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Critiques de Philippe Claudel (2660)
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La petite fille de Monsieur Linh

Monsieur Linh est réfugié. Il a dû quitter son pays après que la guerre ait détruit son village et tué tous les siens.

Tous, non, car il garde précieusement contre lui sa petite fille de quelques mois.

Avec elle il supportera le voyage en bateau puis la promiscuité du foyer d'accueil.

Mais c'est son amitié avec Monsieur Bark qui lui procurera le plus de plaisir.

Sans comprendre leurs langues respectives, ces deux êtres qui ont beaucoup souffert réussiront à partager des moments très forts.



Dans une langue sobre, Claudel fait un très beau portrait de personnages simples submergés par la souffrance mais qui réussissent, par la compassion, à retrouver un peu de bonheur à vivre.



Ce roman m'a rappelé le très beau portrait de vieillard fuyant la guerre avec un enfant dans les bras dans « Terre et cendres » d'Atiq Rahimi…



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Nous sommes Charlie : 60 écrivains unis pour ..

Tout juste un mois après les terribles événements qui ont changé la France et ont insufflé un élan citoyen incroyable, Le livre de poche sort ce recueil de textes. 60 écrivains unis avec la même volonté de défendre la liberté d’expression.



L’ensemble des acteurs du livre a donné de son temps et de son argent pour que vive cette belle initiative dont les bénéfices seront reversés à Charlie Hebdo. 5 euros, ce n’est rien pour un tel recueil.



Dans un délai incroyablement court, l’éditeur a réussi à rassembler cette meute d’auteurs, regroupés sous une même bannière et brandissant leurs stylos comme arme. Leur intelligence et leur liberté de penser aussi.



60 textes forcément inégaux, certains se contentant d’une ou deux maigres lignes, d’autres de plusieurs pages. De l’analyse au cri de ralliement, du souvenir au texte très personnel… il y a de tout dans ce recueil.



L’éditeur a eu la bonne idée d’entrecouper les textes des auteurs actuels, d’extraits de Voltaire, Diderot ou encore Hugo. Pour prouver que le sujet de la liberté d’expression n’est pas neuf et qu’il faut défendre cette liberté jour après jour contre l’obscurantisme.



Sans vouloir détailler tous les textes proposés, j’ai une pensée plus particulière pour les mots de Maxime Chattam qui résonnent cruellement par rapport à son roman en cours d’écriture, pour Ian Manook et son texte si touchant, pour Frédérique Deghelt qui pense à la mère de ces terroristes, pour Dominique Fernandez et Marc Lambron qui nous font prendre conscience à quel point cet événement a touché le monde entier, pour Fabrice Humbert et Romain Puértolas avec leur belle idée de parler du sujet à travers une fiction (grave ou drôle), pour Katherine Pancol et son poème enjoué, pour BHL et son texte très juste, pour Eric-Emmanuel Schmitt et son mordant manuel du fanatique…



Quoi que vous cherchiez, et même si vous ne cherchez rien, vous en trouverez un bout dans ce livre. Une lumière contre l’obscurité qui tente de nous éteindre. Voilà ce qu’est ce recueil. Continuons à allumer de telles lumières.
Lien : https://gruznamur.wordpress...
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Le rapport de Brodeck

Que dire après une telle lecture ? Que l'on n'en ressort indéniablement pas indemne, comment le pourrait-on d'ailleurs, en sachant que de telles atrocités ont eues lieu, et il y a à peine un peu plus d'un demi-siècle de cela ?

L'histoire se déroule dans un village qui doit probablement se situer dans l'Alsace actuelle, en tout cas un village très proche de la frontière allemande et cela, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. De cela, le lecteur est sûr car il est déjà fait mention des camps de concentration puisque le protagoniste, Brodeck (personnage principal dont on ne connaît pas le prénom) y a été détenu pendant presque deux ans. Notez comme cela est étrange que l'on ne connaisse pas son prénom alors que l'on connaît celui de sa femme, Emélia, de la vieille femme qui l'a recueilli, Fédorine et de celle qu'il appelle sa fille, tout en sachant pertinemment que celle-ci ne peut pas être de lui, Poupchette. Est-ce le procédé de déshumanisation qui a été mis en place par le programme nazi consistant à priver un homme de son identité qui s'opère ici ? Peut-être...Tout comme les autres hommes du village n'en ont pas d'ailleurs. Peut-être tout simplement parce que ces dernier se sont rendu coupables d'atrocités durant cette période de guerre ?



Le rapport de Brodeck fait référence à une commande que lui a faite implicitement le maire du village ainsi que d'autres figures importantes de retranscrire le passage, dans leur village, de celui qu'il ont toujours appelé l'Anderer (L'Autre), du jour de son arrivée jusqu'à la fameuse nuit de l'Ereigniës (L’innommable, la tragédie qui devait s'ensuivre pour que le village puisse oublier -oublier les horreurs qu'ils ont accomplies afin de pouvoir continuer à -non pas vivre, mais du moins survivre).



Un roman que j'avais envie de lire depuis bien longtemps et que je suis vraiment heureuse d'avoir enfin découvert car cet ouvrage mérite vraiment d'être lu. Même si le lecteur est un peu perdu, au début du roman, dans l'espace spatio-temporel, il s'imprègne rapidement dans l’atmosphère de ce dernier. Parfois, certains mots n'ont pas besoin d'être dits pour qu'on les comprenne...A lire !

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Crépuscule

Voilà un roman que je referme le coeur gonflé et comme pris dans un barbelé rouillé.

Dans une petite bourgade nichée près de la Frontière de l'Empire, le Curé a été assassiné en pleine rue par une nuit de neige. le Capitaine et son Adjoint se chargent de l'enquête, mais ce meurtre suscite des tensions, entre les communautés chrétienne et musulmane qui vivaient jusqu'alors en paix, que semblent encourager les autorités impériales. Tout cela va mal finir.



Je sors meurtrie mais éblouie de cette lecture. Philippe Claudel y ravive l'écho douloureux du "Rapport de Brodeck". J'y ai retrouvé la même vilénie des hommes traversée d'éclairs de pureté, et l'étrange onirisme d'un lieu perdu dans un temps enfui. Dans cette ambiance de conte cauchemardesque, qui se situe au coeur d'une vieille Europe virile et brutale à l'orée du XXe siècle, l'auteur sonde les âmes. Celle, noire et puante du Capitaine, et celle, lumineuse et gracieuse de l'Adjoint ; mais toutes deux torturées, car Claudel ne se limite pas à dépeindre grossièrement ses personnages : il les nuance avec une humanité qui tord le ventre.

En outre, l'auteur instaure dès les premières pages une atmosphère pesante -on SAIT que quelque chose de terrifiant va arriver (mais quoi ? quand ? comment ?), et on craint le pire à chaque chapitre -suspense anxiogène. Encore traumatisée par le "Rapport de Brodeck" (pourtant lu il y a plusieurs années), j'appréhendais cette lecture, et elle m'a effectivement mise (très) mal à l'aise, mais j'étais également émerveillée par la beauté de l'écriture qui nimbe les paysages et certains protagonistes ; des lambeaux de poèmes aussi. Et puis, j'ai adoré les noms bizarres des personnages : Krashmir, Pakmur, Baraj, Hkanka..., et la façon de les appeler par leur fonction : le Rapporteur, le Policier, le Vicaire..., qui renforcent l'impression de fable pour grands enfants punis. Enfin, comment résister à des phrases telles que : "La vie est une si étrange aventure que pour la supporter certains d'entre nous ont besoin de se convaincre qu'elle possède un sens. Chacun fait comme il peut : agrégats d'atomes, nous nous croyons bien trop souvent physiciens alors que nous ne sommes que matière." Amen.

Cependant, malgré son extrême dureté, le récit n'est pas exempt d'humour -redoutable, certes, mais qui permet de reprendre un peu son souffle aux dépens d'un Evêque ou d'un Maire. Tout n'est pas si désespéré.



J'ai donc immensément aimé cette histoire affreuse narrée d'une manière aussi magnifique. Je l'ai trouvée parfaite à tous points de vue, un diamant aux bords ébréchés et coupants, qu'on ne peut lire sans souffrir. Je vous invite néanmoins à pénétrer à votre tour dans cet envoûtant "Crépuscule" des hommes.

Bon voyage à vous, bon courage surtout ! Vous en serez largement récompensés, je vous le promets.
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Le Café de l'Excelsior

"Nous délaissent sans prévenir les plus beaux de nos jours, et les larmes viennent après, dans les après-midi rejouées de solitude et de remords, quand nous avons atteint l'âge du regret et celui des retours"... Phrase que j'ai emprunté à l'auteur car je la trouve magnifique mais je n'ai pas voulu la mettre dans les citations car il aurait fallu que j'en dévoile un peu plus et cela, je ne le désirai pas. Si vous lisez juste cet extrait, vous allez pensez que vous voues engagez dans une lecture déprimante mais au contraire, il n'en est rien.



Orphelin très tôt, le narrateur vécut les plus belles années de son enfance avec son grand-père et son bar "L'excelsior" (ou café pour vous en référer au titre mais je trouve que le mot bar est plus approprié en raison des personnes qui le fréquentent, que des hommes). C'est un petit coin chaleureux comme on n'en trouve plus beaucoup aujourd'hui (surtout, ô comble de l'ironie, en cette période de crise sanitaire où nombre d'entre eux ne savent pas encore si ils vont pouvoir rouvrir définitivement et si leurs habitués y reviendront dans les mêmes conditions qu'auparavant). Tous les habitués se connaissent et le grand-père de notre héros les connait tous. Notre narrateur se remémore ses souvenirs dans ce troquet, qui, associé à son grand-père qui l'a recueilli suite au décès de ses parents, figurent parmi les plus beaux de son enfance. Vous me direz que pour un petit garçon de huit ans, une telle place n'est pas appropriée et pourtant, L'Excelsior fut pour notre jeune protagoniste sa "madeleine de Proust", sa raison de vivre et il est toujours éprouvant de se les remémorer une fois que nous les avons perdus...à moins que noue décidions de ne pas regretter ses "moments " mais de les garder enfouis au fond de soi, comme un trésor caché, tout en continuant à aller de l'avant.



Un court roman, extrêmement bien écrit, avec des phrases parfois un peu trop longues et chargées, ce que je regrette (ce qui explique en grande partie ma note probablement trop sévère et pas à sa juste valeur pour cet ouvrage) mais avec des souvenirs prégnants et des moments simples qui réconfortent et donne parfois le sourire à ses lecteurs ! Une lecture que je vous recommande malgré cette note mitigée !
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Le Café de l'Excelsior

« Nous vivons parmi de grands pans de lumière hachés de noirs fracas »

La période racontée par le narrateur, en tout cas, est un grand pan de lumière. Il habite chez son grand-père suite au décès de ses parents et y restera trois ans, jusqu’à ce que le service « d’aide » sociale le retire de ce cocon pour le balancer de famille d’accueil en famille d’accueil.

Mais de ça, il ne parlera pas.



Il préfère soulever ses souvenirs d’enfant bien protégé par un homme pudique mais aimant, tenant un modeste café où les habitués se déchargent de leur vie ; du facteur au conducteur de car, tous sont truculents, et il va sans dire que les femmes n’y sont pas admises. L’amitié entre hommes est exaltée, la préparation de la pêche aussi.



C’est le cœur lourd que j’ai fermé ce bien trop petit roman, immense de complicité et de tendresse bourrue, ponctué de phrases musicales, de descriptions imagées, le tout enveloppé avec sensibilité.

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La petite fille de Monsieur Linh

Quelle délicatesse ! Que d'émotion et de pureté ! En toute simplicité, Philippe Claudel nous raconte une histoire poignante, celle de monsieur Linh, qui a dû quitté son pays en guerre, son village ravagé, pour se retrouver dans une immense ville, un pays curieux à ses yeux, où l'on ne parle pas sa langue, avec sa petite fille Sang Diû. Il est seul, et complètement perdu, et va rencontrer un gros bonhomme Mr Bark. Entre les 2 hommes, une relation bienveillante va naître.

Il y a beaucoup de poésie dans ce récit sur l'exil et l'amitié.

La fin est surprenante...mais je n'en dis pas plus !
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Parfums

Ce ne sont pas des nouvelles, plutôt des textes très courts dédiés à l'odorat, aux souvenirs liés aux parfums, quels qu'ils soient : acacia, cannelle, chou, draps frais, église, maison d'enfance, pissotières, sexe féminin, torréfaction, vieillesse... Philippe Claudel nous fait voyager dans ses souvenirs les plus intimes grâce à ces petits textes élégants, ciselés, rédigés de main de maître. Ces textes sont des petits bijoux, des friandises. Cependant, j'ai un faible pour les romans de l'auteur où il s'exprime plus amplement sans être contraint par la longueur du récit. Ainsi, aucun texte de Philippe Claudel, n'a pu égaler jusqu'à présent mes lectures de "Les âmes grises" ou "Le café de l'Excelsior", question de goût, de sensibilité de lectrice... Mais Philippe Claudel reste pour moi Un Maître, un immense auteur contemporain.
Lien : http://araucaria20six.fr/
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La petite fille de Monsieur Linh

M. Linh n’a plus rien, la guerre, la mort lui a tout pris... sauf Sang Diû, sa petite fille âgée de quelques semaines, ils sont tous les deux, les deux seuls, les deux derniers !

M. Linh est à des milliers de kilomètres de son village, un village qui n’existe plus, un village où jadis il menait une vie belle et délicieuse. Son pays n’est plus qu’un morceau de souvenirs.

M. Linh est un vieil homme fatigué, réfugié dans un pays inconnu qui l’épuise et qu’il ne comprend pas. Mais grâce à sa petite fille Sang Diû, M.Linh trouve la force de continuer...

Un jour le vieil homme croise sur un banc un vieux vétéran de guerre solitaire M. Bark, un homme qui auparavant a combattu dans le pays de M. Linh, quand il était jeune et innocent...

Ils se présentent mais ne se comprennent pas, mais qu’importe, malgré cette barrière de langue, les deux hommes s’écoutent ; les regards, les gestes remplacent les mots.

Une belle histoire d’amitié est en train de naître...

Les deux hommes traînent avec eux les mêmes souffrances, la perte des êtres aimés.

Aussi leurs rencontres quotidiennes deviendront des moments de bonheur...



Un livre plein de réflexions sur l’immigration, la guerre, la culpabilité et la vieillesse, servi par une écriture lumineuse, tendre et sobre.

L’histoire d’une belle rencontre celle de deux hommes meurtris, mais bercés par la douceur de la petite Sang Diû, prénom qui dans sa langue signifie « Matin doux ».

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La petite fille de Monsieur Linh

La guerre qui fait rage depuis de nombreuses années a tout pris à Monsieur Linh. Son pays ravagé, son village détruit, son fils et sa belle-fille morts dans les rizières, il ne lui reste rien…sauf, le plus important peut-être, qui permet de se raccrocher à l’existence, une vie, une petite vie à s’occuper.

Cette petite vie c’est Sang Liû, sa petite-fille, un bébé de quelques semaines trouvé au milieu du saccage, miraculeusement épargné par les bombes.

Alors, pour cette enfant si calme, si sage, cette petite fille de l’aube, Monsieur Linh a décidé de partir à jamais.

La petite blottie tout contre lui, il a entrepris un long voyage en bateau vers un pays étranger dont il ne connait pas la langue et au terme duquel il a été placé dans un centre de réfugiés.

Dans cette ville sans odeur, froide et grande, où les gens vont et viennent, pressés, indifférents, où la foule « est noueuse comme un serpent de mer », Monsieur Linh se sent perdu.

Un jour pourtant, alors assis sur un banc, la tête emplie d’un passé détruit et Sang Liû bien serrée contre sa poitrine, un homme vient lui parler. Monsieur Bark est un grand homme sympathique, au visage chaleureux. Il est seul, il est veuf, il est triste.

Alors, entre ces deux hommes qui ne comprennent rien à la langue de l’autre, qui se méprennent même sur leur nom respectif, une amitié profonde naît, faite de petits riens, de l’apaisement d’une voix grave et profonde, de l’odeur de cigarettes, de l’échange de menus présents, de promenades, d’une main amicale posée sur l’épaule.

Cette amitié, c’est un baume au cœur pour Monsieur Linh et pour Monsieur Bark, c’est l’espoir qu’ils n’attendaient plus, c’est l’espérance qui les rattache à la vie car « ce peut-être aussi cela l’existence ! Des miracles parfois, de l’or et des rires, et de nouveau l’espoir quand on croit que tout autour de soi n’est que saccage et silence ! ».



Comme ces artisans patients qui cisellent leurs œuvres dans la discrétion et l’humilité, Philippe Claudel parfait ses livres avec cet effacement de soi et ce naturel qui donnent au final de grands ouvrages, de ceux qui atteignent à l’universel par cette émotion juste qu’ils communiquent.

Roman de l’amitié, roman de l’exil, roman des ravages de la guerre même si celle-ci - comme c’est souvent le cas avec l’auteur - reste en arrière-plan, roman profondément humain, « La petite-fille de Monsieur Linh » bouleverse et ébranle par l’humanisme de son propos, par l’empathie qu’il fait naître en nous, par la sincérité et la lumière qui émanent d’une écriture tout en simplicité et fluidité, tout en réserve et demi-teinte.

Si les sujets qui y sont abordés sont graves - la guerre, la perte, l’exil, la solitude dans un monde d’indifférence et d’anonymat – ils sont néanmoins traités de façon moins sombre que dans « Les âmes grises » ou « Le rapport de Brodeck » et laissent émerger de belles lueurs d’espoir comme les rayons de soleil jouant à travers les bambous dans le village de Monsieur Linh.

La lecture, dans le dépouillement et la souplesse des mots, se fait ici plus sereine, plus éthérée, d’une grâce aérienne, on aimerait même dire d’une grâce « asiatique » tant l’ensemble s’écoule dans la douceur d’une tristesse ouatée, cotonneuse, feutrée.

C’est beau, c’est poignant, c’est lumineux…c’est ce refrain plein d’espérance que chante tout bas Monsieur Linh à l’oreille de Sang Liû :

« Toujours il y a le matin, toujours revient la lumière, toujours il y a un lendemain, un jour c’est toi qui sera mère »

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La petite fille de Monsieur Linh

Un vieil homme débarqué d’un pays lointain, avec pour seul réconfort, la présence de sa petite fille, cette toute jeune enfant étrangement passive, encore un bébé, qu’il ne quitte pas d’un œil... Le reste de la famille a été décimé, Ils sont les seuls rescapés d’une guerre qui n’en finit pas, qui les a condamnés à cet exil, ce déracinement de chaque instant.

Mais le vieil homme est bien décidé à vivre, à lutter pour offrir un avenir à la petite...



Tour à tour plein de tendresse et révoltant, ce court roman est de ceux qui, malgré leur apparente simplicité, laissent une trace...
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Compromis

Nous sommes au soir du 10 mai 1981, à quelques heures de l’élection de François Mitterrand… Dans un appartement sur le point d’être vendu, deux amis, Denis et Martin – un comédien et un dramaturge sans beaucoup de talent – attendent un troisième homme, le futur acheteur de l’appartement qui doit signer le compromis de vente.



Il est un peu en retard, les deux amis tuent le temps, bavardent, parlent de tout, de rien, de politique, de théâtre et de mise en scène, du futur acheteur… Et de l’appartement, avec ses vices cachés qui révèlent chez le vendeur de bien vilains accommodements avec la vérité : des petits compromis, comme dans la vie, comme dans leurs vies, comme au théâtre – surtout quand on court le cachet – comme en amitié, comme en amour. Des comptes seront réglés, des rivalités mises à jour, de vieilles rancœurs enfin avouées - sous les yeux médusés d’un acheteur transformé bien malgré lui en témoin, en arbitre, puis en exutoire et en bouc émissaire…



Avec « Compromis », sa troisième pièce de théâtre, Philippe Claudel nous offre une variation tragi-comique sur les sentiments inavoués, les petits arrangements avec la vie et avec soi-même, les compromis et les compromissions, les ambiguïtés de sentiments, les amitiés fragiles… C’est drôle, c’est enlevé, c’est bien rythmé, c’est vivant et, comme toujours avec Philippe Claudel, c’est sensible, subtil et très bien écrit. Un bon moment de lecture qui demande certainement à être prolongé au théâtre !



[Challenge MULTI-DÉFIS 2019]

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L'Archipel du chien

Lorsque trois corps s’échouent sur l’ile de l’Archipel du chien, c’est tout un monde qui s’en va à l’agonie. De cette agonie qui s’en va faire plier le cœur, le doute, et le bon sens, il ne tient qu’à un pas pour que les témoins deviennent coupables.

Bourreaux-victimes, voici tout le génie de ce roman.

La mort de ces trois hommes échoués sera le déclencheur pour ouvrir les tréfonds de l’âme noire des hommes qui viendront à leur tour s’échouer en enfer.



Une vieille, un pêcheur, le maire, un instituteur, le curé, ils sont juste témoins de ce que la mer a rejeté sur leur île: la mort. Ils auraient pu avoir un peu de cœur ou du moins un peu de raison. Non, le maire est terrorisé par l’image de ces cadavres salissant son île. Réputation, prestige, avenir, sécurité, toutes les excuses sont bonnes pour enterrer ces cadavres comme des chiens.

Tous ne partagent pas l’avis du maire. L’instituteur paiera très cher sa droiture et son souci d’honnêteté. Ils vont, en fait, tous, payés très cher.

La honte, la mauvaise conscience s’imbriquent comme de gros cailloux venant grossir l’état de malaise général.

Dans cette descente en enfer, la nature s’enjoint au malheur des uns et des autres, elle rejette le mal et distille la puanteur de la mort dans les tréfonds du docteur qui ne parvient plus à sentir autre chose que cette putréfaction.



Philippe Claudel met en exergue tout son talent dans ce roman, il extirpe avec brio toute la noirceur des Hommes. Il pousse jusqu’au dégoût, jusqu’à la nausée, il peint de noir et de larmes l’ile et ses occupants massacrés dans le péché, titubant dans les ruelles macabres d’une vie où ricochent sur la conscience les pierres qu’on jette. Tel un cauchemar aux allures bien réalistes.



J’ai donc beaucoup apprécié ce roman ne fut-ce que pour sa puissance littéraire. C’est un roman très noir mais très habilement amené avec une réelle saveur dans les mots.



Noir mais magistral.
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L'Archipel du chien

J’ai terminé ce roman, il y a quelques jours et même si le thème m’a plu car il est hélas d’actualité, je reste mitigée ; j’ai bataillé pour rédiger ma critique, oscillant entre des réactions contradictoires…



Tout d’abord, les protagonistes sont vraiment caricaturaux : on a en gros les édiles : l’Instituteur, objecteur de conscience, le Maire corrompu, le Médecin qui cautionne, le Curé qui ne croit plus en rien, l’ancienne institutrice revêche qui ne supporte pas d’avoir céder son poste, des pêcheurs sans scrupules, sans oublier l’idiot du village… On note au passage que les villageois sont présentés comme des rustres !



Je sais que tous les moyens sont bons pour établir son pouvoir mais quand on voit jusqu’où peut aller le maire du village pour satisfaire ses propres besoins et ambitions, on reste sans voix. Seul compte pour lui son projet de thermes et le fric qui va avec, alors on assiste à des manipulations en tous genres, le tout nappé d’une bonne dose de délation, de calomnies, pour aboutir au procès truqué de l’instituteur accusé de viol sur une élève : c’était le seul habitant du village à ne pas être natif de l’île donc un Étranger, la pièce à sacrifier…



« Vous avez compris ma pensée, reprit le maire, et vous savez bien que je ne suis ni un salaud ni un homme dénué de cœur. Mais, ce n’est pas moi qui ai crée la misère du monde, et ce n’est pas à moi seul non plus de l’éponger. » P 55



Ce roman m’a rappelé bien sûr, les grands mythes sacrificiels, Antigone, Iphigénie … que ne ferait-on pas pour s’attirer la clémence des Dieux et justifier les bassesses ?



Comment réagir après ce qui est arrivé à l’Instituteur ? Ce n’est pas si simple, le Médecin par exemple sent en permanence une odeur de pourriture qui émane de lui et qui ne semble pas perturber les autres, la mauvaise conscience, la culpabilité s’infiltrent dans sa pensée : « L’œil était dans la tombe et regardait Caïn »



On retombe à nouveau sur les grands mythes : Le supplice de Prométhée dont le foie repousse au fur et à mesure que l’aigle le lui dévore) ou le mythe de Sisyphe qui remonte un rocher qui toujours redescend…



En fait, on peut prendre tout ce récit au premier, au deuxième ou même au ixième degré tant les allusions sont constantes.



En tout cas, c’est une île qui porte bien son nom : ses habitants se comportant comme des chiens (je présente mes excuses à mes amis les chiens, car l’idée d’associer cet animal à la méchanceté me hérisse, mais c’est une expression courante, comme traiter les hommes de cochons d’ailleurs). Cette île est noire car un volcan, le Brau, se manifeste régulièrement, noire tout comme l’âme des habitants…



Philippe Claudel s’érige en donneur de leçon, fustige le comportement des passeurs, la lâcheté des habitants de l’île vis-à-vis des migrants qu’on laisse mourir comme des chiens sur la plage, tente de culpabiliser le lecteur au passage. En fait, en caricaturant et fustigeant de cette manière, il pousse ceux qui se sentent impuissants devant le drame des migrants et l’arrogance des Occidentaux, à se culpabiliser davantage encore, alors que ceux qui vivent des trafics ou ceux qui rejettent les Étrangers, resteront indifférents…



J’aime beaucoup Philippe Claudel, mais ce roman m’a hérissée à force d’être caricatural, et cette lecture m’a soulevé le cœur presque du début à la fin. Il va en rester une frustration, une impuissance renforcée et je ne vois pas ce qu’il a tenté de prouver au fond, à part pousser un grand cri de colère…



Je trouve ce roman clivant et je pense que les avis vont faire le grand écart : il sera encensé ou rejeté…
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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De quelques amoureux des livres

Découverte inopinée , de hasard pur , en allant fouiner dans une petite librairie de ma ville, "Caractères", tenue par un couple passionné, dont Françoise, qui écrivait, bien avant que la mode ne se généralise...ses coups de cœur sur les ouvrages qu'elle a envie de défendre.



Là , ce petit volume, vous l'imaginerez aisément ,a capté mon attention, pour son titre "alléchant"... ainsi que par la maquette originale de la couverture, mais aussi par la qualité de la typographie et présentation de ce florilège fantaisiste de tous les "écrivains" morts-nés, qui ne sont jamais parvenus à écrire ou à être publiés... mais aussi les littérateurs qui ont réussi à être édités... ayant achevé leur existence de façon dramatique ou foldingue, etc.



Des anecdotes les plus drôles ou pathétiques, ou déjantées... une lecture plaisante... qui dit fort bien ce besoin , cette addiction de se réaliser par les mots, l'écriture...et de rejoindre cette communauté si valorisante des "Littérateurs"..., de la "Société des gens de lettres" !

Je me permets de transcrire quelques extraits qui donnent une idée de l'éclectisme de ce florilège désopilant !!...



"& ce Juan Opiedo, dont parle Borges, qui toute sa vie exerça la profession de cordonnier et qui sur chacune des semelles des chaussures qu'il rafistolait écrivait des vers de sa composition qui finissaient par disparaître peu à peu, usés par la marche sur les trottoirs de Buenos-Aires. (p. 63)"



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"& ce romancier toujours insatisfait de son travail et qui passait son temps, caché dans les rayonnages des librairies à corriger ses œuvres à même les exemplaires qu'il y trouvait. Il fut de nombreuses fois pris en flagrant délit mais le juge peinait à trouver un chef d'inculpation pour caractériser ses actes, hormis celui de "dégradation de bien privé", mais l'écrivain rétorquait non sans raison que ce bien était en grande partie le sien et qu'il ne faisait qu'en user à sa guise, qui plus est en vue de son amélioration qui serait, à n'en point douter, profitable à tous. (p. 96)"



Une lecture tour à tour grave, fantaisiste, surréaliste, pétrie à la fois d'humilité, d'autodérision, et de sérieux ( pour ce dernier.... en infime quantité !!! et c'est tant mieux...)

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La petite fille de Monsieur Linh

Beaucoup d'émotion dans ce récit (bon sang ça a bien failli me tirer des larmes !), il y a une atmosphère un peu envoûtante, je me suis pris en flagrant délit à espérer tel ou tel événement, ou encore un autre dénouement...

Alors bien sûr vu sous cet angle cette lecture m'a impressionné au sens propre du terme, incontestablement.

Cela dit le dénouement justement, ou plutôt la révélation finale me perturbe et me frustre un peu, comme si...

Enfin, si je dois aller à l'essentiel c'est surtout un très bon moment de lecture, le genre qui vous remue bien.
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Le monde sans les enfants : Et autres histo..

Lorsque Philippe Claudel écrit pour les enfants cela aboutit à un petit livre charmant et sensible rempli d'histoires très courtes, très fraîches qui font réfléchir, divertissent, enseignent. Philippe Claudel ne noircit pas des pages dans le but d'écrire, il donne un sens profond à ses textes. Le public enfantin est un public difficile, Philippe Claudel en écrivain intelligent et sensible qu'il est respecte ses jeunes lecteurs et leur offre des pépites. Un joli petit livre à offrir aux plus jeunes pour qu'ils savourent un de nos plus grands écrivains contemporains.
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La petite fille de Monsieur Linh

Avec quelle douceur et quelle délicatesse Philippe Claudel évoque ce “vieil homme à l’arrière d’un bateau” et Sang diû, sa petite fille, âgée de six semaines, serrée dans ses bras lorsqu’il quitte son pays natal.

Il est touchant ce petit vieux déraciné, si nostalgique, qui vit maintenant en exil à bas bruits.



Philippe Claudel participait récemment à l’émission “Les grosses têtes”, oui, vous avez bien lu ! le Claudel de l'académie Goncourt. Isabelle Mergault nous narra qu’incitant sa fille à lire ce roman, elle en avait arraché les dernières pages, de peur que l'adolescente ne se rende directement à la fin. Car oui, y a même un rebondissement !



L’auteur nous livre une histoire profondément humaine et simple, où affleurent les souvenirs nostalgiques. Les sentiments restent les seules valeurs lorsque l’on a tout perdu.

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La petite fille de Monsieur Linh

Au milieu du malheur et des épreuves surgit un rayon de soleil. Sa petite fille est le seul mince filet de vie qui anime M.Linh. Le manège qui tourne dans le parc maintient vivant le souvenir de son épouse dans la tête de M.Bark. Et le bonheur de cette improbable rencontre entre ces deux hommes ranime un peu de joie dans leurs cœurs, joie simple comme un bonjour, seul mot qu'ils sont capables d'échanger.

Comme la petite fille de M.Linh, laissez vous porter par ce court roman, une larme à l’œil et le sourire aux lèvres.
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Les âmes grises

Du noir teinté d'un peu de blanc et la couleur grise peut qualifier l'âme humaine. Voici ce que nous révèle Philippe Claudel dans son ouvrage Les âmes grises qui se déroule lors de la première guerre mondiale dans un village. Le ton est donné à la page de couverture : photo aux couleurs sépia d'une fillette au visage sérieux et résigné.

L'auteur, d'une écriture vive et ciselée, nous livre le portrait d'habitants avec pour toile de fond la mort d'une femme et d'une fillette.

Au-delà de la narration, Philippe Claudel pointe la complexité de l'être humain dont l'âme est loin d'être blanche et peut virer au noir.
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