Le 22/12/2017
La région d`Equatoria est au coeur du récit. Qu`est-ce qui vous intéressait dans cette province aujourd`hui disparue ?
À vrai dire, la région existe encore aujourd`hui au Sud Soudan. Il y a deux aspects très intéressants. Le premier lié au passé, car la région a connu la guerre des mahdistes qui comporte quelques similitudes avec le jihad actuel. L`autre est que, en ce moment, il y a une guerre civile oubliée dans la région.
Il est souvent question de quêtes à la fois physiques et métaphysiques dans les albums de Corto Maltese. Il est ici lancé à la poursuite d`un "miroir magique". Corto n`est pourtant pas devenu un chasseur de trésors. Que recherche-t-il exactement ?
Je crois que la plupart des lecteurs de Corto savent qu`il est plus intéressé par la quête, c`est à dire par l`aventure en elle-même, que par le trésor. Et quand l`objet est entouré d`une belle légende comme celle du Prête Jean, l`aventure n`est pas seulement géographique mais nous apporte également un voyage intellectuel.
À bien des égards, plus que Corto, ce sont des femmes qui mènent la barque dans cette aventure. On trouve la journaliste Aida, l`exploratrice Ferida mais aussi l`esclave affranchie Afra. Qu`est-ce qui vous intéressait dans ces différents personnages féminins ?
Tout d`abord montrer que l`aventure dépasse toutes les questions de genre. Ces femmes, sauf Afra, sont toutes plus ou moins basées sur des personnages réels, qui ont eu des vies passionnantes. On a essayé de développer des personnages féminins qui auraient mérité d`avoir des histoires dédiées à elles seules.
On croise également plusieurs personnages historiques, comme le jeune politicien Winston Churchill ou encore l`écrivain Henry de Monfreid. Pourquoi avoir décidé de faire croiser leur route avec celle de l`aventurier maltais ?
Dans les récits classiques de Corto, il est très habituel de croiser des personnages historiques. J`ai toujours adoré ce jeu entre la fiction et l`histoire même de la vie de Hugo Pratt, qui nous a montré à quel point la frontière entre la réalité et le rêve est floue.
L`aventure se déroule en 1911, soit peu de temps avant La Ballade de la mer salée, l`album dans lequel il apparaît pour la première fois. Pourquoi avoir choisi cette période ?
On a cherché les créneaux vides dans la biographie de Corto pour rester dans la cohérence de l`univers de la série. De plus, cette époque avant la Grande Guerre reste fascinante car représente la fin d`un monde romantique, celle des explorateurs, et l`aube du monde contemporain tel qu`on le connaît.
Il s`agit de votre deuxième album consacré à Corto : comment avez-vous abordé cette nouvelle plongée dans l`univers créé par Hugo Pratt ? Comptez-vous poursuivre l`aventure ?
Avec Rubén Pellejero, on se dit très souvent que, plutôt que travailler sur une série, nous sommes tous les deux partis à la rencontre d`un vieil ami. Corto Maltese fait partie de notre vie depuis des années, bien avant que cette merveilleuse aventure commence. Et oui, je suis en train d`écrire le prochain volet, donc l`aventure continue. Nous sommes des mecs chanceux !
Quel est le livre qui vous a donné envie d`écrire ?
Je ne sais pas. Je ne me rappelle pas d`un livre concret. Mais quoi qu`il en soit, je suis sûr qu`il s`agissait plutôt d`un album de BD que d`un roman. C`est grâce à la BD que je suis tombé amoureux du métier de raconteur d`histoires.
Quel est l`auteur qui vous a donné envie d`arrêter d`écrire (par ses qualités exceptionnelles...) ?
John Steinbeck.
Quelle est votre première grande découverte littéraire ?
Henry Miller.
Quel est le livre que vous avez relu le plus souvent ?
Au coeur des ténèbres, de Joseph Conrad.
Quel est le livre que vous avez honte de ne pas avoir lu ?
L`Odyssée d`Homère.
Quelle est la perle méconnue que vous souhaiteriez faire découvrir à nos lecteurs ?
L`amant de la grande ourse, de Sergiusz Piasecki.
Quel est le classique de la littérature dont vous trouvez la réputation surfaite ? Ah
Ah, non. Je n`oserais pas... Même si j`ai du mal à lire certains auteurs, je crois que la plupart du temps c`est de ma faute, pas celle de l` auteur.
Avez-vous une citation fétiche issue de la littérature ?
La voilà : « J`habite Villa Borghèse. Il n`y a pas une miette de saleté nulle part, ni une chaise déplacée. Nous y sommes tout seuls, et nous sommes morts ». Ce sont les premières lignes de Tropique du Cancer, d`Henry Miller.
Découvrez
Corto Maltese, tome 14 : Equatoria de
Juan Diaz Canales et
Rubén Pellejero aux éditions
Casterman :

Entretien réalisé par Pierre Krause
Dans le 151e épisode du podcast Le bulleur, on vous présente Les fidèles, album que l'on doit à Ben Gijsemans et aux éditions Dargaud. Cette semaine aussi, on revient sur lactualité de la bande dessinée et des sorties avec :
- La sortie de l'album Acting Class que nous devons à l'artiste américain Nick Drnaso et aux éditions Presque lune
- La sortie de l'album Frontier que l'on doit à Guillaume Singelin, album sorti aux éditions Rue de Sèvres sur le label 619
- La sortie de l'album Le dernier quai que l'on doit à Nicolas Delestret et aux éditions Grand angle
- La sortie de l'album Replay, mémoires d'une famille, album que l'on doit à Jordan Melchner et aux éditions Delcourt dans la collection Shampooing
- La sortie de l'album Judee Sill, album que l'on doit au scénario de Juan Díaz Canales, au dessin de Jesús Alonso Iglesias et c'est édité chez Dupuis dans la collection Aire libre
- La réédition de l'album Le déclic, album que l'on doit à Milo Manara et aux éditions Glénat
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Là dehors, se cachait le coupable de deux meurtres, au moins : celui d'une personne et celui de mes souvenirs.
Et ce salaud allait le payer.
Cette histoire m'avait laissé un goût amer. Je me sentais enveloppé dans une atmosphère viciée par la haine, la vengeance et la corruption... Désormais, j'étais condamné à ce monde-là : une jungle où le gros dévore le petit, où les hommes se comportent comme des animaux. Je m'étais engagé dans un chemin du côté le plus sombre de la vie... au milieu duquel je marche encore.
Nous sommes devant un problème : trois plaignants et seulement deux jambes à briser.
- J'ai de solides raisons de me méfier de la justice des blancs.
- Euh.. que je sache, la justice est aveugle. Elle ne distingue pas les couleurs.
- Eh bien, dans ce maudit quartier, elle voit très bien, comme un putain de prédateur."
C'est comme ça, la vie. Dès que quelque chose cesse d'être utile... TAC! ... on la transperce d'une épingle et elle devient un objet de collection.
Pas la peine d'être bien rusé pour comprendre que l'on a découvert un secret. Si l'endroit est bizarre, que l'heure est bizarre et que les protagonistes sont en train de faire quelque chose de très bizarre... alors tu peux commencer à te douter qu'il y a anguille sous roche... Mais, si à cette situation vient s’ajouter un type avec un détonateur à la main, arrête de penser... et fonce !
Sartre affirme que l'Enfer, c'est les autres. Je veux bien admettre que les autres peuvent nous rendre la vie insupportable, mais ils peuvent aussi être nos compagnons de Paradis. Pour moi, l'Enfer c'est le néant, un endroit sans mes amis, sans musique, sans paroles qui stimulent l'imagination, sans beauté qui exalte les sens…
"Ma cliente a été ravie des résultats. A tel point qu'elle a décidé de ne pas se passer de mes services. ce fut la plus heureuse époque de toute ma vie."
Comme je le dis toujours : les temps sont durs pour les gens honnêtes et professionnels.
Un jour, j'écrirai mes mémoires.
J'ai vu et vécu tant de situations incroyables, que tout le monde pensera en les lisant que c'est un ramassis de mensonges, que tant de méchanceté ne tient pas dans ce monde.
(Dans tome 2 : Arctic-nation)