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Critiques de Marceline Loridan-Ivens (300)
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L'amour après

Sur la couverture du livre, la photo d'une femme que l'on devine espiègle, ses cheveux roux sont en bataille, ses yeux sont pétillants. Elle perd peu à peu la vue, mais elle a toujours la même verve. Elle vient de fêter ses quatre-vingt-dix ans, elle fume de temps en temps un pétard, elle se fout de son âge. Une valise oubliée, remplie de lettres, de photos, de souvenirs, l'occasion d'évoquer les maris, les amants, les amies.



« Ces amitiés et ses amours que nous tissions sans formalités, et qui nous donnaient le sentiment même fugace de notre liberté. »



Marcelline Loridan-Ivens a été déportée à 16 ans à Auschwitz-Birkenau, à 17 ans elle sort d'un monde qui lui a retiré son nom, sa personne, son corps. Dans ce témoignage émouvant, elle évoque librement l'amour après les camps.



« Jamais, avant le camp, je ne m'étais déshabillée devant quelqu'un, jamais je n'avais vu le corps de femmes nues, ni celui de ma mère, ni celui de mes soeurs. J'ai découvert le mien en même temps que je l'ai su condamné. J'en ai fait une quantité négligeable. Secondaire. Il fallait juste qu'il tienne, qu'il soit sec et solide. J'ai tout vu de la mort, sans rien connaître de l'amour. »



L'amour est pour elle une contrée inconnue, elle est un très jeune bourgeon que la guerre a gelé sur pied. Et pour très longtemps. Faire l'amour était devenu une façon claire d'affirmer son autonomie, sa liberté. Elle vit des histoires en sachant qu'elle n'ira pas au bout. Elle fait l'amour sans rien ressentir. Elle n'a pas grand-chose à donner, et elle ne sait pas le donner, elle n'aime pas qu'on la touche, elle n'aime pas se déshabiller.



« J'avais un comportement décousu sans doute, mais sans en avoir conscience. Je me cherchais dans les regards et je ne voulais pas y voir mon âme perdue. Qu'est-ce qu'une âme perdue ? C'en est une qui tâtonne dans la nuit, sur les routes du souvenir. Il faut agir follement pour ne pas la laisser voir. »



La fin des années 50, les nuits de Saint-Germain des prés, à traîner au café et à discuter jusqu'au lever du soleil. Un besoin immense de communiquer avec ses semblables, le besoin aussi qu'on la remarque, qu'on l'entoure, qu'on l'accepte. Elle sera de tous les combats des femmes, la révolution sexuelle, le féminisme.



« Il n'y eut, après les camps, plus aucun donneur d'ordres dans ma vie. »



Elle nous parle de ses deux tentatives de suicide, de Simone Weil sa compagne de détention, de leur difficulté de raconter ce qu'elles ont vécu, elles ne savent pas l'exprimer. L'évocation aussi de Joris son grand amour, avec lui tout s'est mis en place naturellement, la jeune femme et la survivante des camps ne firent enfin plus qu'une seule.



J'ai beaucoup aimé ce récit intime et puissant d'une femme en quête permanente d'amour, une femme anticonformiste tout en séduction. Tous ses souvenirs sont écrits avec une langue alerte comme elle. Parmi les nombreux livres que j'ai eu l'occasion de lire sur les camps de concentration, c'est la première fois que je vois aborder ce thème de comment se réapproprier son corps après avoir subi l'horreur des camps. Le récit bouleversant, sincère, sans aucun artifice d'une femme libre, parfois provocatrice qui se moque bien du regard des autres et qui semble d'une éternelle jeunesse.







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Et tu n'es pas revenu

Et tu n'es pas revenu est une lettre très émouvante que Marceline Loridan-Ivens écrit à son père, mort en 1945, à Auschwitz ou dans un autre camp d'évacuation pendant la marche de la mort.

C'est lettre est comme une réponse à une lettre qu'il lui avait écrit pendant qu'ils étaient tous deux à Auschwitz mais qu'elle a perdu.

Ce témoignage m'a rappelé celui de Nikos Kokantzis avec Gioconda dans la mesure où on sent parfaitement que l'auteur écrit sur le disparu alors qu'elle est au crépuscule de sa vie car elle craint une seconde mort de cet être aimé. C'est l'un des pouvoirs de la littérature de pouvoir laisser une trace, bien qu'elle ne puisse panser la blessure.

Marceline Loridan-Ivens avait 15ans lorsqu'elle a été déportée, et comme dans le témoignage d'Elie Wiesel, on sent quelqu'un qui a été détruit et ne vit pas mais survit à la vie avec des fantômes et des sentiments destructeurs qui ne l'ont jamais quittés.

Comme beaucoup de lecteur, j'ai découvert Marceline Loridan-Ivens dans l'émission La Grande Librairie. Et comme beaucoup, j'ai été choquée par les propos qu'elle a tenu sur "les racailles", mais sans vouloir décrédibiliser ses propos, il faut sans doute n'y voir que l'expression d'un sentiment de révolte et d'injustice (parfois mal placé) qui existe chez certains juifs de sa génération face aux musulmans qui ont fait des choix d'intégration différents. En ce qui me concerne, je me garderai de tout jugement à l'emporte pièce - "il faut oublier maintenant" ou "normal c'est pas juste". La littérature permet de se confronter à des visions, des vies différentes des nôtres mais ne nous donne pas le droit de juger pour autant - me semble-t-il. Et c'est de l’œuvre que l'on parle, œuvre qui une fois entre les mains des lecteurs fait passer l'auteur à l'arrière-plan lorsqu'il ne l'efface pas totalement.



L'originalité de ce témoignage c'est qu'il parle de la destruction des liens familiaux et de la mort de certains sentiments chez cette rescapée. Finalement, cette lettre est peut-être la preuve qu'il reste bel et bien des sentiments à cette femme, mais les sentiments étant liés à cette figure paternelle, elle ne s'est autorisé à les vivre et à les exprimer que dans ces quelques pages écrites sans recherche de style ou d'effet, mais avec une grande sincérité - et un brin de désespoir. Peut-être faut-il y voir aussi le testament d'une vieille dame qui s'est jeté à corps perdu dans des "grandes causes" (la liberté des peuples surtout) pour retrouver une pulsion de vie et n'y croit plus maintenant. Son histoire nous fait dire qu'en fait, la vie (et tout ce en quoi l'on croit) elle-même n'est rien de plus qu'une grande

illusion.... et il y a des retours à la réalité qui sont indéniablement plus douloureux que d'autres.
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Et tu n'es pas revenu

Marceline Loridan-Ivens nous apporte, dans "Et tu n'es pas revenu", son témoignage sur les camps de concentration de la seconde guerre mondiale. Mais à l'inverse d'autres récits sur cette sombre période l'auteure nous parle de l'absence. Celle de son père, déporté à ses côtés, qui n'est pas revenu. C'est fort, bouleversant, d'une peine à la limite du supportable et bien que Marceline Loridan-Ivens nous livre par moments son combat pour la survie, jour après jour, dans le camp d'Auschwitz-Birkenau, c'est le retour sans ce père si présent qui est le plus touchant.

"Et tu n'es pas revenu" est un livre nécessaire, afin de lutter contre l'oubli.
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Et tu n'es pas revenu

Femme d'exception, Marceline Loridan-Ivens née Rozenberg nous livre ici un récit de toute beauté d'une intense et profonde émotion.

"Il fallait que la mémoire se brise, sans cela je n'aurais pas pu vivre."



C'est une éblouissante et violente leçon de vie que ce livre dans lequel elle s'adresse à son père.



Marceline a 15 ans lorsqu'elle est arrêtée avec son père par la Gestapo. Ils sont alors déportés à Auschwitz-Birkenau.



Elle fera partie des survivants de la Shoah, ceux qui sont revenus des camps, contrairement à son père.



"Nous étions des miracles."



Les quelques mots que son père lui confie à Drancy "Toi tu reviendras peut être parce que tu es jeune, moi je ne reviendrai pas", résonneront comme une prophétie qui planera toute sa vie.



Une attente, qu'elle sait vaine au fond d'elle-même, une absence immense, "Et toi, de quel côté es-tu ? De celui des morts ou de celui des survivants ?"



Shloïme et sa chère petite fille qui l'aimait plus que tout, c'était pour elle le bonheur d'être avec son père... Mais c'était dans ces wagons sur la route de la mort.



Un père chéri et vénéré qui la guidera toute sa vie durant.



"J'ai vécu puisque tu voulais que je vive".

"En te parlant, je ne me console pas.

Je détends juste ce qui m'enserre le cœur".



Malgré le traumatisme inguérissable des camps de la mort, Marceline vécut en toute liberté et indépendance.

Quelle femme admirable.



"S'ils savaient tous autant qu'ils sont, la permanence du camp en nous. Nous l'avons tous dans la tête et ce jusqu'à la mort."



Une lecture poignante, tragiquement superbe qui m'a bouleversée.



Mes respects Madame, vous qui nous avez quittés à l'âge de 90 ans en 2018.



Difficile et délicat d'écrire une critique sur un tel livre...

Que mon humble chronique puisse convaincre les lecteurs de découvrir ce récit-témoignage sublime, intelligent.
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Et tu n'es pas revenu

J’ai découvert Marceline Loridan-Ivens lorsqu’elle a été reçue à la Grande Librairie. Elle est décédée depuis, le 18 septembre 2018, à l’âge de quatre-vingt-dix ans. J’avais été grandement touchée et impressionnée par cette femme à la chevelure flamboyante, directe, politisée, mais blessée, bien évidemment, faisant partie de cette dernière génération de déporté(e)s. Et tu n’es pas revenu est un essai biographique où elle témoigne de son arrestation, avec son père, qui lui a dit: « Toi tu reviendras peut-être parce que tu es jeune, moi je ne reviendrai pas. » (p. 11) Elle y parle de son expérience des camps de concentration, de son retour à la vie, et de sa reconstruction sans son père. Un témoignage unique et essentiel.
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Et tu n'es pas revenu

Au travers ce petit livre ,Marceline Loridan-Ivens nous offre un émouvant et bouleversant témoignage de l'amour qu'elle portait à son père, tous deux déportés à Auschwitz /Birkenau ,elle en revint,lui pas.

Et toutes ces années, elle n'oublie pas malgré une vie bien remplie ,la vieillesse arrivant,elle se doit d'écrire ce récit ::" T'écrire m'a fait du bien" .Un témoignage plein de tendresse ,de sensibilité une façon aussi de dire :on pardonne mais on n'oublie pas .

On n'oublie pas,si parfois les mots n'étaient pas assez forts il me suffisait du regard perdu au loin de mon père, pour y voir toute cette souffrance qu'il avait enduré. (Il fut déporté en 44 à Auschwitz /Birkenau et après à Buchenwald /Dora Il en revint ,hélas, son frère Maurice déporté à Auschwitz n'en revint pas .)

À RECOMMANDER CHALEUREUSEMENT.🌟🌟🌟🌟🌟
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Et tu n'es pas revenu

Ce livre est un court récit mais si poignant , d'une rare intensité , tout est décrit ..;que dire de plus ...nous avons le portrait de l'horreur des camps de concentration , de l'antisémitisme ..la cruauté de la guerre et ses conséquences indéniables.

Marceline à 86 ans, juive, et est une des rares survivantes d'Auschwitz.

Elle avait 15 ans lorsqu'elle fut déportée en Avril 1944 dans le même convoi que Simone Veil.

Cette dame écrit une lettre à son père qui n'a pas pu échappé aux bourreaux nazis ...et qui n'est pas revenu.

C'est un témoignage Gigantesque , qui ne me laissé indifférent et qui fait partie de notre histoire à tous ....

La question que je me pose comment cette jeune femme de 15 ans a t elle pu se construire aussi bien sur le plan psychologique que physique après toutes les humiliations vécues et les conditions de détentions inhumaines.

Elle décrit l'atrocité au plus haut niveau.

Si sur le plan psychologique , on aura pu constaté qu'elle était forte en confrontant la mort tous les jours chez les enfants et les plus âgés.

L'image de soi n'a jamais été positive puisqu'elle n'a jamais voulu avoir d'enfants , elle ne veut pas subir ce qu'elle a vu ,a dégradation du corps, le changement de morphologie , l'angoisse de mort .Les corps qu'elle a vu se transformer ... pour se réduire à néant.

Tout sa vie , elle pensera à un seul homme son père .D'ailleurs elle passera un moment de sa vie avec une personne du même âge que son père.



Ce qui m'a frappé à la fin du récit .est que cette jeune vielle dame comme on pourrait la décrire n'est pas restée dans le passé, elle a bien souligné , la résurgence d'actes antisémites ces derniers temps .



Je vous conseils à tous de lire ce livre ..qui est un recueil de données historiques que tout un chacun doit connaitre;
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Et tu n'es pas revenu

Déportée à Auschwitz-Birkenau avec son père, Marceline Rozenberg en est revenue seule. C’est à son père mort qu’elle s’adresse, ce père adoré : "Je t’aimais tellement que j’étais heureuse d’être déportée avec toi."

Au camp elle a eu le miraculeux bonheur de le serrer dans ses bras quelques secondes, et de recevoir un message de lui, quelques lignes sur un fragment de papier sale. C’est à ce message qu’elle répond 70 ans après, dans ces cent pages dont chacune vous tord le ventre.

Il y a le camp, et puis il y a l’après : elle raconte le retour, auprès d’une mère qui voudrait qu’elle oublie tout. Il y a l’incompréhension des autres, les personnes qui n’ont pas vécu la déportation et ne peuvent partager ces souvenirs lancinants, ces souvenirs avec lesquels il faudra vivre sans jamais, jamais s’en détacher. Elle ressasse l’interrogation qui la ronge, quand, comment, où son père est-il mort ? Elle évoque son amie Simone Veil, qui toute sa vie a volé les petites cuillères dans les cafés "pour ne pas avoir à laper la mauvaise soupe de Birkenau".

"Résilience", "refaire sa vie", des mots qui n’ont aucun sens pour Marceline Loridan-Ivens, et dont elle nous fait saisir l'inanité.
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L'amour après

Je referme ce roman en étant émue. Comme à chaque fois que j'ai lu les témoignages de Marceline Loridan-Ivens. Ce petit bout de femme, aujourd'hui âgée de 89 ans, dégage une telle force et une telle détermination!!!

Après avoir témoigné sur son expérience terrifiante de la déportation dans "La vie balagan" et les conditions de survie dans le camp de Birkenau dans "Et tu n'es pas revenu", Marceline se penche sur son vécu de l'amour. En découvrant une valise remplie de lettres aussi bien d'amis ou d'amoureux, c'est tout un passé sentimental et sensuel qui lui revient en mémoire.

Tout d'abord, il lui a fallu mettre à distance sa vision du corps. Comment lui découvrir un éventuel attrait après avoir vu à l'adolescence tant de corps dénudés abîmés par la vie et la maltraitance nazie? Comment supporter le regard, les mains d'un homme séduisant quand notre chair paraît repoussante à notre esprit?

Il aura fallu du temps et de la patience pour que Marceline puisse enfin accepter son corps comme objet de désir.

Une magnifique leçon de vie; un témoignage jamais impudique et pourtant sur un sujet qui pouvait paraître inabordable.
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Et tu n'es pas revenu

Un petit livre de 100 pages mais tout y est, la seconde guerre mondiale, la déportation, les émotions, l'hymne au père époustouflant et le regard d'une survivante aujourd'hui âgée de 83 ans, un regard en arrière, un questionnement intelligent. Une merveille à ne pas manquer.
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Et tu n'es pas revenu

Une petite centaine de page pour dire l’horreur des camps de concentration, le deuil d’un père jamais effectué. Dans la lettre qu’elle lui adresse, Marceline Loridan-Ivens dit avec rage et désespoir les traces indélébiles laissés sur son corps et dans son esprit. Elle décrit avec simplicité et une terrible précision les étapes qui ont mené des millions de juifs dans les fours crématoires. Le récit est aussi implacable que les actes effroyables. Sa concision est à l’image du fossé qui la sépare de sa famille à son retour des camps, immense et insurmontable. Comment dire l’indicible, comme continuer à vivre après ce qui n’était pas la vie ? Confier son chagrin aux morts, exprimer sa douleur à celui qui ne reviendra pas reste alors la seule voie possible pour Marceline. Récit poignant, digne et indispensable.
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Et tu n'es pas revenu

« Maintenant que la vie se termine, tu penses qu’on a bien fait de revenir des camps ? »

« Je crois que non, on n’aurait pas dû revenir. »

Terribles phrases qui concluent cette bouleversante lettre d’une fille à son père. Partis ensemble vers les camps de la mort, elle reviendra seule. Dans « Et tu n’es pas revenu » Marceline Loridan-Ivens nous livre ce témoignage sur l’horreur des camps mais aussi sur cette culpabilité d’être revenue vivante, sur cette impossibilité d'une vie après.

Un texte fort, douloureux et extrêmement émouvant. Un livre à lire de toute urgence en cette période de montée de l’antisémitisme.
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Et tu n'es pas revenu

Marcelline Loridan-Ivens rescapée d'Auschwitz-Birkenau, écrit à son père qui, lui n'y a pas survécu.

Une lettre pour lui raconter quel fut son parcours pendant ces mois d’horreur, la façon dont elle a survécu, le retour à la maison et l’après : ou plutôt, l’impossibilité de l’après, un constat d’impuissance à se réinsérer dans une société étrangère à ce qu’elle a vécu.

Car ce qui m’a particulièrement frappée, c’est la solitude infinie de ces survivants qui se retrouvèrent confrontés à l’incrédulité, l’incapacité totale d’imaginer la déshumanisation absolue des camps nazis, l’inadéquation des questions au retour quand la mère de Marcelline lui demande « à voix basse si j'avais été violée. Étais-je encore pure ? Bonne à marier ? C'était ça sa question », et sans doute aussi un certain sentiment de culpabilité de n’avoir pas cherché à savoir…

Et ce constat déchirant « qu'il y eût mieux valu pour la famille que ça soit toi plutôt que moi. Ils avaient besoin d'un mari, d'un père plus que d'une sœur »… Tout est dit.

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Et tu n'es pas revenu

Marceline Loridan-Ivens est née avec le nom de Rosenberg.

Ce mot signifie Rose de montagne ou une montagne de roses. Mais qu'importe.

Il y en a eu des Roses sacrifiées dans ces montagnes d'horreurs.

Encore un témoignage me direz-vous.

Oui, un de plus, et ce n'est pas fini. Tant que l'on est vivant, on se doit, comme devoir moral avant tout, de lire ces témoignages. Justement pour ne pas oublier, justement pour que "plus jamais ça".

C'est une lettre adressée à son père, le "tu" est donc de rigueur.

C'est bouleversant l'amour que se portent le père et la fille.

J'ai appris un nouveau mot en allemand "stücke" qui signifie "morceaux".

C'est ainsi que les nazis les appelaient, même pas des bêtes, même pas de nom, juste un numéro tatoué sur l'avant-bras, et puis des tas de morceaux, même pas de corps, non, juste des morceaux. Il était ainsi plus aisé de les exterminer sans mauvaise conscience car, finalement, qu'est-ce que des morceaux, des choses dont on veut à tout prix se débarrasser, des ordures.

Déshumanisation systématique, négation de l'humanité ont été les deux mamelles de cet antisémitisme forcené qui est, de nos jours, hélas, rencontré de plus en plus souvent dans le monde entier.

Et puis le retour, le fameux retour au bercail, accueil froid, réactions de rejet, agressivité,

Incompréhension totale. Donc, on garde tout "ça" pour soi, on ne sait jamais ça pourrait être contagieux le malheur et le désespoir.



Et non, il n'est jamais revenu.



Ps à noter l'excellent dossier inédit d'Annette Wieviorka à la fin de l'ouvrage, très bien expliqué, très pédagogique, qui résume si je puis dire cette période si sombre de l'histoire.

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Et tu n'es pas revenu

Temoignage emouvant sur la deportation,sur la separation des familles,sur la vie de misere qu'est la vie de camps de concentration,sur les douleurs psychologiques.

C'est aussi un boulversant temoignage sur le retour a la vie,le retour en famille,l'incomprehension et le non vouloir savoir ce qu'etait le quotidien dans le camps.

Le malheur,la souffrance ne s'arretent pas au moment de l'evacuation du camps;ils continuent jusqu'à la fin de la vie,sans cesse present a la memoire

Tres bel ouvrage tout en emotion

A lire
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Et tu n'es pas revenu

Je découvre ce titre grâce à mon amie NicolaK, je le lis à mon rythme car c'est une lecture très difficile.



Marceline Loridan-Ivens nous offre un témoignage bouleversant en collaboration avec Judith Perrignon.



C'est son histoire à Marceline, elle écrit une longue lettre à son père qui n'est pas revenu du camp. Elle possède une écriture très puissante, on l'accompagne et elle sait très bien maintenir notre attention.



« Je revois ce mot que tu m'as fait passer là-bas, un bout de papier pas net, déchiré sur un côté, plutôt rectangulaire. Je vois ton écriture penchée du côté droit, et

quatre ou cinq phrases je ne me rappelle pas. Je suis sûre d'une ligne, la première « Ma chère petite fille » de la dernière aussi, ta signature, « Shloïme ». Entre les deux, je ne sais plus ».



C'est un sujet très douloureux, c'est un petit livre, il est très bien construit et on se situe très bien. On constate que la thématique est très bien gardée. On se laisse happer, les émotions nous saisissent et on ressent très bien la douleur qui est toujours très vive.



« Mais nous aurions été deux à savoir. Nous n'en aurions peut-être pas parlé souvent, mais les relents, les images, les odeurs et la violence des émotions nous auraient traversés comme des ondes, même en silence, et nous aurions pu diviser le souvenir par deux ».



Je conseille à mon tour de lire « et tu n'es pas revenu » et j'invite à aller voir le beau billet de ma lectrice. C'est au lecteur de découvrir car ce n'est pas toujours évident pour moi d'en dire davantage. C'est une lecture qui marque mais qui est nécessaire.



Je remercie mes ami(e)s pour le partage autour de la lecture.





Siabelle

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Et tu n'es pas revenu

Elle nous a quittés il y quelques semaines. Elles était une frêle femme, frêle mais seulement en apparence par la taille, la minceur, mais oh combien forte par le caractère, par la force d'âme! Et oh combien belle ! Elle a connu Simone Veil, son amie des camps, arrivée par le même convoi... quelques chiffres seulement, tatoués sur les bras, les séparaient.

Cela fait bien longtemps que je voulais découvrir ce livre; "Un de plus sur les camps", diront certains, d'autres diront "il faut tourner la page, passer à autre chose". Son décès récent m'en a donné l'occasion, et également la chance ou le hasard de le trouver disponible dans ma médiathèque.

Oui! il est nécessaire, au moment où l'antisémitisme renaît -mais est-il mort un jour?- de mettre en lumière ce titre ainsi que "L'amour après". J'ai passé quelques heures d'une nuit presque blanche avec Marceline et ses deux livres lus successivement. Une nuit dont on sort sonné par l'émotion, mais tellement heureux !

Longue lettre à ce père parti par le même convoi, et qui n'eut pas la chance d'en revenir. Il était à Auschwitz, elle à Birkenau. Elle le croisa alors que, chacun dans leur file, ils partaient au travail. Au mépris du danger et des coups il lui donna une tomate et un oignon, en se privant sans doute de son repas de la journée... Ils ne le savaient pas, c'était la dernière fois qu'ils se parlaient, derniers souvenirs partagés.

Elle nous parle rapidement et à quelques reprises de ces camps, de ce qu'on savait déjà, avec beaucoup de pudeur et de retenue, mais surtout de la vie après ces camps.

Sa vie fut à jamais bousculée par l'absence de ce papa. Il était son héros de gamine, il lui manqua à divers moments. La vie de la famille en fut à jamais perturbée, la famille éclata, sa mère se remaria, elle fut même absente du Lutetia le jour où Marceline revint des camps : "Sache que notre famille n'y a pas survécu . Elle s'est disloquée. Tu avais fait des rêves trop grands pour nous tous, nous n'avons pas été à la hauteur."

Marceline dut vivre avec cette double absence du père et de la mère. Et c'est seule qu'elle affronta la vie. Seule, pas tout à fait, car à Birkenau elle avait rencontré Simone, Simone Veil. Elles furent amies pour la vie, se soutenant, s'épaulant mutuellement dans les joies et les épreuves.

Mais toujours ce papa fut absent. Ah! si'il avait été là..Il était le pilier de la famille, lui qui avait tant investi pour ce bonheur familial, lui qui avait tant cru à la France, patrie des Droits de l'Homme et des libertés. Elle a fait sa vie sans lui, mais jamais il ne sortit de ses pensées, de son esprit. Il fut présent au moment des grandes décisions que Marceline prit, présent au moment de ses combats.

Un livre sobre, pas du tout conçu pour nous parler des camps, et si elle le fait, c'est tout en retenue, non pas pour partager cette violence, mais pour nous expliquer comment cette violence, comment ces quelques mois, ont radicalement transformé toute sa vie. Une vie qui sans doute aurait été différente si son père avait pu être physiquement à ses cotés.

Une vie au cours de laquelle Marceline dut affronter parfois l'antisémitisme, malgré son passé personnel, malgré l'Histoire qui n'a pas toujours laissé de leçon.

Un grand livre d'amour, d'amour d'une gamine, d'une femme pour son père, un grand livre d'amour de la vie.

Un grand livre !
Lien : https://mesbelleslectures.co..
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Et tu n'es pas revenu

Marcelline devenue une vieille dame écrit à son père assassiné par les nazis dans un camps d'extermination, alors qu'elle en est revenue.



Ce texte qui LUI est adressé donne une longue lettre magnifique, forte, partagée en cinq chapitres.



Tout y est : leur passé, le passé sans LUI au camps, l'après et la pseudo-liberté gagnée, le présent et la permanence du camps dans l'esprit des survivants .



Sandrine Kiberlain offre sa voix à ce texte et ça colle bien.



Entre émotion et tension, reste la terrible question que pose à la fin Marcelline à son père disparu : fallait-il revenir ?

La réponse en dernière page.


Lien : http://justelire.fr/et-tu-ne..
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Et tu n'es pas revenu

"Mais nous aurions été deux à savoir. Nous n'en aurions peut-être pas parlé souvent, mais les relents, les images, les odeurs et la violence des émotions nous auraient traversés comme des ondes, même en silence, et nous aurions pu diviser le souvenir par deux".



Ces mots, ce sont ceux que Marcelline Loridan-Ivens, née Rozenberg adresse à son père, 70 ans après leur séparation sur le quai de la gare du camp d'Auschwitz au printemps 1944. Elle avait 15 ans."Tu reviendras parce que tu es jeune, moi je ne reviendrai pas" lui avait-il dit lors de leur internement à Drancy, antichambre d'une destination dont il pressentait la terrible réalité. Cette phrase, c'est elle qui tient la jeune Marceline en vie, elle qui lui donne la force de résister à la tentation du lâcher prise qui soulage tant de victimes qui trouvent ainsi le moyen de fuir les conditions atroces de leur détention.



Dans cette lettre, Marceline Loridan-Ivens évoque bien sûr ces longs mois à Birkenau, à seulement quelques kilomètres de distance de son père enfermé à Auschwitz et dit comment cette absence est devenue une présence permanente. Il faut lire ce témoignage d'une survivante (il n'en restera plus un jour et seuls ces écrits pourront faire foi de ce que fut la barbarie nazie), dont les mots sont terriblement justes, poignants au point de faire surgir les sanglots, incontrôlables. Tout comme Si c'est un homme de Primo Levi, ce texte est incontournable.



Mais il l'est également par ce qu'il dit des soixante-dix années vécues par l'auteur après. La difficulté de l'après. La culpabilité du survivant alliée à celle d'avoir pris la place de son père dans une famille qui aurait préféré le voir revenir lui, maillon central. Un père, un mari aurait été plus utile lui semble-t-il qu'une fille ou une soeur. La volonté des gens de vite "tourner la page". Pendant toutes ces années, Marceline Loridan-Ivens a construit sa vie, s'est mariée deux fois, a fait carrière dans le cinéma et s'est engagée pour des causes qui lui tenaient à coeur. Sans que jamais cette absence/présence ne la quitte.



Force est de constater que l'histoire n'est pas finie. Le regard que l'auteure porte sur notre monde contemporain est à la fois empreint de pessimisme et de cette lucidité de ceux qui ont vécu le pire et savent encore le reconnaître. "Je ne sais pas me détacher du monde extérieur, il m'a enlevée lorsque j'avais quinze ans. C'est une mosaïque hideuse de communautés et de religions poussées à l'extrême". Jusqu'à ce terrible aveu, l'idée atroce qu'elle aurait peut-être mieux fait de ne pas revenir des camps. Même si elle garde l'espoir de changer d'avis au cours des quelques années qui lui restent à vivre.



Je le répète, ce témoignage est précieux, simplement essentiel, il faut absolument le lire. Le lire et le méditer. Vite.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Et tu n'es pas revenu

Livre marquant , cette grande dame nous a quitté il y a peu elle nous laisse un trésor avec ce livre, ce message d'une fille a son père disparu dans un camp. Entre rage de vivre, désespoir et culpabilité ce témoignage est touchant et exceptionnel .
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