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Critiques de Jérôme Ferrari (751)
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Le sermon sur la chute de Rome

" Une vie vivable est une vie qui espère, capable de ,se traduire comme autre vie avec et par les autres" Constatation de Frédéric Boyer après une douloureuse dépression. Et lorsque le monde s'écroule, ne restent que des heures vides de sens.

Ce problème de la quête de sens et du délitement des mondes est un sujet souvent exploité par les auteurs.

Le discret Jérôme Ferrari nous livre dans "Le sermon de la chute de Rome" un magistral constat de ces hommes aux illusions perdues.

En 1919 le père de Marcel Antonetti revient dans son village natal en Corse. De santé fragile Marcel rêve enfant de voyages dans les colonies et son goût pour l'ailleurs va se concrétiser en 1940 en devenant élève-officier de l'artillerie. Mais ses espoirs s'évanouissent vu sa santé précaire.

La seconde guerre mondiale se termine et Marcel ne s'est pas aperçu que l'empire colonial s'est désagrégé.

Il ne lui reste que sa famille, son ulcère cancéreux dans son île de Beauté.

Son fils Jacques connaitra les ténèbres avant lui .

Ne reste que Matthieu, le petit-fils qu'il n'aime pas vraiment.

Matthieu quitte la Corse pour poursuivre des études de philosophie à La Sorbonne mais lui aussi ne trouve pas sa place aux milieu des inutiles ( constat de Matthieu je précise). Sa vie le traverse sans que ce paumé trouve un sens à son existence . Il traîne un délitement de sa personne même s'il coopère avec son ami Libero en tenant le bar de son village corse.

La prospérité jaillira mais aussi la tragédie dont il devient le témoin.



Ferrari s'appuie donc sur le sermon de St Augustin à Hippone pour philosopher sur ce monde terrestre où l'homme bâtisseur voit sa création s'effondrer, notre monde n'étant pas celui éternel de Dieu.

Avec intelligence, Ferrari brosse une saga familiale où l'absurde touche ses membres. Il n'est pas sans rappeler Meursault de L'étranger ou Sisyphe et son rocher.

Si Matthieu et Marcel ont renoncé , faut-il nous aussi laisser nos rêves, nos convictions et nos engagements s'enfuirent?

Si on ne veut pas rejoindre les désenchantements des héros, il faut se débattre et garder notre libre-arbitre.

Un beau roman sur l'anti-héros et son échec



Surtout je conseille de lire ce roman quand le moral est au beau fixe.



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À son image

Antonia a tout photographié. Toutes les banalités de l'existence mais aussi toute l'horreur. L'iniquité désastreuse d'une guerre qui oppose des peuples, déchire un pays, trucide, sans état d'âme, femmes, enfants, frères et soeurs. Tous les discours et fausses promesses politiques. Et puis les mouvements séparatistes, populaires, populistes, populeux avec cagoules, castagnes, coups de gueule, de coeur, de rage, de silence, sans oublier les coups bas de toutes sortes.

Elle a toujours regardé la vie à travers son viseur, elle ne s'est jamais trouvée.

S'est-elle perdue pour autant ? Dieu seul le sait… Et encore, même cela n'est pas sûr. Antonia a beaucoup mais mal aimé la vie. Elle n'a pas plus aimé la mort, celle des autres qu'elle fixait sur la pellicule, que la sienne qu'elle n'a pas vu venir sur cette route droite qu'elle a quitté.

Elle a raté le retour vers un chez elle où elle était attendue sans même vraiment le savoir. La dérision de la vie l'a projetée dans un ravin, un gouffre, sans même une trace de freinage. Elle qui pourtant avait voulu plus d'une fois marquer un temps d'arrêt, un ralentissement, un changement de cap…

Dans la tête, c'est si facilement concevable. Mais le passage à l'acte… relève d'un autre monde.

Aujourd'hui, les siens sont tous là. Las aussi de cette vie qui n'en finit pas de mourir. de ce rêve plus d'un fois conçu mais toujours avorté. Sa mère cherchera dans ses affaires une photo de sa fille, une photo à mettre sur la tombe pour que ses traits restent à jamais gravés dans les mémoires. Que jamais ils ne soient recouverts de la chape d'un oubli qui meurtri, estompe, efface et supprime. Antonia était photographe. Mais pas une seule photo d'elle n'existe. Aucune pellicule à son image.

A moins que son image ne soit toutes celles qu'elle a sorti des bains révélateurs… et surtout, peut-être, toutes celles qu'elle n'a jamais développées, n'ayant aucune certitude quant au message qu'elles diraient sur l'Homme, le Monde et le Passé qui tant a maltraité le Présent.

L'artifice de Jérôme Ferrari, en termes d'écriture, consiste à inviter le lecteur à suivre ce rite religieux en cheminant dans les pensées profondément humaines de son parrain, prêtre, qui cherche l'équilibre entre l'homme d'Eglise qu'il se doit d'être et l'humain désemparé qui veut garder les bras grands ouvert pour cette filleule qui s'est tant cherchée.

« A son image » est un hymne à l'humilité des représentations que l'Homme peut se faire d'un Monde où il arrive à vivre sans se trouver. Il est aussi la mise en valeur du point d'interrogation qui devrait accompagner tout énoncé de foi, toute croyance qui doit se fonder sur le doute, la recherche, l'affirmation réservée de nos bribes de compréhension et le silence profond du mystère qui permet la résonance de la vie.

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À son image

Une idée originale : le temps d’une messe d’enterrement pour voir défiler la vie d’Antonia.

Le prêtre est son oncle et parrain qui l’a toujours soutenue.

A chaque étape de la messe, une nouvelle vision du monde, un nouveau côté de la vie d’Antonia, selon les émotions et les souvenirs de chacun.

Passionnée de photographie depuis l’enfance, elle fait des photos de mariage, trouve un job local qui ne la satisfait pas, décide de partir seule en Yougoslavie pour faire des photos de guerre. De retour en Corse, elle meurt dans un accident de voiture.

De nombreux sujets développés dans ce roman.

L’impact des photos dans la vie quotidienne, l’impact des photos de guerre sur le public. Utile ? Pas utile ?

La naissance des reportages de guerre.

Le combat des indépendantistes corses.

La guerre des Balkans

La religion.

Le rôle des femmes, particulièrement en Corse.

………

C’est superbement bien écrit, peu ponctué, pas aéré. De longues, très longues phrases où l’on s’égare parfois.

Les événements sont désordonnés selon qui pense à Antonia.

Un roman qui se lit lentement et incite à la réflexion.

De plus, la photo de couverture est très belle.

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À son image

Comment Ferrari s'y prend-il pour condenser en ce mince volume de 220 pages toute l'histoire du XX°s, la question corse, les désarrois d'un prêtre et la vie d'une photographe ? Non seulement il parvient à cette densité narrative, mais il sait mener son lecteur dans une aventure spirituelle de lecture qui peut mettre le moral et l'imagination à rude épreuve.





En effet, le roman aborde la question de la photographie, qui a déjà inspiré quelques beaux livres (par exemple "L'image Fantôme" d'Hervé Guibert). Or la photographie, plus que tout autre art, pose des problèmes éthiques et politiques, surtout la photographie de presse, d'actualité. L'héroïne est tourmentée par la présence du Mal dans l'histoire, et par l'obscénité de ses représentations photographiques. La Yougoslavie et la Corse lui font comprendre qu'un chasseur d'images n'est pas que le spectateur, mais une partie prenante des guerres qu'il photographie, comme n'importe quel soldat, et que le Mal nous séduit tous par la jouissance qu'il nous procure.





Ces tourments très concrets sont réfractés dans la conscience de son oncle et parrain, prêtre dont la fonction et la vocation, pas plus que celles d'un photographe, ne dispensent de la responsabilité historique. Le souvenir inattendu de Bernanos est bienvenu ici, mais la tragédie que subit ce prêtre n'est pas la même que dans "Le journal d'un curé de campagne". Cette dimension religieuse est une grande qualité de ce livre : esthétiquement, elle ouvre tout sur une perspective céleste, elle donne au livre une profondeur et une densité culturelles qu'on percevait déjà dans l'augustinien "Sermon sur la chute de Rome". Notre contemporaine "laïcité" n'est souvent que l'autre nom de l'ignorance volontaire et satisfaite des choses de l'esprit : l'ouvrage de Jérôme Ferrari, qui a emprunté son titre à la Bible, tente de remédier à ce "complexe de Homais".





Le Dieu de ce livre, qu'il existe ou non pour l'auteur (et il existe au moins dans le récit puisqu'il y joue un rôle actif, celui du Créateur du visage humain, dans le titre), est le Dieu des plus tragiques penseurs jansénistes, augustiniens, peut-être (sans le savoir) manichéens. Mais quelque chose a changé : le roman est bâti sur la Messe des Morts (la vraie, conservée dans les polyphonies corses, non la messe d'aujourd'hui, dit l'auteur) ; les titres de chapitres sont des citations du Rituel, fondé sur l'Ecriture, qui parle d'espérance et de miséricorde. Cela suffit, à soi seul, à modifier l'image du Dieu cruel que l'on rencontrait dans les romans précédents. Il n'est plus seulement à l'origine du Mal, il est le créateur de l'homme, ce qui implique une toute autre relation avec lui que la sévérité, la vengeance et la rigueur implacables du "Sermon sur la Chute de Rome". Ce roman rappelle le grand poème d' Odysseas Elytis consacré à la guerre italo-grecque de 1941, entièrement construit sur l'Office orthodoxe du Jeudi Saint. Comme dans "Axion esti" d'Elytis, la langue et la prière de l'Eglise fécondent et transportent la littérature de Ferrari au-delà du désespoir.





Le livre s'ouvre vers le haut, vers le ciel des idées et des dieux, mais il garde un contact intense avec la réalité matérielle, les sensations, les objets. Et ce sens aigu du concret s'accompagne d'une certaine liberté de pensée et de parole : ainsi, la Yougoslavie n'est-elle pas le pays des méchants Serbes (dont l'auteur sait rappeler le génocide dont ils furent victimes en 1942). De même que l'auteur a osé donner une profonde dimension chrétienne à son livre, de même il a osé parler de péché, alors que "cela ne se fait pas", dans le microcosme culturel français. Et ainsi de suite ... Ferrari prend la liberté d'ignorer les figures obligées du politiquement correct et de l'auto-censure, qui dévastent actuellement la culture française autorisée.

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Le sermon sur la chute de Rome

Le livre s’ouvre sur un monde noir et désespéré, un monde de peines et de contrariétés.

De Marcel, le grand-père, à Matthieu, le petit-fils, on assiste aux difficultés de choisir sa vie, d’assumer ou pas les lignes de conduite prises.

Avec des phrases interminables, mais nullement pesantes, l’auteur dépeint une famille corse sur trois générations.

Une écriture puissante et belle au service d’un roman fort et original

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Où j'ai laissé mon âme

Il fut une génération d'hommes qui enchaîna les guerres. Seconde, Indochine, Algérie.

Alors, quand Jérôme Ferrari nous présente l'un d'eux au cours de trois jours consécutifs de l'année 1957, on se rend compte combien cet homme a eu le temps de cogiter en étant aux premières loges pour observer le comportement humain et les arrangements que chacun s'octroie avec soi-même pour rendre la frontière du mal plus floue.

Sauf que cet homme n'est pas plus dénué de contradictions qu'un autre, comme le démontre le discours plus "entier" de la seconde voix dans ce roman.

"Chaque matin il faut retrouver la honte d'être soi-même."

Et ce n'est pas de savoir si ces deux soldats combattent pour le FLN ou l'OAS qui changerait l'interprétation de ce texte, parce que le sujet est la guerre au sens général.

C'est brillant de réflexion comme seul un bon philosophe a la capacité de le partager.

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Le sermon sur la chute de Rome

Une prose enchanteresse qui déchaîne l'enthousiasme, oui, oui, je ne retiens pas mes mots. Car il est tant de lectures frisant l'indigence stylistique la plus totale, que lorsque l'on rencontre un auteur à la plume vraiment inspirée, on se laisse embarquer avec délices dans le rythme et la beauté de la phrase, même si le discours que nous dispense Jérôme Ferrari entraîne le lecteur vers les abîmes de la médiocrité humaine, la vanité et la vacuité de notre existence.



Libero et Mathieu, tous deux étudiants en philosophie, dégoûtés qu'ils sont de la prétendue supériorité de l'intelligentsia parisienne, pratiquant l'entre-soi sur les plateaux de télévision, décident de revenir aux sources, en l'occurrence leur village corse. Ce qu'ils veulent, c'est du concret. Foin des fumeuses théories philosophiques ! Et recréer un monde parfait en faisant revivre le bar du village, ça c'est du concret sur lequel il peuvent apporter leur patte en redonnant du lustre au bar et de l'animation au lieu de leur enfance.



Trop d'espoir ? d'illusions ? d'idéalisme ? de naïveté ? ou trop de simple idiotie ?

N'ont-ils pas trop espérés de la nature humaine ?

Et sont-ils eux-mêmes si différents de tous ceux auxquels ils vont se heurter ?



La famille Antonetti a traversé toutes les guerres du vingtième siècle, les deux guerres mondiales ainsi que la guerre d'Indochine et la guerre d'Algérie, en y laissant parfois la vie et le plus souvent sa jeunesse, ses illusions et la paix de son âme.



Et la vie de se déliter et de se fracasser, confrontée à l'infinie dureté, à l'implacable cruauté du monde et des civilisations, à la bêtise crasse des administrations, à la stupidité des humains ....

C'est la dure leçon que vont recevoir tous les tristes héros de cette fable où rien ne peut durer, où un monde nouveau ne peut surgir qu'après la mort d'un monde ancien, où nos fragiles existences ne valent rien "car Dieu n'a fait pour toi qu'un monde périssable" aussi périssable que l'empire romain qui paraissait inébranlable !

Toute activité humaine est inévitablement vouée à l'échec, tout comme l'indestructible Rome était destinée au saccage ! Voilà le triste constat que nous assène brillamment Jérôme Ferrari.

"Le monde est comme un homme, il naît, il grandit et il meurt" sermon 81 de Saint Augustin.

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Le sermon sur la chute de Rome

Un avis un peu, beaucoup même, à contre-courant de l'opinion générale, mais peut-on s'obliger à aimer un livre si on le trouve extrêmement surfait ? Tout lecteur est un être imparfait dont la subjectivité est patente. N'est-il pas ? Quelques réflexions en vrac, donc, sur Le sermon sur la chute de Rome.



- Beaucoup de prétention dans un livre qui prétend marier réalisme et lyrisme. Ce qui nous vaut des passages d'une trivialité extrême (on ne compte plus les "enculés" sur certaines pages) suivis de moments où le style fait dans l'emphase ampoulée (pléonasme ?)

- Une intrigue principale très légère et anodine qui oblige Ferrari à en développer d'autres (le passé du grand-père, les errances de la soeur) complétement déconnectés. Ne parlons pas de Saint-Augustin qui apparait in fine comme par enchantement. Façon de parler.

- Pas d'unité et, plus grave, pas d'humanité et une sorte de mépris de l'auteur vis-à-vis de ses personnages. Misanthropie ?

- La tragédie finale tient du mauvais mélodrame.

- Belles phrases, accents philosophiques. Certains s'écoutent parler. Jérôme Ferrari se regarde écrire.

- Une vision de notre monde pour le moins cynique. Toute entreprise humaine est vouée à l'échec ? Ce livre aussi.
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À son image

Attirée par cette sublime couverture, par le passage à la GL, la photographie que j'apprécie comme l'art en général, mais je suis restée en marge de l'histoire. Bien que j'ai apprécié découvrir la Corse même si ce n'est pas forcément la belle image de cette île si belle.

Je n'ai pas succombé aux personnages, bien que j'ai admiré l'audace d'Antonia de partir photographier au cœur de la guerre, l'image qu'il faut ou pas dévoiler, la réalité de l'horreur. Le sujet sur l'image est certes intéressant mais n'e fait pas un roman captivant pour autant.



Une demi-déception pour ce roman dont j'en espérais beaucoup plus.



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Le sermon sur la chute de Rome

Une fois de plus, un prix Goncourt me laisse dubitatif. Faut-il y voir l'acrimonie d'un auteur édité en mode alternatif parce que son travail ne retient pas l'attention des maisons d'édition prestigieuses ou le ressenti d'un humble lecteur qui a eu l'occasion de s'enthousiasmer tellement plus pour des romans jamais récompensés ? Je ne connaissais pas cet écrivain, qui certes a une très belle plume, mais elle abuse des phrases interminables à la Proust. Le sermon sur le chute de Rome ne m'aura pas emballé. J'ai trouvé l'histoire assez creuse, les ponts tendus avec Saint Augustin pas convaincants. Peut-être est-ce de la dissonance cognitive parce que j'attendais plus d'un prix Goncourt, et que mon appréciation aurait été plus positive si je l'avais lu sans le savoir !
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Le sermon sur la chute de Rome

Même la plus grosse bille en Histoire a forcément entendu parler de l'Empire romain, et il ne lui aura pas échappé la grandeur de cette appellation.

Jérôme Ferrari, en parallèle, nous parle de l'empire de chacun au travers de la famille Antonetti. Ce petit monde où l'on croise en majorité les mêmes personnes, et où des organigrammes, des règles et des convictions se sont imposés d'eux-mêmes. Ce petit monde où ceux qui cèdent à la tentation de la paresse intellectuelle n'obtiennent qu'une forme de pouvoir factice.

Chaque empire, grand ou grandiloquent, a une chute, une fin.



Comme à son habitude, les écrits de Jérôme Ferrari sont loin d'être dénués de sens.

Ça infuse, ça cogite, j'en redemande.
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Où j'ai laissé mon âme

Avec ce roman conseillé et gentiment prêté par un membre babeliote, me voilà plongée dans une histoire d'hommes, un récit de guerre, une amitié virile mais sans concessions.



Le capitaine André Degorce est un homme tourmenté.

Profondément marqué par son passé de prisonnier à Buchenwald et de combattant en Indochine, c'est avec beaucoup de difficultés et d'états d'âme qu'il remplit sa fonction de tortionnaire en Algérie.

Mal à l'aise dans son rôle, il compense en se rapprochant d'un de ses prisonniers, commandant de l'ALN et tente de se justifier.

En double narration, son compagnon d'infortune, le lieutenant Andréani, pourtant admiratif de son supérieur, en dresse un portrait lucide et implacable.



Un style très travaillé pour une réflexion riche sur le bien et le mal, sur la justification des actes de guerre, sur le sens de la mort ou de la victoire.

Tout cela dans un contexte sombre et complexe.

Un livre court mais qu'il m'a pourtant fallu du temps pour lire tant le propos est dur et lourd de sens.



Un truc de mecs, je vous dis ;-) mais un livre fort, inoubliable...
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Le sermon sur la chute de Rome

Dans un village corse, deux enfants du pays tentent de transformer le bar à la limite de la fermeture, en un monde parfait. Matthieu et Libero ont passé une partie de leurs étés ensemble et abandonnent la Sorbonne et de brillantes études de philosophie pour réaliser leur idéal, sur un coup de tête. Si la chance semble d'abord leur sourire, la réalité de la vie ne tardera pas à les rattraper, avec son lot de malheurs, et comme la chute de Rome était prévisible, celle du rêve des deux jeunes hommes sonnera à son tour.

Au Vème siècle déjà, alors que Rome est prise, Saint Augustin devait réconforter ses fidèles, désespérés de la fin de l'empire qui semblait éternel. Tous les mondes passent, Rome tombe après des siècles de domination, et le petit bar n'avait aucune raison d'échapper à la marche fatale du temps qui passe.



C'est le coeur lourd que je referme Le sermon sur la chute de Rome. Jérôme Ferrari nous invite, à travers ce court roman, à une intense réflexion sur le sens de la vie et de nos actions, face à l'effondrement inévitable des constructions des mortels. Qui sommes-nous pour espérer bâtir quoi que ce soit de durable? Bien loin des ouvrages philosophiques imbuvables, tout cela est au contraire amené à point, au fur et à mesure que l'intrigue se déroule.

L'écriture est, quand à elle, comme le dit si justement la quatrième de couverture, somptueuse ! Les longues et mélodiques phrases me rappellent celles d'Albert Cohen et de Marcel Proust, et ce style m'a véritablement charmée !

Coup de coeur !



Challenge ABC 2015/2016

Challenge Petits plaisirs 2016
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À son image



Antonia est morte. Elle avait une quarantaine d’années et alors qu’elle rentrait d’un reportage photo d’un mariage, la fatigue l’a faite tombée avec sa voiture dans le ravin.

Le roman est constitué des différentes étapes de la messe célébrée par son parrain, prêtre de son état.

Nous sommes en Corse. Chaque étape de ces funérailles religieuses va emmener le lecteur dans les tourments de la vie de Antonia, jeune femme photographe par passion, mêlée affectivement aux agitations terroristes nationalistes, frustrée de ne pas pouvoir trouver la vérité du monde à travers son appareil photo, désespérée de l’avoir trouvée en Ex-Yougoslavie lorsqu’elle décide d’aller couvrir la guerre en free-lance.

Jérôme Ferrari a une façon de philosopher qui amène le lecteur à remettre en question ses fondamentaux alors même que les éléments de la narration sont à mille lieux de ses préoccupations. En effet, quelle est la proportion de lecteurs corses ayant endossé la prêtrise sur le tard qui pourrait s’identifier au parrain d’Antonia ?

Quelle est la réalité ? Celle que l’on perçoit avec ses yeux ? Celle que l’on distingue à travers un objectif ? Quelle est la place de la foi dans cette quête, qu’elle soit religieuse ou politique ?

Très métaphorique et pourtant si proche des intimes sentiments qui nous animent, ce roman est une merveille de littérature intelligente, celle qui si bien écrite nous emmène vers la voie de la réflexion existentielle sans jamais nous faire oublier la faiblesse de notre humanité.

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Le Principe

Le sujet était prometteur puisque l'auteur, Jérôme Ferrari, prix Goncourt 2012, entreprend de retracer la vie du physicien Werner Heisenberg, l'homme qui a été l'un des précurseurs dans le domaine de la mécanique quantique et qui a obtenu le prix Nobel de Physique en 1932.

Cette évocation est faite au travers du regard d'un jeune étudiant en philosophie, étudiant qui sèche lamentablement alors qu'il est interrogé justement sur un texte de Heisenberg.

Il faut dire que la mécanique quantique est un domaine qui peut rebuter plus d'un.

Heisenberg a été le physicien qui a énoncé, en 1927, le "principe d'incertitude" selon lequel on ne peut pas connaître en même temps la vitesse et la position d'une particule.

Il a vécu en Allemagne et a travaillé avec de grands scientifiques dont le physicien danois Niels Bohr, unanimement reconnu comme le père de la physique quantique.

Un homme très brillant donc que ce M. Heisenberg, mais qui a vécu une période trouble et qui a dû rendre des comptes après la guerre.

Contrairement à d'autres scientifiques, il est resté en Allemagne pendant la période nazie. Il a dirigé le programme d'armement nucléaire.

A ce titre il révéla à Niels Bohr l'existence de la possibilité d'une arme nucléaire lors d'un entretien en 1941, entretien qui jeta un froid entre eux, Niels Bohr décidant de rejoindre le projet Manhattan peu de temps après, en vue de donner l'arme nucléaire aux Etats-Unis.

Heisenberg a-t-il bien ralenti le projet qui aurait pu donner l'arme nucléaire à l'Allemagne nazie? Il y a eu beaucoup de controverses, ce que montre bien l'auteur dans son livre.

D'autres personnalités scientifiques sont évoquées.

Le sujet était donc passionnant mais je sors de cette lecture avec une désagréable impression de confusion.

Les personnages et les situations se mêlent mais j'ai souvent du mal à voir les lignes directrices.

De même j'aurais aimé voir un peu plus d'informations sur les enjeux de ces recherches scientifiques, tant du point de vue militaire que civil.

Donc le sentiment que soit je suis passée à côté de quelque chose, soit l'auteur ne nous a peut-être pas suffisamment dirigés vers l'essentiel...

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Un dieu un animal

cela demande un peu d'entrainement

je veux dire, si vous avez l'habitude de prendre votre respiration aux points, avec Ferrari vous risquez l'asphyxie

le texte est là, en bloc, pas de retour à la ligne, pas de tiret, et de loooongues phrases.

Mais dès qu'on a pris le rythme, le bonheur de lire est là aussi, très présent.



Découvert grâce au Goncourt, cet auteur continue de me donner du plaisir ; il m'oblige à réfléchir, il me touche par l'intensité de ses personnages, il fait résonner en moi des interrogations, et bien sûr, comme exprimé au début, il améliore ma respiration ;)



Ici on parle d’un homme, à qui le narrateur s'adresse par un 'tu', et son déchirement nous fait poser la question : peut-on poser des choix de vie et rester maître de son destin?



intensité garantie dans ce court récit



ah j'oubliais … dédicace personnelle de l'auteur… un très beau cadeau de ma fille qui a rencontré souvent ce prof de philo de la ville voisine:)



4/5



is@juin14

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Le sermon sur la chute de Rome

Jérôme Ferrari écrit bien, très bien même. Il est rare à notre époque, de retrouver un auteur de ce style.

D'où, je pense, les avis mitigés sur ce livre, ce que je comprends aisément.

J'ai dû relire plusieurs fois certaines phrases dont je perdais le sens tant elles étaient longues, jusqu'à deux pages quand-même!



Le passage d'une histoire à l'autre, celle de Marcel d'une part, celle de Mathieu, son petit-fils, de l'autre, est fait intelligemment. On peut comprendre, en partie, la vie et le caractère de ce dernier grâce au vécu du grand-père. On découvre aussi la vie des autres membres de la famille.

C'est assez subtilement qu'est annoncée la chute, mais tout à fait prévisible finalement.

Malgré tout, j'ai eu du mal à comprendre vraiment la comparaison avec la chute de Rome et les récits de Saint Augustin. Ou peut-être ai-je cherché la difficulté là où il n'y en avait pas. Parce que la chute de Rome, c'est, en somme, un éternel recommencement...



A lire par les amateurs de belles lettres...

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Où j'ai laissé mon âme

Excellent roman.

Un style adapté à chaque personnage, une histoire prenante pourtant si dure (les tortures en Algérie). Une analyse psychologique qui m'a tenue en haleine. Vraiment un beau texte.

Et félicitations à l'éditeur pour la très belle couverture ! Magnifique....
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Où j'ai laissé mon âme

Cette fois, Jérôme Ferrari met sa belle plume et son talent au service de la guerre d’Algérie.

Encore un roman fort, qui traite du rôle du tortionnaire et de celui du torturé.

Le capitaine Degorce a été emprisonné à Buchenwald lors de la précédente guerre, il se retrouve bourreau lors de la guerre d’Algérie.

Perdu, le capitaine se prend d’admiration pour un de ses prisonniers. En même temps, le lieutenant Andreani, qui lui a voué longtemps un amour inconditionnel s’adresse virtuellement à lui.

Du rôle que les circonstances nous poussent à tenir. Que de questionnement à travers le comportement du capitaine Degorce !

Ce n’est pas un roman facile à lire mais il nous pousse loin dans la réflexion.

Ceci dit, les ouvrages sur la guerre m’épuisent psychologiquement.

Deux si rapprochés, j’ai besoin de légèreté maintenant.

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Un dieu un animal

Un texte en un seul bloc. D'une traite.

Comme si en 2009 (date d'édition) il y avait urgence à mettre des mots sur cette guerre d'Afghanistan, sans prendre le temps de reprendre son souffle.

Un monologue adressé à un jeune homme avide d'action et de violence pour couper court à la vie ennuyeuse dans son village natal. Jeune homme qui ne s'était pas imaginé que les prières naissant dans un cimetière puissent être si différentes de celles qui surgissent au milieu d'un charnier.

Entre diatribe sur la guerre et constat philosophique sur un genre de guerrier, le texte de M. Ferrari est, encore une fois, terriblement bien senti.
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