AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Philippe Pelaez (493)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Furioso, tome 1 : Garalt est revenu

J'aime bien l'héroïc fantasy de manière générale. le « Seigneur des anneaux » est par exemple mon oeuvre préférée toutes catégories confondus, c'est dire ! J'aime également les mondes à la « Game of Thrones » où il y a des enjeux de pouvoir pour conquérir un royaume.



Evidemment, on ressent bien l'influence de ces deux oeuvres majeures dans ce présent titre. du coup, quand je découvre une nouvelle BD, je m'attends à un peu d'originalité pour ne pas rabâcher à chaque fois la même trame.



Dans le cas présent, la soi-disante originalité est un combattant qui revient d'entre-les-morts. Désolé, mais on dirait qu'on nous refait le coup de Gorn qui a marqué en son temps le monde de l'héroïc fantasy dans sa version bande dessinée. Cette fois-ci, c'est la bonne fée Alcyna qui le ressuscite provoquant la colère de la fée Morgane qui soutiendra Roland dans sa quête de vengeance pour l'amour de la belle Angélique.



Maintenant, ce qui pourrait faire la différence, c'est le dessin et le traitement du scénario. Au niveau du graphisme, cela ne casse pas des briques avec un trait assez fouillis qui ne fera pas dans la netteté. Que dire maintenant sur le traitement du récit ? C'est classique avec son méchant de service Roland dont la furiosité est beaucoup trop exacerbée pour être crédible. Cela ne le fait pas !



Si on reste sur le plan du divertissement, cette BD pourra sans doute plaire à un public habitué et fan du genre. C'est vrai que cela se laisse lire malgré un côté assez verbeux dans la narration qui alourdit inutilement le propos.



On apprendra en fin d'album que c'est tiré d'un poème datant de la renaissance sur le Moyen-Age. On se souvient tous de Roland, le neveu de Charlemagne, un fier combattant franc, qui fut tué lors de la bataille de Roncevaux en luttant contre des vascons. Les scènes de bataille assez sanglantes seront d'ailleurs largement présentes.



Ce titre ne m'a pas vraiment convaincu car il y a beaucoup mieux en la matière. Cela reste néanmoins tout à fait correct car on perçoit tout de même un effort de modernisation. Bref, pour conclure, je dirai que c'est un récit de fou furieux comme le titre l'indique. Certains préféreront sans doute « fast and furius ». D'autres voudront juste un peu plus de calme et de sérénité…
Commenter  J’apprécie          383
Super-vilains, tome 1

Club N°49 : BD sélectionnée ❤️

------------------------------------



Franchement c'est trop drôle...



Tout le monde en prend pour son grade les adultes comme les ados.



Aaricia

------------------------------------



BD très drôle avec des dessins très agréables pour ne rien gâcher.



Le petit plus, des thèmes finalement sérieux (harcèlement scolaire, isolement des personnages âgées, écologie) sont abordés avec humour.



On prend plaisir à découvrir les "pouvoirs" et aventure de nos anti-héros.



Vivement la suite !



Samuel

------------------------------------



Fluide Glacial qui fait dans le super-héros ! ?



Serait-ce le retour de Super Dupont, le plus grand héros que la France a fait naître ?



Une nouvelle série originale, qui prend une approche assez différente du mythe du super-héros, bien plus drôle et loufoque que l'approche classique du genre.



On pense un peu au méchant Zorglub de Franquin dans les Aventures de Spirou et Fantasio, mélangé avec un humour propre à Fluide Glacial.



Ça fonctionne vraiment bien et on attend le prochain album impatient de découvrir quels pouvoirs étranges nos jeunes lycéens vont encore découvrir.



Un album rempli d'amour !



Greg

------------------------------------


Lien : https://mediatheque.lannion...
Commenter  J’apprécie          370
Automne, en baie de Somme

Automne, en Baie de Somme est un polar qui se déroule à la fin du XIXe siècle entre Paris et la Baie de Somme. Le dessin est aquarellé, lumineux, en rapport avec l’ambiance de Paris de cette époque, faisant référence à l’Art Nouveau. Alfons Mucha y fait une apparition, puisque une des protagonistes de l’histoire est une de ses modèles. Chaque chapitre est introduit avec une illustration sous forme d’affiche Art-nouveau. Tout cela nous fait osciller entre l’ambiance bourgeoise et l’ambiance populaire avec un bel équilibre. Le polar en soi est assez classique, bien servi par son éventail de personnages, tous un peu troubles, par son faux rythme, dilettante, bourgeois, qui confère à l’histoire un charme particulier. C’est un polar élégant, un polar “Art nouveau”, original par son style, et j’ai aimé le final qui nous prend un peu au dépourvu.
Commenter  J’apprécie          370
Maudit sois-tu, tome 1 : Zaroff

Leur médiocre anonymat touche à sa fin. La chasse a déjà commencé.

-

Ce tome est le premier d’une trilogie. Sa parution initiale date de 2019. Il a été réalisé par Philippe Pelaez pour le scénario, et par Carlos Puerta pour les dessins et les couleurs. Il comprend cinquante-quatre pages de bandes dessinées.



Quelque part à Londres, dans une grande artère, la nuit. Les véhicules roulent sur la chaussée, leurs lumières allumées. Sous une plaque d’égout, un homme est en train de monter le long des barreaux encastrés dans le béton : il fuit. Celui qui le pourchasse est éminemment conscient de ce que pense sa proie. Il conseille à Clarence, la créature qui l’accompagne de laisser sa proie s’épuiser, de la laisser respirer l’odeur de la peur qui suinte par les pores de sa peau ruisselante. Car il sait. L’animal n’a pas conscience de sa propre mort. L’homme, lui, sait qu’il va mourir. Il tourne le dos à la créature, mais celle-ci l’imagine hagard. Il la fuit et elle le devine terrorisé. Car il sait. Il sait qu’il est maudit. Dans l’œil de la bête, il y a l’innocence. Mais le regard de l’homme devenu proie révèle cette vérité : Il est moribond. Si l’animal meurt, l’homme, lui, périt. Faut-il que les hommes s’ennuient ? Ils se divertissent pour éviter de penser au néant qui les attend. Ils s’adonnent à a guerre, aux jeux, ils s’adonnent aux femmes. Lui, il chasse. La perception du danger provoque la fuite, seul moyen de survivre à cette épreuve. Celle de la sélection naturelle. Ceux qui restent immobiles ou qui choisissent de combattre sont condamnés. Pour survivre, il faut fuir. Il aime cela. Il est Baal, il est Mithra, il est Seth. Il est la chasse, Il est la mort.



Dans les égouts, la créature a traqué le fuyard, et celui-ci est mort, un carreau d’arbalète ayant transpercé son crâne. Le comte Nicholas Zaroff regarde le cadavre de sa proie, la créature Clarence à ses côtés, le docteur Charles Moreau l’a rejoint, ainsi que deux hommes de main. À une question de Moreau, Zaroff le rassure : il a son appât. Leurs quatre tristes héros ne le savent pas encore, mais ils sont sur le point de goûter à la gloire. La première est aussi superficielle et paresseuse que son aïeule fut brillante et laborieuse. Ce n’est pas l’intelligence qui lui manque, mais elle a érigé la frivolité en vertu. La deuxième, malgré sa volonté et sa force de caractère, n’est qu’une jeune femme abîmée par des années d’errance et de perdition, des années qui l’ont marquée au fer rouge. Le troisième, lui, n’a que quelques vagues gènes en commun avec celui qui illustra son siècle et fut un fer-de-lance du progrès de l’humanité ; l’alcool a détruit ce qui lui restait de fierté. Quant au dernier, ce personnage vulgaire et immonde révulse son être tout entier. Il n’est que corruption et infamie alors que son ancêtre n’avait pas assez du globe pour étancher sa soif de connaissance. Ils n’ont pas conscience du grand destin que Zaroff leur réserve. Leur médiocre anonymat touche à sa fin. La chasse a déjà commencé.



Une couverture macabre avec une créature, Clarence, assise sur un tas de squelettes humains. Une référence directe au film Les Chasses du comte Zaroff (1932, The Most Dangerous Game) réalisé par Ernest B. Schoedsack et Irving Pichel, d’après une nouvelle de Richard Connell (1893-1949), The Most Dangerous Game (1924). S’il a la curiosité de regarder la quatrième de couverture, le lecteur découvre le titre des tomes deux et trois, avec l’annonce d’un autre personnage dont le descendant joue un rôle important dans celui-ci, le docteur Charles Moreau, une écrivaine ayant laissé une marque indélébile dans l’Histoire du roman et du fantastique. Il comprend également que les tomes se suivent à rebours de l’ordre chronologique : 2019 pour celui-ci, 1848 pour le deuxième et 1815 pour le dernier. Le lecteur ouvre l’ouvrage et il n’en croit pas ses yeux. Carlos Puerta se montre aussi photoréaliste que pour la trilogie Baron Rouge (2012-2015) écrite par Pierre Veys. L’impression faite par les dessins relève de la photographie : le réalisme des façades, des voitures, des enseignes lumineuses. Pour un peu, le lecteur croirait que l’artiste a pris des photographies et s’est contenté de les retoucher par infographie, en jouant par endroit avec un peu de floutage, et en ajustant les couleurs. L’effet est saisissant. Une fois l’action se déroulant dans les égouts, il devient évident que l’artiste ne s’y est pas rendu pour réaliser un reportage photographique, et pourtant la qualité du rendu ne diffère pas d’un iota des images en pleine rue. Il s’agit vraiment de sa technique de dessin, et de ses choix en termes de représentation.



Un parti pris graphique aussi saisissant installe une narration visuelle à la saveur particulière, entre impressions photographiques et peintures en couleur directe. En fonction de la scène, le lecteur éprouve une sensation de réel quand il se trouve dans un bar au comptoir avec Eleonore Dabney, dans les rues de Londres avec le très reconnaissable 30 St Mary Axe (dit le cornichon) en arrière-plan, à la sortie d’un théâtre, dans le zoo de Londres pour braconner le tigre, dans le salon très confortable d’Emily Robinson, à la sortie d’une école élémentaire, ou dans le salon puis la salle à manger luxueuse de la demeure de Nicholas Zaroff dans le Yorkshire. Il croit ensuite pouvoir toucher les pierres des ruines d’une église, jusqu’à sentir les aspérités de la pierre. Il se trouve encore plus épaté quand sur la page suivante, deux personnages en fuite voient des cerfs dans une clairière, avec un rendu entre la photographie et l’impressionnisme, confondant d’exactitude et de sensation de luminosité. À ce point hypnotisé par la qualité du rendu, le lecteur ne remarque pas dans un premier temps que l’artiste sait très bien régler le degré de précision photographique, entre le réalisme incroyable et le camaïeu en fond de case en fonction de ce que requiert la scène. Une expérience visuelle de lecture très singulière. De la même manière, l’artiste joue sur le degré de réalisme et de précision dans la représentation des personnages, préférant une forme d’imprécision pour leur insuffler plus de vie, plutôt que de les figer dans une photographie.



Captivé par les dessins de chaque case, le lecteur ne se concentre pas forcément autant sur l’histoire. Au vu du titre, il sait que le comte Zaroff, ou plutôt son descendant, va organiser une chasse à l’homme sous un prétexte plus ou moins plausible, et que le récit culminera dans une course-poursuite dont l’issue peut aussi bien favoriser la proie que le chasseur. D’ailleurs la première scène comprend une traque d’un homme dans les égouts. Du coup, il focalise plus son attention sur les phrases qui courent dans les cartouches : une exhortation à laisser la peur monter chez le fuyard pour que sa course n’en soit que plus désespérée et efficace, et qu’ainsi la chasse s’en trouve plus intéressante. Ce thème revient une seconde fois quand les quatre proies sélectionnées par Zaroff font le voyage pour se rendre dans sa propriété du Yorkshire. Zaroff évoque l’état de la bête : désespérée, alors qu’elle n’entend plus que le son du cor qui semble tout proche, le hurlement des chiens sur ses talons, le froissement des taillis qu’elle bouscule. Elle ne sait pas ce qu’est la mort. Elle ne sait même pas ce qu’est la vie. Mais elle connaît le danger. Tous ses sens tendent vers la survie, et elle se fie à la seule chose qui puisse la sauver. Au seul et dernier sens que partagent encore les hommes et les bêtes. L’instinct. Avec ces passages, le scénariste retranscrit bien la ferveur qui habite Nicholas Zaroff quand il pense au frisson de la chasse, aux sensations intenses qu’elle lui procure, à la jouissance de l’inéluctabilité de la chasse du fait de sa supériorité sur la proie, sur l’être humain ravalé à l’état de bête.



Le lecteur entame donc cette histoire avec la connaissance de savoir qu’elle consiste essentiellement à mettre en place les circonstances et les conditions de la chasse du comte Zaroff version 2019, et qu’il assistera à cette chasse. Il fait donc connaissance avec le descendant de Piotr Vassili Zaroff, cousin du tsar, et avec les quatre proies décrites par Zaroff en des termes peu flatteurs : Emily Robinson journaliste paresseuse et droguée, Eleonore Dabney fille facile et suicidaire, Josuah Cornford docteur alcoolique et violent, l’inspecteur Sisted policier vulgaire et ripou. Il découvre par la suite les raisons qui ont conduit Zaroff à les choisir comme proie. Il se rend compte que Zaroff a également fait appel à Charles Moreau, descendant d’un personnage de fiction issu d’un roman de Herbert George Wells (1866-1946). Le scénariste mêle habilement des personnages littéraires avec des figures historiques pour tisser une toile de causes et de conséquences, un exercice de style amusant qui révélera certainement plus de saveurs dans les deux tomes suivants.



S’il a déjà pu apprécier la qualité des images de Carlos Puerta ou la qualité de l’écriture de Philippe Pelaez (par exemple Automne en baie de Somme, 2022, avec Alexis Chabert), le lecteur est conquis par avance par la promesse d’une nouvelle chasse du comte Zaroff. Il n’est pas forcément assez préparé au choc visuel des cases, entre exactitude photographie donnant une consistance incroyable à chaque lieu, et glissement vers des touches impressionnistes pour des sensations plus tournées vers l’émotion. L’intrigue délivre bien une chasse à l’homme, plusieurs même, tout en développant le thème du sentiment de supériorité du chasseur qui ravale sa proie humaine à l’état de bête, sur fond de liens entre trois œuvres littéraires. Captivant.
Commenter  J’apprécie          360
Automne, en baie de Somme

Elle était une saison qui sait que le temps lui est compté.

-

Il s’agit d’une histoire complète en un seul tome, indépendante de toute autre. Cette bande dessinée a été réalisée par Philippe Pelaez pour le scénario, et par Alexis Chabert pour les dessins et les couleurs directes. Elle comporte soixante-deux pages. Il se termine avec une postface d’une page de l’artiste expliquant pour quelle raison il a choisi 1900 à Paris. Dans ce projet, il s’est amusé à retranscrire les ambiances que son arrière-grand-mère lui a transmises, recréer un passé où il peut voyager comme un fantôme, et honorer la mémoire de ses ancêtres. Chacune des trois parties s’ouvre avec un texte de Nelly Roussel (1878-1922), extraits de son ouvrage Quelques lances rompues pour nos libertés (1910).



Sur une grande plage de la baie de Somme, se trouve un petit navire à voile, échoué sur le sable comme un animal mortellement blessé regardant une dernière fois l‘horizon, avant de se coucher définitivement sur le flanc. Un homme en train d’agoniser s’extirpe tant bien que mal de la cabine et s’allonge sur le pont. Les mouettes volent haut au-dessus du bateau. Le lendemain, la gendarmerie locale est sur place et elle accueille l’inspecteur Amaury Broyan, venu de Paris, dépêché par le ministre lui-même. Car le défunt était un riche industriel : Alexandre de Breucq. Le lieutenant Brousse lui explique que le malheureux s’est étouffé dans son propre sang, et que son agonie a dû être longue. L’inspecteur se demande si la victime connaissait son assassin, si ce dernier avait préparé le poison en étant sûr que de Breucq le prendrait, ou s’il était à bord de cette goélette, avec lui, et qu’il a pris tout son temps pour le regarder mourir.



Quelques jours après, l’inspecteur se tient à quelque distance de la mise en terre du cercueil au cimetière, accompagné par Arsène. Ils regardent les gens présents venus se recueillir : les banquiers d’un côté, les industriels de l’autre, et au milieu l’État. Un franc-maçon à la tête de l’État, un communard comme président du Conseil, et les socialistes qui gagnent encore des voix aux dernières élections municipales. Et tout ce beau monde pour enterrer le plus prometteur, le moins corrompu et le plus social des industriels. La vie est mal faite. Arsène s’écarte rapidement car la veuve Marthe de Breucq se dirige vers eux avec son garde du corps Simon. Broyan lui présente ses condoléances. Elle lui demande de passer le jeudi suivant, à dix-sept heures à son hôtel particulier. Une fois la cérémonie terminée, Elle monte dans sa calèche avec Simon et lui demande pourquoi Broyan a été choisi pour l’enquête. C’est un des policiers les plus efficaces de Paris, enfin avant les soucis avec sa défunte fille. Dans l’atelier d’Alfons Mucha, Axelle Valencourt pose pour la toile L’Automne. Elle lui fait observer que des grains commencent à se détacher de la grappe. Rien de grave : il a terminé pour aujourd’hui. Il faut qu’elle revienne dans deux jours pour terminer le tableau. Le lendemain elle a prévu d’aller au marché aux modèles place Pigalle. Le soir Thérèse sort de la prison de Saint Lazare, et elle monte dans le fiacre qui l’attend.



Pour commencer, une couverture superbe avec un mystère, une jeune femme représentée avec une manière qui évoque Alfons Mucha (1860-1939), ce qui est tout à fait intentionnel puisque cette demoiselle est le modèle qui a servi pour sa représentation de l’Automne. Le fini de la couverture est particulièrement soigné : le titre et la dorure en arc de cercle sont rendus avec une encre métallique, en légère surimpression, pour un très bel effet. En bas, le bateau échoué sur ce qui doit être une plage de la baie de Somme. Une introduction en six pages qui permet de poser le récit : une enquête policière sur le meurtre d’un industriel progressiste, un capitaine d’industrie mettant en œuvre une politique paternaliste, à la fin du dix-neuvième siècle. Elle permet aussi d’apprécier toute la palette de l’artiste. Il commence par trois pages avec plusieurs marines, très vaporeuses, un très beau rendu de l’ambiance lumineuse du ciel et du sable à deux moments différents de la journée, une goélette et des personnages détourés d’un trait fin et fragile, avec des silhouettes un peu allongées, des contours nourris par les couleurs directes. L’autre moitié se déroule d’abord dans un cimetière parisien, puis dans les rues de la capitale. La couleur directe permet de réaliser un jeu d’ombre mouvante du plus bel effet. L’artiste joue remarquablement bien du niveau de précision et du niveau d’imprécision dans les formes : le lecteur assimile facilement les contours des stèles funéraires sans avoir besoin de les voir dans le détail, et il identifie au premier regard la forme d’une colonne Morris.



Raconter un polar en bande dessinée s’avère souvent un exercice périlleux, car il faut parvenir à caser tout à un tas d’informations comme les éléments de contexte, l’histoire personnelle de la victime et de ses proches, la recherche d’indices et leur analyse, et il faut également parvenir à mettre en scène les phases de déduction sans qu’elles n’apparaissent ni trop artificielles et mécaniques, ni trop parachutées ou absconses. Le lecteur se rend vite compte que les auteurs savent inclure les informations avec une réelle élégance, et une réelle ambition. Ainsi, la victime était un riche industriel de type paternaliste, portrait qui se dessine par bribe au fil de remarques rapides. L’inspecteur a une histoire personnelle tragique qui influe directement sur ses motivations et donc la façon dont il hiérarchise ses priorités. Il dispose d’un physique avec une certaine carrure et des postures parlantes sur son caractère et ses dispositions d’esprit. La veuve éplorée est d’une réelle élégance, son maintien et sa façon de se tenir en disent également long sur son assurance et sa détermination. Axelle est magnifique de bout en bout, une beauté diaphane, avec un soupçon de mélancolie, une réelle douceur, une assurance d’une autre nature. L’artiste sait donner vie à chaque protagoniste, leur insuffler du caractère, ce qui est indispensable pour que la mécanique policière ne ressorte pas comme un artifice.



La quatrième de couverture précise que l’histoire se déroule à la Belle Époque, et même précisément en 1896. Cette année correspond effectivement à la date de réalisation du tableau Automne par Mucha. Les auteurs ne l’ont pas choisi par hasard, et le lecteur constate rapidement que l’intrigue est indissociable de la réalité historique de l’époque, qu’elle en découle, qu’elle n’aurait pas pu se passer à une autre époque. C’est donc un véritable polar qui agit comme révélateur d’une facette de la réalité sociale de la société à ce moment-là, et à cet endroit-là. Avec son air de ne pas y toucher vraiment, l’artiste réalise une reconstitution historique visuelle impressionnante. Les tenues sont d’époque, aussi bien pour les hommes que pour les femmes. Il est possible d’identifier les rues de Paris où se déroule chaque scène. Le lecteur finit par se rendre compte que Chabert est allé faire des recherches sur les différents modèles de voiture hippomobile en circulation à Paris, ce qui atteste du temps consacré à recréer cette époque avec authenticité. S’il ne l’a pas fait avant, le lecteur prend alors le temps de regarder les détails : les façades immeubles, la fontaine d’une place, l’évocation du cabaret Au Lapin Agile (à nouveau une mise en couleurs extraordinaire), un paravent, un intérieur bourgeois, un cabinet médical, etc. Il regarde les moulins de la Butte Montmartre et il découvre le chantier de la construction de la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre (1875-1923), avec ses échafaudages et son campanile pas encore construit.



Le décor de ce chantier en cours a été proposé par le scénariste qui, lui aussi, parsème son récit de marqueurs historiques contribuant à la reconstitution. Lors du prologue, Arsène évoque Félix Faure (1841-1899), franc-maçon alors président, et Jules Méline (1838-1925), un communard alors président du Conseil. Au fil des pages, le lecteur peut relever la mention de Sarah Bernhardt (1844-1923, actrice ayant également servi de modèle Mucha), Paul Brouardel (1837-1906, médecin légiste), et une citation de Jean Jaurès (1859-1914, on recrute dans le crime pour surveiller le crime, dans la misère de quoi surveiller la misère). Il y a également le titre de chacun des trois actes (Les sanglots longs – Le cœur des femmes – Morte saison) et les citations en ouverture : elles sont toutes les trois extraites du même ouvrage de Nelly Roussel (1878-1922), une libre penseuse, franc-maçonne, féministe, antinataliste, néomalthusienne et femme de lettres libertaire française, une des premières femmes à se déclarer en faveur de la contraception, et à promouvoir l’importance de l’éducation sexuelle des femmes. Tous ces éléments font partie intégrante de l’intrigue, à l’opposé de simples éléments de décor pour meubler artificiellement. L’histoire se déroule en suivant l’inspecteur, et sa façon de procéder est dictée par son caractère et son histoire personnelle. L’enquête ne se résume pas à un jeu intellectuel, mais procède des convictions du policier. Les autres personnages ne font pas figuration : les actes d’Axelle ou de Marthe reflètent également leurs convictions et leurs objectifs, à l’opposé de personnages superficiels ou interchangeables.



Le scénariste maîtrise aussi bien l’esprit que la lettre des polars. Il y a des phases de déductions, des indices, des indicateurs, quelques coups échangés, autant de conventions attendues du genre. L’enquête implique aussi bien des individus de la haute société, que des gens du peuple, et elle fait ressortir des vices cachés. Elle agit donc bien comme un révélateur de plusieurs facettes de la société de l’époque. Elle fonctionne sur ses particularités et pas indépendamment du lieu ou de l’Histoire. En un nombre limité de pages, les auteurs savent immerger le lecteur dans un environnement concret et une reconstitution historique rigoureuse. Celui-ci est sous le charme de la narration visuelle dès les premières pages, et il se prend à savourer le texte assez écrit qui parsèment les cases de la première planche. Il retrouve ce dispositif à l’occasion d’une planche dans chaque acte, venant apporter une touche littéraire et poétique à la narration. Il se laisse porter par l’enquête à la méthode naturaliste, sans essayer de devancer l’inspecteur, se retrouvant surpris à plusieurs reprises par ces découvertes, et révulsé par l’horreur du véritable crime. Excellent.
Commenter  J’apprécie          350
Alter, tome 1 : Ceux qui partent

BD SCIENCE-FICTION / POST-APO.

"Alter" en 2 tomes chez Drakko était autrefois "Parallèle" en 4 tomes chez feu Sandawe, et cela se sent rapidement car on voit bien qu’on ne suit pas le cahier des charges de Christophe Arleston… Les 100 pages de Philippe Pelaez sont bien remplies (trop remplies ?), et plutôt agréables à lire car elles transpirent la volonté de réaliser un travail bien fait (peut-être avec trop d’ambitions pour son propre bien ? Les dessins de Laval NG perdent en précision ce qu’ils gagnent en dynamisme et les couleurs froides de Florent Daniel collent bien au propos.
Lien : http://www.portesdumultivers..
Commenter  J’apprécie          330
Six, tome 1 : Le Massacre de Tanque Verde

Club N°54 : BD sélectionnée ❤️

------------------------------------



Ce premier opus qui sert à mettre en place les 6 protagonistes, renouvelle le genre western.



Violence bien sûr, mais déconstruction avec un ton cynique et parfois désabusé.



Bon moment de lecture en espérant que la suite soit à la hauteur du projet.



Wild57

------------------------------------



Western qui surprend par son originalité.



Vivement la suite !



Un dossier très intéressant à la fin de l'ouvrage sur la (dé)construction d'un mythe autours du western.



David

------------------------------------



Tome d'introduction qui nous présente les six protagonistes du titre, petit à petit, jusqu'à les réunir dans une chevauchée finale.



Des poursuivants aux motifs multiples, un narrateur mystérieux.



Ça sonne comme un western des plus classiques, d'anti-héros, mais le texte final laisse présager de chemins moins parcourus.



On va attendre la suite pour vraiment se faire un avis, mais c'est visuellement plutôt sympathique et l'écriture prenante.



Greg

------------------------------------



Tout les ingrédients du western et une bonne dose de mystère...



Voilà qui est alléchant !



Gwen

------------------------------------


Lien : https://mediatheque.lannion...
Commenter  J’apprécie          320
Pinard de guerre, tome 1

Scénario : Philippe Pelaez

Dessins & couleurs : Francis Porcel



Je n'ignorais pas que nos pauvres poilus étaient shootés au pinard.

Je n'ignorais pas non plus, qu'il y avait et qu'il y a toujours, hélas, des profiteurs de guerre.

Ferdinand, le pourvoyeur du "pinard de guerre", en est un exemple au cynisme répugnant. Quoique...

Par contre, j'ignorais les ravages que l'alcoolisme avait fait dans les rangs des troufions, même après la guerre.

Ils ont subi une double peine et ça, c'est terrible pour eux et leur famille.

Les hauts gradés, eux, ont échappé à tout ça.

La couverture, déjà, met bien en scène les tranchées.

Et le rouge qui s'écoule des tonneaux représente aussi le sang des soldats.

Des pages entières sont couleur vinasse.

Tout cela est visuellement très réussi.

La postface de Philippe Pelaez explique "l'ivresse" nécessaire pour partir au combat.

Poignant.
Commenter  J’apprécie          312
Puisqu'il faut des hommes

Lorsque Joseph rentre en 1961 de la 'guerre d'Algérie' (alors désignée comme 'pacification', 'maintien de l'ordre', mais surtout pas présentée comme une guerre), il est mal reçu. Il y est resté deux ans et demi, certes, mais planqué en 'Section Administrative Urbaine' - ça ne compte pas, c'est lâche, minable, surtout pour ceux qui ont perdu un fils "là-bas". Seuls sa mère, le boucher et sa fille sont heureux de le revoir, car ce qui compte pour eux, c'est de revenir vivant et bien-portant.

Les autres le méprisent, voire l'insultent, à commencer par son propre père, d'autant que le fils aîné a perdu l'usage de ses jambes suite à un accident à la ferme.

.

Cet album intelligent et touchant aborde plusieurs sujets : la mutation agricole amorcée après-guerre en France, l'exode rural ou les rêves d'ailleurs/de mieux des jeunes (qui quittent un à un le pays, pour s'en aller gagner leur vie, loin de la terre où ils sont nés ♪♫ *), les rivalités fraternelles, mais aussi la guerre... et l'amour.

.

Cette histoire m'a captivée et crispée (je pensais : "Mais casse-toi, libère-toi de ce vieux con injuste, laisse-le se dém3rder avec sa vieille charrue !"). J'ai été déçue par le retournement ; non pas par l'idée elle-même ni le sujet, mais par la façon précipitée dont il est présenté. Heureusement, la postface permet de le re-considérer différemment, et j'ai alors trouvé les émotions qu'aurait dû susciter la 'révélation' dans la BD, si elle était apparue plus sobrement.

.

* https://www.youtube.com/watch?v=MHLa8TD4opU ♪♫
Commenter  J’apprécie          301
La chambre des merveilles (BD)

Club N°50 : BD non sélectionnée mais achetée sur le budget classique

------------------------------------



Superbe bande dessinée adaptée du roman de Julien Sandrel qui se retrouvera bientôt sur les grands écrans.



Les images se marient bien avec le texte.



L'histoire est fluide et bien menée.



Une belle découverte !



Sirtitou

------------------------------------



Je ne connaissais pas le roman de Julien Sandrel.



Un bon feel-good book joliment illustré et colorisé.



J'ai trouvé les dessins bien adaptés au sujet.



Une BD qui fait du bien et donne envie de se replonger dans son livre des merveilles.



Samuel

------------------------------------



Philippe Pelaez, c'est 8 BD en 1 an, bon OK beaucoup d'adaptations mais quand même !!!



Bon là, c'est un feel-good book adapté du livre de Julien Sandrel.



Le dessin est agréable et on reconnait bien l'école espagnole (bien que Patricio Angel Delpeche soit argentin).



L'histoire est un peu trop "pathos" à mon goût.



Aaricia

------------------------------------



Pour ceux qui ont lu le livre, on retrouve bien l'histoire de Julien Sandrel.



On s'attache à cette maman qui fait tout pour vivre les rêves de son fils dans le coma.



Malheureusement, le dessin ne permet pas de vivre cette histoire comme dans le roman car trop enfantin à mon goût.



Mel

------------------------------------


Lien : https://mediatheque.lannion...
Commenter  J’apprécie          300
Dans mon village on mangeait des chats

Tout commence avec Charon, le boucher qui tue des chats pour en faire des pâtés qu’il vend au prix du foie gras. Jacques, un adolescent, le surprend et un terrible accident suivra.

Le soir-même, en rentrant chez lui, Jacques découvre que son père à une fois de plus frappé sa mère et là encore, il décide que ça suffit.

Toute la vie de Jacques sera placée sous le signe de la violence et cet engrenage fera sa fierté jusqu’à ce que l’engrenage s’emballe et signe sa perte.

Cette bande dessinée est sombre, tant par les couleurs employées que par les propos mais j’ai beaucoup aimé suivre le destin très particulier de ce garçon.

Commenter  J’apprécie          300
Dans l'ombre

Club N°53 : BD non sélectionnée

------------------------------------



Les coulisses de la vie politique.



On n'est surpris de rien, le rythme bien trouvé évite l'ennui.



Le récit d'une campagne présidentielle par le premier conseiller d'un candidat qui, face à des soupçons de fraude, s'interroge sur l'honnêteté de son patron et le sens de sa vie militante.



Morgane R.

------------------------------------

Commenter  J’apprécie          280
L'Enfer pour aube, tome 2 : Paris rouge

Masse critique, suite de ma lecture, je remercie les éditions Soleil et Babelio de m'avoir permis cette plongée dans le Paris de la Commune et de du tournant dix-neuvième vingtième siècle.

Mon ressenti (et mes étoiles) sont à considérer dans la globalité, cet album (comme le précédent) souffrant quand même de quelques défauts qui m'ont cependant moins affecté pendant cette suite des aventures de Hervé, Nolwenn, Gabriel, Angèle, et surtout l'incorruptible capitaine Levedec...

Principalement la quasi impossibilité de discerner du premier coup d’œil les protagonistes. Les traits sont ressemblants, il faut s'attacher aux détails, qui certes ne manquent pas : vêtements, angles de vue, figurants... Ajouté au fait que la fameuse voix narrative vient souvent entamer un changement de décor une case avant et même une page avant celui-ci, cela oblige à une grande concentration...

Concentration incitant d’ailleurs à creuser ce chapitre jamais étudié par l'historiographie scolaire agréée. On peut apprendre qu'en 1871, le camp de Satory fut le lieu de détention de milliers de communards qui vécurent plusieurs mois sans abri ni soin, sous la garde des fidèles Versaillais. Ils moururent de maladie, furent abattus...

Le polytechnicien Louis-Nathaniel Rossel, qui y fut fusillé le 28 novembre 1871, à vingt-sept ans, fait d’ailleurs penser au héros de cette bande dessinée.

Louise Michel elle même fut détenue dans ce camp Elle déclara lors de son procès avant d'être envoyée en déportation : « Ce que je réclame de vous qui vous donnez comme mes juges, c’est le champ de Satory où sont tombés nos frères… Si vous n’êtes pas des lâches, tuez-moi ! »

Cette bande dessinée navigue donc dans cette époque historique en mettant l'accent sur la répression par le pouvoir, grâce à la "force légitime", de la pauvreté et de la misère du peuple.

C'est donc une œuvre engagée que les allergiques aux soulèvements populaires, les rentiers de tous poils, aficionados de la mesure et de la bonne tenue hypocrite et bourgeoise ne supporteront pas.

La fin du premier album offrait des éléments de compréhension, il n'y en a pas ici, c'est dommage surtout pour la scène finale qui m'a laissé dans le doute...

Une bande dessinée rageuse pour alimenter un esprit de révolte.
Commenter  J’apprécie          282
L'Enfer pour aube, tome 2 : Paris rouge

Pendant la Commune, un convoi de la Banque de France transportant plus de trois millions de francs et destiné à payer les soldats communards est attaqué. En 1904, la fille du commandant du convoi veut se venger. ● Ce second tome est encore plus fouillis que le premier. L’histoire, racontée en dépit du bon sens, est à peine compréhensible. Comme dans le premier tome, le dessin est très brouillon, pas plaisant du tout, tous les personnages se ressemblent. Le propos est caricatural, sans nuance, d’une lecture désagréable. ● Je remercie Babelio et les éditions Soleil de m’avoir permis de lire cet ouvrage dans le cadre d’une masse critique privilégiée.
Commenter  J’apprécie          283
Puisqu'il faut des hommes

Je viens de dévorer : Puisqu'il faut des hommes de Philippe Pelaez.

Parfois, il est des secrets qu’il vaut mieux taire...

Pour les habitants du village, il a beau s’être engagé, il n'est qu'un planqué. Un militaire de bureau qui a évité les zones de combat. Et surtout, un lâche qui a fui, grâce à l’armée, les durs travaux de la ferme.

Personne ne lui pardonne d’avoir abandonné sa famille, alors que son frère est cloué sur une chaise roulante, victime d’un accident de tracteur pendant son absence.

D’enfant du pays, Joseph revient en paria.

Par bonheur, l'honneur du village est sauf : le fils du cafetier, lui, a réellement combattu en Algérie.

Mais quand il revient à son tour de la guerre, son récit va bousculer bien des certitudes...

Puisqu'il faut des hommes est une bande dessinée que j'ai pris plaisir à lire d'une traite.

J'ai aimé les traits de l'auteur, l'histoire. Les deux sont simples, mais efficaces.

Joseph revient de la guerre d'Algérie et il en prend plein la tête car tout le village est persuadé qu'il a fait la guerre planqué derrière un bureau ! Son frère est en fauteuil roulant suite à un accident de tracteur. En revenant, le jeune homme est devenu un peu un bouc émissaire. Son père est très dur avec lui, son frère boit trop et sa mère est impuissante face à la réaction des deux hommes.

Alors Joseph encaisse... jusqu'au retour de son ami, qui va remettre les pendules à l'heure...

Je connais mal la guerre d'Algérie, et j'ai apprécié de découvrir cette période. C'est une bonne BD, avec une histoire qui se tient de la première à la dernière page. Cela montre bien la dureté des fermiers, surtout à cette époque.

J'ai apprécié ma lecture, et je mets cinq étoiles.
Commenter  J’apprécie          270
L'Écluse (BD)

On ressort l’histoire de Quasimodo transposée dans le Lot en 1960, ici, il ne fait pas sonner les cloches mais il ouvre les écluses, Des meurtres, un coupable tout désigné, une population de ploucs assoiffé de vengeance, un inspecteur de police citadin qui vient donner des leçons aux péquenots du coin, c’est cousu de fil blanc, dès le premier cadavre, on connait déjà toute la suite, on connait déjà le méchant de l’histoire, et les flashbacks ajoutent une couche épaisse et collante sur les clichés, la seconde guerre mondiale, l’enfance maltraitée, avec les poncifs pour tirer sur la corde de l’empathie, le harcèlement, la peur de la différence… Il y a quelques ellipses et variantes sur la fin, histoire de faire croire que cette histoire n’a pas déjà été écrite mille fois, mais ça ne prend pas, c’est un un scénario rempli de trucs et d’astuces galvaudés avec des personnages caricaturaux sans relief. Le dessin est très académique, il a un aspect caricatural très prononcé, dans le genre aventure et humour, il ne s’accorde pas au récit sombre et violent et ne permet pas d’aller vers l’émotion. Pour finir, je n'ai pas aimé cette fin (la façon dont la justice est rendue). Bref, je n’ai pris aucun plaisir avec cette lecture.
Commenter  J’apprécie          263
Puisqu'il faut des hommes

Lorsqu'on lit cet album, il ne faut pas passer à côté du dossier en fin d'ouvrage qui décrit les traumatismes de guerre appelés TSPT pour troubles de stress post-traumatique. Cette dénomination scientifique n'existe que depuis 1980. Avant, c'était le cinéma qui relatait les dommages de la guerre sur le psychisme des soldats. Quant à la guerre d'Algérie, il y a un grand silence autour des « évènements ».

Cette BD raconte le retour de Joseph, l'un de ces soldats partis en Algérie française, on y découvre les mentalités de l'époque vis-à-vis de cette guerre coloniale qui ne voulait pas dire son nom.

Joseph est confronté à l'animosité générale. Celle de son père tout d'abord, écrasé par le travail à la ferme, et son frère ensuite, qui s'est retrouvé dans un fauteuil roulant après un accident de tracteur. Mathilde, sa presque fiancée, ne l'a pas attendu, elle va se marier avec un autre. Quant au village, il bruisse de rumeurs et de mépris, car Joseph était « un planqué », il travaillait dans une administration tandis que ses camarades risquaient leur vie dans le djebel.

Mais les évènements ne sont pas aussi lisses qu'ils le laissent paraitre. Entre les non-dits, les jalousies, les rancunes et les malentendus, notre personnage Joseph aura bien du mal à se retrouver. le retour est bien difficile pour lui, il cristallise sur lui les lâchetés, les jalousies et la culpabilité du plus grand nombre et il se retrouve seul au milieu de l'arène. Même son frère se défie de lui, comme s'il était responsable de cet accident qui en a fait un handicapé.

Ce roman graphique est donc l'histoire d'un retour qui s'avère bien ardu, le tout sur fond de guerre d'Algérie. Mais plus que la situation historique, il est surtout question de mentalités dans un village, de ceux qui sont restés et les autres qui sont partis se battre. On y croise des paysans acharnés à la tâche mais croulant sous les dettes, des mères inquiètes pour leur fils et des jeunes filles aux amours contrariées.

Le traumatisme de guerre est peu évoqué - juste quelques réminiscences brutales chez Joseph, mais il est surtout question des émotions, les désordres engendrés par le retour du jeune soldat dans une société, une famille qui le jugent durement à l'aune de leurs convictions faussées par des informations erronées et un jugement subjectif et hâtif.

Je regrette que l'auteur n'ait pas développé davantage les traumatismes liés à la guerre et se limite à des différents personnels.

Le dessin est agréable et explicite avec des personnages bien croqués.

Commenter  J’apprécie          260
Automne, en baie de Somme

Je ressors de cette lecture légèrement déçue. L'intrigue correspond bien à ce qui est annoncé dans le résumé, mais je m'attendais quand même à une histoire un peu moins sombre : cela commence par un meurtre, et l'enquête finira par révéler tout le sordide d'une société dominée par des très riches qui soignent leur image publique mais abusent de leur pouvoir pour assouvir dans l'ombre leurs bas instincts ou régler leurs comptes.

Les auteurs dépeignent ainsi une image peu reluisante d'un Paris au tournant du XXème siècle entre grandes demeures bourgeoises, ateliers d'artistes ou bistrots ouvriers (meurtres, vengeances, viols, etc).

Les dessins sont beaux, colorés, en particulier les paysages car les traits des personnage ne sont pas toujours très réguliers.

Je crois que cette histoire n'était tout simplement pas pour moi...

Commenter  J’apprécie          250
L'Enfer pour aube, tome 2 : Paris rouge

La violence est l'arme du faible.

-

Ce tome est le second d’un diptyque racontant une histoire indépendante de toute autre. Il faut avoir lu le premier tome avant : L'Enfer pour aube, tome 1 : Paris Apache (2022). Sa première édition date de 2023. Il a été réalisé par Philippe Pelaez pour le scénario, Tiburce Oger pour les dessins et les couleurs. Le lettrage a été assuré par Estelle Kreweras. Il comprend cinquante-quatre pages de bandes dessinées.



À Paris, en 1871, il y avait cet homme qui courait, haletant, fébrile, glissant sur le pavé, frôlant les bâtiments, jetant sans cesse des coups d’œil derrière lui, s’abritant sous les portes cochères pour s’offrir quelques minutes de répit. Il savait, lui, le lâche, le traître, que la peur est un prédateur qui s’attaque à l’homme isolé. Patiente et sereine, l’aube attendait son heure pour balayer l’opacité et la noirceur de son ennemi supérieur en ombres. Elle surgirait doucement des faubourgs ourlés de brume, repoussant les dernières nuées sombres qui offraient encore un asile au fugitif. Car c’est entre chien et loup qu’il avait choisi la fuite, lorsque la nuit ripaille, se gorge de festins et ne se soucie guère de devenir demain. Elle offrait un sursis au fourbe qui se faisait ombre, qui se faisait mur, oscillant sans cesse entre la crainte d’être démasqué et l’impatience d’atteindre les remparts. Et lorsque l‘aube s’en vint, presque par surprise, jetant son voile de vérité sur la ville déjà meurtrie et bientôt mutilée, il fut presque surpris d’avoir atteint son but.



Charles Brunel, agent du lieutenant-colonel Ducoroy, du 55e régiment d’infanterie, présente son sauf-conduit aux soldats : il faut qu’il voie le lieutenant-colonel, c’est urgent. Une fois devant son supérieur, il rend compte : Camélinat, le directeur de la Monnaie de la Commune exige trois millions deux cent mille francs en pièces d’or pour les refondre. Le comité de salut public n’a plus de métal pour battre monnaie et payer les hommes. Et cette fois, ils sont bien décidés à envoyer la troupe si la banque refuse. Le marquis Alexandre de Plœuc, sous gouverneur de la banque de France, seul aux commandes de la Commune, a fait mettre plus de trois cents sacs dans un fourgon ; si la Commune ne vient pas chercher l’argent, ces sacs disparaîtront et plus personne ne mettra la main dessus. Brunel continue : après-demain, le 20 mai donc, tous les sacs d’or, d’argent, les billets et les titres seront descendus à la cave. Ils vont ensabler l’escalier et préparer la défense de la banque. Ils le donneront aux fédérés, s’ils viennent. Le marquis sait qu’il vaut mieux lâcher trois millions et sauver les quatre milliards qu’il y a dans les coffres. Dauger et Letessier ont supervisé le chargement du fourgon. Le plan est d’arriver plus tard, avec Rochemond comme prévu. Le lieutenant-colonel souhaite savoir qui va escorter le fourgon. L’agent répond que c’est bien le problème, le comité leur a collé un capitaine breton, un certain Ronan Levedec, un idéaliste. C’est un rouge, un vrai, un de ceux qui préfèrera mourir sur la barricade, quitte à laisser ses deux petites filles orphelines. Il a son neveu avec lui, un gamin de quinze ans qui ne le lâche pas d’une semelle. Ducoroy conclut qu’il faut s’occuper de ces deux-là : il ne doit pas y avoir de témoin.



Le lecteur entame ce second tome assez intrigué : en effet, l’identité de l’Écharpe a été révélée dans le premier tome et il ne semble pas y avoir de dynamique pour que ses aventures se poursuivent. La motivation semblait entendue : une vengeance trouvant son origine dans des forfaitures commises pendant la Commune de Paris en 1871. Il restait tout au plus la mystérieuse affliction de l’inspecteur Gosselin. L’histoire s’ouvre ici avec un élément d’intrigue supplémentaire, non évoqué précédemment : le vol d’un magot, trois millions deux cent mille francs en pièces d’or, un fait authentique. Quoi qu’il en soit, le lecteur replonge sans se faire prier dans ce Paris, d’abord en 1871, puis en 1903. Le plaisir est immédiat, de retrouver la narration visuelle de Tiburce Oger. Il y a d’abord cette mise en couleur à base de lavis de gris tirant parfois vers l’ocre, une sensation entre la grisaille de Paris, une morale traînée dans la boue, et parfois rehaussés par des touches de rousseur, ou de rouge, évoquant parfois la violence physique, parfois la rage émotionnelle, parfois l’automne, sans que le lecteur ne parvienne à établir un lien logique entre ces éléments ressortant contre la grisaille. Qu’importe, car cela n’enlève rien à la force visuelle de la narration.



Dès la première page, les rues de Paris apparaissent plus vraies que nature : les pavés mouillés, les façades un peu de guingois, les déchets sur la chaussée. Plus loin la cour de la banque de France avec son grand portail. Pages neuf à treize l’avancée la carriole dans les rues de Paris, les façades des immeubles, les grandes artères, les candélabres, les quais de la Seine. Puis cette page terrible sur le quai bas en bordure de Seine, alors que le capitaine Ronan Levedec essaye de bander la partie inférieure du visage de Gabriel. La cave d’un hôtel particulier avec son échelle, ses étagères de bois, sa trappe en bois. Les barricades et la mitraille. Les catacombes. L’environnement sordide du camp de Satory. Les allées du Père-Lachaise avec les tombes et le statuaire. Montmartre et sa basilique. L’artiste sait évoquer à merveille ces différentes facettes de Paris, avec le dosage parfait entre ce qui est représenté et ce qui est laissé à l’imagination. En outre, ces décors passent de l’arrière-plan au premier plan en fonction de la nature du moment de chaque scène, jouant à part égale avec les personnages, dans une interaction remarquable entre l’humain et l’environnement. Selon ses inclinations, le lecteur sera frappé par un aspect ou un autre : la dureté du contact entre les roues en bois cerclées de fer de la carriole et la chaussée inégale en pavés, l’élégance des encorbellements d’une façade, l’encadrement des fenêtres et des portes, les colonnades d’une rampe d’escalier, les poutres à demi calcinées d’une construction bombardée, les crânes et les ossements dans les catacombes, la boue saturée d’eau du camp de Satory, la pièce unique d’un appartement pauvre, une grille en fer forgé, les arabesques de l’entrée d’une station du métropolitain, l’autel de la basilique, etc.



Les plans de prise de vue génèrent une dynamique de la narration, comme s’ils animaient aussi bien les personnages dans leurs actions que les décors. L’artiste fait des merveilles en termes de composition, un savant dosage entre des traits parfois comme esquissés, des arrondis apportant de la souplesse aux personnages, une apparente absence de finition ou de précision qui conserve la spontanéité, la vie dans les visages et les gestes, sans oublier la rousseur flamboyante du capitaine Ronan Levedec et d’Angèle. Par moment, la direction d’acteur rappelle le naturel des pantomimes de Will Eisner, juste ce qu’il faut d’exagération pour relever la qualité de l’expression et pour aboutir à un naturel évident. L’agent Charles Brunel très précautionneux et humble dans ses gestes pour être sûr de ne pas déclencher l’envie de tirer chez les soldats, la traîtrise justifiée par les convictions du soldat à terre qui ordonne à ses collègues de tirer sur l’homme qui vient de l’épargner, la détermination absolue d’enfant qui anime Angèle quand elle remet un fusil plus grand qu’elle à son père, la volonté farouche de son père au camp de Satory pour revoir ses filles à tout prix, l’indignation brutale de l’inspecteur Gosselin face à une veuve hautaine et suffisante, la panique de la foule dans la station de métro en entendant crier au feu, la conviction inébranlable d’Angèle adulte, etc.



Avec une telle narration visuelle, le lecteur sent que l’intrigue passe au second plan dans son esprit. Finalement, il ne s’agit pour le scénariste que d’expliquer comme est advenue la situation de départ du tome précédent : le crime qui lie Ducoroy, Charles Dauger, Letessier, Rochemond. L’origine de cette vengeance implacable de l’Écharpe. Pour autant, l’intrigue se savoure pour elle-même : bien troussée, entremêlant un vol bien conçu, profitant des circonstances d’une époque troublée, une vengeance perpétrée par la génération suivante, un policier honnête et consciencieux. Des circonstances qui introduisent de l’imprévu, à la fois dans l’organisation du vol, à la fois dans les actes des individus. Le lecteur dévore un chapitre après l’autre : l’introduction, le souvenir des pillards de la Commune, la devise des cupides (La vertu ne vient qu’après l’argent), le camp de Satory dernière étape pour les Communards avant la déportation au bagne, d’étranges incidents dans le cimetière parisien du Père-Lachaise près du mur des Fédérés, le mont des martyrs (le Sacré-Cœur rappelle aux Communards l’expiation de leurs crimes). Il ressent l’opportunité du profit pour les gradés militaires qui organisent le vol, et l’intensité des convictions politiques chez Ronan Levedec, d’un côté des individus exerçant un métier, de l’autre un idéaliste. Trente ans plus tard, en 1903, Angèle incarne l’héritage de la Commune de Paris : fille d’un Communard, consciente du sort qui a été réservé aux insurgés. Elle a choisi un mode d’action par la violence, intimement convaincue que la fin justifie les moyens. Pour elle, Commune, révolte, révolution, elle revient à chaque fois que le peuple, las de se faire servir une double ration de misère, prend conscience de sa servitude. Elle est un mal nécessaire, et peu importe le moyen de ses actions pourvu qu’on ait la terreur. Cette violence-là si elle était le fait du prince, l’inspecteur la validerait sans hésiter. Mais si elle vient du peuple, elle ne peut être qu’illégitime. Il est un policier, il est le bras armé d’un ordre politique et social qui est incapable de se remettre en cause… À moins qu’on l’y contraigne.



L’expression L’enfer pour l’aube est tirée d’un poème de Victor Hugo (1802-1885) : Melancholia (1838), tiré des Lamentations (1856), dénonçant le travail des enfants. Avec cette seconde partie du diptyque, l’artiste replonge le lecteur au beau milieu des personnages, dans une narration visuelle d’une rare conviction, que ce soit pour le naturel et la vitalité des personnages, la sensation des rues de Paris, et quelques scènes d’action saisissantes. Le scénariste déroule une histoire de vengeance dans une intrigue remarquable, entre grande Histoire, enfant prisonnière du destin issu de l’histoire de son père, mise en perspective du recours à la violence par un peuple, par un individu. Épique et humain.
Commenter  J’apprécie          240
L'Enfer pour aube, tome 2 : Paris rouge

Ce deuxième tome nous confirme l'identité du mystérieux justicier avec lequel nous avons fait connaissance précédemment. Mais surtout, nous accédons aux raisons qui l'ont conduit à en endosser ce rôle et à sélectionner ses "victimes " . Notre héros porte la souffrance et la rage des Communards mais aussi de profondes blessures personnelles.

Philippe Pelaez et Tiburge Oger nous ramènent quelques temps au coeur des événements de 1871 et de façon particulièrement poignante à la semaine sanglante qui assassine dans la pire barbarie le peuple de Paris.

Comme dans le premier tome j'ai appris beaucoup de choses sur l'histoire de la Commune, par exemple les raisons de la construction de sacré coeur, le détournement de l'or de la banque de France, l'existence de l'odieux camps de Satory.

Mais ce qu je retiendrai plus intimement de ce très beau récit, c'est la force des émotions qu'il met en exergue, rendant plus tragiques et plus humains encore la bravoure et la dignité des communards. Je retiens aussi,le beau message comme un fil rouge,qu'on ne perd jamais quand on lutte pour la liberté et la justice. Enfin, je suis touchée par l'interpellation si pertinente de Philippe Pelaez et ses complices,sur la légitimité de la violence: ne peut-elle être acceptable que lorsqu'elle est " le fait du prince", mais est intolérable si elle vient du peuple quand il prend conscience de sa servitude ?

Je terminerai en ajoutant qu'au delà de la qualité du scénario et du graphisme, ces deux tomes sont de très beaux " objets"; soignés, agréables au toucher comme à la vue.

Merci encore à Babelio et aux éditions Soleil.
Commenter  J’apprécie          242




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Philippe Pelaez (1063)Voir plus

Quiz Voir plus

Voyage au centre de la terre

Comment s’appelle le personnage principal ?

Otto
Axel
François
Hans

10 questions
116 lecteurs ont répondu
Thème : Jules VerneCréer un quiz sur cet auteur

{* *}