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Critiques de René Fallet (253)
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Paris au mois d'août

René Fallet - Paris au mois d'août - 1964 : Ah ce Paris populaire des années 60, celui des petits restos, des cabarets, des courses de vélo et de l'accordéon qu'on entendait à tous les coins de rue. Un Paris qui n'existe plus depuis que les classes les plus pauvres sont parties garnir les barres d'immeubles en banlieue. Henri Plantin est vendeur au rayon pèche d'un grand magasin, un homme simple et sans histoire qui se réjouis intérieurement du départ en vacances de sa femme et de ses enfants. C'est la grande transhumance de l'été qui voit la moitié de la cité se vider vers des petites villes côtières qui deviennent le temps de quelques semaines des ruches remplies de plagistes à la peau blanche. Donc cette année Henri reste seul, il va pouvoir en sortant du turbin taper le carton avec ses potes et boire quelques bières sans penser à rentrer vite à la maison car le diner est servi tous les soirs à 19h00. Patricia Greaves est anglaise, elle est en France pour fuir une histoire d'amour difficile et prendre un peu de bon temps dans la capitale. Ont-ils pensé ces deux-là se rencontrer et se plaire ? Lui finalement ne devait être pour elle qu'un petit mangeur de grenouille sans relief tandis qu'à ses yeux à lui elle ne pouvait être qu'une grande sauterelle british un peu excentrique et prétentieuse. Pourtant ces deux-là s'apprécient et s'aiment l'instant de quelques jours en oubliant leurs différences. Car Patricia est jeune, elle est belle, elle sent bon, elle ressemble à un mannequin de magazine. Et lui a la quarantaine vaillante, le profil sec et aiguisé du voyageur au long cour alors qu'il n'a jamais vu la Seine plus loin que le pont de Charenton. Pourtant il trouve des réflexes d'explorateur pour lui montrer sa ville, pour déambuler avec elle de Saint-Germain des prés à Montmartre. Il ira même jusqu'à se battre pour ses beaux yeux ou du moins à prendre une raclée par un mastodonte tout juste échappé d’un quartier classieux de Londres. La vie est douce quand on aime mais le temps file et la fin des vacances arrivent, comment pourra-t-on alors se séparer et reprendre une vie normale pour Vingt, trente, quarante ans peut être ? Elle rentre en Angleterre avec ses rêves de covergirl, lui retrouve femmes et enfants avec au fond du cœur le souvenir prégnant de ces heures remplies de chaleur. Ce livre de René Fallet défiait le conformisme et la morale de l’époque. Il abordait l’adultère comme une option agréable et non pas comme un vice nimbé de culpabilité judéo-chrétienne. C’est sans doute ce qui en fait encore toute sa modernité aujourd’hui… vivifiant
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Georges Brassens

"C'était pas des amis choisis

Par Montaigne et La Boétie

Sur le ventre, ils se tapaient fort."

Les copains d'abord.





"Je me suis dit que 14 années de bonheur ( auprès de George Brassens) méritaient mieux qu'une bouteille de champagne" Et, ce fut un livre, sur son ami.





Mais, René Fallet ( auteur de romans, dont "Le triporteur" et "La soupe aux choux") râle :

- C'est Brassens qui...que...quoi

- Bois, fit George.





"Dans le bouquin, il y a une espèce de biographie, un peu beaucoup de sentimentalisme imbécile, l'analyse ... de 90 chansons, des photos..."

- Il faudrait que tu soulignes que je chante simplement, accompagné simplement, par un seul bassiste, souffle Brassens





C'est difficile d'avoir du succès en ne faisant rien pour en avoir.

Je ne parle que des cons...

" le temps ne fait rien à l'affaire

Quand on est con, on est con"





De la mort:

"Quand l'un d'entre eux

Manquait à bord

C'est qu'il était mort.

Les copains d'abord."





Des femmes et des putains:

"Une jolie fleur déguisée en vache

Une jolie vache déguisée en fleur

Qui fait la belle et qui vous attache

Et qui vous mène par le bout du coeur"





"Brassens n'aura pas eu de chance avec ses amis. Aucun n'aura jamais su chanter sa gloire. Mais, tous auront su boire son vin."

Mais, si Brassens n'avait eu besoin de personne?





René et George signèrent ensemble, un pacte unique (signé le 24/11/1978) dans l'histoire des amitiés, où chacun des deux s'interdisait de parler de l'autre, quand cet autre aurait disparu... "quelques puissent être les sommes proposées".

Et, René Gallet ne survécut guère à George Brassens.





Écoutez avec moi, cette grande voix qui vient de la Terre et de la Mer, de la Méditerranée ! La voix des pauvres Martin, de l'Auvergnat... de La fille à cent sous.

Écoutez Brassens, car après tout, " Cupidon s'en fout"..
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Paris au mois d'août

Paris au mois d'août, j'y suis...

Difficile maintenant de se faire accoster par une Suédoise

ou une Anglaise qui demandent leur chemin

Elles ont toutes un smartphone...

Plantin, le héros du roman de Fallet a cette chance.

Pendant que madame part en vacances

avec les marmots,

le vendeur rayon pêche à la Samaritaine

se retrouve célibataire.

Entre boire des coups et jouer aux cartes avec les copains,

il aime flâner dans les rues de Paris

et se fait accoster par Pat, une jeune touriste anglaise

qui lui demande le chemin du Panthéon

pour voir la tombe de... Napoléon ?

Le courant passe tout de suite entre eux...

Ce Paris au mois d'août, il date d'un bail

mais quel programme !

Le Paris d'antan

Les copains comme cochon

la concierge fouille merde

L'anglaise so british qui sent la citronnelle

Et l'amour qui donne des ailes

Oui ce René, Fallait que je le lise !
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Le beaujolais nouveau est arrivé

« Je suis un vieux Peau-Rouge qui ne marchera jamais en file indienne. (Achille Chavée) »

Eh bien moi, Je les ai trouvés vraiment sympas, ces quatre peaux-rouges décrits avec tant de tendresse par le distingué œnologue René Fallet !

Un brin anars, un brin misogynes, un brin franchouillards, un brin réacs, fricoteurs en diable, ils m’ont fait grogner, bougonner, grimacer, et rire aux éclats. Ils m’ont ému aussi. J’ai lu un vrai bouquin, avec une saveur acide, et des grosses épines sur lesquelles on se pique. Un livre qui m’a rendu nostalgique aussi, au point d’affoler mes souvenirs…

La France de Giscard, ses trente glorieuses, ses grands ensembles, l’ascension social, son métro-boulot-dodo-jus de fruits, ils s’en tamponnent. Ils lui ont tournée le dos, dédaigneux comme des Princes, pour se terrer au chaud dans le « café du pauvre », celui où il y a encore de la sciure sur le sol.

Ce ne sont pas des révolutionnaires, nos quatre indiens ! Ils ne rêvent pas de matins radieux et ne dansent pas la carmagnole à tout bout de champ. Ils ne veulent pas de ce monde tel que les hommes l’ont fait, tout simplement, et préfèrent vivoter d’expédients tout en bas de l’ascenseur social. Qu’on leur foute la paix, quoi !

Quatre singes qui ne connaissent pas l’hiver…

Il doit bien y en avoir encore de nos jours, de ces vieux peaux-rouges qui trainent en espadrilles et en habits colorés dans nos rues ? Je suppose que ceux-là sont totalement réfractaires à internet et au portable, et complètement bouchés quand on leur cause d’économie numérique et de ses « extraordinaires débouchés en terme de richesses et d’emplois » ! A coups sûr, leurs esprits factieux et mal intentionnés tournent en dérision l’écologie punitive et notre société spectacle.

Mais je me demande : ont-ils toujours la même passion pour le beaujolais nouveau ?

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Les vieux de la vieille

Pour moi qui ai toujours un train de retard, les vieux fourneaux jusque-là c'était trois vieux de la vieille qui habitaient le même livre de René Fallet.

Jean-Marie Péjay, Blaise Poulossière et Baptiste Talon, à plus de soixante-dix ans, découvrent qu'ils s'ennuient.

Blaise Poulossière, à 72 ans passés, s'ennuie depuis que Jeanne, sa femme, repose au cimetière du village.

Il ne boit plus guère, il le jure sur la tête de la défunte !

Baptiste Talon, lui, vit chez ses enfants depuis que sa femme s'est noyée dans une mare, chez ses enfant qui essaient de le tenir propre, ce qui n'est pas une mince affaire !

Et leur vieux pote, Jean-Marie Péjat racle du sabot et peine à vivre, à traîner son imposante carcasse de 75 ans.

Crachant, chiquant et cahotant, ils se chamaillent et vident ensemble des chopines.

Mais plus rien ne les retient au village, ni affection, ni amitié.

Leurs souvenirs sont trop lointains pour être encore des souvenirs.

Le soir de la fête des escargots, ils s'aperçoivent qu'ils sont vieux, terriblement vieux et que leur place est désormais à l'asile départemental de Gouyette.

Ils partent donc pour Gouyette ...

Il n'est pas si fréquent pour un lecteur de se réjouir avec des personnages qui se drapent autant dans leur vieillesse.

C'est que le sujet est sensible.

Mais René Fallet a écrit un roman irrésistible emporté dans un tourbillon d'humour, de fantaisie et de tendresse par trois vieux paysans, une paysanne aussi vieille qu'eux et un âne cacochyme.

Le récit est est une équipée pédestre, mouvementée et tonitruante, un dernier road-movie avant que les portes de l'asile ne semblent se refermer sur trois vies.

Des adieux tumultueux aux copains du cimetière jusqu'au domaine des Echanguettes où les trois compagnons retrouvent Catherine Cateau qu'ils n'avaient pas revue depuis cinquante ans, d'aventures en aventures, ce voyage est excessif, gaillard et finalement très insolent.

Catherine a eu autrefois des bontés pour les trois, et aucun d'entre eux ne s'en doutait !

C'est la jalousie qui va leur révéler qu'ils ne sont pas vieux, que la vieillesse n'existe pas.

Le roman de René Fallet est étourdissant de tendresse, de fantaisie et d'humour.

En 1960, Gilles Grangier en a réalisé une adaptation pour le grand écran dont les rôles principaux étaient tenus par trois vieux "débutants" : Jean Gabin, Pierre Fresnay et Noël-Noël.

Les dialogues ont été signés par Michel Audiard.

Et ben, mes cadets, c'est vous dire ...
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Le braconnier de Dieu

Le braconnier de Dieu, c'est l'histoire de Grégoire Quatresous, dit « Vingt Centimes ». Jeune homme épris de coquineries, cherchant avec son ami Toussaint Baboulot à oublier de temps en temps les affres de l'Occupation dans les bras d'une femme généreuse dont le mari est prisonnier, c'est un soir de 1943 en revenant de chez la mère Françoise que son destin va prendre une tournure inouïe. Pour échapper à une patrouille allemande qui traque les deux compères, il ne doit la vie sauve qu'en trouvant refuge auprès de moines Trappistes. C'est comme cela qu'il va devenir Frère Grégoire à l'abbaye Notre-Dame de Sept-Fons.

Vingt-six années consacrées à la dévotion et à la communauté de ses frères moines... Et puis un dimanche de juin...

« Ce fut en allant voter Pompidou que Frère Grégoire rencontra le péché. » C'est d'ailleurs ainsi que commence ce récit savoureux de René Fallet. Tout est annoncé dans cet incipit jouissif à souhait...

Ce dimanche matin-là, le chemin de Frère Grégoire va rencontrer celui de Muscade, belle et voluptueuse marinière dont la péniche est amarrée sur la berge du canal du Nivernais. Non, je vous assure qu'il n'y a pas de contrepèterie dans cette phrase...

C'est un dimanche matin de juin qui sent l'odeur enivrante des pistils, l'école buissonnière et le pastis...

Muscade, c'est la jolie fleur rouge d'une bouche, c'est un pépin qui se glisse dans le fruit défendu, quelque chose de trouble et de féminin. C'est un rire gorgé d'impudeur et de jaja, c'est le bleu du ciel qui se retourne, c'est la java dans tous ses états...

Quand le vin de messe est tiré, il faut le boire !

Frère Grégoire ne s'en remet pas, certaines mauvaises langues diront que, s'en retournant à l'abbaye après cela, au bureau de vote, se saisissant d'un seul bulletin, il aurait même voté communiste...

Je vais vous faire une confession : ce court roman m'a fait un bien fou. C'est une ode à l'incivilité, à la chopine et à l'amour. Chaque page se boit comme un verre de Saint-Pourçain.

C'est l'aventure au bord du zinc, c'est le soleil dans les verres, c'est la joie au balcon à gorges déployées...

C'est follement drôle et c'est fin en même temps, jamais vulgaire, fin de poésie... Poésie champêtre, rurale, poésie de la fraternité et de l'amour...

Chaque phrase se boit comme du petit lait. « C'est le petit Jésus en culotte de flanelle ! »

Drôle, léger oui... Mais ne vous y trompez pas, derrière l'allure d'une farce paillarde et anticléricale, derrière la langue truculente de René Fallet, se cache aussi une fable inspirée qui fait l'éloge de la liberté et de la joie de vivre.

Apôtre de l'esprit libre, René Fallet nous invite, en fustigeant la religion, à revisiter la notion du péché et à nous éprendre de la vie telle qu'elle vient, avec ses gourmandises et ses chemins de traverses...

Et Dieu dans tout ça ?

Dieu ? Il s'en sort plutôt bien merci pour lui, dépoussiéré, réhabilité, remis au coeur de la vie...

Le braconnier de Dieu, c'est un orgasme bucolique, oenologique, fraternel, littéraire...

Le miracle de ce petit livre sans prétention est que chaque page est un éveil des sens.

Un roman à déguster sans modération...

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Banlieue sud-est

Banlieue sud-est est le premier roman de René Fallet écrit en 1946 et publié en 1947.

Ceux qui me suivent ici depuis quelques temps savent que j'aime beaucoup les romans de cet auteur presque oublié aujourd'hui. Pourquoi ? J'y trouve quelque chose de délicieusement désuet, un côté un peu anar et épicurien, un esprit libertaire qui ne se prend jamais au sérieux, avec un fond de tendresse et de poésie populaire. J'ai découvert René Fallet à travers les billets qu'il chroniquait sur les chansons de son ami Brassens, douze vinyles qui font partie d'une collection à laquelle je suis particulièrement attachée. Dans ses billets, on y trouve la verve qui lui est particulière.

Qui plus est dans ce roman, j'ai retrouvé la jeunesse, - ou du moins celle que j'imagine, de mes parents à l'époque où se déroule le récit.

René Fallet écrit ce roman alors qu'il n'est âgé que de dix-neuf ans. Il le situe à Villeneuve-Saint-Georges, dans la banlieue sud-est de Paris, sa ville natale.

Le personnage principal est Bernard Lubin qui avec sa bande d'amis cherche le plaisir de vivre de la jeunesse malgré l'occupation, entre virées à la campagne, flirts avec les filles, disques de jazz achetés au marché noir, mais aussi bombardements, restrictions et Service du Travail Obligatoire. L'auteur aborde déjà les thèmes qui caractérisent toute son oeuvre, comme l'antimilitarisme, l'hédonisme, la critique du travail et une vision poétique du monde.

On y trouve cette adolescence zazoue chère à Boris Vian.

Le roman démarre d'ailleurs dans cette atmosphère bon enfant et désinvolte, même si nous sommes en temps de guerre. Cela démarre comme un air de jazz ou de valse-musette.

La force du roman tient à cela. Ils s'appellent Bernard, Claude, Cous, Alix, Annie, Zézette... René Fallet, que je soupçonne de ressembler comme deux gouttes d'eau à ce fameux Bernard Lubin, nous décrit le quotidien d'une bande de copains en 1944.

L'univers de Bernard Lubin, ce sont les filles, les bistrots, le cinéma, les bals, sans oublier les bons plans et les petites magouilles nécessaires pour se faire un peu d'argent de poche.

Et puis il y a l'amour, ou du moins quelque chose qui y ressemble de très près.

Annie aime Bernard qui aime Zézette qui aime Cous... Jusqu'alors, rien de nouveau depuis la nuit des temps. Mais pour Bernard, le désir envers Zézette devient presque obsessionnel. Il n'en peut plus...

La guerre est là et l'occupation aussi. Ce groupe de copains semble en être un peu indifférent, tandis qu'en 1944 peu d'individus sont encore engagés réellement dans la résistance et que la collaboration active demeure également relativement minoritaire. C'est plutôt une collaboration passive, certes parfois complaisante avec loccupant, parmi une large majorité de la population. Au début de 1944, les résistants de la dernière heure ne se sont pas encore manifestés. D'ailleurs, ils n'y songent pas encore car ce n'est pas du tout leur projection et ils en sont sans doute idéologiquement très éloignés pour beaucoup.

Cette bande de copains représente cette frange de la population d'alors qui n'était ni d'un bord, ni de l'autre, qui subissait l'occupation, bon an mal an...

Au-delà de l'hédonisme qui dicte ce récit, j'ai aimé les thèmes abordés tels que l'indifférence, la lâcheté, la révolte, la jalousie...

L'écriture de René Fallet offre un style familier et parfois détonnant : il passe de la gouaille populo auréolée de l'argot du titi parisien au lyrisme parfois un peu exacerbé mais toujours très beau et magnifique.

La force du roman est qu'il va brusquement produire une tragédie contre toute attente. Parce que la guerre est là, elle est cela, elle recèle des émotions, des émotions qui vont s'éveiller, nous éveiller nous lecteurs, éveiller aussi les consciences qui sommeillent, éveiller l'inattendu, éveiller les personnages, permettre ce qu'un jeune homme de dix-huit ans est capable ou non de faire, agir. Agir ou non, c'est la question en tant de guerre.

Tout ce roman dit cela qui démarre avec la verve d'une conversation au bord du comptoir et avec sa fin digne d'une tragédie antique. C'est la beauté de ce roman bancal mais beau.

La bande-son du roman est désuète à souhait. J'y ai entendu des airs que fredonnaient mes parents entre eux : la valse à Dédé de Montmartre, ah le petit vin blanc, le plus tango du monde...

Et puis le jazz que j'aime de cette époque : Louis Armstrong, Duke Ellington...

Je n'imaginais pas cette fin, une telle fin du roman, mais en tant de guerre on peut imaginer tout, les dédales de personnages qui se côtoient, se fuient, se perdent...

Banlieue sud-est est d'une belle et merveilleuse gravité.

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Les vieux de la vieille

Poulossière, Pejat et Talon, sont trois vieux loustics rustiques confis dans les chopines et les chicaneries.



Sachant que la mort approche, et se sentant devenir étrangers à leur bourg ils décident d'aller à l'hospice de Gouyette. Le trajet devient prétexte à une vadrouille pour retrouver des souvenirs de leur jeunesse.



Comme plus tard dans "la soupe aux choux", Fallet sait dans ce roman rural et picaresque rendre ses vieux ronchons sympathiques et là encore au-delà de la farce, amener une réflexion sur le grand âge…



Ce livre de 1957 fut adapté au cinéma par Gilles Grangier en 1960 dans un film éponyme avec Jean Gabin, Pierre Fresnay et Noël-Noël. Adaptation très libre mais qui garde l'essentiel du livre ; l'amitié ronchonnante des "vieux gars".
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Bulle ou la Voix de l'océan

J'ai retrouvé dans mes livres d'enfants cette étonnante petite histoire de René Fallet et je me suis dit qu'elle plairait sûrement à mes élèves, amateurs de poésie et de belles phrases.



Cette histoire est donnée à lire à partir de 9 ans.

Le texte, particulièrement riche, avec des tournures de phrases certes très jolies, mais soutenues, fait que je le conseillerais à des enfants un peu plus âgés.

J'ai parfois dû adapter le texte, mais mes jeunes lecteurs ont aimé cette histoire qui commence comme un récit de pirate pour finir comme une merveilleuse histoire d'amitié.



*

C'est l'histoire de Bulle, un coquillage rare de l'océan indien, qui, après avoir apprécié la beauté des fonds marins, rêve de découvrir la terre et le monde des hommes. Elle va vivre des aventures mouvementées et rencontrer toute une galerie de personnages étonnants. Flibustiers, tenanciers de taverne, gens de la noblesse, et enfin Petit-Pierre, un petit orphelin.



*

C'est la mer qui se présente la première, impressionnante, majestueuse, mélodieuse, effrayante, monstrueuse.



« Je suis la mer. On me connaît. Je suis salée. Je suis bleue quand le ciel est bleu, verte quand le ciel est… vert. Si vous me préférez rouge, je suis la mer Rouge. Noire, je suis la mer Noire. Jaune. de corail. ...

Je suis la mer ! Je bats les rochers. Je m'amuse à jongler avec les bateaux. Je suis la mer, qui recouvre les trois quarts du globe, qui dit mieux ? Les vagues de dix-huit mètres de haut, c'est moi, la mer ! Je casse tout, je fracasse tout !

Je sais aussi caresser, être calme et limpide, remarquez. Je suis même capable de jolis sentiments. Bulle, tenez, je l'aimais beaucoup. Parfois, mes vagues l'écoutaient au passage. Bulle faisait « bip bip ! » comme vous le savez, j'ouvrais bien grandes mes oreilles de mer et moi, la mer, j'aimais entendre Bulle me dire et me redire la profonde chanson de la mer. »



Et puis Bulle fait son entrée au milieu d'un jardin de corail.



« J'étais une bulle comme toutes les bulles de l'Océan Indien, ornée de mille couleurs de perroquets, peinte avec un arc-en-ciel. Les bulles de Méditerranée sont vilaines à côté de nous autres, bulles des tropiques, c'est vrai.

Quand je dis bulles, je parle du coquillage, notez bien. le mollusque qui est dedans, ce n'est pas lui, la bulle. »



Son destin bascule le jour où, à sa plus grande surprise, elle se retrouve sur un bateau pirate. Objet de toutes les convoitises, elle va voyager à travers le royaume de France de Louis XIV, passant de main en main jusqu'à ce qu'elle rencontre finalement Petit-Pierre.



« Bulle, tu ne peux pas me parler. Mais moi, si tu veux, je te parlerai. Je te parlerai d'amitié. Je t'apprendrai l'amitié. Tous les hommes courent après l'amitié par égoïsme, pour être moins seuls. Si je dois t'aimer, Bulle, ce sera pour ton bonheur à toi. Si je te sais heureuse, et je le saurai à tes couleurs, je serai heureux. Je lis sur les lèvres des hommes, mais les tiennes ne bougent pas. Garde tes chansons, Bulle, je te dirai les miennes. »



*

L'écriture, qui s'accompagne de dessins très simples en noir et blanc, est très belle.

Comme pour « Tistou les pouces verts » de Maurice Druon, ce que j'apprécie tout particulièrement dans ce récit, c'est la façon dont l'auteur s'adresse à son jeune public, ne prenant pas un ton enfantin et puéril pour leur parler.



« L'hiver a une âme, qui est le squelette de l'été. Les larmes ont une âme, elles sont le squelette de la joie. Les hommes ont une âme, qui n'est que le squelette de leur enfance. »



René Fallet épouse la variété des niveaux de langue de ses personnages avec une remarquable puissance d'évocation. Il ajoute à la poésie de son texte, une douce mélancolie, une tendre naïveté, une perspicacité empreint d'innocence, faisant ressortir des images qui prêtent à sourire, à s'attrister, à se révolter.



« Tu vois, Bulle, c'est ma maison à moi. Papa me disait toujours qu'un petit garçon doit avoir une maison à lui, n'importe où, dans un trou, sous un arbre ou sous une roche, pour y faire pousser des souvenirs. Tu m'entends, Bulle ? »



Ainsi, l'auteur joue avec les mots, mêlant l'humour au drame, la poésie aux propos injurieux, l'empathie à la défiance et la ruse, la générosité à l'envie, la bonté à l'égoïsme.



*

« Bulle ou la voix de l'océan » est une histoire surprenante qui véhicule de belles valeurs auprès des enfants par ses messages forts sur l'acceptation de l'autre dans sa différence, sur l'amitié, sur les apparences et les illusions, sur les relations entre les hommes et la mer.

Il permet aussi de réfléchir sur les notions de qualité et défaut, de vérité et de mensonge, de vie et de mort, et de possession.



« C'est le propre de l'amitié que d'avoir tantôt une bouche pour parler, tantôt une oreille pour entendre. »



*

Magique, cette petite bulle aux couleurs arc-en-ciel.

Merveilleux, ce petit roman pour enfants plein de charme, de douceur et de poésie dans la profonde humanité qu'il distille.

« Bulle ou la voix de l'océan » est une histoire savoureuse, émouvante, drôle et triste. Il fallait tout le talent de René Fallet pour que les enfants et leur maîtresse s'attachent à cette belle bulle au chant magique.



Une histoire pour petits et grands, pour rêver et écouter la voix de l'océan.



« Bip bip ! fit Bulle une dernière fois. Petit-Pierre, ceux qui s'aiment ne se disent jamais adieu. Ils se disent à bientôt, à demain, à un de ces jours, au plaisir, à un de ces quatre matins. Voilà ce qu'ils se disent, quand ils s'aiment. »
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Paris au mois d'août

Ne voyez pas une malice de ma part en publiant cette chronique au cours du mois de septembre, mais simplement la conséquence d'un retard dans la réservation de ce livre faite auprès de ma médiathèque préférée.

Paris au mois d'août est un délicieux roman de René Fallet, publié en 1964. D'ailleurs, l'histoire se déroule dans le Paris des années soixante, le Paris bon enfant de la croissance, des congés payés, dans la France de De Gaulle et de Pompidou. C'est le Paris des quartiers populaires, des grands magasins, du zinc, du tiercé, de la belote, des rues qui déjà s'affolent, se vident, se remplissent selon les transhumances urbaines...

Le narrateur, c'est Henri Plantin, un Français moyen, ceux qui ne font pas de bruit, ceux dont on ne dit rien. Il travaille à la Samaritaine, il est chef de rayon aux articles de pêche, magasin 3. Vous le reconnaitrez, il a une blouse grise et il ressemble à Charles Aznavour...

Cette année, Henri Plantin ne suivra pas la petite famille à Concarneau, chez la tante de son épouse Simone... Ouf ! Il ne supportait plus l'iode ni le grand large (ici s'il vous plaît, en tant que Finistérien de souche, je réclame un droit de réserve, ce propos n'engageant que le narrateur !). Bref, Henri se réjouit de ces trois semaines où il restera seul dans l'appartement de la rue Saint-Martin. Seul, pas tout à fait...

Trois semaines pour Henri Plantin, c'est plutôt l'occasion de taper le carton avec ses copains, les apéritifs où l'on devise, où l'on refait le monde à coup de pastis, où l'on devient tous Présidents de la République, où l'on sait brusquement tout sur tout... Bien entendu, tout ceci n'arrive plus aujourd'hui...

Trois semaines où Henri n'est pas obligé de rentrer à la maison à dix-neuf heures pétantes.

Et puis, deux ou trois jours plus tard, à peine se souvient-il d'avoir déposé sa femme et ses trois enfants dans le train pour la Bretagne, qu'Henri Plantin rencontre par hasard Quai de la Mégisserie, une jeune et jolie anglaise blonde en robe rouge du nom de Patricia Greaves, dite « Pat », mannequin à Londres en vacances à Paris, un peu perdue à la recherche de Napoléon pensant que ses cendres reposerait au Panthéon... Pat l'épate (bon, désolé, je sais... !)

Et voilà note Riton indiquant le chemin, se proposant même de faire un brin de causette. Henri propose de l'accompagner vers les Invalides... Il n'en faut pas plus à notre chef de rayon pêche pour hameçonner le coeur de la belle, où c'est peut-être l'inverse, allez savoir !

Mais « il n'y a pas de hasard, il n'y a que des rendez-vous » avait dit un poète quelques décennies plus tôt.

De cette rencontre fortuite va naître une histoire d'amour fulgurante...

Blonde et robe rouge, façon Kim Novak, Pat traversant le paysage d'Henri, ici le vertige de l'amour va durer trois semaines...

Un pigeon blanc qui se pose sur le toit devient brusquement le témoin attendri, le complice, l'allié de cette histoire jubilatoire et triste à la fois.

Bon, pour dire franchement les choses, c'est une histoire d'adultère à la française. Il ne s'agit pas ici d'en faire ni l'apologie, ni de s'en offusquer, mais plutôt, à l'instar de notre ami le pigeon blanc, de capter les émotions de nos personnages, et les émotions, ce sont bien sûr la joie pure, mais aussi la tristesse, la peur, la colère... Oui la colère contre le destin ! Ce foutu et satané destin !!! Aïe, je m'égare...

Ce sont deux amants traversés de bonheur, déchirés aussi parce qu'ils sont épris l'un de l'autre, mais tandis que l'un se projette dans l'après, l'autre se délecte de l'instant présent.

Henri est fou d'amour, Henri est affolé. Oui mais Pat vit l'amour au jour le jour, déguste chaque instant.

Il y a toujours ce léger et douloureux décalage que vivent les amants de quelques jours... Vous savez ce que c'est... Je dis cela, mais peut-être que vous n'en savez rien...

À peine commencée, l'histoire se projette déjà dans l'inquiétude de la fin inéluctable, rendant presque incapable la saveur de l'instant présent. N'avez-vous jamais vécu ce tourment ?

C'est comme si le 31 août sonnait par avance le glas, une sorte de Waterloo, désolé c'est l'image anglaise qui me vient, une sorte de Trafalgar, où Pat s'en irait, sonnant la défaite, la puissance du destin devant laquelle il faut rendre les armes, où la famille reviendrait de Concarneau, où la concierge de l'immeuble rirait sous cape, où seul un pigeon blanc égaré sur un toit sous le ciel de Paris serait aussi triste qu'Henri Plantin...

Faut-il voir dans cette romance parisienne une fable philosophique sur la capacité ou l'impossibilité de se saisir de l'immanence de l'instant ?

Comment garder l'essentiel de cette rencontre, sa quintessence, dans ce mouvement qui les brûle tous les deux, les embrase, dont la trajectoire file inexorablement vers la séparation, l'impossibilité d'un après ensemble... File vers ce couperet du 31 août.

Mais Paris au mois d'août, c'est aussi l'éloge de l'amitié, de la fraternité, de la débrouille.

Paris au mois d'août, c'est tendre, c'est coquin, c'est espiègle, c'est narquois, on passe de la joie à la tristesse comme on passe d'une rive de la Seine à l'autre en passant par le pont des Arts... C'est une romance de Paris, le Paris des gens de peu, des gens riches dans le coeur, je ne vous en dis pas plus, mais quand même, sans cela l'histoire d'Henri n'en mènerait pas large...

Paris au mois d'août, c'est un air d'accordéon, un Paris qui n'existe plus, ou presque plus...

Les prémices de la fin d'une époque sont déjà là, le gouvernement vient de décider de transférer les Halles à Rungis et à la Villette. On s'apprête aussi à construire au loin de grandes barres, des H.L.M. comme ils disent. Il faudra bien s'habituer à ce mot : Achélèm, encore heureux que ce soit facile à dire, à défaut que ce soit facile d'y vivre...

Les couches sociales les plus modestes bientôt quitteront peu à peu ce centre mythique de Paris pour laisser place à autre chose qui ne ressemblera plus à l'âme de Paris et de ses faubourgs. Voilà ! C'est à cela que devisent les copains qui refont le monde, sans faire de mal à personne, sauf un peu à eux-mêmes... Écrit en 1964, certains propos du texte sont terriblement prémonitoires...

Paris au mois d'août, c'est un Paris qui n'existe plus. Aujourd'hui le rayon pêche de la Samaritaine est sans doute devenu la chambre luxueuse à 1 000 $ la nuit d'un somptueux hôtel pour milliardaires.

René Fallet apporte dans ce récit sa verve, des citations qui font mouche, c'est inventif, c'est jubilatoire, c'est nostalgique comme une chanson d'Aznavour...

Comme Henri Plantin, on voudrait que le 31 août n'arrive jamais dans nos vies.

En lisant ce roman j'ai eu l'impression que durant 237 pages mon coeur ressemblait, à s'y méprendre, à ce Paris des années soixante au mois d'août.

Longtemps dans mon coeur mélancolique, il sera Paris au mois d'août.



♬ Balayé par septembre

Notre amour d'un été

Tristement se démembre

Et se meurt au passé

J'avais beau m'y attendre

Mon coeur vide de tout

Ressemble à s'y méprendre

A Paris au mois d'août ♬

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Paris au mois d'août

Je découvre la prose légère de l’auteur, primesautière, piquante, à l'ironie burlesque bon enfant et les reparties piquantes dignes du regretté Michel Audiard’ ! .



Visiter Paris au mois d'août, découvrir ses moeurs lorsqu'elle est désertée par sa population ….Un plaisir !

Ce Paris populaire des années 60, petits restos, cabarets, gouaille parisienne , courses de vélo , airs d'accordéon …

Un Paris qui n'existe plus !

Henri Plantin «  dit Riton » est un français moyen, vendeur au rayon pêche de la Samaritaine.



Pendant que Simone , son épouse part en vacances avec les enfants ,il se retrouve célibataire.

Il aime flâner dans les rues de Paris, se fait accoster par une touriste anglaise ..Patricia, jolie femme blonde et longiligne …



Le courant passe même si ces deux- là n'étaient pas faits pour s'entendre..

Cocasseries er efforts maladroits attendrissants , un rêveur urbain plus vrai que nature, une anglaise so british qui sent la citronnelle .

Ils s'apprécient et s'aiment quelques jours ….

Inquiétude de la fin… Hélas , déjà ! Dans un Paris qui a complètement disparu …le Paris d'antan, cet amour - parenthèse…..

Alors fable parisienne, éloge de l'amitié, nostalgique , pareil à une chanson de Charles Aznavour ? .



Je ne m'étendrai pas plus …

Voici un petit livre qui m'a apporté un moment de légèreté, divertissant, palpitant , émouvant …

Une très belle histoire d'amour tendre et éphémère, fragile dont chacun ne ressortira pas le même ….

Un ouvrage délicieux entre deux lectures compliquées…
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Le beaujolais nouveau est arrivé

A Villeneuve-sur-Marne, les derniers pavillons sont remplacés par des immeubles d'habitation et de bureaux. Seul un quartier surnommé la «Réserve» a échappé à la voracité des promoteurs immobiliers. On y trouve le Café du Pauvre, un débit de boissons anachronique. Oubliez l'ambiance lounge, les écrans plats et les cocktails à 15 euros. Ici, le patron vous sert un vin de pays, la patronne vous prépare un boeuf miroton et le sol est couvert de sciure. Accoudés au zinc, quatre copains font du tapage en éclusant des verres de beaujolais. Ca discute, ça s'engueule et ça plaisante bruyamment. le plus âgé, c'est Camadule, un brocanteur qui passe plus de temps au bistrot que dans son commerce. A sa droite, Captain Beaujol, un ancien militaire aux propos amers et à la soif inextinguible. Viennent ensuite Debedeux, un cadre réformé qui a encore fière allure dans son costume défraîchi, et Poulouc, un jeune bien décidé à en faire le moins possible. L'ambiance est à la franche camaraderie, entre «les copains d'abord» et «un éléphant ça trompe énormément». le roman distille sa philosophie faite d'esprit canaille, de chaleur humaine et d'anarchisme débonnaire. Les personnages assument d'être des « bons à rien » et choisissent de vivre hors de la modernité galopante et de l'uniformisation. Ce sont des «Naufragés de la Méduse industrielle», des proscrits de la «start up nation», les précurseurs du Groland. Ils préfèrent se serrer les coudes autour d'un comptoir, boire plus que de raison et passer leurs journées à jouer à la belote et au 421. René Fallet nous vante un art de vivre décalé noyé dans le gros rouge qui tâche mais qui ouvre les coeurs. Une parenthèse éthylique et amicale qui enraye les mécanismes d'une société en marche. A consommer sans modération.
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Paris au mois d'août

Henri Plantin, dit "Riton" est abandonné par femme et enfants partis en villégiature. En bon père de famille, il se prépare à passer du bon temps avec ses potes du café un petit pastis, une petite belote après le boulot.

Mais sa vie pépère de petit vendeur au rayon pêche à la Samaritaine prend le large un beau soir où ce petit coquin de sort met sur son chemin Patricia, une belle anglaise blonde et longiligne avec toutes les taches de rousseur pile poil là où il faut.

Ces deux là n'étaient pas vraiment faits pour se rencontrer et pourtant...

La rencontre, ce que chacun y met ou pas, les mensonges élégants, le comblement d'un vide, la réassurance, la cicatrisation d'une blessure...

Une belle histoire d'amour fragile et éphémère dont aucun protagoniste ne sortira le même.

Une parenthèse dans une vie simple et parfois un peu grise.

Qu'il est doux ce Paris au mois d'août!

Allez, Charles, entonne-nous la ritournelle!
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La soupe aux choux

Les maisons de Le Glaude et celle de Cicisse me rappellent celle de ma tante Juliette et de mon oncle Marcel : même toile cirée, papier collant attrape-mouches, cuisinière à feu de bois, tit canon (en Normandie, c'est le coup d'cid'), tit coup pour le facteur (le tit calva en Normandie)... Manque plus que les dominos ou la coinchée. Ma tante avait l'étable à cochons à côté de la chambre pour lui tenir chaud l'hiver.

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Mais "La soupe aux choux" est avant tout un conte avec une morale.

1 ) Où va-t-on avec le béton ?

Pourquoi abandonne-t-on les vieux dans notre société ?

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2 ) Il y a un Ange pour les pauvres gens généreux : La Denrée ( le "martien" tombé du ciel) rend au centuple la pièce prêtée, et Le Glaude admet que sa femme, redevenue jeune, fasse sa vie, et lui donne même son argent quand il part.

L'Ange, symbolisée par La Denrée, n'oublie pas d'emporter les racines (au sens propre et au sens figuré) des vieux quand il les emmène dans son paradis.

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Je n'ai malheureusement pas encore lu le livre, mais je pense que le film le respecte, avec de supers De Funès, Carmet et Villeret, et il est formidable !

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Le Triporteur

J'ai aimé le Triporteur, roman de René Fallet, livre rencontré au hasard d'une location de vacances, mais je sais aussi qu'il ne révolutionnera pas la littérature française. D'ailleurs, sans doute est-il déjà un peu passé aux oubliettes, malgré l'adaptation cinématographique mettant en scène un Darry Cowl espiègle et naïf, dont le zézaiement allait passer ainsi à la postérité.

Oh, ce n'est sans doute pas la meilleure cuvée de René Fallet, pourtant ce petit roman vaut le détour et se laisse déguster avec plaisir.

Difficile de résumer l'intrigue car il n'y en a pas vraiment, à vrai dire.

Nous sommes à Vauxbrelles-en-Bourgogne (Côte-d'Or), célèbre pour son clocher du XVème siècle, son usine de boutons de porte, son bistrot le Thermomètre, la saveur des lèvres de la fille du charcutier et l'arrière-boutique de la fleuriste... Nous faisons la connaissance d'Antoine Peyralout et de ses amis. Grand dadais de dix-neuf ans, Antoine Peyralout, fils du quincailler, fait le désespoir de ses parents, il est fainéant, membre de l'Amicale des amis de la belote et du 4.21 réunis, supporter du club de football local, le R.C. Pommard et poète qui s'ignore.... Il est désigné par ses amis, - véritable confrérie maniant avec dextérité le verbe autant que le verre -, pour aller encourager l'équipe locale de football, lors de la coupe de France à Paris. Il acquière ainsi un triporteur aux enchères pour trois francs six sous, le sauve in extremis de la décharge à laquelle il était destiné, l'Amicale baptise l'épave du doux prénom d'Augustine, avec une bouteille, vide s'il vous plaît, faut tout de même pas exagérer ! et hop ! le voilà parti sur la Nationale 7 où beaucoup de rencontres et de mésaventures vont l'attendre...

J'ai aimé le charme désuet de ce road-movie façon vélocipède ou plutôt tricycle. Ce charme tient à trois fois rien...

C'est un hymne à l'amitié, à l'irrévérence et à la liberté, véritable ode du zinc, de la paresse et des chemins buissonniers.

Ici, le pastis qui coule de la bouteille au verre et du verre au gosier, - je m'arrêterais là -, ressemble à un fleuve d'Amérique du Sud.

Ici, Il y a une poésie de l'insolite et du quotidien. Les oiseaux font du xylophone, tandis que des milliers de grenouilles font vibrer leurs trombones : chez René Fallet, les bruits de la nature, c'est un concert de Count Basie. Les papillons de nuit, les lucioles et les constellations sont aux manettes pour nous donner l'illusion, le temps d'une cavale, que la vie est vraiment féerique. Et puis, drôle et instructif à la fois, j'ai découvert que les limaces avaient une conscience mathématique : le chemin le plus court pour passer d'un point à un autre est bien une droite, même si sur cette droite, qui peut laisser des traces visqueuses, se trouve le visage d'un voyageur vélocipédique endormi dans une prairie !

Ah ! Et puis les noms, les surnoms... Suce-la-glace, Comme-la-lune, Mouillefarine...

Et puis de temps en temps, il y a l'amertume de l'amour qu'on croyait là au bord du chemin...

J'ai aimé ce ton canaille, jamais vulgaire, pourfendeur du travail, de la maréchaussée, de l'ordre établi et de l'opinion publique, un ton que n'aurait pas renié Georges Brassens ; d'ailleurs les deux artistes étaient amis, René Fallet a chroniqué avec délice les chansons des albums vinyles du chanteur. C'est comme cela d'ailleurs que j'ai fait la connaissance de l'écrivain.

Jubilatoire !
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La soupe aux choux

Tel le battement de l’aile du papillon générateur de tempêtes à des milliers de kilomètres, qui pourrait imaginer qu’un beau chou du jardin accompagné de quelques carottes et de deux ou trois grillons revenus dans une pôle bien culottée pourrait modifier le destin des occupants d’une petite planète à 22 millions de kilomètres? René Fallet bien sûr! et sa truculente soupe aux choux (on ne décroche pas le prix Rabelais par hasard).



Tout le monde connaît le chef d’oeuvre du septième art, (il y a même Louis de Funès, dirait Benabar pour échapper à ses devoirs de sociabilité), qui réunissait les regrettés Villeret et Carmet. Et pour une fois, le film et le roman sont strictement superposables (il est vrai qu’il y a peu de messages entre les lignes).

Bien entendu inutile de se créer une image mentale des personnages : c’est fait et la couverture est là pour en rajouter une couche.



L’histoire est connue, deux septuagénaires hédonistes, vouant un culte au chti canon, et au perniflard, (« des hommes qui savent ce qu’est la soif ») attirent par leurs flatulences dignes de La France a un incroyable talent, un oxien qui va découvrir le monde des émotions positives.



L’avenir de nos deux compères, aux années comptées, à mille lieues des évolutions imbéciles de l’expansion économique, menacés d’expulsion par un projet de parc d’attraction, s’inscrirait-il dans les étoiles?



Il y a un peu de Clochemerle et de Don Camillo dans le portrait de de cette société rurale en mutation, en équilibre précaire à la lisière d’une révolution dont on peut constater aujourd’hui que l’on s’engouffrait dans une impasse. Hélas, il est peu probable que la solution se situe à des années lumière, s’il en existe une.



Le style est très ….terroir, un hommage au bourbonnais, qui n’existe même plus comme entité administrative.

Ce n’est pas un chef d’oeuvre de la littérature, soyons clair, mais une courte récréation pittoresque, qui ne peut pas faire de mal




Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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Bulle ou la Voix de l'océan

Aujourd'hui c'est mercredi et mercredi, c'est... ?

« Les histoires à Berni ! »

De nouveau, les enfants ont crié à l'unisson ces quelques mots comme un cri de ralliement.

Une fois n'est pas coutume, pour illustrer le thème que j'avais choisi, nous sommes allés au bord de la mer, au grand air. Hé oui, par moins trois degrés en cet hiver déjà précoce, quelle cruauté me direz-vous d'infliger un tel sort à de si adorables chérubins ! Et vous aurez raison ! Mais n'y voyez-là aucun esprit taquin ou revanchard de ma part, certes cette classe admirable d'attention et d'écoute me fait voir de toutes les couleurs depuis maintenant plusieurs mercredis, mais j'ai fini par les adorer et cette idée de planter mon histoire dans un décor réel est une façon, je l'espère, qui leur permettra de mieux se souvenir du conte que je vais leur raconter ce mercredi.

Chaudement vêtus, ils ont couru vers la plage, tandis que Sandrine la maîtresse d'école m'aidait à disposer, sur un immense rocher en escalier qui servirait tout à l'heure d'amphithéâtre, quelques accessoires, ici un gros coquillage, là un vieux casier de pêche et aussi des coussins pour qu'ils n'attrapent pas un rhume...

Sur l'épaule du petit Paulo, son caméléon prenait les couleurs d'un magnifique bleu d'hiver. C'était la couleur de la mer ce jour-là.

J'avais décidé de leur raconter un merveilleux conte, Bulle ou la Voix de l'océan, écrit par René Fallet, un auteur que j'affectionne tout particulièrement et qui n'est pas spécialement connu pour écrire des contes pour enfants, jugez-en plutôt par quelques titres : le beaujolais nouveau est arrivé, Comment fais-tu l'amour, Cerise ? Ou bien encore La soupe aux choux, quoique ce dernier récit aurait bien pu susciter l'hilarité de la classe de manière sonore et odorante, on allait cependant éviter de tenter une telle expérience...

Sandrine la maîtresse d'école a invité les élèves à venir s'asseoir sur le grand rocher. Puis je me suis avancé vers eux en leur montrant la couverture du livre qui illustrait un magnifique dessin de fond marin.

« Aujourd'hui, je vais vous raconter l'histoire d'un coquillage rare. Mais le personnage principal est tout d'abord la mer, c'est elle qui s'exprime dans les premières pages du récit. Elle dit avec poésie et expression les différentes formes, les différentes couleurs qu'elle peut prendre. Aujourd'hui elle est bleue, parfois elle peut être verte et lorsqu'elle est en furie, elle peut devenir noire de rage. »

J'ai tenté de dessiner avec mes gestes quelque chose qui ressemblait au mouvement des vagues, mais je sentais qu'il en fallait bien plus pour capter l'attention de mon auditoire qui avait plutôt les yeux rivés au-dessus d'eux, sur les goélands qui tournoyaient dans le ciel en jacassant...

L'histoire se passe au temps des flibustiers, en 1696. Nous sommes dans les mers du Sud, dans l'Océan Indien précisément, un endroit où il fait un peu plus chaud qu'ici.

« C'est vrai, ça caille, a crié le petit Jean-Michel en se frottant les mains contre son pantalon.

- Oh celui-là je vous dis, fit la petite Chrystèle en haussant les épaules, écoute plutôt l'histoire, tu auras moins froid.

Mais la mer est dangereuse. Parfois des pirates attaquent d'autres navires pour leur livrer bataille et les piller. C'est le cas de la Désillusion, un voilier avec à son bord des corsaires du roi Louis XIV qui décident d'aborder un navire anglais. Les combats font rage sur le pont du navire, au corps à corps et à coup d'épées et de sabres. Alors la petite Doriane et la petite Nico ont pris chacune un vieux bâton et ont fait mine de ferrailler en criant des jurons que j'aurai la décence de ne pas répéter ici. « Tu vas me la rendre cette tablette de chocolat, nom de ... ! » ; « Jamais, elle est destinée au butin du roi, espèce de... ! »

Pendant qu'à la surface de l'eau, des marins se battaient, tout était apparemment tranquille dans le fond marin où Bulle, un très joli coquillage, vivait avec un locataire en elle, un mollusque paresseux, qui s'appelait Gluc. J'ai pris le joli coquillage que j'avais déposé sur un rocher pour le leur montrer.

« Oh ! Gluc ! Quel drôle de nom ! » s'est exclamé le petit Pat en riant aux éclats. Il a répété plusieurs fois le nom en faisant des grimaces devant sa petite camarade Anna qui lui a répliqué : « Glop ! Glop ! Glop ! » On a alors entendu jaillir de l'assistance plein d'autres étranges onomatopées qui venaient affoler les goélands au-dessus de nous et se mêler à leurs cris.

« Gloups ! », « Glurb ! », « Gling ! ».

Le regard de Sandrine a croisé le mien, j'ai cru lire un léger soupir d'agacement sur son visage. Il est vrai que Sandrine m'avait prévenu d'éviter de leur offrir la moindre occasion qu'ils sauraient saisir à bon escient pour que cela dérape dans une cacophonie totale et qu'il y avait en cela des mots à éviter. Mais là, vraiment, je ne pouvais pas déformer l'histoire. Il s'appelait vraiment Gluc, ce mollusque paresseux, et cela n'aurait pas rendu le même effet s'il s'était appelé au hasard Patrice par exemple... Je n'ai rien contre les Patrice, hein ?

Pour revenir à notre affaire, je suis admiratif des conseils pédagogiques que la maîtresse d'école, Sandrine, sait me prodiguer chaque mercredi. C'est vraiment un métier ! Puis dans sa bienveillance coutumière, Sandrine a dit « Vous mourrez d'envie de connaître la suite, n'est-ce pas Bernard qu'ils meurent d'envie de connaître la suite... ? »

La classe s'est aussitôt assagie. Il faut que je retienne cette astuce pour la prochaine fois. J'ai saisi la balle au bond. « Mais voilà que le pauvre Gluc a mangé trop de laitue de mer et qu'il meure d'une indigestion. » J'ai vu alors tout autour de moi des mines s'attrister. Ils avaient l'air de trouver ce petit compagnon bien sympathique et rigolo. Bulle se retrouve désormais toute seule, sans locataire. Aussitôt, profitant de la situation, arrive un petite crustacé qu'on appelle le Bernard-l'hermite, qui s'est décrété être le nouveau locataire de Bulle sans lui demander la permission. Bulle ne voit pas cela d'un bon oeil.

Les enfants ont bien entendu ri au nom évocateur de Bernard-l'hermite, certains m'ont désigné en tendant vers moi un bras accusateur, je ne dirai pas qui, je ne suis pas cafteur, voyons !

La petite Anne-Sophie a demandé : « c'est quoi un Bernard-l'hermite ? » C'est un petit crustacé de la forme d'un crabe qui est obligé de vivre dans une coquille pour se protéger et parfois il déloge l'occupant qui s'y trouvait. « Ah ouais ! C'est un squatter, quoi ! » s'est alors exclamé la petit Sylvie, fière d'avoir trouvé cette ingénieuse comparaison.

« Mais voilà que sur la mer, on continue de se battre. Un marin, puis deux, puis trois tombent à l'eau, tous transpercés d'un coup de sabre, leurs corps échouent tout près de Bulle. Son destin va alors basculer et ce sera pour elle l'occasion de quitter l'océan, de se retrouver à bord d'un navire de corsaire, en route pour le port De Nantes...

Bulle devient alors l'objet de toute les convoitises, passant des mains de capitaine à celle d'un matelot. Puis elle est vendue à un marchand, avant de rencontrer des lieux plus calmes, où on va la laisser tranquille durant plusieurs décennies, trônant sur un coin de cheminée...

Parfois on se bat, on se chamaille pour tendre l'oreille, entendre devant l'entrée de sa cavité le bruit de la mer et des vagues. Certains ont même entendu le bruit de pièces d'or que l'on fait glisser entre les doigts avides de pirates ou de marchands, car Bulle sait imiter tous les bruits... »

Les enfants ont voulu à leur tour entendre ce que pouvait bien dire un coquillage de cette espère et ont tendu leurs bras vers moi. J'ai déposé délicatement le coquillage dans les mains de la petite Fanny qui le porta avec précaution vers son oreille, puis elle passa à sa voisine la petite Domm. J'ai repris alors le cours de mon histoire, tandis que le coquillage passait de main en main, avec des gestes doux, comme si c'était un objet précieux.

« Mais Bulle sait se taire aussi... Elle sait se faire oublier, pour mieux se protéger des maux de la terre, car elle est très fragile...

Enfin, un jour elle atterrit par hasard dans les mains du Petit-Pierre, un enfant qui habite la campagne. Il est sourd, il est rejeté par les autres enfants du village à cause de cela et pourtant ils vont se comprendre, lui et Bulle... Petit-Pierre est le seul qui, comme elle, aime vraiment la mer. Et il sera le seul à entendre ce que Bulle peut lui dire, lui délivrer comme un secret...

« Je suis sûr que Petit-Pierre perçoit des choses que d'autres n'entendent pas, a alors dit la petite Gaëlle. Elle me plaît bien ton histoire de coquillage, camarade ! »

Alors, je leur ai raconté la fin de l'histoire, une jolie fin comme savent les écrire les écrivains qui veulent enchanter le coeur des enfants ou de ceux qui ont gardé une âme d'enfant à leur manière...

Sandrine est revenue vers les élèves, évoquant qu'en 1696, la mer était peuplée de dangers, de pirates, de flibustiers... mais qu'aujourd'hui d'autres dangers menacent directement les océans, les fonds marins, évoquant la pollution, les déchets, les espèces aquatiques qui sont touchées ou disparaissent à cause de cela... Pour la maîtresse d'école, c'était aussi une manière d'illustrer un thème d'actualité qu'elle avait décidé d'engager sous forme de petits travaux avec ses élèves dans le cadre de la COP15 biodiversité qui démarrait aujourd'hui. Elle voulait commencer à sensibiliser ses élèves sur ce sujet essentiel et qui lui était cher aussi.

La mer en était le plus bel exemple.... Que penserait Bulle si elle retrouvait son océan natal aujourd'hui dans cet état ?

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La soupe aux choux

Jaligny ressemble à des tas et des tas de villages : un raz-de-marée a tout emporté. Ils ont appelé ça les Glorieuses. Les jeunes sont partis essaimer en usine, nicher dans les achélèmes, faire les trois huit dans le neuf quatre pour se payer une deux chevaux. Seuls quelques inadaptés, des Bourbonnais pure souche «mi-rouges mi-blancs», sont restés végéter sur place. C'est le cas de deux vieux paysans, le « Bombé » et le « Glaude », qui résident dans des fermes voisines au hameau des Gourdiflots. Ils vivent à l'écart du progrès, en quasi autarcie, profitant d'un art de vivre « à la française ». Ils boivent avec excès, fument du vieux tabac gris et se permettent des distractions toutes rabelaisiennes. Vous connaissez la suite… Un visiteur d'outre galaxie gare sa soucoupe dans le pré du Glaude. Il vient tout droit d'Oxo, un astéroïde qui symbolise notre belle modernité : les excès ne sont pas tolérés, les aliments n'ont pas de goût, les femmes s'autofécondent, le plaisir n'existe pas, tout est régi par un aéropage technocratique. Les moeurs de Gourdiflots sont une révélation pour les Oxiens qui comptent bien s'en inspirer. le film est très proche du roman, les dialogues sont parfois repris au mot près. Et pourtant, j'ai le sentiment que le texte s'essouffle moins que son adaptation, d'autant plus que l'auteur y livre une satire des moeurs villageoises. C'est drôle, haut en couleur, irrévérencieux et c'est surtout plus profond que ça en a l'air. Je reprends ce slogan à mon compte "du pain, du vin et des copains !". (Bon, j'attendrai le week-end, je dois bosser pour payer les traites du monospace avec radar de recul.)
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Les pieds dans l'eau

Le dimanche, mon pépé se levait aux aurores, éclusait sa chicorée, grignotait un morceau de charcuterie et, toujours à moitié endormi, pédalait comme un dératé pour démarrer son vélomoteur. Il pouvait pleuvoir ou geler à pierre fendre, il sautait sur son deux-roues, quittait son HLM de Créteil pour gagner son coin de pêche du côté de Montereau. A l'arrière, sur le porte-bagages, il réussissait à faire tenir ses cannes, son matériel et son fils de guingois. La matinée de pêche se terminait invariablement par un passage au bistrot histoire de raconter ses exploits aux copains. Au retour, il n'y a pas que la bourriche qui était chargée...



René Fallet a partagé la même passion et parvient à en rendre compte dans ce texte. Il exprime l'amour du petit matin (« c'est à peine l'aurore et je tombe du plume »), les coins de pêche à ne surtout pas éventer, l'intérêt pour le matériel et les techniques de pêche, le coeur qui s'emballe quand on sent une prise se débattre au bout de la ligne et les virées entre potes.



René Fallet fait part de son amour de la nature et condamne une époque où l'on bétonne et pollue au nom du sacro-saint progrès. Pour reprendre ses mots, l'homme est un con pour l'homme qui tue le temps en tuant l'air du temps. En 1973, déjà, face au spectacle de fleuves charriant des gardons crevés, on éprouvait une nostalgie d'une nature préservée et généreuse. Avant, on pensait déjà que c'était mieux avant (ah, les bords de Seine du temps de Maupassant...).



Dans ce récit, on se gausse des m'as-tu vu et on se réchauffe le coeur en partageant une soupe au chou avec les patrons d'un bistrot ou une goutte de prune avec le paysan du coin. La nature, l'humanité, le bonheur...



« Les pieds dans l'eau » est un plaisir de lecture qui a éveillé en moi de jolis souvenirs et une douce nostalgie. Merci M. Fallet.
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Paris au mois d'août

J'ai découvert la prose tendre, légère et piquante de René Fallet, avec cette histoire de parenthèse estivale au début des années soixante.

L'auteur rend ce mois d' août encore plus brûlant, par une passion torride née d'une rencontre de hasard.

Entre le titi parisien et la miss anglaise, la barrière de la langue sert parfois de garde-fou en apportant une note touchante à cette brève histoire.

Les efforts maladroits de Pat et Henri, pour se montrer l'un à l'autre sous un jour plus avantageux, ressortent d'une attendrissante cocasserie qui jamais ne sait se prendre au sérieux.

On trouve, dans Paris au Mois d'août, cet esprit du parisien moyen de ce début des sixties, quasiment disparu avec la migration des parisiens modeste vers des banlieues de plus en plus lointaines.

Paris, déjà envahis par l'automobile (!)

Fallet rend aussi une sorte d'hommage à cet esprit frondeur du parisien, lorsqu'il fustige l'aberration grotesque que constitue le Sacré-cœur de Montmartre.

Et, qui de mieux qu'un employé de ce symbole commerçant qu'est la Samaritaine, rêveur urbain et ennemi définitif d'une horrible bignole plus vraie que nature; pour refaire un tour de ce Paris (Reine du mooooondeu, C'est Paris! Comme si bien chanté).

Voilà. Un livre avec des aspects cristallin, pour offrir un moment de légèreté avec quelques soupçons de gravité dans une échappée estivale.

À lire sur Paris-Plage ou tout autre endroit où l'on se pose en vacance.

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