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Critiques de José Saramago (638)
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L'Evangile selon Jésus-Christ

Remember,

Pour la fin du monde, Gérard Palaprat, Face B, "Svasti", je vous donne le La :

"Adrien le charpentier, qui vient faire rire à tous les banquets [...],

Ils ont dit Svasti, ils ont dit paix sur tous les êtres

Ils ont dit Svasti, ils n'étaient pas de grands prophètes."

Je vous passe pas tout le disque, mais l'idée centrale est cernée....Alors oui, cette Face B, je l'ai passée en boucle (faut peut être rappeler qu'a l'époque, c'étaient des 45t, et qu'il fallait encore se lever pour changer le disque...), bref, tout ça pour dire que mon Aîné s'appelle Adrien et son Cadet, Thibault, est Charpentier....comme le début de la chanson, Face B, que je passais en boucle....dingue non !? coïncidence !?

Alors j'en viens à Saramago, L'Evangile selon Jésus-Christ, je l'assimilerai bien à la Face B des Quatre évangiles (Matthieu - Marc - Luc - Jean) ; bon OK, je n'ai lu que Marc dont ses sept pains pour quatre mille hommes, l'inventeur du MARKetting koi ! Non, les Evangiles, bien que Chloe, ma fille,( la guitariste de Svasti, face B que je n'ai pas retranscrit en entier....) m'avait gentiment offert au Noël 2015, ne m'ont absolument pas converti, d'ailleurs je n'en ferai pas allusion dans Babelio, car sujet à trop de polémiques enflammées ....Mais le José, lui a su m'intéresser à cette histoire du petit Jésus, il a pu interpréter à sa façon les signes avant coureurs d'un futur Grand Homme....

Moralité : Tous les 25 Décembre, les Chrétiens et Jésus crient : Joyeux Noël

En 1998, le monde entier clamait Saramago prix No(B)el ......Noel. Nobel. Face B .Ad Libitum.

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L'aveuglement

Saramago, ce diable de Saramago… On comprend aisément à la lecture de L'Aveuglement que cette oeuvre ait marqué celles et ceux qui l'on lue. BLAM ! la claque ! Parce que ce petit pépère, avec ses grosses lunettes et son air de ne pas y toucher, nous envoie en pleine face l'immonde, l'indicible vérité ; la puanteur ensevelie en chacun de nous et qu'on juge totalement inavouable.



Inavouable parce qu'on a honte de nous même, parce qu'on a honte de se savoir fait de cette argile-là. Argile qui vue d'ici ressemble comme deux gouttes d'eau à de la merde. Oui, le mot est cru mais il n'en existe pas d'autre pour exprimer avec autant de force tout le dégoût qu'il contient. Fange, c'est trop joli, ça rime avec ange, alors que l'autre, il ne rime qu'avec lui-même ou bien des dérivés comme " emmerde ", " démerde " et, à la rigueur certaines formes conjuguées du verbe " perdre ".



Bon, je l'avoue, ce n'est pas tout à fait un hasard si j'ai choisi ces quatre mots car ils résument à eux seuls tout ce qui attendrait une communauté frappée d'aveuglement. D'abord ils perdent, puis viennent les emmerdes, alors il faut qu'ils se démerdent et finalement, ils pataugent tous dans leur … bon, bref, je vous laisse imaginer la suite.



Ce livre est vraiment étonnant et incroyable, car avec rien ou presque, en étant pourtant complètement dans le réel, en introduisant simplement une toute petite variable, il nous plonge dans la science-fiction pure et dure : c'est implacable.



Un truc tout bête : une personne tombe aveugle subitement en pleine rue au volant de sa voiture. En soi, même si c'est peu probable, on se dit que ça pourrait arriver. L'élément narratif qui modifie tout, c'est que cette pathologie est contagieuse ; toute personne approchant de cet aveugle le devient elle aussi en quelques minutes ou quelques heures.



Si bien que ce cas isolé ne tarde pas à devenir une épidémie sans précédent. Voilà, la science-fiction s'arrête ici, ensuite, il suffit juste de laisser agir l'humain sur cette mixture pour voir ce qui arrive. (Vous qui avez des yeux, profitez-en.)



Et là, c'est l'apocalypse ! Pas besoin d'être particulièrement clairvoyant pour s'apercevoir que José Saramago a une assez piètre opinion de l'humain en général et, malheureusement, nous ne saurions totalement lui donner tort. Se recrée alors un univers concentrationnaire, se recréent alors l'enfer pestilentiel des lazarets ou les ravages imaginables des villages de cholériques, tels qu'ont pu nous les décrire Albert Camus ou Jean Giono.



Toutefois avec cette nuance supplémentaire, à savoir qu'ici, le mal ne tue pas et donc qu'il autorise toutes les sauvageries, toutes les bestialités, toujours présentes en l'humain, en chacun de nous, et que le vernis social n'a qu'assoupi, conjoncturellement assoupi. L'histoire des camps de la Seconde guerre mondiale prouve, à qui en douterait encore, qu'en situation extrême les victimes se transforment facilement entre-elles en abjects bourreaux, en bêtes immondes dénuées de toute " humanité ".



José Saramago nous rappelle avec amertume que c'est pourtant " ça ", l'humain. Eh oui, on n'ose pas y croire, on en a honte, on ne veut pas le voir, et pourtant, c'est sans doute ce qu'il y a de plus universellement " humain " dans l'humain : la bestialité de son instinct de survie.



Cette première partie du livre, au sein du centre fermé destiné à recevoir les personnes frappées de cécité tandis que le reste de la société continue à fonctionner m'a littéralement enthousiasmée. Je la trouve horrible, absolument écoeurante mais je la trouve juste, bien sentie, très crédible, en tous points exceptionnelle. En revanche, j'ai été moins séduite par le second temps du roman, hors du centre fermé.



On sent que l'auteur a cherché à atténuer un peu son propos, à rendre l'humain un peu plus fréquentable, à ne pas passer pour un pur misanthrope. Selon moi, c'est une erreur : je trouve qu'il fait perdre un peu de sa puissance au livre. Mais cela n'engage que moi, comme je l'écris souvent.



Il faut maintenant en venir au message de cette seconde partie d'ouvrage, qui me semble intéressante aussi, mais dont j'ai moins aimé le traitement. En deux mots, le fait que nous sommes aveugles en croyant voir. Nous survolons, nous croyons connaître en ne faisant qu'effleurer, tant les choses, que l'organisation sociale à laquelle nous appartenons, que les gens que nous côtoyons. Nous nous figurons les connaître en n'examinant que leur " épiderme " psychique.



Nous sommes tellement, tellement plus complexes ; le monde dans lequel nous évoluons est tellement, tellement autre chose que ce que nous croyons qu'il est après un examen rapide, trop rapide, ce à quoi nous nous arrêtons communément.



On peut très certainement y lire aussi une forme d'avertissement d'ordre plus politique. La notion floue " d'intérêt général " qui pousse les états à parquer des hommes comme des bêtes dans un centre clos dénué de tout, même de l'essentiel. Et si l'aveuglement c'était ça aussi ? Notre cécité à percevoir la tyrannie dans ce qui se donne des airs démocratiques au-dessus de tout soupçon ?



Donc, prenons le temps… Explorons, avec tous nos sens si possible… Détachons-nous de notre aveuglement, et… lisons Saramago. Mais ce n'est bien évidemment qu'un modeste avis, qui n'y voit que d'un oeil, c'est-à-dire, pas grand-chose.



N. B. : Je tiens à remercier chaleureusement André qui m'a offert et permis de découvrir ce livre. Cette critique lui est amicalement dédiée ; il se reconnaîtra.
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L'aveuglement

Jose Saramago, prix Nobel de littérature en 1998 signe ici avec l’aveuglement une fiction ahurissante car de sa plume, il fait de l’inimaginable une réalité plausible mais combien effrayante.



Un homme perd la vue à un feu rouge. C’est le début d’une pandémie où chacun perdra la vue en très peu de temps. Une seule femme sera épargnée, la femme du médecin. Car ici, nul n’est nommé. Le filou voleur de voitures, l’enfant louchon, la femme aux lunettes teintées, l’homme au bandeau noir. Saramago ne les nomme pas comme s’ils n’existaient déjà plus. C’est d’ailleurs là que se trouve le poumon de ce livre: être privé de la vue c’est être privé de la vie. Être privé de la vie, c’est être banni des règles de civilité, du respect, de savoir vivre et savoir être.



Ce premier petit groupe d’aveugles sera reclus en quarantaine dans un vieux dortoir désaffecté. Enfermés, privés de liberté, affamés et souillés. Ils devront faire face aux diverses humiliations suprêmes, la merde est partout, l’odeur devient pestilentielle. Quand arrive le second groupe de plus de deux cent personnes, les conflits s’annoncent.

Survivre est l’unique but pour ces aveugles. Si la solidarité permettait une certaine stabilité à dix, celle-ci éclate quand centuple le nombre. Car l’homme sait se montrer primaire, bestial, égoïste, tortionnaire pour assouvir sa faim. Certaines scènes ont été très éprouvantes. Quand un leader se forme et bascule dans l’ignominie. Inutile de vous faire un dessin, l’homme est d’une cruauté sans égale quand la société et ses jolies règles s’effondrent.



Ce roman d’anticipation est brillant, entraînant et addictif. Oppressant et nauséabond à souhait. Fourmillant de messages existentiels à la pelle.

L’écriture est intelligente et sait nous tenir en haleine.

On reprochera peut-être à l’auteur de ne pas s’attarder sur l’origine du fléau, sur les angoisses des uns et des autres de vivre dans le noir du jour au lendemain. Ce roman est une plongée en autarcie dans l’enfer humain. L’enfer c’est les autres disait Sartre, on nage en plein dedans.



Toute la complexité de ce roman tient à mon humble avis sur le message d’alerte et sur toute la symbolique visuelle que nous assène l’auteur. Pour voir, il faut être humain. Nous passons notre vie ensemble sans nous voir et pire, sans même nous comprendre. Sans nos yeux, territoire de l’âme, clés de la compréhension, de l’humanité, de l’ouverture, du monde, il nous est bien impossible de vivre de manière éclairée.

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L'aveuglement

“L'Aveuglement” est le roman le plus captivant qu'il m'ait été donné de lire depuis longtemps mais aussi celui que j'ai refermé avec le plus grand soulagement. Son atmosphère oppressante et nauséabonde, rien que d'y penser j'en ai la chair de poule !



Imaginez une pandémie qui, en quelques semaines, frappe de cécité la population dans son ensemble ! La dimension extraordinaire et brutale du cataclysme empêche la mise en place de la moindre organisation salvatrice et engendre un chaos absolu.

Sans eau, sans électricité, les aveugles errent en groupes disparates à la recherche de nourriture qui jour après jour se raréfie dans les magasins saccagés. Les personnes les plus vulnérables expirent dans la rue au milieu des voitures abandonnées et des déjections de toutes sortes. Les cadavres encore chauds sont la proie de chiens faméliques, de rats énormes, d'oiseaux nécrophages...

Le lecteur accompagne un groupe d'une dizaine de personnes, les toutes premières victimes du fléau mises en quarantaine, qui dans son malheur a la chance inespérée de compter en son sein une femme qui voit encore. Cette dernière par prudence feint la cécité et seul son mari, médecin ophtalmologue, est au courant de cette heureuse anomalie du destin.



Avec “L'Aveuglement”, paru en 1995, le futur Nobel José Saramago signe une fiction incroyablement réaliste dans laquelle la bestialité prend rapidement le pas sur toute humanité. Heureusement le comportement altruiste et l'intelligence de la femme du médecin atténuent quelque peu la noirceur ambiante !

L'étrangeté de cette fiction est encore accentuée par la syntaxe singulière de l'écrivain portugais chez qui la virgule est reine.



Constamment collé aux basques des protagonistes dans leurs déplacements à tâtons, le lecteur sidéré par le degré apocalyptique de l'intrigue fera jusqu'au dénouement... les yeux ronds.

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Le voyage de l'éléphant

♫Au-delà des orages

Je pars en voyage

Mon âme au vent

Le coeur éléphant

Je suis parti d'ici

Pour rencontrer la vie

Être vivant

Énormément

Sur les épaules des géants

Le coeur éléphant♫

-Frero Delavega-2015-

---♪----♫----🏔--🐘--🏔----♫----♪---



pour tout à chacun

oun portous, 1551

mai sauf pour charles quint

maximilien II

à demi-mot rapports odieux

point de larmes à mot niaque

la vie de cornac

éléphant t'astique

ganesh vs basilique

afrique ou bengale

on ne sait padoue

a mi me da igual

tout pour rien à qui loue tout

saint antoine, ami miracle

luther contre tout obstacle



road trip à la mode de quand

cornac sur les épaules d'un géant

le monde se trompe énorme et ment

lisbonne-vienne ado d'éléphant

porqué te valses advienne que pourra

un éléphant roi se trompe parfois

et danse aussi mal que vous et moi

saramago, sur les traces d'une vérité

nobel empreint d'humanité

chacun est ce pour quoi il est né

Mai en fête, c'est ça qui me plait .







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L'aveuglement

Réglez vos mirettes !

Ni vu, ni connu, imaginez qu'un bonhomme, puis deux, puis trois, puis beaucoup, les enfants, les femmes, les construits, les déconstruits, les mal construits, les reconstruits et les bien foutus, everybody en body ou en peignoir, perdent subitement la vue au volant de leur voiture, pendant une séance chez un ophtalmo ou en beurrant des tartines.

Pas vu pas pris ? Et bien si. le gouvernement tente d'enrayer l'épidémie en réquisitionnant un hospice abandonné pour enfermer les victimes et les cas contacts. Quelques aveugles de naissance égarés sont également enfermés, principe de précaution oblige. L'armée est chargée de les rationner avec ordre de tirer à vue en cas d'évasion.

Dans cette quarantaine forcée, à la solidarité initiale entre victimes va succéder le pire et le meilleur de l'humanité. Pour ne pas abandonner son mari devenu aveugle, une épouse, bon pied bon oeil, s'est laissée enfermer avec les obtus de la cornée et va tenter de sauver son mari et ses anciens patients : un enfant bigleux, une jeune fille aux lunettes teintées, un vieillard au bandeau noir, le patient 0 et un voleur de voitures en bonus.

Comme la cécité a touché aussi bien de bons samaritains que de viles crapules, la loi du plus fort s'instaure au sein de cette communauté fortiche à Colin-maillard, où s'entassent plusieurs centaines de malades. En mode survie, revenus à l'état de nature, les besoins primitifs de chacun priment peu à peu sur toute humanité. C'est oeil pour oeil. Tout le monde peut se garer sur les places pour handicapés.

Je vous conseille d'acheter cette fable immorale du prix Nobel Portugais les yeux fermés. Ce texte, paru en 1995, n'est pas seulement dérangeant et passionnant, il nous rappelle de la façon la plus crue, dans un récit qui n'épargne aucun détail, qu'il est plus important d'observer que de voir sans regarder. L'auteur tape aussi comme à son habitude sur les pouvoirs autoritaires et sur l'individualisme.

Je n'ai pas suivi cette histoire en confiance comme un aveugle suit son labrador sur un passage piéton. José Saramago m'a fait traverser une autoroute les yeux bandés derrière un caniche. Il fait du lecteur un voyeur, détaillant ce que les personnages ne peuvent plus voir, les impudeurs, la saleté, l'oubli de soi et un rapport au corps débarrassé du regard des autres. Pratique pour se balader à poil dans son jardin mais un brin humiliant quand il s'agit de fréquenter les toilettes publiques en nocturne. Cette cécité protège finalement ses personnages de l'ignominie qu'ils supportent.

Ce roman, adapté au cinéma dans un film que Julianne Moore ne parvient pas à sauver malgré son talent ( « Blindness – 2008), prend une dimension de récit post apocalyptique quand les personnages quittent leur prison et tentent à tâtons de parcourir une ville où la recherche de nourriture constitue l'unique raison de vivre.

L'auteur portugais n'a jamais été tendre avec la religion mais ce roman a une résonnance biblique avec la parabole du Christ pour les pharisiens : « Ce sont des aveugles qui guident des aveugles. Or si un aveugle guide un aveugle, ils tomberont tous les deux dans la fosse. » Source Evangiles selon Luc, Matthieu et Wikipédia qui marche aussi avec les moutons. Brueghel en a fait un tableau, forcément très gai.

Il faut croire qu'il n'y a pas que l'amour qui rend aveugle.

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L'aveuglement

Science-fiction et Prix Nobel peuvent cohabiter et même faire bon ménage : L’Aveuglement est un roman de José Saramago, prix Nobel de littérature en 1998, et seul auteur portugais à avoir eu cet honneur.



Un homme au volant de sa voiture ne redémarre pas au feu vert. Concert de Klaxons et protestations n’y feront rien : l’homme est subitement devenu aveugle! C’est inquiétant et intrigant, mais très vite on comprend que c’est le cas index d’une série interminable de cécités subites : le seul contact visuel avec une personne atteinte par ce « mal blanc » (ces aveugles-là ne sont pas plongés dans les ténèbres mais dans un vide blanc), provoque la maladie.



Rapidement les autorités réagissent et parquent les sujets atteints dans un hôpital psychiatrique désaffecté. Les conditions sont ultra-précaires et rapidement les parias sont confrontés à des obstacles de toutes sortes, et à des conditions d’hygiène épouvantables. Et une femme parmi eux s’en rend compte de manière plus aiguë que les autres puisqu’elle est la seule à ne pas être atteinte. Elle a juste feint le handicap pour accompagner son mari.



Lorsque les cas se multiplieront au dehors, l’existence des reclus, plus de trois cent dans des locaux destinés à recevoir nettement moins de pensionnaires, les conditions de survie deviendront inhumaines. Et c’est alors que se manifeste la part animale de l’homme.





Autant dire que le récit est terrifiant et l’empathie nous fait souffrir avec eux. Peu importe que l’idée de départ soit peu crédible. Les conséquences, elles, sont totalement plausibles. Et l’horreur de la dégradation physique et des souffrances charnelles est amplifiée par l’infamie des outrages psychologiques. C’est glaçant.



Le style est particulier et demande une attention soutenue : les dialogues ne sont pas séparés du récit, les phrases, juste sépares par des virgules, ce qui oblige à s’interroger sur qui dit quoi. Difficile de juger de la traduction, mais le style m’a plu parfois bizarre.



D’autres particularités rendent ce récit singulier, comme l’absence d’identité des personnages, nommés en fonction des circonstances qui les ont introduits dans le roman : la femme du médecin, le premier aveugle, le chien des larmes…



C’est un roman marquant. Merci à Gwen21 pour ce cadeau.
Lien : https://kittylamouette.blogs..
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L'aveuglement

Une épidémie de cécité très contagieuse s'abat sur les hommes qui au fur et à mesure de leur contamination sont parqués dans un asile gardé par l'armée. Là les aveugles livrés à eux-mêmes découvrent l'enfer. Au manque de nourriture et à la saleté repoussante s'ajoutent la violence de l'armée et celle d'un groupe d'aveugles qui rançonnent violentent avilissent leurs compagnons de misère.



Les assaillants comme les victimes, femmes et hommes sans noms, sont les représentants anonymes de toute la société « le monde tout entier est ici ». Et si tous ont peur et certains voient dans leur malheur une punition de Dieu, les femmes s'avèrent plus courageuses et combatives que les hommes. D'ailleurs la seule personne épargnée par la cécité est une femme qui va se battre pour les aveugles victimes. Mais la tyrannie renversée, on peut se demander si cette femme souhaite un retour à un état antérieur susceptible de lui faire perdre sa prédominance.



Un roman cauchemardesque et terriblement angoissant (surtout en ce moment), d'une dimension symbolique évidente, où il semblerait que les fragilités d’une démocratie, incapable de gérer une crise sanitaire, soient ce que José Saramago entende dénoncer.



Challenge MULTI-DÉFIS 2020
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L'Evangile selon Jésus-Christ

Le parcours de vie de Jésus de Nazareth est abondamment relaté dans les évangiles, textes-phares du Nouveau Testament.

J’ai conservé d’une lointaine catéchèse le souvenir de textes empreints d’un mélange de mystère, de magie, de mysticisme. Les évangélistes Jean, Luc, Marc et Matthieu ont rédigé ces écrits sur la foi de témoignages peu ou prou similaires et leurs ressemblances tant sur le fond que sur la forme sont patentes.



“L’Evangile selon Jésus-Christ” du Nobel portugais José Saramago, paru en 1991, permet de découvrir une interprétation différente de la vie du Fils de l’Homme.

J'en vois déjà qui rient sous cape, incrédules à l'idée qu'un communiste athée natif de la subversive région de l’Alentejo puisse avoir un quelconque avis en matière de spiritualité, puisse s'intéresser aux choses de l'au-delà, puisse s'embarquer dans Dieu sait quoi…



Saramago n’est pas le premier profane venu et son érudition impressionne. Un long repérage de cette terre de Galilée où vécurent Marie, Joseph et leurs neuf enfants lui a sans doute été nécessaire pour retranscrire avec autant de minutie l’ambiance de la bourgade de Nazareth avec sa population juive louant à longueur de journée le Seigneur pour ceci, pour cela et pour cela encore...

La région est de toute beauté , il ferait bon y vivre sinon que les légions romaines l’occupent et que les crucifiements à répétition plombent le moral des autochtones.

De la naissance de Jésus dans une grotte de Bethléem à sa mort sur la croix, Saramago explore les zones d’ombre de l’Histoire. En équilibre sur la crête des plausibilités, sans jamais se départir d’un humour subtil, il s’emploie à démystifier la vie de ce jeune homme à l'esprit sain dans un corps sain.



Le Vatican, au dogmatisme figé dans le marbre, s’est évidemment offusqué du fait que l’iconoclaste Saramago aborde avec naturel la sexualité du Christ. Pourtant la relation fusionnelle entre Marie de Magdala et Jésus est d’une sincérité émouvante, elle apporte de la crédibilité au roman et en constitue l’un des points forts.



José Saramago convie le lecteur à cheminer aux côtés d’un Jésus avançant avec circonspection vers sa destinée et ce serait péché de se priver de sa divine humanité.

En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui lira ”L’Evangile selon Jésus-Christ” goûtera ici-bas à un moment de vraie félicité !

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Les intermittences de la mort

La mort est-elle une femme ? Une femme discrète, squelettique, entourée d'un drap blanc, vivant dans une pièce glaciale aux murs blanchis à la chaux et dentelés de poussiéreuse toiles d'araignées, ayant pour seule compagnie une vieille faux rouillée et usée d'avoir trop servie ? Invisible en public mais qui se fait voir à quelques rares élus à la vue pénétrante, dont Proust. Il aurait vu, lui, une grosse femme vêtue de noir…



C'est à partir de cette image d'Épinal , que Gustave Doré a d'ailleurs superbement immortalisée sur un cheval, qu'a construit son récit l'auteur portugais José Saramago. Mais il va en faire une femme particulièrement facétieuse, capricieuse, blagueuse. Intermittente dans ses désirs et ses volontés. Presque humaine. Une femme comptable également qui tient rigoureusement son registre des morts dans d'innombrables armoires munies de grands tiroirs remplis de fiches, une femme qui aime écrire de mystérieuses lettres violettes…Vous remarquerez que l'auteur ne met pas de majuscule, aucune négligence de sa part, il s'agit bien de la mort, cette mort routinière et banale, ancestrale, qui touche quotidiennement, partout dans le monde, sans relâche, tout être vivant, et non de la Mort, plus grandiloquente, plus globale, plus grave, celle qui toucherait tous les êtres vivants en même temps. L'apocalypse.



Dans un mystérieux pays inconnu, la mort va faire grève. Pendant une année, elle va en effet s'arrêter d'oeuvrer, pour reprendre ensuite de plus belle. Et Saramago, de sa plume érudite et irrévérencieuse, caustique et savante, de mettre en valeur les conséquences en chaine de cette grève. Sachant que les pays limitrophes, eux, ne sont pas touchés par cette bénédiction - Enfin, bénédiction de prime abord -. Sachant que cette grève ne concerne que les être humains et non les animaux. Sachant enfin que si la mort s'arrête, la vieillesse, elle, ne cesse pas. Les souffrances et les maladies non plus. Imaginez un peu les conséquences…les conséquences ubuesques que cette grève va engendrer.



Entre l'affolement de l'église (sans mort, pas de résurrection, et donc plus d'église), le désespoir des pompes funèbres, l'angoisse des hôpitaux face à l'afflux de malades au seuil de la mort qui ne meurent plus, celle des foyers pour le troisième et le quatrième âge dans lesquels les sorties ne compensent plus les entrées, l'obligation pour les familles de reprendre les mourants éternels, la recherche de nouveaux profits des compagnies d'assurance qui voient l'explosion des résiliations et les calculs effrayants des caisses de sécurité sociale pour l'équilibre du système de retraite, l'auteur nous brosse un croustillant tableau de ce qui s'avérait être de prime abord un nouvel Eden. Reste la philosophie pour essayer de prendre du recul et la « maphia » aussi engagée à côté du gouvernement dans un étonnant trafic de clients terminaux, écoulant en douce les quasi-macchabées de l'autre côté de la frontière…



Au bout d'un an exactement, la mort va reprendre du service et cette fois ci elle décide d'alerter les prochains élus par voie postale aux moyens de lettres violettes qui arrivent mystérieusement à leurs destinataires pour annoncer la sombre prophétie qui a lieu à chaque fois une semaine plus tard. le temps pour eux de prendre leurs dispositions…Je vous laisse imaginer les réactions et des gens concernés, et du gouvernement qui va tenter d'approcher la mort, d'analyser son écriture, de trouver où elle se cache. En vain. Une mise en scène de la mort très originale dans cette deuxième partie du récit que j'ai trouvé cependant moins passionnante que les conséquences de la grève dans la première partie.



Fable prétexte pour développer de nombreuses réflexions sur la mort, la façon de raconter de José Saramago est très singulière. L'écriture est quelque peu alambiquée, faite de longues explications, d'absence de majuscules parfois. L'humour est corrosif et vient donner une belle touche de légèreté au ton très professoral de l'auteur. Certaines explications très détaillées et minutieuses pourraient paraitre fastidieuses mais c'est sans compter sur l'autodérision du lusitanien ; il se moque en effet de cette érudition qu'il étale avec moult détails, et se moque même de son lecteur au passage.



« Il est possible que seule une éducation soignée, phénomène de plus en plus rare, s'accompagnant du respect plus ou moins superstitieux que le mot écrit instille habituellement dans les âmes timorées, ait poussé les lecteurs, bien qu'ils ne manquent pas de raisons pour manifester explicitement des signes d'impatience mal contenue, à ne pas interrompre ce que nous avons profusément relaté et à vouloir qu'on leur dise ce que la mort avait fait depuis le soir fatal où elle avait annoncé son retour. Etant donné leur rôle important dans ces événements inouïs, il convenait d'expliquer avec force détails comment avaient réagi au changement subit et dramatique de la situation les foyers du crépuscule heureux, les hôpitaux, les compagnies d'assurance, la maphia et l'église catholique… ».





Cette singularité est très différente d'un autre géant des lettres portugaises, je veux parler d'Antonio Lobo Antunes. L'érudition et l'irrévérence de récits de l'un le dispute au flux de conscience oniriques, aux soliloques envoutants, de l'autre. La fable fantastique et philosophique versus les obsessions ancrées sur l'histoire dictatoriale et coloniale du Portugal. La rumeur dit que les deux auteurs ne s'apprécient guère…En tout cas, ces deux géants montrent à quel point la littérature portugaise est d'une incroyable richesse, d'une passionnante complexité, d'une grande variété et surtout, surtout, d'une étonnante singularité telle l'âme, sans doute, de ce pays et de ses habitants.





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L'aveuglement

Il était temps que j’écrive quelque chose à propos de ce roman alors que nous sommes en plein confinement à cause de cette pandémie du Coronavirus. Car, il s’agit bien d’une situation semblable dans ce roman où une épidémie des plus étranges se propage dans une ville pour atteindre tout le pays et se propager à travers le monde.



L’aveuglement est un roman atroce où le réalisme d’une situation imaginaire renforce cet aspect cruel de l’histoire. José Saramago conduit en maître la trame de son roman en décrivant jusqu’à où l’humanité entière peut s’abaisser et atteindre une bestialité hideuse. En effet, on suit le parcours d’un groupe de personnes, dont le nom n’est pas mentionné et qui sont mises en quarantaine après avoir été contaminées par une maladie étrange ; une cécité blanche ! Au fur et à mesure que l’épidémie se développe et que la base où étaient enfermées ces personnes reçoit d’autres malades, on assiste à une dégradation totale des principes et des mœurs. La panique et l’envie de survivre les poussent à faire des comportements inhumains. Tout cela on le voit grâce à la femme de l’un des malades ; la seule qui peut voir, par bonheur ou par malheur car elle sera témoin de toutes ces ignominies.



Ainsi, la perte de la vue entraîne la perte de ce garde-fou contre le mal. Les aveugles ne voyant plus rien se permettent tout et sachant que personne ne les voient, ils se sentent plus libres dans le manque de tout contrôle moral ou pénal. Par contre la cécité a permis aux gens de découvrir, de « voir » leur véritable nature, de sonder leur côté caché, presque diabolique. Car précisément ils étaient « des aveugles qui voient, Des aveugles qui, voyant, ne voient pas ».



Cette histoire des aveugles guidés par cette femme, comme l’image de la liberté guidant le peuple, au milieu des excréments, des cadavres et des ordures, est une horrible satire de l’infamie de l’Homme et de sa faiblesse ; son insignifiance. Cette femme réussit à les aider à survivre (surtout le groupe qu’elle guide) mais elle ne pourra pas, malgré ses efforts, à les tirer de leur bestialité. Cette histoire où les noms des personnages et des lieux sont absents prend une dimension universelle et répond parfaitement à la définition du roman selon Kundera puisqu’elle décrit mieux que n’importe quel essai la condition humaine. Chose ironique, le titre original est "Essai sur la cécité".



Le style de Saramago est assez singulier (pour ceux qui n’ont jamais eu l’occasion de lire ses romans). Les dialogues ont une forme inhabituelle puisque récit et dialogue ne sont séparés ni de tirets ni de guillemets ; seules, des majuscules nous informent du début de chaque réplique et du changement des interlocuteurs. La narration dense et compacte nous tient en suspens et l’on se voit parcourir des paragraphes qui s’étalent sur plusieurs pages et où la virgule est la reine. Mais dès qu’on s’habitue à son style particulier, on entre dans le jeu de Saramago.



Le roman est d’une profondeur remarquable, et sincèrement on ne sort pas indemne de cette lecture. Malheureusement, son adaptation cinématographique n’était pas à la hauteur de ce roman.

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Le Dieu manchot

José Saramago signe avec son Dieu Manchot un roman aussi atypique et personnel sur l'histoire de son pays que Gabriel García Márquez et son fameux Cent Ans De Solitude.

C'est une œuvre foisonnante, baroque qui réalise la jonction entre deux réalités historiques portugaises de la première moitié du XVIIIème siècle, à savoir, l'édification du monumental couvent de Mafra qui dura plus de trente-cinq années et d'un héritage, certes, plus mineur, mais un héritage tout de même : l'invention d'un aérostat par le père Bartolomeu Lourenço de Gusmão.

L'auteur prend évidemment quelques libertés avec les dates afin de faire coïncider parfaitement les deux événements, ce qui est faux puisque le ballon non dirigeable du prêtre brésilien fut inventé avant que le couvent ne sorte de terre, mais peu importe. L'objectif pour lui est d'édifier une fiction qui fasse revivre le Portugal du roi Dom João V (Jean V de Portugal), l'âge d'or, si l'on peut dire, juste avant le cataclysme du mémorable tremblement de terre de Lisbonne qui marque le déclin inexorable de l'empire portugais.

Tout ici fait référence aux traits marquants du règne de Dom João V. Tout d'abord le héros masculin, Balthazar Sept-Soleils, un soldat ayant perdu sa main gauche lors d'une des guerres qui marquent le début du règne de Jean le Magnanime. Ce personnage manchot, héros picaresque moderne, symbolise le côté masqué, l'arrière des choses, ce qui se cache derrière toute réalisation, derrière les brillants et le lustre, celui qui ne s'assoit pas à la droite de Dieu mais à gauche.

À droite, ce que l'on montre, ce que l'on professe, les grands principes, à gauche... les moyens pour y accéder... pas forcément aussi reluisants...

À droite, l'édification d'un couvent magnifique, splendide, comme rarement on en aura vu de par le monde. À gauche, les milliers de vies sacrifiées pour ce rêve mégalo, les milliers d'ouvriers mobilisés de force et arrachés à leur campagne comme aux plus belles heures de l'esclavage des pharaons d'Égypte. À gauche, les millions engloutis, les trésors gagnés à la sueur et au péril des vies, loin, très loin, tout cet or et ces diamants du Brésil. Tout ça pour ça, pour du clinquant, pour de l’esbroufe, pour se sentir vraiment catholique.

Ce livre est aussi un brûlot anti-chrétien qui dénonce toute l'hypocrisie et les abus du système religieux, ainsi que la farouche violence de l'inquisition d'alors.

Une chasse aux sorcières qui nous mène droit au quatrième personnage principal de ce livre (après Balthazar, le père Bartolomeu Lourenço et le roi), peut être le plus important, la femme extralucide Blimunda. José Saramago en fait un personnage incontournable autour duquel repose tout le surnaturel un peu comme Úrsula Iguarán était le pilier de Cent Ans De Solitude.

Blimunda représente les hérésies combattues par l'inquisition. Blimunda représente la lucidité, la fidélité, l'amour du peuple pour sa base, pour son socle c'est-à-dire pour le Portugal même.

Le couple Balthazar-Blimunda c'est l'image même du Portugal : Balthazar, représente le courage et le sacrifice de soi ; Blimunda la volonté, la fidélité à la famille et la croyance aux forces occultes.

Le roman comporte deux moments distincts. Durant la première moitié, la construction de la Passarole, la machine volante du père Bartolomeu Lourenço par ces deux marginaux de Balthazar et Blimunda occupe l'essentiel de l'espace.

Dans la seconde moitié du roman, l'édification du couvent de Mafra et ses dommages collatéraux (construction déjà présente dans la première moitié mais encore plus présente par la suite) occupent une position centrale. D'ailleurs, le titre original du roman est Memorial do Convento, titre que nous-autres francophones comprenons assez facilement.

Le père Bartolomeu Lourenço est un personnage ayant réellement existé, mais Saramago en fait un symbole ; celui de la folie du Portugal de cette époque-là, celui du temps et de l'énergie investis dans un rêve évanescent destiné à disparaître inexorablement au lieu de se soucier de ce qui fait l'âme de ce pays : son peuple. À ce titre, le prêtre et le roi souffrent du même mal ; ils ont la tête dans les nuages mais bien peu les pieds sur terre...

Je n'en dirai pas plus long sur la substance du roman où perle de partout un amour véritable de son auteur pour son pays, même s'il en brosse tous les travers sans concession et parfois avec férocité.

Je voudrais encore dire deux mots de la forme qui n'est pas non plus sans intérêt. José Saramago expérimente une forme de ponctuation intuitive non conventionnelle, notamment dans les dialogues, ainsi qu'un tas de petites astuces ou trouvailles formelles très originales et qui rendent le texte très ouvragé.

Le style baroque, en accord avec la période de l'histoire considérée, peut parfois être un peu pesant, mais dans l'ensemble, nous avons affaire à un grand virtuose du verbe, ce qui n'est pas si fréquent, et ce que je tiens à saluer.

Pour moi, voici un bon livre, un très bon livre même, que j'ai vraiment apprécié mais pas jusqu'à le faire pénétrer dans les appartements de mes chefs-d'œuvres fétiches dont je garde jalousement la clef au plus profond de mon cœur.

Mais ceci n'est bien sûr qu'un avis boiteux sur un dieu manchot, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Caïn

En ces temps vaguement bibliques, alors que les rois mages se sont déjà mis en route, parlons du dernier roman que ce grand auteur nous a livré, avant d’aller voir s’il n’avait pas mal parié, l’ami Pascal ayant fait preuve de davantage de prudence : la déférence envers un dieu —à l’heure d’éventuellement le rencontrer — n’est pas ce qu’il y a de plus cher à miser.



Comme lui, je ne vais pas m’embarrasser à mettre de majuscule au début d’un nom (pas vraiment) propre, ami imaginaire qu’une humanité toujours pas mature n’en finit plus d’invoquer, aberration que la modernité aurait dû corriger en premier, bien qu’elle en ait les moyens sans les intérêts…



La pagination Saramago, toujours surprenante, façon « Editions Cent Pages », utilise surtout ces majuscules pour marquer, dans les dialogues, les différents interlocuteurs, au lieu d’un retour à ligne.

Cette concentration du texte en bien peu d’espace n’est pas toujours évidente à suivre, et oblige le critique à en parler dans chacun de ses textes dédiés à ce canonisé au comité Nobel, comme de nous alourdir l’esprit avec la liste de ses derniers récipiendaires… (oh non…! encore…)



Au moins, on peut dire que son écriture est écologique : il concentre en moins de 200 pages une histoire qui en prendrait le triple chez une maison coutumière des textes remplis d’air ( coucou Le Tripode ).



Donc notre vieux sage portugais prend quelques risques, réinterprétant à sa sauce acido-réaliste une grande part de l’Ancien Testament, ensemble de contes de qualités littéraires inégales, auxquels on préférera Grimm, Hoffmann ou Gripari pour endormir les enfants.

On ne peut que saluer une telle entreprise : enfin un auteur qui s’attaque à la littérature jeunesse sans tenter de leur faire croire que la Terre est plate.

Mais une telle démarche n’est pas là pour ravir nos chers libraires : souvenez-vous qu’il ne leur fera pas vendre beaucoup de papier… et sans s’intéresser au sexe des anges… bien qu’il y soit question de leurs épées de feu…



Quelque peu foutraque, l’organisation de son récit n’en reste pas moins très amusante, avec comme point d’orgue les différentes conversations entre Caïn et Dieu, saisissant effet miroir, où l’évidente absurdité de ces dogmes, ainsi que la notion de Bien et de Mal, éclatent sous la pression du simple bon sens.

L’auteur ne se sert pas du dangereux relativisme, mais d’un humanisme de bon aloi, passant en revue les mythes qui fondent aux trois grands ensembles religieux monothéistes, pour mieux les ridiculiser.



« Le chemin de l’erreur au début est étroit, mais il y aura invariablement quelqu’un qui sera toujours disposé à l’élargir, disons que l’erreur, pour reprendre le dicton populaire, c’est comme manger ou se gratter, le tout est de commencer. »



Anathème et blasphème sont dans un bateau : une bien belle histoire, qui ferait passer Salman Rushdie pour un militant du Femyso.

Et pour finir de s’en convaincre, faîtes un tour du côté de la jolie critique de viou1108, elle qui n’aurait pas laissé flotter l’arche de Noé…

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Le Radeau de pierre

J’aime José Saramago et j’ai peine à quitter Le radeau de pierre.

Tandis que la péninsule Ibérique se détache de l’Europe, qu’elle dérive et menace de frapper les Açores, tout un mouvement parallèle hormis terrestre, se met en branle.

Il s’agit pour tous les habitants de quitter le littoral au plus vite pour s’enfoncer dans les terres afin de survivre au cataclysme. Et, comme plus prodigieuse encore que l’annonce imminente de la mort, des phénomènes humains se font ressentir, comme une prophétie qui se joue du destin des hommes autant que des données recueillies par les différents stratèges, les politiques, scientifiques, sismologues, tantôt affirmant, tantôt récusant les conséquences de la faille enregistrée dans l’écorce terrestre, la dérive des continents, le devenir de la péninsule Ibérique, et enfin son rattachement à l’Europe. Il s’ensuit paradoxalement, un irrémédiable rapprochement des êtres qui se soudent entre eux par tous les élans possibles que recèlent les dons d’humanité. Il n’est pas un animal qui ne trouve sa place dans cette harmonie nouvelle qui regroupe chacun des cinq, puis des six personnages, dont deux couples, du chien, de l’âne, d’un cheval puis de deux, au cours de cet exode vers les Pyrénées où chacun veut voir, pour l’avoir vu de ses propres yeux, la faille et le lieu précis de la rupture.

Au cours de cette épopée, circulent à bord d’une vieille guimbarde tirée par deux chevaux nos six personnages, dont un âne et le chien qui n’a pas son pareil pour guider et transmettre des informations de premier ordre pour la bonne marche de l’expédition ; de même, chacun agira comme une entité non négligeable pour assumer son rôle et œuvrer au plein épanouissement du groupe, quand bien même il lui faudra outrepasser ses propres règles ou tabous. Il adviendra de cette harmonie que les femmes engendreront une descendance dont l’auteur a sciemment laisser planer le doute quant aux géniteurs, afin de donner toute sa place à l’imaginaire et peut-être aussi pour veiller à intégrer d’une manière transcendantale, Pedro Orce, le personnage vieillissant, vacillant puis mourant, dans le monde de demain.

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Le voyage de l'éléphant

L'absence de ponctuation et de majuscules saute aux yeux en ouvrant ce roman de José Saramago.



Finalement on maîtrise assez rapidement les contraintes de ce nouveau rythme grâce à la prose légère, sensible et assez linéaire de l'auteur portugais.



A l'aide de son sens inimitable de la formule, il nous raconte le périple, le voyage d'un l'éléphant de Lisbonne à Vienne, nous tenant en haleine grâce à la peinture du milieu et des personnages dans une construction précise et retorse à la fois, dotée de beaucoup de compassion pour les faiblesses humaines.



Cette épopée de fond historique, insolite, classée comme un conte par l'auteur lui-même, est avant tout une fable sur la société moderne mais aussi l'opportunité de glisser des réflexions philosophiques et sociologiques de grande acuité.



José Saramago carbure parfois à l'excentricité mais jette aux quatre vents des éclats de réflexions sur l'humanité avec beaucoup d'humour et d'ironie, auxquelles se joignent une implacable lucidité.



Le triste sort l'éléphant et ce qu'on en fait de lui après sa mort est poignant mais José Saramago met en exergue plutôt le chemin parcouru que la fin en soi.



Ce qui est important c'est ce que nous faisons du temps dont nous disposons.



Passionnant et résonnant toujours dans l'actualité !





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L'Evangile selon Jésus-Christ

Eh bien, voilà ! Je viens de lire ma première bible. J'en suis tellement heureuse que je doute, dès à présent d'en lire une autre plus brillante ou qui puisse me combler davantage. Je pensais dans ma jeunesse que croire ne pouvait finalement nuire à personne, soit qu'une telle démarche ne pouvait que tourner vers les autres, quelque esprit par trop individualiste, par exemple et sans dire, je suis athée, je disais à qui m'interrogeait, je crois en les hommes ; ceux de bonne volonté, de bon augure, cela va sans dire. Je me disais qu'un Dieu en valait un autre et dans un même principe, j'en restais là, m'accommodant des uns comme des autres, pourvu qu'ils ne me changeassent point et ni moi leurs adeptes. Entre ces lignes, il me suffit d'entrer comme on dit, dans la peau des personnages pour tenir ma devise et je dois dire ici, que je suis souvent le Diable, parfois Jésus, mais très rarement Dieu. Évidemment, il faut lire José pour savoir de quelle diablerie je parle, et pour autant se rendre compte que si l'un manque à sa vocation l'autre y pourvoit bien plus souvent qu'à son tour. Alors tout comme moi, ‘On' se questionne. Pourquoi Dieu manque-t-il régulièrement à sa tâche quand le monde va mal et que les hommes souffrent ? Est-ce à dire qu'il n'est pas d'homme sans Jésus tout comme il n'est pas de Dieu sans Diable… Soit, que tous comme un seul sont interchangeables, tantôt homme, dieu, diable. Il m'apparait alors et bien que ce ne soit promptement qu'une mienne apparition, qu'il en soit ainsi au quotidien, quand un homme, fut-il le meilleur à un moment donné, put être le même mais pourtant le pire ou le moins bon dans un autre temps, etc. Ce qui m'amène à penser comme un blasphème les multiples interprétations dites profanatoires sur les jugements portés sur telle ou telle de l'une des religions du monde, quand on sait que l'esprit voyage et que comme je viens de le dire il habite de multiples personnages. Censurons l'un ! nous condamnerons tous les autres, soit qu'après, aucune bible ne fut écrite…
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Caïn

Dieu, si tu existes et que par hasard tu te promènes sur Babelio ou sur les blogs de lectures, ne lis pas ce roman de Saramago, cet hérétique (d'après le Vatican), car tu t'en prends plein la gueule. Ou alors, si tu es beau joueur et intelligent (quod non, d'après l'auteur précité), lis-le et tu sauras alors que ton piédestal, bâti sur la crédulité (pardon, la croyance) millénaire d'un peuple d'âmes égarées dans le désert, n'est, pour certains mécréants, pas plus stable ou plus solide qu'un pouf rempli de granules de polystyrène. Car, Dieu Tout-Puissant, il en existe, des gens qui osent te contester, te contredire, te désacraliser et même te ridiculiser. A ce jeu-là, le « jeune » Saramago dont je te parlais, est plutôt doué. Il nous emmène en balade à travers l'Ancien Testament, sur les pas de Caïn. Caïn, tu te rappelles, c'est celui que tu as condamné à une errance éternelle après qu'il ait tué son frère Abel, par dépit et jalousie, parce que tu avais préféré les offrandes de ce dernier. Et tu vois, la différence ici par rapport au canon biblique habituel, c'est que l'auteur prend parti pour Caïn, qui est pourtant le premier assassin des Ecritures. Mais voilà, ce brave Caïn est en l'occurrence posé en victime d'un Dieu mesquin et pas miséricordieux pour un sou, qui a ses petits chouchous, et tant pis pour les autres. De plus, Caïn est présenté comme un homme intelligent, qui pose un regard lucide sur les agissements irrationnels d'un Dieu qu'il se permet même de contredire. On est donc loin de la créature soumise et dévouée à son maître.

A travers ses déambulations spatio-temporelles, Caïn assiste aux épisodes de Babel, Jéricho, Sodome, du Veau d'Or, et rencontre Abraham, Job, ou Moïse. A certaines occasions, il interviendra, parfois par hasard, pour atténuer ou même contrecarrer les plans de Dieu, mais le plus souvent, il ne pourra que contempler le désastre de massacres autorisés ou voulus par celui-ci. Toujours il s'interroge et se révolte contre le comportement insensé d'un Dieu rancunier et caractériel. Et quand arrivera le Déluge, Caïn décidera que « L'histoire est terminée, il n'y aura rien d'autre à raconter ».



Je n'avais jamais rien lu de Saramago, et voilà que je le découvre avec son dernier roman, publié alors qu'il avait 87 ans.

Passé l'obstacle d'une écriture qui défie la ponctuation et se joue des majuscules, on est embarqué dans une relecture iconoclaste de l'Ancien Testament dans laquelle, entre l'humour sarcastique et des scènes carrément désopilantes, sont posées des questions vertigineuses : pourquoi l'homme a-t-il créé Dieu, qui lui-même a créé l'homme à son image ? Pour justifier sa propre méchanceté, ou pour inventer un bouc émissaire pour la racheter ? Si l'homme est mauvais, est-il à l'image de Dieu ? Et si Dieu est bon, pourquoi l'homme est-il mauvais ? Et pourquoi agit-il alors parfois en son nom ? Est-ce parce que Dieu est mauvais que certains ne croient pas en lui ? Etc...

Contrairement à ce que disait Caïn à la fin du roman, je ne pense pas que « l'histoire est terminée »...
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L'Evangile selon Jésus-Christ

Me voilà arrivée au bout de ce long chemin de souffrances et de moments de totale jubilation.

Et voilà que je me découvre en train de penser et de m’exprimer d’une manière qui ne m’est pas commune !

C’est que je sors d’un livre difficile, dérangeant, captivant, mené de main de maître, cela va sans dire, par José Saramago.



Par quoi commencer ?

Par ma difficulté. Ma difficulté à entrer dans cette prose sans espace pour respirer, uniquement composée de virgules, sans aucun tiret marquant les dialogues, sans aucun paragraphe.

Difficulté aussi à comprendre où l’auteur voulait en venir, et donc surprise totale devant cette réécriture de l’histoire de Jésus, oui, mais mêlant subtilement humour grinçant, légèreté, iconoclasme, psychologie profonde.



Par quoi continuer ?

Par mon plaisir profond à suivre cette famille dont tout le monde parle depuis la nuit des temps, dont ma famille m’a parlé depuis mon enfance. Ce Joseph, taciturne et – comme tous les hommes de cette époque – méfiant à l’égard des femmes, même de la sienne. Cette Marie, discrète mais têtue. Ce Jésus, adolescent rebelle et tourmenté, puis homme amoureux d’une femme et aimant les gens.



Plaisir mêlé de trouble, aussi, de découvrir la face cachée des choses, à la manière de Saramago : un Joseph hanté par sa culpabilité – celle de n’avoir pas pu prévenir à temps le village de Bethléem du massacre des tout-petits – et mis à mort comme le sera son fils : crucifié, mais par erreur.

Un Jésus hanté lui aussi par la culpabilité de son père, et ne sachant comment se débarrasser de ce remords pourrissant.

Un Diable au demeurant bien sympathique ! Bien plus sympathique que ce Dieu présenté comme cruel, vindicatif, orgueilleux. D’ailleurs, je ne résiste pas à vous recopier ce passage ô combien essentiel mais tellement irrévérencieux, au moment où Dieu envoie Jésus en mission et où il révèle ses pensées cachées :

« Tu t’es fabriqué là un joli destin, après 4000 ans de travail et de soucis que les sacrifices sur les autels, pour abondants et variés qu’ils soient, ne compenseront jamais, tu continues à être le dieu d’un tout petit peuple qui vit dans une partie minuscule du monde que tu as créé avec tout ce qui s’y trouve, alors dis-moi, mon fils, si je peux me tenir pour satisfait (...) Tu peux m’aider à étendre mon influence, à faire en sorte que je sois le dieu de beaucoup plus de gens. »

Bref, le ton est donné, et je comprends très bien pourquoi l’Eglise catholique a crié à l’assassin à la sortie de roman ! Mais moi, je me suis esclaffée, et j’ai réfléchi, aussi, très sérieusement, à cette religion catholique faite de « renoncement, clôture, souffrance, mort, guerres et carnages » (ces pages bouleversantes sont le summum !).



Plaisir enfin à suivre les méandres de la pensée du narrateur, qui n’hésite pas à interpeller le lecteur en comparant les choses anciennes à notre propre modernité, et toujours avec beaucoup d’humour.



Finalement, je ressors de cet évangile dévastateur toute pleine de cahots, secouée par le rire et l’interrogation, bénéfiques et libérateurs.



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Le voyage de l'éléphant

Quel charme ! que l'écriture de José Saramago. Ça m'a fait rire et beaucoup plu (ce qui eût sans doute été fatal chez un autre) ce pied de nez au style conventionnel ; le manquement des majuscules points et autres artifices qui, en cours de lecture, ne permet aucune digression de la concentration du lecteur et accentue au contraire le mode « attention soutenue » lors de la découverte. Ce ne fut pas pour moi un effort considérable tant j'aime la prose de cet auteur, duquel j'ai bu le récit et cheminé avec ravissement, au côté du pachyderme et de son meneur, le cornac. Fut-il roman, conte ou épopée historique, c'est surtout le renouveau du bonheur à chaque fois que je lis cet auteur. Il y a là une fraîcheur et un naturel qui n'entravent en rien le sérieux de la narration et le processus d'élaboration pour brosser le portrait de Salomon, de l'Archiduc et de tout un chacun de ces personnages qui s'aventurent à diligenter la caravane de Lisbonne jusqu'à Vienne.
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L'aveuglement

Mon histoire avec Saramago est plutôt particulière. Elle a commencé il y a presque 15 ans, en même temps que mon attirance pour les prix Nobels. C'est sans doute le premier auteur récompensé par le prix que j'ai lu parce qu'il l'avait été. Après m'être rendu compte que trois de mes auteurs préférés (Camus, Faulkner et Garcia Marquez) étaient tous trois lauréats, j'ai commencé à regarder plus attentivement la liste complète. Et, ayant trouvé un livre de Saramago dans ma bibliothèque, j'ai donc commencé la découverte par Histoire du siège de Lisbonne, loin d'être un des plus connus de l'auteur. J'ai continué par L'année de la mort de Ricardo Reis, Cain... là encore des livres plus confidentiels de l'auteur. Et ce n'est que plus récemment que j'ai lu L'autre comme moi (après avoir vu l'adaptation ciné Enemy de Denis Villeneuve), déjà plus connu. La route me mène donc tout droit à L'aveuglement, sans doute le best-seller de l'auteur, en tout cas le plus lu sur ce site.



Comme pour la grande majorité de ses livres, Saramago commence par une idée simple mais forte. Ici c'est "Et si tout le monde devenait aveugle". A partir de là, il développe son style propre, fait de longs paragraphes à la ponctuation frustre, surtout composée de virgules. Les dialogues s'entremêlent, une petite musique s'installe. Les phrases trop bien construites sont le plus souvent ironiques mais on n'est pas à l'abri au détour d'une page de voir débouler la poésie, l'émotion, le sublime.



En partant de cette première idée simple, l'auteur semble vouloir en explorer toutes les implications, et il nous plonge avec lui dans les méandres de cette obscure clarté subie par ses protagonistes. On plonge ici surtout dans l'horreur de la situation, on descend à chaque chapitre d'un étage supplémentaire alors qu'on croyait être descendu au plus bas. Les conséquences les plus "quotidiennes" de cette cécité globale progressive sont explorées jusqu'à l'écoeurement. le questionnement est politique au premier abord, avec la gestion de la crise, mais dérive vite vers le religieux, le sociologique, l'existentiel pour venir questionner en profondeur notre humanité et ce qui en fait l'essence. On ne peut à certains moments que faire certains parallèles avec la crise sanitaire actuelle et sa gestion (et on en vient à se dire qu'on a quand même évité le pire !) et on se dit qu'une épidémie qui handicape les gens d'un sens est sans doute plus terrible que celle qui les tue... surtout si la contamination devient aussi rapidement globale.



A la fin de l'ouvrage, je me dis que Saramago reste lui-même, dans ses plus grands succès comme dans les livres plus confidentiels. Ce qui a sans doute fait le succès de celui-ci est l'effet plus "choc" de la grande idée de base, qui ne peut qu'interpeller tout lecteur, d'où qu'il soit dans le monde. Et c'est sans doute ce qui a aussi contribué à sa Nobélisation, survenue seulement 3 ans après la parution du roman.
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