Citations de Marie-Sabine Roger (2030)
"- Ça t'ennuie d'en parler ?
- Non. Seulement, j'en ai pas l'habitude.
- Raconte-moi. Tu es né comme ça ?
- Comment, comme ça ?
- Aveugle."
J'apprécie la saine exactitude, au passage. Je craignais trop l'hypocrisie des mots qui feutrent, paquets-cadeaux pour la douleur.
Non-voyants, pour les aveugles. Malentendants, pour les sourds.
Et pour les cons, c'est non-comprenants qu'on propose ?
La vie est un escroc sans scrupules : si on n'y prend pas garde, elle vous plume à vif et vous laisse repartir avec les poches vides, comme un flambeur qui sort d'un casino.
[...]A ta santé, gamin !
J'ai levé vers lui mon verre à moitié plein.
A ta santé, bonhomme.
A tous les jours passés. Au futur qui nous reste.
Au présent, parce que c'est à jamais le seul des temps qui compte.
Le seul qui fait de nous des êtres immortels.
L'ami qui part, ou l'amant, ou l'enfant, c'est toute une saison de la vie qui s'achève, et jamais plus ne reviendra. Il nous faut accepter ces puits creusés à vif dans la chair des mémoires, nous asseoir sur le bord un instant et pleurer, puis repartir et laisser derrière nous des paysages effacés à jamais et qui ne vivront plus que dans nos souvenirs.
... la médecine a beau faire des progrès tous les jours, on n'a encore rien trouvé contre la connerie. À voir le nombre de gens atteints, ça mériterait pourtant qu'on vote des crédits.
Les nouveaux jeunes cons de cette génération nous saluaient index et majeur écartés, en nous faisant le V de la victoire. On répondait de la même façon. Sans l'index, par sobriété.
On m'a intubé le bazar pour cause d'écrasement de l'urètre, ce qui fait qu'ajouté à l'oedème des baloches, on dirait que je sors d'une greffe de biniou.
La foi, entre les mains d'un homme comme toi, c'est une arme de poing. Une arme blanche. Elle fait infiniment plus de mal que de bien.
Il en faut du courage, et de la dignité, pour enluminer d'or la tristesse et les drames.
Quand les mots sont sortis comment les rattraper sitôt ouvert la cage ils se pressent au dehors chutent comme des corps tombant le long d'une façade prennent de la vitesse et à la fin s'écrasent. Parfois avant de toucher le sol le vent les soulève les porte vient les pousser sous l'aile Alors les mots s'en vont au gré des courants d'air ils s'élèvent s'éloignent on ne les entend plus ou bien ils restent là perchés sur le bord de l'oreille hirondelles posées sur le rebord d'un toit.
Ainsi va la vie, qui nous soumet trop fréquemment au bon vouloir des imbéciles.
La morveuse tapote ses mémoires, des deux index, sur Facebook. C'est sa drogue.
Je me suis ouvert un compte pour voir ce qu'il en est. Il faut être encore jeune ou crever de solitude ou d'ennui pour accepter autant d'amis dont la plupart viennent d'on ne sait où, dont on s'était passé avant d'ouvrir son compte et en compagnie desquels on ne tiendrait même pas dix minutes avant d'être lassés, en temps normal.
Etre con à ce point, c'est du talent, je trouve.
Tout seul on est que soi ce n'est pas suffisant.
On se quitte en s'aimant encore c'est dommage ça arrive plus souvent qu'on ne croit vivre ensemble c'est corrosif on y laisse sa peau son âme. L'amour est nécessaire mais il ne suffit pas. Il faut qu'il y ait en plus des paillettes Du rêve.
Je suis ce qu'on appelle une agoraphobe ou, pour certains des nombreux praticiens que j'ai pu consulter, une phobique sociale. Il semblerait qu'ils ne soient pas tous d'accord sur ce point, ni sur d'autres. La seule chose sur laquelle ils se retrouvent sans problème et avec une belle harmonie, c'est sur la question de leurs honoraires.
Il a raison. Le malheur se construit à deux.
Pour le faire durer toute une vie, c'est un travail de longue haleine.
A chaque jour il faut sa peine.
Nous formions un curieux assemblage. Une cohabitation de vieux colocataires qui font rêves à part dans un lit partagé. (P166)
J'aime bien les gens qui ont des manies, des gestes insignifiants qui en disent long sur eux. Ça ouvre des lucarnes, un peu, dans leur toiture.
Partir c’est mourir un peu, mais mourir c’est partir beaucoup.
Alphonse Allais