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Citations de Lianke Yan (180)


Le jeune maïs poussait de plus en plus. La nuit venue, ses feuilles bruissaient très légèrement, cela ressemblait à la respiration d’un bébé profondément endormi.
Ce soir-là, l’aïeul et son chien s’étaient assis près de la plante, se reposant après une journée de labeur. A écouter sa respiration, ils sentaient leurs articulations et leurs os mollir et se détendre. La lune apparut, avec sa face féminine, suspendue au sommet de la voûte céleste, de claires étoiles autour d’elle. On aurait dit les boutons d’un vêtement de fête, cousus sur une étoffe de soie bleue, incomparablement vaste.
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Le soleil qui pénétrait par la fenêtre faisait étinceler les grains de poussières qui voletaient dans l'air en murmurant autour de moi comme autant de fantômes sortis de mon roman.
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Son homme était mort. Tué par la peur de l’avenir.
Il n’était plus, la clarté des jours s’en était brusquement allée. Pendant la pleine saison, il n’y aurait personne pour porter la bêche et manier la faucille dans les champs ; pas plus qu’à la morte de compagnon pour bavarder et se changer les idées. Si l’hiver l’eau gelait dans sa jarre et la fissurait, qu’il faille l’emmailloter de fil de fer, ce serait à elle désormais de le faire.
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Nous savons tous que le déroulement de l'histoire ne dépend pas seulement de l'histoire du personnage, il dépend aussi de son passé.
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- [...] Parle à Ding Liang et dis-lui de bien réfléchir. On doit connaître quelques jours de bonheur dans sa vie. On n'apporte rien en naissant et on emporte rien dans la tombe. Si on peut être heureux un seul jour, il faut en profiter.
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Cette année-là, la sécheresse semblait ne jamais devoir finir, le temps lui-même paraissait avoir été réduit en cendres et le charbon des jours se consumait dans nos mains. Le soleil brillait en grappes infinies au-dessus de nos têtes. Dès le matin, et jusqu’au soir, l’aïeul respirait l’odeur de ses cheveux roussis. Quelquefois, il tendait la main dans le vide. Il pouvait alors sentir l’odeur de ses ongles cramoisis. Journée de merde ! Il jurait ainsi tout le temps, quittant le village dépeuplé, foulant un abîme de silence, les yeux mi-clos, un regard jeté de biais vers le soleil, il disait, viens l’aveugle, partons. Le chien suivait, guidé par le bruit du pas alourdi par les ans, et deux ombres quittaient le village.
L’aïeul grimpait vers l’arête de la montagne, les rayons de lumière tremblaient sous ses pieds. Un faisceau oblique provenant de l’est lui fouetta soudain la face, les mains, la pointe des pieds, cinglant comme une canne de bambou. Il sentit la chaleur d’une gifle sur le visage. A la commissure des paupières, du côté exposé au soleil, la brûlure semblait dissimuler au creux des rides un chapelet d’innombrables gouttes bouillantes.

(Incipit)
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La maladie gagnait sans cesse du terrain et tenait déjà le Village des Ding à la gorge. Les lamentations retentissaient en permanence.
Les menuisiers qui fabriquaient les cercueils avaient déjà changé trois ou quatre fois de hache et de scie.
Implacable comme une nuit noire, la mort enveloppait le Village des Ding et tous les villages alentour.
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L'aïeul pensa que sur cette chaîne de montagnes dénudées, il avait fait pousser du maïs, qu'il en décortiquerait l'épi pour remplir un bol de grains, des grains aussi précieux que des perles, dont les villageois pourraient se servir comme de semences lorsqu'ils reviendraient, lorsque la sécheresse aurait cédé la place à la pluie. Alors les saisons se succéderaient, et sur cette chaîne montagneuse on verrait de nouveau une immense étendue verte, des champs et des champs de maïs à perte de vue.
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Le temps avait fraîchi, la chaleur du jour commençait à se dissiper. Au-dessus de la cabane, les étoiles et la lune récupéraient doucement leur rayonnement, à la manière d'un filet de pêche que l'on retire de l'eau, c'était une lumière pure qui s'égouttait légèrement et que l'on entendait perler, tinter faiblement.
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De très loin, quelque part dans la montagne, lui parvint, issu d’une mine, l’écho sonore et oppressant d’une déflagration, mais ensuite le silence fut complet. L’explosion avait transformé le soleil couchant en plage d’eau ensanglantée. En énorme boule d’un rouge épais qui après avoir sauté se déversait à l’extérieur du ciel. Les arbres étaient devenus garance, comme couverts de fleur d’hémoglobine. Ecarlates aussi, les chants des oiseaux, et leurs trajets pour rentrer au nid jonchés de duvet cramoisi. Un lièvre terrorisé avait jeté un oeil dans la direction de la poussière qui montait puis avec un petit cri — Ciel ! — s’était enfui entre les céréales des champs. Elles aussi effrayées, les graines des herbacées en avaient pâli dans le ventre des passereaux affamés. Les tendres feuilles et fleurs que la commotion avaient fait tomber s’étaient cachées dans les bouches des moutons et des vaches. C’est au milieu de ce silence, marqué du sceau de la panique, que Minghui s’était engagé vers le cimetière. En chemin il rencontra un air carminé, une source polluée, des papillons de nuit que la peur égarait et des fourmis malades qui crachaient une écume blanche. Sa route croisa aussi celle d’un chien abandonné, sur le point de crever la langue desséchée. p 262-263
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"Dans la profondeur du silence, on entendait le grésillement de gouttes lumineuses sur les auvents"
"L'horizon rouge du couchant se faisait de plus en plus mince et l'aïeul écoutait le froissement des rayons qui se retiraient comme un pan de soie"
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Au moment où il détournait les yeux, le souffle gonfla le haut de la chemise de nuit et, pris au dépourvu, il ne put s’empêcher d’apercevoir ses seins. Ils étaient gros, blancs, aussi ronds que s’ils avaient été tracés au compas et aussi appétissants que les petits pains cuits à la vapeur dont le colonel était si friand.
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Même nue, elle gardait la pureté et la noblesse d'un Bouddha.
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17 h 00-18 h 00

Par où commencer ? 
Commençons par là. 
C’était pendant la canicule, le jour de la fête du dragon, le six du sixième mois du calendrier lunaire, il faisait si chaud que la terre sentait craquer ses os et, sur sa peau, les poils devenus poussière. Sur les arbres racornis, les fleurs fanaient, les fruits tombaient. En suspens dans les airs, les chenilles se momifiaient. 
Sur la route, les pneus des voitures éclataient, on les voyait dévier de leur trajectoire. On ne recourait déjà presque plus aux bêtes de somme, les paysans conduisaient des tracteurs, les plus riches avaient des voitures. Lorsqu’éclatait un pneu au bord d’un champ, une camionnette déglinguée venait à la remorque. Les tracteurs exhalaient une odeur de peinture rouge. Parfois surgissait une charrette tirée par un cheval ou un bœuf. Mais en grande majorité les paysans comptaient sur leurs propres forces et portaient sur leurs épaules, avec une palanche, le blé mis en bottes. Les champs les engloutissaient tous, tel un immense serpent ; la route était bouchée, les disputes allaient bon train. On en venait parfois aux mains. Un homme mourut ainsi lors d’une rixe. Peut-être plusieurs. 
Cette nuit-là, la nuit de la fête du dragon, des hommes périrent à cause de la chaleur. Chez nous, dans notre boutique du Nouveau Monde, toutes les robes mortuaires furent vendues. Nos marchandises d’occasion, notre collection d’objets funéraires, ceux même qui, remisés dans l’armoire, étaient mités, tout fut emporté. Les couronnes de fleurs, le papier-monnaie, les figurines, chevaux, chars et autres articles de papier découpé et coloré d’or, d’argent, de jade… 
Quelques jours auparavant, en entrant dans notre boutique – cette boutique funéraire à l’enseigne du Nouveau Monde –, vous auriez été choqués de voir quelle somptueuse abondance de marchandises s’y trouvait. Mais il n’y a plus rien à présent. Le soir de la fête du dragon, notre commerce a connu son apogée. En un clin d’œil, tout a été vendu. Exactement comme lorsqu’on annonce une brutale inflation des prix et que les gens se précipitent à la banque pour retirer leurs sous. La banque a été vidée jusqu’à la moindre coupure, même obsolète. Dans la rue, les magasins ont été totalement dévalisés, il ne reste plus rien.

(Début du Livre 1)
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Tu ne peux pas te contenter de laisser le phare de la révolution éclairer ta route, tu dois fournir toi-même l’energie qui le fera briller encore plus pour qu’il éclaire la terre entière pendant mille ans.
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Révolution et travail étaient son âme et sa vie, le noyau autour duquel gravitait tout son être. La guerre de résistance anti-japonaise, la révolution agraire, le combat pour la révolution, tous ces grands moments de l’histoire avaient été depuis sa plus tendre enfance le fil directeur de sa vie et, jusqu'à l’âge de cinquante ans, alors que le soleil avait franchi le zénith et descendait vers l’ouest, ils avaient aussi été l'aune à laquelle il avait mesuré la réussite de sa vie.
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Son visage avait retrouvé la sérénité d’un bol d’eau à l’abri du vent dans une encoignure.
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Personne ne se serait attendu à ce qui allait se passer : bravant la réprobation du Village des Ding, mon oncle et Lingling décidèrent de vivre en concubinage.
Ils étaient comme l'eau et le sable quand l'eau est absorbée par le sable où elle coule. Ils s'attiraient, se cognaient et se collaient l'un à l'autre comme le pôle positif et le pôle négatif de deux aimants. Ils étaient comme les graines qui s'envolent quand le vent se lève et retombent quand il se calme pour germer et s'enraciner dans la terre jaune.
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- A quoi sert d'avoir plus d'argent qu'on n'en a besoin ?
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Si la terre tourne, alors pourquoi ne tombe-t-on pas du lit la nuit ? Pourquoi l'eau des jarres ne se renverse-t-elle pas ? Pourquoi l'eau du puits ne remonte-t-elle pas ? Et pourquoi marche-t-on la tête ver le ciel ?
D'après cet homme, c'est parce que la Terre nous aimante, mais pensez donc ! Si la Terre nous aimante, alors pourquoi arrive-t-on encore à lever les pieds pour marcher ?
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