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Critiques de Robert Littell (232)
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Philby : portrait de l'espion en jeune homme

Chacun des chapitres composant le livre est consacré à un personnage majeur de ce roman biographique , et c'est lui qui prend la parole pour donner son ressenti sur Harold Philby, un des plus grands espions du XXème siècle.

Ce livre même habilement histoire et fiction et comme souvent, j'ai interrompu le cours de la lecture pour mener, à mon tour, plus de recherches approfondies sur cet anglais, qui a eu une vie de chat, multiple et aventureuse.

Lecture entreprise après celle de la Baignoire de Staline.
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Le cercle Octobre

Moment d’histoire, printemps de Prague. Ce n’est pas un polar, on connait l’auteur du crime (l’État soviétique) et il ne peut pas y avoir d’enquête…



Des amis, des artistes qui vivent à Sofia, Bulgarie. Des communistes de la première heure qui sont célèbres pour toutes sortes de raisons. L’un était le Porte-Drapeau lors de la libération du pays et un autre était un recordman de vitesse en cyclisme. Il y a aussi un magicien de renommée internationale, un clown nain aux mœurs douteuses, un mime au silence éloquent, une peintre, un poète. Avec leurs amis, ils rêvent d’un humanisme socialiste et se permettent de critiquer le régime dans leurs réunions privées. Ils se sentent protégés par leur célébrité, jusqu’à l’invasion de la Tchécoslovaquie où le Parti ne supportera pas qu’ils rendent publique leur opposition à l’invasion d’un pays frère.



Un rappel de l’Histoire, c’était il y a presque 50 ans. Des pensées griffonnées dans un carnet pouvaient valoir une condamnation aux travaux forcés, un voisin pouvait vous dénoncer pour vos paroles ou pour l’interprétation qu’on pouvait en faire. Des gens qui disparaissent et dont on efface même les traces dans l’histoire. Des êtres tiraillés entre leurs idéaux et leur sécurité et des héros qui sont prêts à sacrifier leur vie pour leurs idées.



Un thriller et une leçon d’histoire, un rappel de la valeur de la liberté de parole…

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Une belle saloperie

Plus connu pour ses romans d'espionnage, Robert Littell, dans un véritable exercice de style, nous offre un hommage au roman noir. Samuel Gunn est un vrai détective à l'ancienne, cynique, solitaire et pétri de convictions. Au seuil de sa caravane en alu plantée aux portes du désert, il voit apparaître une "comtesse aux pieds nus" qui a besoin d'aide. Pour 90$ par jour, il plonge à corps perdu dans les rivalités mafieuses de deux familles du Nevada.



Si ce roman ne manque pas d'atouts, notamment l'écriture brillamment ironique de son auteur, il n'a pas su me captiver. Une narration trop linéaire, des références qui tombent parfois dans la caricature et surtout des personnages secondaires trop faiblards ont fini par rendre cette lecture un peu longue. Sans être franchement désagréable, ce roman est néanmoins décevant tant les premières pages recelaient de promesses.
Lien : http://bloglavieestbelle.ove..
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Légendes

Littell père est un sacrément bon écrivain.

Le début m'a fait un peu peur. Après, en guise d'ouverture, la scène-choc-suivie-d'un-flashback (convenue, convenue!), et la rencontre entre le privé-revenu-de-tout et la mystérieuse-cliente-à-la-beauté-intrigante, la partition se fait plus subtile. Non que les clichés disparaissent (mention spéciale à la caricaturale chef des services secrets) mais l'éclatement de l'intrigue entre des temps et des légendes différents embarque le lecteur à la recherche d'une vérité qui se construit peu à peu mais se dérobe souvent, excitant jeu de dupes.

L'espion, comme le romancier, doit inventer des histoires et des personnages. Il semblerait d'ailleurs que le héros schizophrène de Littell ne soit devenu espion que pour endosser des vies diverses: l'aventure, la vraie, est forcément intérieure. Aussi, les scènes de carnage et/ou d'évasion in-extremis sont-elles rondement menées (j'irais même jusqu'à dire que la fuite hors du laboratoire est carrément torchée, 3 pages, pas plus) parce qu'il en faut mais que l'essentiel est ailleurs. L'essentiel est de liquider les méchants et les questions existentielles, voire de récupérer le goût de vivre et les ossements d'un saint lituanien, bref de considérer la folie du monde comme un terrain de jeu où c'est le plus érudit qui gagne. Jubilatoire.

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La compagnie

Retour de lecture sur "La Compagnie: le grand roman de la CIA" un livre du journaliste et écrivain Robert Littell, publié en 2002. Ce livre imposant de plus de 1200 pages, avec une pagination dense, retrace à travers le destin de plusieurs personnages de fiction, notamment trois anciens étudiants de Yale devenus espions, l'histoire de la guerre froide et de la lutte entre la CIA et le KGB, cela sur près d’un demi-siècle de 1950 à 1991. Le format du livre peut en décourager certains mais il faut savoir que l’auteur a vraiment frappé fort ici, ce livre est une véritable référence, on peut presque dire que Littell a tué le game, car il remplace quasiment à lui seul un genre complet qui est celui du roman d'espionnage. On apprend et on comprend à travers celui-ci énormément de choses sur la guerre froide et ses mécanismes. Le récit aurait pu être décliné en plusieurs tomes bien distincts puisqu’il se concentre sur plusieurs événements bien précis que sont: le soulèvement de la Hongrie en 1956, la baie des cochons à Cuba en 1961, l'Afghanistan en 1983 et enfin le putsch de 1991 contre Gorbatchev. On peut s’étonner de l’absence de l’assassinat de Kennedy, mais c’était un évènement marquant de cette période tout en étant un peu à la marge de la guerre froide. Les Kennedy sont pour d’autres circonstances, loin d’être absents de ce roman. C’est une saga impressionnante, haletante, construite avec énormément de précision et de détails. Malgré quelques erreurs, comme par exemple la réapparition d’un Boorman pourtant mort dans la bataille de Berlin, ou le bombardement de Dresde mal daté, et certains gadgets techniquement farfelus, dignes d’un James Bond, le tout est plutôt bien ficelé, bien documenté et crédible. Les détails de l’implication des Etats-Unis dans les événements relatés sont passionnants. On ne s'ennuie presque jamais malgré la longueur de ce roman, l’auteur a su réaliser un parfait mélange entre la réalité et la fiction et à su agrémenter son roman historique d’une chasse à la taupe, au sein de la CIA, particulièrement haletante qui rend la lecture passionnante et donne de la consistance et du rythme à l’histoire. Une des difficulté dans la lecture de ce roman pourrait être de s'y retrouver avec les très nombreux personnages, membres de la CIA du KGB ou hommes politiques, mais Littell fait l'effort à chaque fois de rappeler le titre et le rôle de chacun, cela toujours sans trop alourdir le texte, ce qui aide grandement à la compréhension. Cela étant dit, on n’est pas dans une œuvre littéraire d’une grande poésie, l’écriture, même si elle est extrêmement précise, reste purement fonctionnelle, dans un style qu’on peut difficilement imaginer plus basique. Les relations amoureuses sont presque du niveau de la collection Arlequin et la psychologie des personnages principaux très manichéenne, il sont et restent tous figés dans leurs croyances et convictions. Certains portraits sont particulièrement caricaturaux, notamment celui du responsable russe du KGB, grand stratège mais sans subtilité, qui est dépeint comme un pédophile abject ou encore l'espion américain, surnommé le sorcier, comme caricature de cowboy alcoolique. Seuls les transfuges et taupes, qui passent d’un camp à l’autre, apportent un peu de subtilité dans leurs pensées et sortent des schémas pré-établis avec leurs manœuvres, leurs doutes et leurs trahisons. On voit clairement dans la forme de ce roman, que nous avons affaire à un roman de journaliste, cela dans la banalité du style mais d’un autre côté aussi dans la maîtrise parfaite de son sujet. C’est un roman historique, qui nous explique par l’exemple, avec les quatres événements choisis qui sont vécus de l’intérieur, du point de vue américain ainsi que celui des russes, ce que la guerre froide a vraiment été ou ce qu'elle est encore. On a une idée relativement précise de la manière dont fonctionne un service de renseignements particulièrement opaque comme la CIA, ce qui se passe à son siège de Langley. Les interactions avec le monde politique sont parfaitement détaillées, on est même un peu atterré de constater à quel point ces hommes politiques sont sans grande réflexion et totalement dépendants de leurs services de renseignements. On ferme donc ce roman passionnant en comprenant mieux le monde dans lequel nous vivons, comment nous en sommes arrivés là, mais non sans inquiétudes quand on sait que les principaux arsenaux nucléaires sont entre les mains de dirigeants pas particulièrement futés, conseillés par des gens qui évoluent souvent dans l’amateurisme le plus complet.



____________________________

"La floraison finale, s'il y a floraison, peut prendre encore cinq ans. Le contre-espionnage, c'est pareil- on fait pousser des graines dans des petits pots pendants des années, on maintient une température chaude et humide, on espère que ça fleurira un jour, mais c'est sans garantie. Il faut avoir la patience d'un sain, ce dont vous êtes totalement dépourvu, Harvey . La culture ses orchidées et le contre-espionnage ne sont pas votre tasse de thé."
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Requiem pour une révolution

Robert Littell est un excellent vulgarisateur. Comment dépeindre la tragédie absolue qui débuta en novembre 17 pour s’achever (s’est-elle vraiment achevée ?) en 1989, toujours en novembre ?

Il choisit d’insérer dans l’histoire russe deux new-yorkais qui rêvaient de révolution : un juif ayant fuit les pogroms de l’ancienne Russie et un aventurier mêlé aux luttes ouvrières du début de siècle. En imaginant que Trotski les ramène avec lui en Russie après la première révolution de février, il les immerge dans la grande histoire jusqu’à ce mois de mars 53 qui marqua la mort de Staline. C’est habile car il va pouvoir utiliser l’idéalisme de l’un en le confrontant à l’opportunisme sans scrupules de l’autre. Dans les révolutions, il y a beaucoup d’idéalisme au tout début qui s’efface vite face aux opportunités qui surgissent presque aussitôt. Dans le meilleur des cas les idéalistes se font opportunistes, dans le pire des cas ils sont éliminés par les opportunistes.

Robert Littell met les points sur les « i », la révolution permet à certains individus de révéler puis de développer leurs tempéraments criminels et sadiques. La scène de la page 128 est un sommet du genre : « Demande grâce » ordonna Tuohy. Alexinsky fit l’erreur de dire : « S’il vous plait. » Quand sa bouche s’ouvrit, Tuohy y glissa profondément le canon. Alexinsky s’étrangla mais Tuohy, savourant le moment, ne tira pas. Les yeux d’Alexinsky devinrent vitreux de terreur. Les doigts de Tuohy le picotaient, tant le sentiment de puissance – et le plaisir – qu’il éprouvait était grand. Souriant légèrement, il appuya sur la détente. »

C’est cousu de fil blanc, l’un finira dans un beau bureau et un grand appartement mis à sa disposition par le NKVD, pendant que l’autre goûtera de la Loubianka pour n’avoir pas dénoncé un poète.

Ca se lit comme un roman policier, les événements historiques sont, pour la plupart, indéniablement et tragiquement exacts et la force du réquisitoire réside dans la foule de petites anecdotes toutes plus tragiques les unes que les autres. Elles mettent un visage sur les souffrances et le chagrin de quelques unes des innombrables victimes pour finalement donner tort à Staline auteur de l’abominable citation « La mort d’un homme est une tragédie. La mort d’un million d’hommes est une statistique.» Le personnage du poète est emprunté à Ossip Mandelstam* dont le courage inouï lui valut la mort mais aussi la postérité pour le poème ci-dessous, composé en 1934 en pleine terreur :

« Nous vivons, sourds à la terre que nous foulons,

Nul ne perçoit nos discours à dix pas.

On n'entend que le montagnard du Kremlin,

L'assassin, le tueur de paysans.

Ses doigts sont gras comme des larves

Et les mots, lourds comme du plomb, tombent de ses lèvres.

Ses moustaches de cafard rient,

Et la tige de ses bottes brille.

Autour de lui, un ramassis de chefs au cou flexible

Demi-hommes serviles avec quoi il joue.

Ils piaulent, ronronnent ou geignent,

Lui jacasse et pointe le doigt,

Forgeant une par une ses lois, pour les jeter

Comme des massues à la tête, à l'oeil ou à l'aine.

Et chaque meurtre est une fête

Qui enfle de plaisir la large poitrine de l'Ossète. »

*Littell lui a consacré un autre de ses romans : L’Hirondelle avant l’orage.

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Requiem pour une révolution

Une superbe fresque sur fond de révolution russe, avec ses idéaux, ses espoirs, et son enthousiasme des débuts. Autant d'utopies qui disparaissent malheureusement, voir inévitablement, au rythme de la confiscation du pouvoir par des dirigeants sans scrupules de plus en plus déconnectés des réalités, pour aboutir à la dictature sanguinaire de Staline. Ce cheminement est incarné par un immigré américain, juif originaire de Russie, reparti avec enthousiasme sur sa terre natale russe pour y vivre la révolution avec les bolcheviks. Le livre est passionnant dans un style qui m'a rappelé "un pays à l'aube" de Dennis Lehane. Bien que s'agissant d'un roman, le texte est très documenté. L'auteur, journaliste spécialisé dans les affaires russes, précise en fin d'ouvrage les principales libertés qu'il a prises avec l'histoire. Un roman historique comme je les aime.
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L'hirondelle avant l'orage

C'est tout moi de me retrouver à lire un livre pareil pendant mes vacances ! Voici une plongée en apnée dans la vie (ne valant bientôt plus très cher) de Ossip Mandelstam, un poète - un grand poète, et peut-être même le plus grand poète russe du 20ème siècle- incroyablement courageux/ ou fou/ ou les deux qui vécut dans les terribles années 30 en U.R.S.S. et qui osa défier Staline en rédigeant un poème subversif disant tout haut ce que tout le monde/la plupart savent, que les paysans dans les campagnes crèvent de faim à cause de la collectivisation, que le chef adulé est en fait un assassin et un bourreau de ses sujets. Ce roman choral prête voix au poète mais aussi à son entourage, sa femme Nadejda et d'autres acteurs ayant gravité autour de cette histoire. Bien que le sort d'à peu près tous les citoyens soviétiques fut effroyablement pénible sous le régime stalinien, Robert Littell choisit de montrer celui des artistes, muselés par la dictature à produire uniquement des oeuvres à la gloire du régime. C'est très bien documenté même si c'est romancé. Je lis en parallèle La fin de l'homme rouge de Svetlana Alexievitch ce qui apporte un éclairage intéressant aux deux lectures. Je recommande ce livre, mais pas nécessairement en vacances, les scènes dans la Loubianka (sinistre prison moscovite habitée par de non moins sinistres interrogateurs) donnent froid dans le dos, et c'est un euphémisme. Vous ne pourrez manquer d'être touchés par le sort de cet artiste et héros méconnu (du moins, méconnu de moi) et instruits de cette page d'histoire (à moins que vous ne connaissiez déjà bien cette période de l'histoire russe).

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La compagnie

Un roman policier (au sens large qui englobe le roman d’espionnage) doit sa qualité tant à l’intrigue et à la profondeur de ses personnages qu’à la capacité de son auteur à l’ancrer dans une réalité soit connue et partagée par les lecteurs, soit mystérieuse, opaque, à plusieurs facettes, ce qui est le cas ici.



Lorsque l’exercice prend la forme d’une saga mettant en scène plusieurs générations d’espions et contre-espions, narrant la quasi-intégralité des relations Est-Ouest de l’après-guerre jusqu’au milieu des années 1990, il s’agit de l’œuvre d’une vie.



La Compagnie décrit principalement le parcours de 3 jeunes hommes engagés par la C.I.A. naissante après-guerre et leur apprentissage d’un monde bipolaire dans lequel deux grandes puissances veulent à tout prix gagner une guerre d’influence.



Les intrigues sont multiples, bien menées (nul besoin de prendre des notes) et la qualité du roman tient dans la capacité de Robert Littell à créer un équilibre convaincant entre trajets personnels (dont certains sont à peine romancés, comme celui de Philby) et trame historique : l’ouvrage, fort bien documenté, retrace sans concession, surtout pour les hommes politiques, 40 ans d’histoire extérieure américaine, avec une grande place accordée à Berlin, Prague et Cuba, les hésitations, les opérations ratées, les traîtres, les idées farfelues pour assassiner Fidel Castro, les coups de billard à 3 bandes.



Ce roman reste une œuvre de fiction, et si certains éléments sont présentés comme le fruit de l’imagination paranoïaque de James Angleton selon lequel la plupart des dirigeants des pays de l’Ouest travaillaient pour l’U.R.S.S., d’autres le sont moins précautionneusement, à l’image de la mort de Jean-Paul 1er dont la description par Robert Littell est venue alimenter la page Wikipedia des théories complotistes sur le sujet.



C’est ce qui rend le maniement de ce roman, présenté parfois comme un livre d’histoire ou bien un récit journalistique, un peu délicat, et rend nécessaire de démêler le vrai du faux.



Par ailleurs, si certaines événements sont rapportés avec beaucoup de réalisme (la résistance pragoise, l’épisode de la Baie des Cochons), l’évocation de la période Gorbatchev, le démantèlement politique et économique de l’U.R.S.S. est faite à très gros traits et frôle souvent la caricature.



Malgré ces quelques points mineurs, la Compagnie demeure l’ouvrage de référence pour découvrir ou redécouvrir le roman d’espionnage et la période de la Guerre Froide.
Lien : http://occasionlivres.canalb..
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L'hirondelle avant l'orage

Dans la famille Littell, tout le monde connaît désormais Jonathan, auteur des inoubliables Bienveillantes ; on a moins lu son père, Robert, journaliste américain longtemps posté à Moscou, et grand spécialiste de l’espionnage.

Ce que nous offre ici Robert Littell est un chef d’œuvre : c’est l’histoire de la fascination mutuelle que se vouent Ossip Emilievitch Mandelstam, poète russe, et Joseph Vissarionovitch Staline. En 1934, Mandelstam écrit sur le maître du Kremlin des épigrammes de plus en plus critiques, au point de le traiter de « bourreau et d’assassin de moujiks ».

La Tchekha se déchaîne, et Mandelstam entre dans le noir univers de la torture physique et morale, où il retrouve quelques braves soviétiques innocents, qui finissent par se dire que si la Parti les trouve coupables, c’est qu’ils ont bien commis quelque faute, mais laquelle ?

Staline, qui admire le poète, décide qu’il aura la vie sauve, ce qui nous fait visiter une société où on survit grâce à la profonde et débrouillarde humanité dont est capable le Peuple russe, et où les jeunes cadres dénoncent allègrement leurs supérieurs pour prendre les bonnes places, et s’approprier leurs glacières électriques.

Mandelstam, « armé du pouvoir explosif enfermé dans le noyau des poèmes », choyé par sa douce épouse Nadejda, tient le coup un moment, terrorisé et divagant, mais toujours vivant. Il meurt en 1939 au « Camp de la Deuxième rivière », ce qui fait dire à Staline : « Le con ! comment vais-je faire maintenant ? »

Il y a eu beaucoup de tableaux du Goulag, mais celui-ci, avec son humour, son humanité, sa vérité, son écriture splendide, mérite absolument d’être lu.











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Koba

Biographie romancée pour tenter de réhabiliter un des plus grands dictateurs du 20eme siècle au seuil de sa vie .

Robert Littell utilise le dialogue entre Koba (un des nombreux pseudonymes de Staline) et un enfant de dix ans prénommé Léon afin de justifier la politique appliquée en ces temps trouble pour l'URSS et le désir de Staline de passer à la postérité.

Entre les purges et les disparitions, Koba et Léon continuent de converser sans que l'enfant, d'une candeur due à son âge, ne prenne toute la mesure de ce qui se joue y compris au sein de sa propre cellule familiale.

Autour de ce duo, gravitent les "imperméables", police secrète, les gardes du corps de Staline et les autres enfants de l'immeuble du palais, amis de Léon qui tentent de survivre après la disparition de leurs parents.

Certains passages, surtout lorsque Staline est en crise, sont vulgaires et des mots orduriers utilisés me semblent déplacés dans le contexte sauf si on tient compte de l'état de santé mentale de Staline à la fin de sa vie , enfin durant sa vie.



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L'hirondelle avant l'orage

Pour un poème non publié, seulement dit à une poignée de personnes, dont une a parlé, Ossip Mandelstam, poète russe connut le Goulag, la torture à la Loubianka, dans les caves de laquelle les tchékistes torturaient, et exécutaient les prisonniers d'une balle dans la tête. "Mort d'un arrêt cardiaque" telle était le message que recevaient les familles sous Staline.

Ce roman très documenté, écrit après une visite de l'auteur à la veuve de l'écrivain Ossip Mandelstam, retrace ses 5 dernières années de vie, dans une "ville moins douze" c'est à dire loin des 12 plus grandes villes de l'URSS, puis au goulag où il mourut. Son corps fut jeté à la fosse commune.

Terrible témoignage sur cette période, sur les procès dans lesquels chacun pouvait être accusé, déporté, ou exécuté pour un autocollant de la tour Eiffel sur une valise, la vie dans les camps, les fosses communes...on y retrouve une partie de l'atmosphère décrite par Arthur Koestler dans "Zéro et l'infini".

L'auteur nous dépeint ces personnages Staline d'une part, Mandelstam et les écrivains d'autre part fascinés les uns par les autres, se craignant mutuellement mais pouvant avoir parfois des relations très troubles

Un livre qui peut être complété par la lecture de "Contre tout espoir" de Nadejda Mandelstam, veuve de Ossip Mandelstam.


Lien : https://mesbelleslectures.co..
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La compagnie

La compagnie - Le grand roman de la CIA de Robert Littell est un docu roman où nous suivons le Sorcier, l'apprenti Sorcier et plusieurs autres grand espion dans une guerre pas toujours froide. Budapest, 1956, les opposants au régime qui espère une intervention américaine sont envoyés à l'abattoir, alors j'ai pensé l'Ukraine manipulé par les États-Unis qui se retrouvent seul devant l'invasion Russe. L'invasion ratée de la Baie des Cochons en 1961 supervisé par la C.I.A. L'invasion de l'Union Soviétique en Afghanistan qui a précédé la chute de l'Union. La victoire avec la chute de cet empire du mal en 1991. Il y a aussi l'histoire de Starik un maitre espion russe d'une intelligence redoutable. Avant d'oublier, il y a la recherche de la taupe à l'intérieur de la C.I.A. cette histoire est vraiment à elle seule une œuvre d'art et le lecteur se retrouve dans une jungle de miroirs. Une histoire passionnante d'un passé pas si lointain.
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Philby : portrait de l'espion en jeune homme

Qui est Kim Philby ? Rien de moins que le traitre le plus renommé de toute l'histoire de la Grande Bretagne ! Communiste convaincu et espion du NKVD (services secrets russes et ancêtre du KGB), il a réussi à se faire incorporer au MI6 en 1940 et a fait partie des pontes des services secrets britanniques pendant plus de dix ans, un record jamais égalé pour un agent double. La découverte de sa traitrise au début des années cinquante a été un traumatisme et une humiliation sans précédent pour le MI6, et par extension pour tous les services secrets occidentaux dont la plupart des directeurs ont viré par la suite complètement paranoïaques, persuadés que des espions russes se dissimulaient en permanence sous leurs lits – ce qui était grandement exagéré, on s’en doute. La fuite en URSS du bonhomme l’a finalement fait passer au statut de légende et il peut se vanter d’avoir fait couler autant d’encre historique que littéraire. Sa carrière a notamment inspiré l’excellent roman « La Taupe » de John le Carré.



Robert Littell n’est donc pas le premier romancier à avoir été fasciné par Kim Philby. Là où l’écrivain britannique innove, c’est dans la période de la vie du personnage sur laquelle il a décidé de se concentrer. Comme l’indique son sous-titre « Portrait de l’espion en jeune homme », le récit couvre les toutes premières années de Philby en tant qu’espion soviétique : son séjour à Vienne pour soutenir les ouvriers socialistes, son recrutement par le NKVD, ses premières années de journalisme, son entrée dans le MI6... L’idée géniale de Littell est d’avoir fait raconter chacune des étapes de la vie du jeune espion par des personnages l’ayant côtoyé – son épouse, l’agent russe qui l’a recruté ou ses amis de Cambridge – sans jamais que le point de vue de Philby lui-même ne nous soit dévoilé. En effet, quel meilleur moyen employer pour mettre en scène ce personnage insaisissable, à la personnalité trouble et fluctuante ? De ce point de vue là, le roman de Littell est une réussite, un récit d’espionnage parfaitement rodé et d’une grande profondeur psychologique.



Là où le bât blesse – du moins, en ce qui me concerne – c’est dans l’hypothèse émise par Robert Littell dès les premières lignes de son roman et qui sous-tendra toute la suite de son histoire : Kim Philby n’aurait pas seulement été un agent double, mais un agent triple. Comprenez par là que Philby aurait fait semblant d’être recruté par le NKVD pour pouvoir donner aux russes de fausses informations soigneusement sélectionnées par le MI6 (la trahison dans la trahison dans la trahison : gare à la migraine…). Pas besoin d’être un historien qualifié pour voir que cette théorie, aussi séduisante soit-elle pour un romancier et valorisante pour l’Angleterre, ne résiste pas à une étude légèrement approfondie. Trop de faits historiques la contredisent : la pagaille générale déclenchée par sa défection au sein du MI6, la dépression nerveuse suivie d’une démission du chef des services secrets de l’époque, le silence honteux gardé par le MI6 même après la mort de Philby en 88, etc… Malgré ce qu’affirme Robert Littell, fermement convaincu de son hypothèse, dans sa postface, la théorie de l’agent triple me semble relever du romantisme pur et simple.



Ceci dit, Littell a pour lui le droit sacré du romancier qui est de pouvoir se détacher de la réalité historique s’il peut en tirer un bon roman. « Philby - Portrait de l’espion en jeune homme » reste un récit d’espionnage de haute qualité que j’ai dévoré en l’espace de quelques heures. À lire d’un œil critique, mais à lire tout de même !

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La peste sur vos deux familles

« Vous ne voyez donc pas, Roman, que nous sommes de simples grains de poussière, prisonniers d’un cercle vicieux qui s’appelle la Russie, et que nous nous contentons d’attendre qu’une pelle nous ramasse avant de nous mettre à la poubelle? »

Roman Monsourov et Yulia Caplan, tels des Roméo et Juliette de l’ère post-soviétique, voient leur romance contrecarrée par les rivalités de leurs familles évoluant dans les sphères mafieuses de Moscou, un fromage que se disputent tous les peuples russes avides de profiter des bienfaits du nouveau capitalisme à l’œuvre. Azerbaïdjanais, Tchétchènes, Juifs, Ossètes, tous veulent participer au banquet et sont prêts à s’entretuer sur la place publique pour y parvenir.

Robert Littell, un romancier spécialiste de l’univers russe, éblouit une fois de plus avec ce roman historique condensé sur les années ayant suivi le démantèlement de l’URSS. La narration vive et l’écriture impeccable en font une lecture jouissive et dynamique.

Je compte bien récidiver avec les autres ouvrages de cet auteur prolifique que j’affectionne depuis fort longtemps.

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L'hirondelle avant l'orage

Il a beaucoup été écrit sur la dictature stalinienne qui est maintenant du ressort de l'histoire. Avec ce roman, Robert Littell nous la fait revivre de façon pathétique, telle que l'ont vécue le poète Ossip Mandelstam et ses proches. On y ressent profondément l'absurdité de ce système et l'impuissance de ses victimes, mais aussi toute la force de la poésie de Mandelstam, que ce texte donne envie de connaître. Un mélange de fiction romanesque et d'histoire comme je les aime.





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La compagnie

Bureau des légendes...

Un très bon roman sur la CIA qui s'appuie sur une connaissance, une intimité même avec son sujet. C'est très très intelligent, vous découvrirez l'histoire de celui qui a inspiré le personnage d'amalric dans BDL. Ce n'est quand même pas désagréable de lire des choses qui nous offrent cette sensation constante d'être bluffé par des situations, des dialogues, des retournements (cliffhanger à tous les étages ici !). Sans surprise le début est sans doute plus réussi que la fin ( mais après avoir écrit près de 1000 pages, il devait avoir envie de finir!). Cela n'est pas grave car on aura appris, et peut-être surtout compris, beaucoup de choses.

Une réserve toutefois, on est ici dans du très très bon roman d'espionnage, un top du top du divertissement brillant. Mais, selon moi, on est dans une littérature moins inventive, nettement moins personnelle que Le Carré, qui , mais c'est un avis qui n'engage que moi, joue dans une toute autre catégorie.
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Philby : portrait de l'espion en jeune homme

Comment un jeune aristocrate diplômé de Cambridge est-il devenu l’espion le plus célèbre du XXème siècle sans avoir été inquiété le moins du monde ? De 1934 (année de la fin de ses études et de son recrutement par les soviétiques) à 1962 où, sur le point d’être démasqué, il fuit en URSS, un parcours fascinant le conduit à intégrer les services secrets britanniques puis à devenir le chef de la section chargée de lutter contre les espions soviétiques ? On croit rêver.

Pourquoi a-t-il, en compagnie de quatre de ses condisciples de Cambridge, décidé de trahir son pays ?

Robert Littell répond à ces questions et dresse le portrait intime de ce jeune idéaliste ainsi que de sa première épouse et de ses officiers traitants du NKVD. De Vienne à Moscou, son itinéraire passe par Londres où il gravit les échelons du MI6, Salamanque et Burgos, où il est correspondant de guerre auprès de Franco, Biarritz où il livre ses renseignements, Gibraltar où on lui demande d’assassiner Franco et Calais où il embarque pour l’Angleterre sur l’un des derniers bateau de pêche au moment de la débâcle. C’est une succession de scènes et de dialogues très vivants qui illustrent cette vie d’espion. Ses « employeurs » ont toujours eu des doutes sur la réalité de son engagement et plusieurs analystes du NKVD ont clairement indiqué qu’il était, à leurs yeux, un agent double. Trois d’entre eux le paieront cher et la scène, où devant Staline, ils expriment leurs doutes est, sans doute, le sommet glaçant de ce roman fascinant.

En conclusion, sur des éléments fournis par le Mossad et un ancien directeur de la CIA, l’auteur arrive à se demander si Kim Philby n’était pas en réalité un agent triple. Les agents du NKVD désavoués par Staline avaient-ils vu juste ? C’est difficile à croire mais, avec les espions, sait-on jamais ?

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Koba

Dans une tentative de justification et de réhabilitation face à la postérité représentée ici par Léon, un garçon de dix ans dont les parents ont été victimes du régime, le vieux Staline, terré dans son bureau surveillé jour et nuit par des gardiens, s’adresse à son jeune interlocuteur en lui cachant sa véritable identité. Soliloquant plus souvent qu’autrement, Koba (surnom de ses années de jeunesse) dresse un portrait édulcoré de sa gouvernance sous les yeux scrutateurs de Léon, qui le questionne innocemment sur son rôle dans la révolution bolchevique et l’avènement du communisme.

Robert Littell connaît bien son sujet et l’a traité de diverses manières dans son œuvre romanesque et Koba ouvre une perspective intéressante sur l’époque stalinienne en donnant la parole aux enfants privés de leurs parents au nom du dogme politique. J’ai aimé cette approche mais j’aurais apprécié que le roman soit plus étoffé au niveau des personnages. Cela dit, les dialogues à eux seuls valent le détour et pour mieux comprendre l’histoire russe à travers le roman, Robert Littell s’avère incontournable.

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La peste sur vos deux familles

C'est le premier ouvrage de l'auteur âgé aujourd'hui de 87 ans que je lis. J'avais bien tenté de lire celui de son fils Jonathan, « Les bienveillantes » couronné du prix Goncourt en 2006, mais il m'était tombé des mains en raison de sa cruauté.



La couverture annonce « Un roman au coeur de la mafia russe ». Une histoire d'amour contrariée entre les héritiers de deux gangs rivaux, opérant pour leur propre compte dans la Fédération de Russie en pleine déliquescence après la chute de Gorbatchev et la prise de pouvoir du fantoche Boris Eltsine.



Une transposition du mythe de Shakespeare. Roméo est Roman, le fils du chef charismatique du gang des Ossètes (ethnie originaire du Caucase), Timour le Boiteux. Roman tombe amoureux de Yulia, fille de Nahum Caplan, le chef du gang Juif qui dispute à Timour son territoire.



La guerre des clans s'envenime. Chacun rançonne ses victimes sous prétexte de protection imposée : la technique mafieuse est la même dans ce pays en déshérence, comme partout ailleurs. Une occasion pour l'auteur de décrire la société russe des années 90 où le capitalisme sauvage et son corollaire la corruption règnent. Une situation qui semble perdurer aujourd'hui, à plus grande échelle encore.



Au milieu de ces bandes de tueurs sans merci, même si certains respectent un code d'honneur, un fonctionnaire du service de la répression de la criminalité organisée (on dénombre 300 gangs opérant sur Moscou), Ossip Axelrod, joue les agents provocateurs et met en route un processus de réaction en chaîne - meurtres et vengeance - appliquant le principe que rien n'est plus efficace que l'anéantissement des sbires les uns par les autres.



La romance de Roméo et Juliette va naturellement en faire les frais.
Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
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