru en 1927 dans la collection "les chefs-d'oeuvre du roman d'aventures" de la librairie Gallimard.

Et, ce secret est bien gardé puisqu'il n'est finalement révélé que dans le second opus, "Une mission secrète", qui a été publié un an plus tard dans la même collection.

Le secret d'ailleurs est d'autant mieux gardé que ce second volume est quasiment introuvable et, en tout cas, hors de portée d'une impécunieuse bourse comme la mienne.

Bougri de bougri, j'enrage, morbleu !

Sous le règne de Louis XV, vers l'an de grâce 1740, en Auvergne, entre Riom et Clermont , Artaban Montrognon dit "La Pivoine" est emmené par les soldats du prévôt de la maréchaussée vers un funeste destin sans que l'on sache vraiment pourquoi.

Mais grâce à Françoise Bonistrol, la fille de l'aubergiste de "La Vouyvre", grâce au jeune comte Albéric de Saint-Genest, l'escogriffe à longues moustaches va s'évader ...

Ce roman est classique.

Disons-le tout net, il n'a pas révolutionné le genre, ni par l'originalité de son récit, ni par le typique de ses personnages.

Mais le récit ici n'a cependant pas le premier rôle.

Car ce joli petit livre est un roman de bibliophile.

Ce qui n'est pas si courant.

Et, ce livre est un petit bijou de style, comme un salon Louis XV désuet pourtant rempli de charmantes babioles et autres bibelots insolites qui n'apparaissent qu'au fervent curieux.

Gustave le Rouge semble aussi à l'aise dans L Histoire mystérieuse que dans l'aventure baroque ou le fantastique extravagant.

"Ce drame est de tout point véridique" écrit-il.

Bougri de bougri, que voilà un mensonge véniel dont le moindre père jésuite lui donnera l'absolution !

Reste que le pays est plein de tricornes à la recherche de "La Pivoine".

Qu'à cela ne tienne, Albéric de Saint-Genest, l'ayant pris à son service, décide d'aller chercher fortune à Paris ...

Chemin faisant, ils vont arracher la marquise de Pontrodeix des griffes de l'infâme sergent-recruteur Chanfardel qui pourtant se prétend la fleur des braves, la coqueluche de toutes les belles ...

Paris, la rue Dauphine, le café "Procope", le théâtre de la Comédie, le Pont-Neuf que l'on ne peut pas traverser sans y croiser un cheval blanc, un moine et une jolie fille ...

Mais Paris c'est aussi la barrière d'Enfer, les catacombes objets de terreur de tous les parisiens, le taudis de la mère Fipart ...

Gustave le Rouge, en quelques tableaux et coups de plume évocateurs, ressuscite ce vieux Paris.

Il a plus d'un tour dans son bissac, et plus d'un mot oublié du dictionnaire tels que "orviétan", "merlan", "berniquet", "ferlampier" et "Turlupin".

Albéric de Saint-Genest va se retrouver mêlé à une histoire d'état, pincé entre sa fidélité pour Louis XV et son mépris pour le cardinal Fleury, triste reflet d'un Richelieu ou d'un Mazarin.

Les personnages de ce roman sont tour à tour, et en même temps, pittoresques, héroïques et amoureux, charmantes et dévouées, fourbes et lâches, truculents et pochards.

L'ensemble de la galerie du genre est représentée.

Tout l'intérêt de ce charmant et captivant roman de Gustave le Rouge est dans le détail, dans sa manière d'écrire très particulière où la digression sert le récit au lieu de l'alourdir.

Mais le Rouge s'amuse aussi avec L Histoire, il ne craint pas l'anachronisme quand il est malicieux.

"La Pivoine" ne serait, aux dires de la reine elle-même, qu'un digne émule de Fanfan la Tulipe !

Savait-elle, Marie Leszczynska, que Fanfan la Tulipe est un personnage de fiction d'une chanson de goguette datant de 1819, très en vogue à l'entre-deux siècles ?

Gustave le Rouge, apparemment ne lui avait pas dit !

Bougri de bougri, j'enrage, morbleu !

Qui est le chef des faux-monnayeurs ?

Quel secret cache la marquise de Pontrodeix ?

Le comte d'Ancize, l'âme damnée du cardinal, sera-t-il châtié comme il le mérite ?

Vers quelles nouvelles aventures et secrètes missions, Albéric de Saint-Genest et "La Pivoine" vont-ils se précipiter ?

Ne serais-je pas un peu béjaune, si je n'avais pas un peu mon idée là-dessus ? ...

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Les derniers jours de Paul Verlaine

Après avoir, à regret et bien trop tôt, refermé "Les derniers jours de Paul Verlaine", l'on ne peut pas se séparer si aisément de la vision de "ce Verlaine douloureux, boitant en archange foudroyé, et fait comme un voleur" qui nous y a été présentée.

Dorénavant on la préférera toujours à celle du "Verlaine officiel créé depuis par les braves gens scrupuleux".

"Les derniers jours de Paul Verlaine", vénérable ouvrage du "Mercure de France" paru en 1911, est signé Frédéric-Auguste Cazals et Gustave Le Rouge.

Les deux auteurs ont été des amis intimes et sincères du grand poète.

Maurice Barrès prétend, dans sa brillante préface, qu'une telle biographie étreint le coeur.

Tout au moins inspire-t-elle sympathie et respect pour le "pauvre Lelian*" et indulgence pour ses mortelles faiblesses.

"N'est-ce pas servir la gloire du génial poète que de dire toute la vérité ?"

L'ouvrage est d'une richesse désintéressée.

On y sent l'affection que portent à Verlaine les deux auteurs ...

Jamais soleil d'hiver ne brilla plus radieux dans un ciel plus pur que ce jour des funérailles de Verlaine.

Devant la douloureuse perte qu'éprouvait la poésie française, la foule était recueillie et grave.

Quinze pages du registre, posé chez le papetier d'en bas, furent bientôt couverte des signatures les plus illustres ...

"Les derniers jours de Paul Verlaine" est, avec "Parnassiens et décadents" et "Le Quartier Latin", un des trois volumes du triptyque qui éclaire l'écrivain qu'était finalement Gustave Lerouge.

Ils sont légion, ceux qui ont écrit sur lui.

Bien peu de ceux-ci l'ont compris.

L'homme, venu de Valognes, a gardé une grande part de son mystère.

Pourtant la courte mais riche biographie que lui a consacré Francis Lacassin dans "Passager clandestin" est passionnante.

Elle a le mérite de nous parler de l'homme qu'il était.

De nombreux dessins esquissés par Verlaine lui même, ou par Cazals, enrichissent "Les derniers jours de Paul Verlaine"

Verlaine a brûlé sa vie dans un triste désordre moral.

Mais Gustave Le Rouge et Frédéric-Auguste Cazals ne croient pas qu'un Verlaine bourgeois ou fonctionnaire modèle n'eut jamais écrit les sublimes vers de "Sagesse" et de "Parallèlement".

Ils racontent.

Ils nous présentent le grand poète.

Ils démentent.

Ils ont vécu à l'hôtel Lisbonne avec le "pauvre Lelian*", partagé avec lui des pauvres repas au restaurant de la Huchette et respiré avec lui, au café Procope, cette atmosphère enfumée de fines causeries littéraires.

A leur ouvrage indispensable, un autre est complémentaire.

Celui qu'Edmond Lepelletier, lui aussi proche du grand poète, a écrit sur la première moitié de la vie de Verlaine ...



*cet anagramme de Paul Verlaine est le surnom qu'il se donnait parfois à lui-même.



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Les aventures d'un vieux savant

Au grand dam des quelques derniers détenteurs de cette originale petite brochure, et qui, à la revendre, comptaient bien en tirer abondamment profit de quelques monnaies sonnantes et trébuchantes, il faudra bien là avouer la duperie de son auteur.

"Les aventures d'un vieux savant" n'est qu'une réédition sur mauvais papier d'un décevant roman de Gustave le Rouge.

Et, le client risque de se faire attendre !

Vingt et un ans se sont passés depuis la parution de "La reine des éléphants".

Ce roman, d'ailleurs sans véritable réel intérêt de lecture, a été oublié depuis longtemps lorsque "Les aventures d'un vieux savant" vient à paraître, en 1927, dans la collection "Mignon-Roman" des éditions de la "Cité du bon livre" d'E. Bottereau, 10 rue Mézières à Paris.

Sir John Printermont et sa fille Emmy avaient un ami depuis presque vingt ans : l'éléphant Bakaloo qui n'est pas un éléphant comme les autres éléphants.

Il a porté sur son dos le prince de Galles et inspiré Rudyard Kipling ...

Gustave le Rouge, lui, n'est pas monté sur le dos de Bakaloo puisque, d'après Francis Lacassin, il a écrit son livre au cinquième étage d'un immeuble des Batignolles.

Mais Rudyard Kipling a bien inspiré l'essentiel et le superflu de ce récit simili-exotique dont on ne sait pas s'il était destiné à la jeunesse, au populo ou à la ménagère qui déjà avait dépassé cinquante ans.

D'après le Rouge,"Les gens casaniers, et qui ont surtout voyagé dans les livres, sont assoiffés d'aventure" !

Ce livre est un voyage à travers une Inde de cartes postales.

L'hindou est tel que nous l'avions imaginé, le colon anglais, toujours sanglé dans un uniforme impeccable et dans son honneur, se comporte d'une manière satisfaisante et littéraire.

Sous chaque feuille, il y a un oiseau, sur chaque fleur un papillon et sous chaque pierre un reptile ...

Mais la luxuriance des descriptions de paysages, les baobabs d'une trentaine de mètres de circonférence, la jungle et ses ruines exotiques, la faune mystérieuse que Gustave le Rouge fait semblant d'y découvrir ne parviennent pourtant à dissimuler l'indigence du récit et le faible caractère des personnages.

Le récit est émaillé d'invraisemblances et de détails étonnants ...

Anatole Montbrichard est un savant illustre, membre de l'Institut de la Société Nationale de Géographie.

Son guide, Lyoni, l'a dépouillé avant de fuir.

Lyoni est un hindou cruel qui a aussi dérobé la nourriture de Bakaloo, l'éléphant pour la revendre .

Chassé du service de sir John Printermont, il va devenir l'âme damnée du capitaine Chapman sur lequel courent des rumeurs d'extorsion de fonds commises au détriment de riches négociants dont un même, riche parsi, aurait disparu à la suite d'une soirée commune.

Mais le vice-roi des Indes a ordonné à Sir John Printermont de marcher avec la moitié de son régiment contre le radjah de Khanda-Saïb qui a mis à mort deux anglais et insulté le pavillon britannique ...

Ce petit roman de Gustave le Rouge est à la fois d'une naïveté renversante et d'une étonnante cruauté.

Les descriptions évocatrices ne sont que décors factices et tous les éléments de la caricature la plus évidente sont ici réunis.

Cependant l'inévitable attaque de tigre se termine ici comme jamais elle ne s'est terminée.

Les quelques digressions, qui d'habitude font la joie des lecteurs de le Rouge, n'apparaissent dans le récit que contraints et forcés, presque pour y cacher les invraisemblances que le Rouge y a semées.

L'orgie menée par les anglais dans la jungle est un petit chef d'oeuvre de mauvais goût qui, à lui tout seul, est une raison de plus d'éviter la lecture de ce livre.

Même Francis Lacassin, s'il défend tout de même ce roman dans sa préface de "La reine des éléphants" à la collection 10/18, s'y montre pourtant moins dithyrambique qu'à son habitude lorsqu'il évoque le bibliophile extravagant qu'était Gustave le Rouge.

Que Dieu me savonne, que Gustave Lerouge me pardonne.

Je crains que d'appeler sur votre lecture les bénédictions de Vichnou et de la déesse Sita ne suffise pas ...



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La dame noire des frontières

Plutôt que "La dame noire des frontières", ce livre de Gustave le Rouge aurait dû s'intituler "L'esclave amoureuse".

Car des deux romans contenus dans ce petit recueil, c'est ce deuxième texte, pourtant plus court que le premier, qui lui donne tout son intérêt.

Mais avant d'en entamer la lecture, le plaisir passe ici par "Le Rouge, rénovateur de la femme fatale", une préface signée Francis Lacassin.

Car malgré qu'il ait été prolifique, Gustave le Rouge est un auteur mal connu que l'on a longtemps dédaigné et sous-estimé.

Il faut savoir, par exemple, que dans Valognes, sa ville natale, il ne possède même pas une petite ruelle à son nom !

Sa biographie est floue, il n'a pas toujours signé ce qu'il a écrit et beaucoup de ses livres ont été perdus.

Pourtant deux hommes ont aidé à mieux le connaître : Blaise Cendrars dans "L'homme foudroyé", et Francis Lacassin dans "Passagers clandestins", puis dans les nombreuses préfaces dont il a émaillé les rééditions de l'oeuvre connu de le Rouge.

Un essai complet, une véritable biographie, "Images et portraits de Gustave le Rouge" d'henri Bordillon, serait toujours à paraître ?

Mais pour revenir au livre qui nous occupe, il contient deux courts romans, et l'on peut dire que le premier "La dame noire des frontières" est à mi chemin entre la littérature populaire et le roman d'espionnage.

Il se lit avec plaisir malgré que son épilogue semble avoir été écrit à la hâte.

Le capitaine Marchal a conçu les plans d'un avion blindé révolutionnaire qui, lors du prochain conflit avec l'Allemagne, pourrait assurer à la France la suprématie dans les airs.

Le capitaine Marchal aime Yvonne, la fille du général Pierre de Bernoise mais il est fasciné par miss Arabella Willougby.

Et Robert Delangle, le fin reporter du "Grand Journal de Paris", a cru reconnaître en la jeune anglaise la fameuse dame noire des frontières, une espionne redoutable et célèbre de l'autre côté du Rhin ...

C'est "L'esclave amoureuse" qui est l'épice de ce livre.

Ce court roman, adapté au théâtre, aurait fait recette sur la scène du Grand-Guignol.

Car la passion et le frisson, la violence, l'amour et la jalousie en sont les ressorts principaux.

Gustave le Rouge a ici soigné son écriture, retenu sa plume afin de livrer un petit bijou.

En Louisiane Mr de Saint-Elme est un créole français.

C'est un bon maître et un mari fidèle.

Il a fait de Léonore Prynker sa femme.

Mais son bonheur va se fracasser contre l'infidélité et la débauche de l'aimée ...

"L'esclave amoureuse" est empreinte de sensualité, de cruauté et d'humanité.

C'est un de ces petits morceaux de littérature, semés ça et là dans son oeuvre par le Rouge, qui sont les véritables témoignages de son grand talent ...



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La mandragore magique : Téraphim, golems, and..

"La mandragore, dont la racine représente grossièrement, parfois, la forme humaine, a longtemps hanté les rêves avides des esprits crédules et des imaginations démoniaques".

C'est toujours avec curiosité et appétit que j'ouvre un livre écrit par Gustave le Rouge.

L'écrivain est mystérieux. L'homme ne l'est pas moins.

Un passionnante préface d'Hubert Juin, intitulée "Éloge du polygraphe" ouvre l'ouvrage.

Elle est de celles qu'il ne faut pas négliger, de celles qui éclairent le lecteur, qui intéressent l'amateur.

Pour gagner sa vie, Gustave le Rouge fit mille choses dont certaines dans les coulisses d'un cirque de Caen.

Mais, dès le collège, il ne pense qu'à la Littérature.

Ce qui l'amènera à écrire des poèmes, malheureusement, sauf un, tous perdus ...

Ce qui l'amènera à fréquenter des "néphélobates" et des "argyraspides" ...

Ce qui l'amènera à devenir l'hagiographe des symbolistes, des décadents ...

Ce qui l'amènera auprès de Verlaine ...

Ce qui l'amènera, à boire l'absinthe, "chez Salis", au "Chat Noir" ...

Ce qui l'amènera dans les environs de chez Vanier, le "bibliopole du quai St-Michel ...

Ce qui l’amènera à nous laisser "Le Quartier Latin", "Les derniers jours de Paul Verlaine", "Verlainiens et décadents" et une somme de bons bouquins ...

Hubert Juin, à la fin de l'ouvrage, revient nous offrir une postface qui, sans titre, se propose d'éclairer encore un peu plus l'ouvrage de Gustave Le Rouge.

De celui-ci que dire de plus qu'il parle de la mandragore, du téraphim, du golem, de l'androïde et de l'homoncule, qu'il est curieux, bizarre et saugrenu.

Gustave le Rouge ne nous offre pas ici un chef d'oeuvre.

Mais une petite digression sur un des sujets étonnants dont il était friand ...

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L'Amérique des dollars et du crime - Bouquins

Vendus, en 1899 et 1900, quatre sous la pièce sous la forme du défunt livre de colportage, imprimés sur du grossier papier gris et ornés en couverture d'une image naïve, les huit volumes de "la conspiration des milliardaires" sont, d'après Francis Lacassin, l'acte de naissance d'un maître conteur.

C'est le premier roman de Gustave le Rouge, cosigné par Gustave Guitton.

Le professeur Golbert de l'Académie des Sciences et Olivier Coronal, l'inventeur de la torpille terrestre destinée à tuer la guerre, rêvent d'augmenter les échanges commerciaux entre l'ancien et le nouveau continent, entre l'Europe et l'Amérique.

Ils ont imaginé pour cela une locomotive sous-marine, un chemin de fer subatlantique.

Mais le club des milliardaires américains, sous l'impulsion de William Boltyn le roi de la conserve de Chicago, ont décidé de placer l'Europe sous leur tutelle économique ...

"La conspiration des milliardaires" est un roman né de l'imagination délirante d'un érudit.

Francis Lacassin, dans une préface éclairée, nous promet que ce récit empoigne, dès sa première page, le lecteur pour ne le lâcher qu'à la dernière.

Gustave le Rouge est un passager clandestin* de la littérature populaire.

Il est d'abord un personnage avant d'être un écrivain dont la biographie a jusqu'à aujourd'hui échappé à tout hagiographe puisqu' Images et portraits de Gustave le Rouge d'Henri Bordillon ne semble jamais avoir paru.

Né en juillet 1867, au 7 de la rue de Poterie à Valognes dans la Manche, Gustave le Rouge fit son lycée à Cherbourg où il rencontra le jeune poète Julles Tellier à qui toute sa vie il voua une profonde admiration.

Gustave le Rouge fut journaliste, romancier, scénariste pour le cinéma, dramaturge, critique culinaire et gastronome, exploitant agricole, animateur d'un cirque ambulant, botaniste, inventeur et poète.

Il possédait à fond l'art de manier le fouet.

Mais surtout il ne pensait qu'à la littérature.

Il fréquentait les symbolistes, les décadents.

On l'avait nommé hagiographe des saturniens.

Et son oeuvre, dont malheureusement une grande partie a mystérieusement disparu durant l'occupation, est à l'avenant du personnage.

C'est un foisonnant mélange d'érudition et d'imagination.

Oublié de longues années, il a été heureusement admiré par Blaise Cendrars, et redécouvert par Hubert Juin et Francis Lacassin ...

Cette réédition intégrale de "la conspiration des milliardaires" dans la collection "Bouquins" de chez Robert Laffont, ajoutée de quelques documents et préfaces, est une belle porte d'entrée vers cette oeuvre scientifico-fantastico-policière dont il faut accepter les conventions.

Mais n'est-ce pas toujours le prix à payer pour entrer de plein-pied dans la littérature Populaire ? ...



*"passager clandestin" tome1 de Francis Lacassin - paru chez 10/18 en 1979
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Un drame sous-marin

Grandes aventures, voyages excentriques : voilà ce que propose, en 1931, la section bleue des "Éditions Jules Tallandier" de Paris.

La collection est bleue comme la bibliothèque qui, dès le XVIIème siècle, proposait en France les premiers titres de littérature populaire.

La collection est bleue comme l'océan que, sous la plume de Gustave Lerouge, parcourt le sous-marin Jules Verne ...

Car le titre original de ce petit roman est bien "le sous-marin Jules Verne".

"Un drame sous-marin" est son deuxième titre.

C'est un bon roman, un peu naïf et charmant.

Le clin d'oeil au maître y est évident.

Le récit est fabriqué "à la manière de ...".

L'inévitable hommage y est rendu à Jules Verne et à son impérissable "20.000 lieues sous les mers".

C'est, selon Gustave Lerouge, "un hommage dû à ce romancier, dont les ouvrages sans prétention ont tant fait pour la vulgarisation des sciences".

D'ailleurs, "Un drame sous-marin", sans aucun doute, peut être qualifié de "Vernien" car, comme chez le maître, "la science souveraine y donne le bonheur à l'homme".

Alexandre Dumas est aussi évoqué.

Une petite escale sur l'île de Monte-Cristo en est l'occasion ...

Mais pour autant, lorsque l'on a dit tout cela, a-t-on tout dit ?

Un milliardaire philanthrope, le norvégien Ursen Stroëm, organise un sensationnel concours ouvert aux ingénieurs du monde entier.

Un fabuleux prix de cinq millions-or est offert à celui qui, dans un délai d'un an, dressera, seul, les plans d'un grand sous-marin à usage non militaire.

Le projet de Goël Mordax est choisi par un jury composé des plus illustres des savants du monde entier.

Il est porté en triomphe.

Mais pour lui, l'aventure ne fait que commencer.

Il s'est attiré la haine de Tony Fowler, son malheureux concurrent ...

Il va découvrir l'amour en la personne d'Edda Stroëm, la fille du milliardaire norvégien ...

On retrouve dans "Un drame sous-marin" de nombreux éléments présents dans toute l'oeuvre de fiction de Gustave Lerouge :

- son horreur de la guerre ... Gustave Lerouge évoque une guerre mondiale voulue par des impérialistes sans scrupules ...

- son attirance, faite d'exécration et de fascination pour l'Amérique et son capitalisme naissant ...

- son goût à insérer de la cuisine dans sa littérature ...

Dans cette édition du roman, du fait de la rupture entre les deux auteurs, la signature de Gustave Guitton a disparu.

Le livre est articulé en deux grandes parties et un épilogue :

- un drame de la haine

- la bataille sous-marine

"Un drame sous-marin" est un bon petit roman d'aventure, de littérature populaire.

Il est écrit, à l'ancienne, dans un style élégant mais efficace.

Il n'affiche aucune autre prétention que de nous faire passer un bon moment.

Pourtant, il est finalement certainement plus riche qu'il n'y paraît ...







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Le Quartier Latin.

C'est un marchand inattentif qui m'a offert, pour quelques pièces, ce livre précieux et rare.

Ce livre est un livre important dans l'oeuvre de Gustave le Rouge.

Le fait qu'il l'ait écrit en collaboration avec Georges Renault n'y change rien.

Au fil des pages, les deux auteurs, par la magie des mots, se fondent en un seul.

Il est écrit quelque part, dans une certaine "Revue de l'Imaginaire", que Gustave le Rouge écrivait pour se faire plaisir et pour gagner son pain.

C'est réduire quelque peu son oeuvre dont ce livre, paru en 1899, est, avec "les derniers jours de Verlaine" et "Verlainiens et décadents", la véritable pierre d'angle.

"Le quartier Latin" n'a jamais été réédité.

Pourtant c'est un livre lumineux et foisonnant d'esprit.

Pas une rue, pas une maison, pas une pierre qui n'évoquent quelques souvenirs littéraires ou artistiques.

Le quartier Latin est le royaume de la bohème.

Cette dernière a l'éloquence facile.

Elle sème son oeuvre, à droite, à gauche, au hasard des apéritifs.

Rue Linné, habite un vieux lettré qui collectionne, depuis trente ans, tout ce qui concerne le "Quartier".

Voilà qu'il a mis à la disposition de Gustave le Rouge et de Georges Renault un monceau de livres et de paperasses, de cartonniers et de gravures ...

Mais dans étude embrassant le "Quartier", il n'a pas été possible de citer tous les artistes qui s'y sont fait une renommée.

Les deux auteurs ont passé sous silence tous ceux dont le talent est "courant", de même que ceux dont l'oeuvre, trop connue, n'a pas besoin de commentaires.

"Le quartier Latin" est enrichi de nombreuses illustrations, de croquis, de quelques photographies que l'on doit à Daniel Monfreid, à Paul Verlaine, à Burret, à Grün, à Gustave le Rouge, à Paul Verlaine, à René Lelong et à quelques autres.

Le livre est d'une richesse telle que l'on ne peut la condenser.

Il est moderne, parfois subversif et insolent, toujours intelligent.

Il est un panorama, une recherche des esprits larges et indépendants.

"La morale et l'opinion sont des tyrans".

"Lire c'est déjà se révolter".

Une caricature de Monsieur Charles Blanc, sympathique préfet de police ...

Telles sont les conclusions de ce magnifique ouvrage où le pittoresque, l'inédit et le décadent côtoient le pitoyable et l'infâme misère.

Où l'on rencontre Paul Verlaine, Sidi le tatoué qui jonglait avec des poids de 20 kilos, Charles Canivet le brillant chroniqueur du "Soleil", Alfred Dalibard qui chantait "la soupe à deux sous" et le père la Purge qui ne fabriquait des chaussures que pour les poètes et les anarchistes ...







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La conspiration des milliardaires, tome 1

"La conspiration des milliardaires", paru initialement, en 1899 et 1900, sous l'apparence de huit petits volumes de colportage vendus quatre sous pièce, est le premier roman de Gustave Le Rouge.

C'est à la fois un roman populaire et une anticipation scientifique.

Il est cosigné par Gustave Guitton.

William Boltyn est un de ces milliardaires qui avait fait, autrefois, en sabots, son entrée à Chicago.

Ayant eu l'idée d'une vaste spéculation, sur les bestiaux, qui devait l'enrichir, il devint "le roi de la viande" et n'avait plus guère de rivaux que ce Mackay qu'on surnommait " le pape de l'or" et Vanderbilt, "le roi des chemins de fer".

Entouré des dix plus grosses fortunes des États-Unis, il décida un jour de se lancer dans une lutte économique et militaire contre la vieille Europe afin d'assurer au capitalisme américain la suprématie dans le commerce mondial.

William Boltyn s'adjoint pour cela les services d'Hattison, le plus grand chimiste, le plus formidable ingénieur de toute l'Amérique et de tout l'Univers...

Un mariage est alors arrangé entre Aurora, la fille du milliardaire et le jeune Ned, le fils du brillant ingénieur...

En 1977, c'est dans l'excellente collection 10/18 que ce grand et long récit est repris en trois tomes dont aucun ne porte un sous-titre.

Ce premier volume est précédé d'une brillante préface qui aurait pu s'intituler :

"le roman populaire ne mérite pas toujours le mépris dont on l'accable".

Cette préface est signée Francis Lacassin.

Elle apporte un fin éclairage à la lecture du récit et présente un auteur si mal connu.

Gustave Le Rouge est un auteur original, prolifique et atypique.

Ce premier roman, même s'il tombe dans certains travers du roman populaire, même s'il en respecte les conventions et les structures, s'avère être au final moderne et intelligent.

- Il exprime le conflit entre une science humaine, encadrée par une éthique, par des valeurs et une autre inféodée à l'argent et à l'industrie.

- il parle de l'affrontement entre l'intelligence et l'argent.

C'est une acerbe critique du capitalisme et de l'impérialisme des États-Unis d'Amérique.

Gustave Le Rouge, en son temps, avait compris que la marche en avant de l'industrie était le plus inéxorable et le plus implacable des colonialismes.

L'auteur, parfois assez dur dans ses propos, dénonce aussi dans son récit la ségrégation exercée envers "le peuple noir" et le sort réservé au peuple indien par "ces marginaux et ces audacieux ayant déferlé sur ce nouveau continent" !

Le médecin et confident de Gustave Le Rouge disait de lui qu'il avait lu des bibliothèques entières !

Quoiqu'il en soit, grâce à sa grande érudition, il émaille son récit d'une multitude de détails appartenant aux domaines les plus divers de la connaissance.

Chaque situation est prétexte à distiller discrètement un savoir mais aussi de belles et efficaces descriptions :

A l'occasion de la traversée de l'Atlantique, par exemple, Hattison et son fils Ned, frôlant les abysses, nous offrent une belle promenade au fond des mers...

Avec ce premier roman, "la conspiration des milliardaires", Gustave Le Rouge s'annonce, non seulement comme un écrivain avec qui il faudra compter, mais aussi comme un précurseur dont les propos seront repris, au cours de ce vingtième siècle naissant, par toute une génération d'écrivain dont Jack London est peut-être le plus significatif....





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Verlainiens et Décadents

Il est certains livres, qui à force d'être vainement recherchés, finissent par ne plus être espérés.

Celui-ci, au fond d'une caisse poussiéreuse, se cachait derrière une jolie couverture en cuir fauve et quelques lettres dorées.

L'ouvrage a été, un jour, qualifié par une revue, comme un de ces petits volumes dont la place est marquée dans toute les bibliothèques.

"Verlainiens et décadents" est un album de souvenirs.

Il est une époque où la mode était aux qualificatifs truculents, aux savoureux néologismes.

Un libraire s'appelait un "bibliopole", les poètes des "héphélobates" ou des "argyraspides".

On ne craignait pas, alors, de qualifier un chef d'école de "gonfalonier du verbe".

Gustave Le Rouge se fait, ici, l'hagiographe des Saturniens.

Tout d'abord, il pousse les portes du collège de Cherbourg, où il nous présente le jeune poète Jules Tellier qui vient d'y être tout juste nommé professeur de rhétorique.

Cherbourg est une ville pleine d'inconnu.

Elle nous apparaît en plein.

Puis vient, pleine d'émotion, d'enthousiasme et de curiosité, la première rencontre, dans un petit restaurant de cochers, entre Gustave Le Rouge et Paul Verlaine.

Et, de ce jour jusqu'à la mort du grand poète, les deux hommes entretiendront les relations les plus franches et les plus cordiales.

"Verlainiens et décadents" est la clef pour mieux appréhender "les derniers jours de Verlaine", ce livre fameux où Frédéric-Auguste Cazals et Gustave Le Rouge ont fixé leurs souvenirs avec des mots, des scènes, mille traits et mille images vivantes.

"Verlainiens et décadents" est un album de souvenirs.

Son auteur y pousse la porte du célèbre cabaret "le Chat Noir" à l'heure où, sous l'influence du poison vert de l'absinthe, les discussions devenaient tumultueuses et où tout le monde avait du génie ...

La plume de Gustave Le Rouge est des plus fines.

Cinquante ans ont passé, l'âme du quartier a disparu.

Mais la mémoire de l'auteur est intacte.

Il nous présente une formidable galerie de personnages.

Le livre, précieux, est devenu rare.

J'aime à imaginer que l'esprit, malicieux, de Gustave Lerouge, en portant ma main vers cette caisse oubliée, a voulu offrir, au "pays" que je suis, ce magnifique moment de littérature ... et je l'en remercie encore ...





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Le mystérieux Docteur Cornélius - Tomes 03 et 0..

"Le mystérieux Docteur Cornélius" de Gustave Le Rouge (1867/1938), c'est le roman feuilleton début de siècle (le vingtième) à son meilleur niveau.



Action et rebondissements non-stop, des personnages, certes stéréotypés, mais surtout parfaitement décrits en quelques mots, pas de temps morts, pas de digressions superfétatoires*.



Le Rouge, auteur prolifique, ami de Verlaine de de Blaise Cendrars, avait trouvé les clefs pour captiver l'attention du lecteur et, plus de cent ans plus tard, cela fonctionne toujours !



Les éditions Manucius, avaient au début des années 2000, effectué un joli travail en rééditant l'intégrale des romans populaires de la série "Docteur Cornélius" dans une série d'élégants livres au format poche.



Gustave Le rouge est un auteur que je vous encourage à découvrir, il est l'un des pères du feuilleton et a inspiré nombre d'auteurs de romans policiers et de scénaristes d'oeuvres -dites- populaires.



Si au fil du temps son nom a été relégué au rayon "rétro", il a avec des auteurs comme Gaston Leroux, Maurice Renard, Maurice Leblanc, imposé un genre qui se perpétue dans le roman, la télévison, la bande dessinée...



Rendons hommage à ces aieux et ne les laissons pas tomber dans l'oubli !



* Nous sommes entre "lettré(e)s utilisons un vocabulaire autre que celui des réseaux (a)sociaux !
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La guerre des vampires

"La guerre des vampires" fait suite à un premier tome, "le prisonnier de la planète Mars". Les deux récits sont indissociables et n'en font, au final, qu'un seul.

Une chose est au moins sûre pour Ralph Pitcher et Miss Alberte : leur ami Robert Darvel est naufragé sur la planète Mars.

Miss Alberte a décidé de consacrer son immense fortune à tenter de retrouver l'homme qu'elle aime toujours.

En Tunisie, dans une région sauvage située entre Aïn Draham et la Chehahia, elle a acheté la villa des Lentisques, un merveilleux palais arabe, et dans cette paix profonde du désert, accompagnée du capitaine Wad, de l'ingénieur Bolenski et de Georges Darvel, le frère cadet de Robert, elle a édifié un laboratoire pourvu de l'outillage scientifique le plus complet, le plus puissant dont aucun savant n'ait jamais disposé.

Une après-midi, un étrange phénomène se produisit.

Dans une cuve dont le liquide contenu avait la propriété de rendre visibles certains rayons, un être monstrueux apparut. Il se tenait immobile, comme une pieuvre tapie dans sa caverne.

Ses yeux étaient larges et sans prunelles, il n'avait pas d'oreille, pas de nez, seulement une bouche petite et très rouge.....

Gustave Henri Joseph Lerouge est né à Valognes en juillet 1867.

Son grand-père fut longtemps maire de Réville, un joli petit village du Val de Saire dans le nord du Cotentin.

Il fréquenta le collège de Valognes, le lycée de Cherbourg et la faculté de Caen.

Il fut un écrivain prolifique et talentueux qui se frotta à tous les genres.

(roman de cape et d'épée, poèmes, souvenirs, pièces de théâtre, scénarios de films policiers, ciné-romans à épisode, anthologies, essais, ouvrages de critique)

Mais il fut d'abord un extraordinaire conteur. Il écrivit de formidables romans d'aventure populaire souvent fantastiques, merveilleux ou de science-fiction.

"Le prisonnier de la planète Mars" suivi de "la guerre des vampires" est le passionnant récit, parfois surréaliste, des aventures de Robert Darvel.

C'est une véritable épopée qui déboucha sur un mystère littéraire, une étrange analogie en conjoncture : en 1908, trois romans parurent qui se ressemblaient étrangement :

- "La roue fulgurante" de Jean de la Hire

- "Aventures merveilleuses de Serge Myrandhal" de Gayar

et "le prisonnier de la planète Mars" de Gustave Le Rouge....
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Le mystérieux docteur Cornélius - Intégrale, tome 1

Cette intégrale regroupe les 6 premiers opus de la série “Le mystérieux docteur Cornelius”



Pour ceux qui se souviennent de Fantômas au cinéma, cette série est un peu dans le même genre, c’est une suite de feuilletons, avec un trios de méchants, Le Docteur Cornelius Kramm, son frère Fritz et Baruch Jorgell, fils maudit et renié de Fred Jorgell. En fait, le Docteur Cornélius est souvent très en retrait dans ces aventures, il est juste l’incarnation du mal, mais les histoires sont racontées surtout du point de vue des bons, un peu comme si on avait appelé "Les aventures de Blake et Mortimer", “Le mystérieux Olrik”.

Du côté des héros, il y a tout un groupe de personnages hétéroclites qui vont se rencontrer au fil des épisodes, le personnage central de chaque aventure est différent, mais ont des liens entre eux. C’est de l’aventure pour l’aventure, destinée à nous faire voyager, frissonner, avec une pointe de science-fiction, dans un genre qu’on appelle “Merveilleux scientifique”, directement hérité de Jules Verne. Ces aventures me font surtout penser à Fantômas de Pierre Souvestre et Marcel Allain, avec ce méchant qu’on arrive jamais à saisir, mais dont nos héros parviennent malgré tout à contrer les plans machiavéliques.



C’est du récit écrit à la va-vite, les idées s’accumulent sans trop de cohésion et sans soucis de cohérence, presque directement jetées sur le papier, c’est un genre qui inspirera les débuts de la bande dessinée franco-belge, et particulièrement Hergé. Savants fous contre bon savant, bon capitalistes contre capitalistes véreux… Les femmes sont courageuses, avec du caractère, mais ont quand même besoin d’un chevalier servant et ne rêvent que de mariage et de belles toilettes,



1. L'Énigme du Creek sanglant

Premier épisode qui va mettre aux prises Baruch Jorgell à Harry Dorgan, enquête policière avec des meurtres commis avec électrocution. Le Docteur Cornélius est très en retrait.



2. Le Manoir aux diamants

On va suivre Baruch Jorgell qui s’est réfugié en Bretagne et va abuser de la confiance d’un savant, Gaston de Maubreuil et de ses proches.



3. Le Sculpteur de chair humaine

Retour de Baruch Jorgell aux Etats-Unis et entrée en action du Docteur Cornélius, qui va échanger les visages de deux protagonistes. C’est dans cet épisode que la série prend son ampleur avec cet échange de physique.



4. Les Lords de la Main rouge

L’intrigue est ici plus “financière”. Baruch a pris la place du frère de Harry et va tenter un putsch financier contre son vrai père. Cet épisode est un peu moins épique que les précédents, mais il permet de mettre en place la main rouge, organisme mafieux des frères Kramm.



5. Le Secret de l'île des pendus

Changement de décors, changement de personnages, on retourne vers de l’aventure épique et rocambolesque avec Agénor et Lord Buridan. Enlèvement, île mystérieuse où la main rouge a installé une prison pour le savant Bondonnat



6. Les Chevaliers du Chloroforme

On retrouve les filles des savants De Maubreuil et Bondonnat qui viennent enquêter au Etats-Unis avec leur compagnon pour retrouver le professeur Bondonnat. Les différents protagonistes se rapprochent, ce n’est pas du goût des Lords de la Main Rouge (les frères Kramm) qui vont tenter de s’en débarrasser.



Ça a bien vieilli, les personnages sont très caricaturaux, les situations un peu trop rocambolesques, c’est un peu comme Tintin en Amérique, une accumulation de situations qui nous mettent en émois, avec une certaine fantaisie improvisée un peu bancale et beaucoup d’incohérences. Les gentils ne meurent jamais, les trois grands méchants non plus, par contre, les figurants ne font pas long feu. Quelques remarques racistes ou nationalistes viennent parfois nous écorcher les yeux, mais vu avec un regard d’aujourd’hui, elles paraissent plus ridicules que démonstratives (mais ça, c’est encore plus flagrant chez Jules Verne ou dans les débuts d’Hergé).



Je me surprends à m’attacher à cette aventure, un peu tordue, justement parce qu'elle est bancale, cette maladresse est touchante, amusante, et finalement, ces personnages, ridicules dans leurs certitudes, dans leurs postures guindées, aux idées vieillottes, nous offrent un certain exotisme temporel. J’avoue que j’y ai pris un certain plaisir, justement pour son charme désuet et ce côté improvisé.

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La Reine des Eléphants

C'est un livre léger, sympathique! On suit les aventures de la jeune Emmy, une importante héritière dont les prétendants tournent autour pour sa richesse, avec Bakaloo, son éléphant aussi sagace que sa patronne, il brandit sa trompe s'il le faut pour réclamer justice. Ça devient une espèce de conte de la jungle quand le père d'Emmy se fait prisonnier auprès du rebelle Radjah Khanda-Said dans les parties nord de l'Inde, Emmy lance un défi à ses pretendants: celui qui réussira à libérer son père, l'épousera...vives les aventures dans la jungle indienne! On découvre aussi le pays des Indes sous l'occupation anglaise, la haine vengeresse qui secoue de part et d'autre, des coutumes indiennes, leur spécialité pour des empoisonnements. C'est vrai que ça fait un peu vieux, ce livre, seul avantage est que ça se lit d'un trait, puis le personnage d'Emmy est aussi attachant que son Bakaloo...
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Le Prisonnier de la planète Mars

Le rideau se lève à l'enseigne des "Armes de l’Écosse" dans une taverne.

Deux hommes, anciens amis, se retrouvent.

L'un, Ralph Pitcher, lors d'une expédition dans la jungle du sud de l'Inde a rencontré la fortune sous la forme d'une boite de laque pleine de gemmes de moindre valeur et de lingots d'or.

L'autre, Robert Darvel, après avoir connu fortune, renommée et bonheur, se trouve ruiné à plates coutures. Il a vendu ses inventions pour un morceau de pain et rompu ses fiançailles avec la fille du banquier Téramond.

Après avoir laissé sa fortune en Sibérie dans un système pour communiquer avec les éventuels habitants de la planète Mars, il ne lui reste que de quoi vivre à Londres durant un mois.

D'ici là, il faut qu'il fasse quelque découverte.

Mais le lendemain de cette soirée , provoquant l'inquiétude de Ralph Pitcher, Robert Darvel semble avoir disparu.

Contacté par le brahme Ardavena, il est parti avec lui, dans le plus grand secret jusqu'au plus profond de l'Inde mystérieuse, jusqu'au monastère de Chelambrum.

Ayant inventé un moyen de propulser une olive d'acier dans l'espace et trahi par le brahme félon, il se réveille, en pleine nuit martienne, dans une caverne qui semble s'enfoncer dans les entrailles du sol.....

Original, baroque et saugrenu, ce premier tome du cycle martien de Gustave le Rouge est suivi d'un deuxième intitulé "la guerre des vampires".

C'est un récit d'aventure, de science-fiction.

Il semble, sauf erreur de ma part, antérieur de quatre ans au premier tome du cycle martien d'Edgar Rice Burroughs, "les conquérants de Mars" à qui il fait immanquablement penser.

En 1908, Gustave le Rouge fait donc preuve d'une belle et surprenante originalité.

Le meilleur de son oeuvre, qui se trouve sûrement dans ses romans d'aventure et de science-fiction souvent teintée de fantastique, se lit d'un trait avec un plaisir fébrile.

Il est, avec Léon Groc, un de ses précurseurs dont on redécouvre avec beaucoup de plaisir les titres évocateurs tels que "les conquérants de la mer", "la princesse des airs", "le sous-marin Jules Verne" et bien sûr "le mystérieux docteur Cornélius".
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Le mystérieux docteur Cornélius - Intégrale, tome 3

Ce troisième tome inclut les épisode 12 à 18 et met un terme à la série. C'est le crescendo final, nos héros, sous la direction de Lord Burydan remontent petit à petit sur la trace de leurs ennemis.

12 - La croisière du Gorill-Club

Enfin de l'action, Bondonnat va s'échapper de l'ïle des pendus alors que l'expédition de Lord Burydan va y aborder pour une bataille mémorable. de l'action, du mystère et un retour à la science fiction, peut-être le meilleur épisode de la série.

13 - La fleur du sommeil

On retrouve Bondonnat, coincé sur une autre île, récit assez passionnant, avec une bonne part de mystère, mais assez loin encore du contexte de la lutte contre la Main Rouge.

14 - le buste aux yeux d'émeraude

Retour des héros au Canada, un épisode sans grand intérêt, qui se solde sur l'attentat contre William Dorgan.

15 - La dame aux scabieuses

Lord Burydan va rechercher la femme vue dans les décombres de l'attentat du pont, pendant ce temps Allenor part se cacher dans le ranch de la gitane. Malheureusement, la Main Rouge a réussi à la retrouver.

16 - La tour fiévreuse

De nouveau en Floride, Lord Burydan enquête sur les naufrages des navires de la compagnie d'Harry Dorgan. de l'action à nouveau, mais un argument assez bancal.

17 - le dément de la maison bleue

On va retrouver le vrai Joe Dorgan, le dénouement approche.

18 - Bas les masques !

Et à la fin, ce sont les gentils qui gagnent, happy end.



Après des épisodes 12 et 13 assez sympathiques, les suivants raccourcissent, on a l'impression que Gustave le Rouge a hâte d'en finir et ça se ressent à la lecture.

Ces épisodes sont un peu plus passionnants que ceux du tome 2, il y a de l'action, enfin, mais c'est souvent peu crédible et en ne centrant pas véritablement son intrigue sur un personnage particulier, aucun ne prend l'ascendant, et tous restent assez superficiels. 18 épisodes en tout, certains n'apportent pas grand chose, comme dans les séries télé actuelles, j'ai fini par me lasser. La science-fiction a presque disparu au dépend d'un récit d'aventure, de lutte contre une organisation mafieuse. J'avoue avoir souvent trouvé le temps long. Reste le charme vieillot de ces séries centenaires.
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Cinq nouvelles extraordinaires

Gustave Le Rouge est un auteur de l’imaginaire qui mérite plus de renommée et de réédition qu’il n’en a. Connu principalement pour son diptyque Le prisonnier de la planète Mars / La guerre des vampires et plusieurs gros romans d’aventure dont Le mystérieux docteur Cornélius, il nous offre avec ces cinq nouvelles une autre facette de son talent. Moment d’introspection très fort, Spectre seul est un véritable poème en prose. Ma préférée de cet ensemble. Notre-Dame La Guillotine, par la façon dont l’auteur nous entraine, m’a fait penser aux nouvelles de Edgar Poe. Le Spectre rouge est sans contredit la moins à mon goût. Globalement bonne, sa chute m’a déçu dans sa forme plus que dans son fond. Le Navire de Jules César m’a fait penser aux histoires de mer de W.H. Hodgson ou John Flanders. La dernière, Dans le ventre d’Huitzilopochtli, est plus dans le ton des récits d’auteurs comme Abraham Merritt. Mais quid du style ? Me demanderons certains d’entre vous. Hé bien, son style est riche d’un vocabulaire recherché ( même si certains mots sont inusités de nos jours) utilisé dans des phrases bien construites qui rendent le récit des plus agréables à lire. Gustave Le Rouge est vraiment un auteur que je recommande.
Lien : http://livres.gloubik.info/s..
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La fiancée du déserteur

Il fut un temps, au XIXème siècle, où Cherbourg, port d'attache de l'Escadre du Nord, voyait se dresser, vers le ciel de l'arsenal, une forêt de matures. Les silhouettes de nombreux cuirassés, de leurs tourelles et de leurs cheminées se reflétaient sur le miroir des différents bassins.

Un peu plus loin, la statue équestre de Napoléon 1er se dressait sur son socle de granite.

Au fond de cette perspective, embrassant l'horizon, la ligne grise de la digue barrait la mer sur une longueur de plus d'une lieue.

Les cabarets étaient remplis de matelots, les rues regorgeaient d'uniformes.

Gustave Le Rouge a choisi le cadre de cette cité marine, toute militaire, pour y planter le décor de son intrigue, une sorte de récit d'aventure teinté d'espionnage.

Au petit matin, deux hommes sortent du Cercle Officier sur le quai Coligny.

Ils ont joué gros.

Le capitaine de frégate de Kérity a gagné près de trente mille francs.

Servières, en civil, a perdu cinq mille francs qu'il doit à son ami.

Se séparant sur les quais de l'avant-port du bassin du Commerce, ils ne se doutent pas que le destin va entremêler et tisser les fils dont ils vont être les marionnettes.

Le capitaine de Kérity, flânant dans bars du port, flirte avec Marie-Ange, sans savoir qu'elle est la fiancée d'Yvonnig Le Gall, matelot lorientais embarqué sous ses ordres sur le cuirassé "La Dévastation".

Une altercation s'en suit qui, ayant pour témoin inopportun l'amiral Dutonnoir, mènera l'infortuné Le Gall vers la forteresse et le conseil de guerre.

Servières, qui aime en secret Jacqueline, la fille de l'amiral, se rend pourtant à un rendez-vous galant mystérieux. Il est suivi par un grand diable maigre....

L'enjeu de ce ballet est un portefeuille de plans.

Servières a inventé un sous-marin de conception nouvelle et révolutionnaire.

L'amiral Dutonnoir lui a proposé de financer la construction d'un prototype....

Gustave Le Rouge fait une description minutieuse et évocatrice du port de Cherbourg et du petit village de Landemer, près d'Urville-Nacqueville, qui connut une certaine notoriété lorsque l'Infante d'Espagne, Boris Vian, Claude Monet, Édith Piaf ou Françoise Sagan y avaient leurs habitudes.

Le récit est classique mais assez prenant. Il éveille la curiosité et l'intérêt.

Gustave Le Rouge est valognais. Il est né, en 1867, au n° 7 de cette même rue de Poterie où mes grands-parents avaient leur petite maison.

Ayant fait son lycée à Cherbourg, entre 1881 et 1886, il rend compte, en 1900, de sa plume talentueuse du tableau qu'il avait pu observer dans ce port militaire.

La lecture vaut pour l'intrigue, bien sûr.

Mais elle vaut, bien plus encore, pour le décor, les personnages et l'évocation de l'époque.

Cet ouvrage est une curiosité en même temps qu'une peinture très réussie de la garnison de Cherbourg lorsque, autrefois, une flottille de cuirassés assurait sa puissance et sa prospérité.



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