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Critiques de Scott Hawkins (46)
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La Bibliothèque de Mount Char

Ce roman est un OLNI !!



Je remercie Babelio et les éditions Folio SF pour l’envoi de ce livre suite à la Masse Critique de Mars 2019. C’est la deuxième fois que je le sélectionne car le résumé m’intrigue beaucoup et la couverture est superbe. J’ai reçu cette nouvelle édition en avant-première, sortie prévue pour le 2 Mai 2019, la première édition de ce roman étant chez Denoël.



Le début est plus qu’énigmatique. Qui sont donc ces bibliothécaires ? À quoi servent ces catalogues ? Qui est donc celui qu’ils nomment Père ? Le démarrage est assez lent même si on ne suit que Carolyn. La fatigue du boulot n’aidant pas, j’ai avancé difficilement dans ma lecture, 60p en 3 jours, mais l’histoire m’intriguait suffisamment pour que j’essaye d’en lire un peu plus. De temps en temps, nous avons des interludes qui nous racontent des moments du passé des personnages, cela correspond souvent à un détail dans le texte initial qui est ainsi mieux expliqué. Même s’il ne se passe pas grand-chose, l’histoire est restée suffisamment intrigante pour maintenir mon attention. Le plus troublant pour moi a été quand on est passé à des narrateurs différents des Bibliothécaires. Par moment, l’histoire me faisait penser à « De bons présages » de Neil Gaiman. Au bout d’un moment, j’ai fini par être totalement dans l’histoire et à réfléchir selon la logique voulue par l’auteur. C’est très bizarre mais en même temps, ça prouve que, malgré ma lenteur de lecture, j’ai retenu les différents détails de cette histoire. La partie que j’ai préféré concerne la lionne chez le vétérinaire, c’était plutôt cocasse comme situation. Plus on avance dans l’histoire, plus on voit les sombres ramifications de celle-ci. Qui a déclenché tout ça ? Carolyn ? David ? Ou un ennemi de Père ? L’auteur a vraiment créé un bouquin hors norme où il nous donne la fin qu’il a imaginé après la découverte du coupable et non, une fin qu’il nous laisse deviner comme dans certains bouquins actuels. Je suis quand même bien contente d’y avoir maintenu mon attention, même si 15 jours pour lire 560p, c’est long. L’histoire est vraiment très spéciale avec une pléiade de personnages tous plus originaux les uns que les autres. Le moins que l’on puisse dire, c’est que je n’aurais jamais imaginé une histoire de ce genre, elle est surprenante de bout en bout et il y a toujours un élément pour éveiller notre curiosité. L’auteur a vraiment un imaginaire complexe et très original. Par contre, comme souvent, je trouve que le résumé de la 4ème de couverture en dit beaucoup trop sur l’histoire. Heureusement que je ne m’en souvenais plus et que je ne l’ai pas relu pendant ma lecture car j’aurais peut-être abandonné ce roman et ça aurait été dommage. Comme d’habitude, je suis hermétique au second degré, du coup, je n’ai pas trouvé ce roman hilarant mais j’en ai bien apprécié l’ambiance et certains des personnages.



Comme vous l’aurez compris, ce n’est pas un coup de cœur mais néanmoins, c’est une excellente découverte de cet auteur, de son style et de son imaginaire. Je suis curieuse de voir ce qu’il pourrait inventer pour son prochain roman, peut-être une suite à celui-ci car la fin semble ouverte. Si vous êtes amateurs de romans fantastiques originaux et complexes, je vous conseille très fortement de le découvrir, c’est d’ailleurs le premier roman de cet auteur. Pour ma part, il s’agit d’un nouvel auteur à suivre. Par contre, gros bémol pour la maison d’édition, il reste des coquilles dont une plus que récurrente (« … des plus ... » l’adjectif n’est jamais mis au pluriel contrairement à la grammaire française), un oubli de lettre (il pour ils), une erreur de prénom et un oubli d’espace dès la première page… Il y a certes noté « épreuves non corrigées » mais n’est-ce pas sensé être une réédition de l’éditeur Denoël ?



Sur ce, bonnes lectures à vous :-)
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La Bibliothèque de Mount Char

Sur le présentoir de la librairie, titre et couverture m'avaient fait de l'oeil. Dès qu'il est question de bibliothèque, j'ai du mal à résister.

Pourtant, aux premières pages de ma lecture, la seule question qui résonnait dans ma tête, c'est : "Mais qu'est-ce que c'est que ce bouquin?". Il faut dire qu'on débarque d'emblée au bord d'une route nocturne avec une jeune femme couverte de sang, pieds nus, et qui vient de tuer un certain détective Miner avec un couteau d'obsidienne... Déroutant, non?



C'est là toute l'efficacité de Scott Hawkins; même si l'on ne comprend pas grand chose et qu'on se sent perdu pendant un bon moment, il donne envie de poursuivre, de ne surtout pas lâcher l'affaire. Et j'aurais eu tort en effet car ce roman pour le moins singulier se révèle captivant et foisonnant. On y découvre que selon les plans où l'on se trouve, le travail de bibliothécaire ne consiste pas seulement à acheter, enregistrer et permettre l'emprunt des livres (entre autres tâches et bienfaits que ces personnes apportent aux usagers). Que même la tempête possède un don de versification. Que selon le type de catalogue que l'on reçoit à étudier, on dispose de capacités qui dépassent l'entendement. Et encore plein d'autres choses.



La bibliothèque de Mount Char est difficilement classable. Livre de l'imaginaire, ça c'est sûr. S'y mêlent des éléments de science-fiction, des scènes plutôt sanglantes dignes d'un roman d'horreur, le tout dans une Amérique tout ce qu'il y a de plus banale et contemporaine. Les personnages sont intéressants à suivre, grâce à leurs spécificités d'apprentissage pour les Bibliothécaires mais aussi par leur personnalité bien différenciée. Les pages défilent sans ennui ni temps mort, rythmées par un bon tempo, des flashbacks aussi utiles que bien amenés dans le fil de la narration, et des surprises à foison.



Ce qu'il y a de bien avec ce type de roman si étrange, c'est qu'il est quasi impossible d'en deviner le dénouement. Chapeau à Scott Hawkins dont c'est le premier ouvrage. Ses descriptions de la fameuse bibliothèque me laissent sur la frustration de ne pouvoir aller y fouiner. En tout cas, j'ai passé un très bon moment en compagnie de Carolyn, Michael, Margaret, Steeve, Naga et les autres. Amateurs de curiosités littéraires, La bibliothèque de Mount Char est faite pour vous!
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La Bibliothèque de Mount Char

Pfiou quelle galère !

J'ai eu beaucoup de mal à terminer cette lecture.

Le récit est un joyeux fouillis composé de personnages atypiques. On suit des jeunes gens élevés par une mystérieuse entité qu'ils nomment Père. Ce dernier dispose d'une bibliothèque dans laquelle étudient les protagonistes. Au fur et à mesure du récit, on s'aperçoit que ces études sont pour le moins étranges : nécromancie, guerre, langage des animaux, dialectes disparus depuis des millénaires…

L'ambiance oscille entre glauque et humour noir. Le chemin de ces anti-héros dans les Etats-Unis d'aujourd'hui est parsemé de meurtres et de résurrections. Ce n'est pas une lecture de tout repos.



La construction du récit est un peu désordonnée. L'auteur alterne les chapitres sur le passé de ces étranges étudiants et leur actualité. J'avais du mal à me repérer dans les époques.

Du coup, cela m'a gonflée. L'histoire a lentement perdu de son intérêt, je pense que c'est une lecture suffisamment exigeante pour monopoliser l'attention du lecteur mais je n'étais pas dans cette humeur.

En revanche, point positif, j'ai trouvé les personnages bien construits, chacun d'eux apporte une touche d'humour du fait de leur spécialité.

Attention, pas mal de scènes gores, certaines s'exerçant sur des enfants.



En résumé, un récit qui m'aura d'abord intriguée puis déroutée et enfin lassée. Sentiment mitigé en ce qui me concerne.
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La Bibliothèque de Mount Char

Récompensé en 2018 par le prix Elbakin du meilleur roman étranger, « La bibliothèque de Mount Char » (paru chez Denoël et réédité ce mois-ci en poche) a fait l’objet de nombreuses chroniques très partagées : certaines enthousiastes, d’autres fortement rebutées par le caractère glauque (voire carrément horrifique) de quelques scènes. C’est la raison pour laquelle j’ai longtemps hésité avant de me lancer dans cette lecture qui m’a finalement laissé un sentiment mitigé, même s’il faut bien reconnaître que la rapidité avec laquelle j’ai dévoré le roman est plutôt révélatrice. Posons d’abord un peu le décor. Le lecteur fait connaissance dès le premier chapitre avec une curieuse jeune femme, Carolyn, qui est de toute évidence loin d’être une Américaine ordinaire compte tenu de sa façon de se comporter et surtout d’appréhender le monde. Un sentiment d’étrangeté et de malaise s’empare alors aussitôt du lecteur et ne fait que se renforcer à mesure que l’on fait la connaissance des « frères » et « sœurs » de l’héroïne, de toute évidence eux aussi très perturbés, voire carrément flippants pour la plupart. Entre celui qui parle et vit au milieu des animaux, celle qui semble revenir tout droit du royaume des morts, et celui qui se trimballe avec des trophées morbides en affichant une férocité et une cruauté tout sauf feintes, on se dit qu’on est tombé sur une bande de sacrés timbrés ! Des timbrés qui se trouvent manifestement dans une situation critique : non seulement celui qu’ils appellent « Père » a mystérieusement disparu depuis des jours, mais surtout sa disparition semble avoir créé une sorte de champ de force autour de la maison dans laquelle ils habitaient, la rendant ainsi inaccessible. Cela n’aurait rien de dramatique si la maison en question ne constituait pas en l’unique accès à la Bibliothèque (avec un B majuscule, attention !) et à toutes les connaissances exceptionnelles qu’elle contient. Une Bibliothèque dont l’importance est de toute évidence capitale (quand bien même on peine pour le moment à bien en saisir la raison), et qu’il va manifestement falloir défendre contre les vautours attirés par la disparition du patriarche.



Difficile de rester indifférent à ce roman pour le moins déroutant qui s’amuse à faire régulièrement vaciller les certitudes du lecteur. Le récit m’a fait penser par cet aspect à un autre roman fantastique lu récemment, « American Elsewhere », dans lequel on retrouvait la même tension, le même sentiment de malaise diffus : c’est comme si notre instinct nous criait à chaque page que quelque chose cloche sans qu’on puisse pour autant mettre le doigt dessus. Le roman est, de ce point de vue, une véritable réussite, dans la mesure où il parvient à installer un climat oppressant de bout en bout. Ce sentiment d’angoisse est souvent contrebalancé par un humour très noir, voire carrément macabre, qui parvient à dédramatiser la situation tout en renforçant paradoxalement le malaise ressenti par le lecteur. C’est ce savoureux mélange entre noirceur et fausse légèreté qui fait tout le sel du récit mais qui peut aussi totalement rebuter une partie de son lectorat : âmes sensibles s’abstenir ! L’autre atout principal de cette histoire vient de sa construction et du suspens savamment entretenu par l’auteur pendant la majeure partie de l’ouvrage concernant la disparition du « Père », et surtout la nature de ses « enfants ». La quête menée par Carolyn et ses semblables pour tenter de comprendre l’absence de leur paternel est évidemment intrigante, et pourtant c’est surtout l’origine et le rôle même de ces personnages qui titille en premier lieu la curiosité du lecteur. Les chapitres « flash-back » au cours desquels l’auteur revient sur l’arrivée des enfants et leurs années de formation dans la Bibliothèque sont ainsi les plus attendus, mais aussi sans doute les plus perturbants car dégageant une espèce de fascination malsaine. Et c’est là que je rejoins une partie des lecteurs qui ont pu être dérangés par la description de plusieurs scènes de tortures physiques et psychologiques subies par Carolyn et ses frères et sœurs pendant la durée de leur formation. Des tortures difficilement soutenables à envisager, et qui mettent le lecteur d’autant plus mal à l’aise qu’elles sont exercées sur des enfants.



Ceux-ci constituent d’ailleurs une autre source de malaise. Les mécanismes d’auto-préservation adoptés par ces personnages afin d’encaisser les sévices subis sont en effet parfois plus déroutants que les tortures en elles-mêmes, au point que l’effroi en vient parfois à remplacer la pitié. Cela n’empêche pas le lecteur de s’y attacher, même si les plus sensibles d’entre eux sont un peu mis sur la touche et auraient mérité d’être davantage développés. Le personnage de Carolyn est pour sa part très ambiguë : d’un côté on ne peut s’empêcher d’admirer son sens de la stratégie, tandis que de l’autre on éprouve un sentiment de révolte à la voir utiliser et surtout se débarrasser aussi froidement de ceux qui lui sont proches. En marge de cette fratrie, on suit également le destin de deux personnages « ordinaires » qui vont voir leur vie bouleversée par leur rencontre avec les « apprentis bibliothécaires » : l’un est un ancien soldat réputé pour son héroïsme sur le champ de bataille et qui supporte mal cette renommée ; le second est un gars un peu paumé, ancien cambrioleur désormais rangé qui va devoir surmonter un sacré paquet d’épreuves suite à sa rencontre avec notre héroïne. Si les premiers chapitres mettant en scène ces différents personnages parviennent à capter immédiatement l’intérêt du lecteur, celui-ci a malheureusement tendance à décliner à mesure que l’intrigue avance et que l’auteur lève le voile sur le mystère de la Bibliothèque. Sans aller jusqu’à parler d’ennui, la seconde moitié du roman suscite en tout cas moins d’enthousiasme que la première, et ce en dépit d’un rythme qui s’accélère et d’une succession d’impressionnantes scènes d’action que ne renierait pas un blockbuster américain. La conclusion offre malgré tout de belles surprises et les réponses apportées aux nombreuses interrogations posées sont suffisamment complètes pour combler la frustration du lecteur.



« La bibliothèque de Mount Char » est un roman à l’ambiance très particulière qui parvient à susciter avec une remarquable efficacité tour à tour la fascination ou le malaise. L’intrigue est construite habilement et permet de maintenir un suspens appréciable pendant la majorité du récit, même si le rythme de la deuxième partie est à mon sens moins maîtrisé. Les personnages sont eux aussi traités de manière soignée, et l’ambiguïté de certains reste sans doute l’une des plus grandes réussites du roman. A lire… à condition d’avoir le cœur bien accroché !
Lien : https://lebibliocosme.fr/201..
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La Bibliothèque de Mount Char

En résumé : J’avoue, j’ai passé un bon moment de lecture avec ce roman, même si certains aspects m’ont légèrement frustré. L’auteur nous plonge dans un récit complètement barré avec des bibliothécaires contrôlant l’univers. Père a disparu, l’accès à la Bibliothèque est devenue impossible et ses disciples deviennent nerveux et enquête pour essayer de le retrouver. C’est déjanté, sans limites, percutant et bien rythmé ce qui fait qu’on se laisse porter par ce récit. L’univers est l’un des gros point forts de ce livre proposant une mythologie très prenante et pleine de mystères, qui se dévoile efficacement entre révélation, second degré et folie. Il donne clairement envie d’en apprendre plus, même si je trouve que sur la fin il s’adapte un peu trop aux besoins de l’auteur devenant parfois improbable et reposant sur quelques Deus Ex Machina faciles. Les personnages ne manquent pas non plus d’attrait, mélange de folie et de charisme, et plus on avance dans le récit plus on comprend ce qui leur est arrivé, leurs failles, leurs souffrances. Je ne vais pas dire qu’on s’attache et qu’ils nous touchent, mais on les comprend et ils se révèlent assez charismatiques pour nous captiver. Seul Steve, qui pourtant a son importance dans le récit, m’a un peu laissé de marbre. La conclusion s’avère explosive, rythmée, avec de nombreux rebondissements et le voile qui se lève sur les différents mystères présenté, mais voilà je l’avais deviné bien en amont. C’est simple sur les deux grosses révélations j’avais trouvé la première au premier quarte du livre et l’autre entre le premier tiers du livre et la moitié ce qui est frustrant pour un roman qui repose justement sur ses mystères. J’ai aussi trouvé que certaines scènes étaient un peu trop déconnectées du récit ce qui offre quelques longueurs. La plume de l’auteur est simple, efficace et entraînante même si parfois l’auteur en fait un peu trop sur le côté familier ce qui peut s’avérer un peu lourd. Au final ça reste un bon livre, détonnant avec de bonnes idées, dont mon seul regret et d’avoir deviné la fin, mais cela ne m’empêchera de lire d’autres écrits de l’auteur.





La chronique complète sur le blog.
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La Bibliothèque de Mount Char

Un roman de Fantastique Lovecraftien / Strossien vraiment, mais alors vraiment pas comme les autres, qui met les bibliothécaires au pouvoir



(lu en VO)



Ce livre de Fantastique, inspiré autant par Lovecraft que par Stross, est vraiment très particulier, dans son ambition et son sense of wonder (une expression qui n’est d’habitude employée qu’en science-fiction mais qui, ici, n’est en rien galvaudée), mais aussi dans le côté horrifique, gore et malsain de certaines scènes. Ce n’est tout de même pas si souvent qu’on voit le maître de la Réalité et de toutes choses à l’oeuvre, formant douze disciples comme autant d’apôtres dévoyés, chacun maîtrisant une partie du pouvoir suprême, chacun étant tour à tour horriblement torturé s’il ne se soumet pas aux volontés de Père. Ces anciens petits américains ont été arrachés, à huit-dix ans, au monde normal, pour être conduits dans la Bibliothèque, celle qui renferme tous les secrets de l’univers (ou presque).



Malgré des scènes très cruelles, un ton souvent très noir, la fin du livre vous réservera bien des surprises (sans compter qu’elle appelle de toute évidence une suite, que je lirai avec plaisir si elle paraît). Les nombreux twists de l’intrigue, les révélations dans les flash-backs, le rythme bien maîtrisé et les cliffhangers typiques des codes du thriller et savamment employés sauront vous tenir en haleine. Globalement, c’est donc un livre recommandable, sachant qu’il ne faut tout de même pas être trop sensible vu l’horreur et le côté glauque et transgressif de certaines scènes. De plus, on peut déplorer un certain manque d’originalité, vu que c’est tout de même extrêmement inspiré par Lovecraft et peut-être surtout Stross.



Toutefois, si ce livre avait un énorme potentiel sur le papier, celui-ci est un peu gâché par un style parfois sur courant alternatif (la scène où Erwin est dans le Bureau Ovale, par exemple, est franchement mauvaise), par de vagues problèmes de cohérence, et par un auteur qui, à quelques reprises, en terme de suspension d’incrédulité, nous en demande beaucoup (on doit toutefois nuancer ces critiques en tenant compte du fait qu’il ne s’agit après tout que d’un premier roman). En revanche, c’est prenant, on lit avec plaisir, il y a de l’imagination, bref c’est assez contrasté, en fait. J’ai envie de dire que si vous avez aimé le volet Lovecraftien de l’oeuvre de Stross, vous pouvez y aller, sachant que les qualités d’écriture ne sont pas les mêmes.



Retrouvez la version complète de cette critique sur mon blog.
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La Bibliothèque de Mount Char

Père maîtrise l’ensemble des catalogues, mais ne souhaite pas qu’un de ses élèves puissent un jour rivaliser avec lui. Ainsi la moindre tentative est brutalement châtiée. Il génère ainsi la méfiance et un esprit de pré-carré entre les enfants ou la compétition acérée remplace l’idée d’entre-aide. David devient d’une cruauté saisissante s’épanouissant avec la découverte et l’apprentissage de son catalogue. Que peut faire une Carolyn avec les langages mis à part s’endurcir ?…



Ces premiers chapitres furent presque une épreuve, j’ai même été sur le point de refermer le roman dès le premier, ce qui ne m’arrive quasiment jamais.



Cependant, une petite flamme maintenait mon intérêt. Une flamme qui a pris davantage d’ampleur au fur et à mesure.



Déjà le récit alterne entre le présent qui relate la recherche de Père qui a subitement disparu et le passé qui détaille les phases clés de l’éducation. Cette structure d’une fausse simplicité apporte du suspens et renforce la dramaturgie, soulignant habillement chacune des phases. Ainsi, plus le lecteur avance dans le récit, plus se trouve-t-il pris dans la toile de Scott Hawkins.



Carolyn happe le lecteur. Elle exerce une forme de fascination entre cette vulnérabilité initiale, un sentiment de petite chose fragile, et l’intuition qu’elle possède une force et une détermination incommensurables. Elle est si paradoxale, si énigmatique dans ses forces et faiblesses qu’elle éveille une grande curiosité. En tant que lecteur, j’ai navigué entre l’empathie et la répulsion…



Répulsion, oui car aucun de ces enfants/adultes ne provoque la sympathie ou l’attachement tant ils sont tarés, barrés, flingués du cerveau, barbares du cœur. La compassion nous en éprouvons, mais elle est systématiquement douchée par un acte ou un comportement dérangeants. Seuls les protagonistes secondaires comme Steve et Erwin, pleinement humains nous raccrochent à une certaine « rationalité ». Ou les animaux (Naga, la lionne).



Outre son originalité, cette fantasy urbaine est marquée par cette folie qui imprégne la psychologie des personnages, le cadre démesuré de la Bibliothèque, la démence de certains comportements,… Mais les motivations demeurent rationnelles, tout comme la trame qui ne sombre jamais dans le délire. D’ailleurs cela peut paraître paradoxal car sous ce parfum timbré, nous sentons bien que Scott Hawkin mène son histoire et que jamais il ne se laisse déborder par les lubies ou l’extravagance de ses personnages. Tout à un but, ici.

A la suite ce cette lecture, vous verrez les bibliothécaires d’un œil nouveau et peut-être admiratif. La Bibliothèque de Mount Char se paie le luxe de l’extravagance et cela fonctionne, exerçant une fascination sur son lectorat grâce à une imagination débordante, des personnages solides et une histoire qui donne dans la démesure.



Critique plus complète sur mon blog
Lien : https://albdoblog.com/2017/1..
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La Bibliothèque de Mount Char

Au départ, c'est louche. Très louche même. On en vient graduellement à comprendre qu'il y a au monde énormément plus que ce que le commun des mortels ne peut soupçonner. Une poignée d'initiés par contre est en plein dedans, tellement qu'ils sont étrangers au monde normal qui n'est qu'une infime facette de leur univers. On tombe dans ce milieu comme un cheveu sur la soupe et qui plus est, les personnages sont eux-mêmes plongés dans une situation anormale. Mais il est clair que l'auteur mise sur l'inattendu des scènes et sur les révélations progressives. Cependant, après l'hébétude provoquée par l'étrangeté désarçonnante de ces premiers chapitres, je me suis retrouvé debout, crécelle en main, criant : « Encore, encore ! ». Dès lors un page-turner qui m'a filé entre les doigts dans le temps de le dire.



Très haut degré d'originalité, une originalité déjantée qui m'a fait penser à du Chuck Palahniuk ; comme si ce dernier aurait voulu écrire un roman inspiré d'un monde de comic à la Marvel (pour toute cette variété d'êtres comme personnages) mâtiné des Chroniques de Narnia (pour les lions !). L'auteur développe un univers époustouflant, greffé sur le réel qui en pâlit affreusement, insoupçonné des foules, craint par les autorités compétentes, apprivoisé par les bibliothécaires, géré par un démiurge inquiétant...



C'est vraiment follement divertissant, ça se démarque du commun. Il y a des scènes jubilatoires. Nous sommes également introduits dans les manigances et machinations de personnages très intelligents. Bref, c'est un grand plaisir, un vent de fraîcheur de la part de ce modeste amateur de SFFF passé derrière la plume pour le plus grand bénéfice du genre. Un vent de fraîcheur avec quelques relents putrides toutefois, car souvent sacrément morbide !
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La Bibliothèque de Mount Char

On ne s'ennuie pas un instant à la lecture de cet étrange roman. Pas une faute de goût, pas une longueur, pas une vulgarité, qui sont la rançon à payer quand on se plonge dans la littérature d'imagination. On ne peut guère prendre ce livre pour un roman de SF, malgré ce que la couverture indique, et il n'y a rien de ce qui rend la SF actuelle si mortellement ennuyeuse : les bons sentiments et le politiquement correct. La "bibliothèque" du titre pourrait faire penser à Borges et à un certain fantastique intellectuel, mais le récit, plein d'aventures, de rebondissements et de surprises, dissipe vite cette illusion. Ici, nulle méditation littéraire sur la littérature. D'ailleurs, la bibliothèque du roman est remplie d'ouvrages "utiles", plus que de fiction et d'art : comment ressusciter un mort, parler aux animaux, recettes de cuisine vieilles de soixante mille ans, poésies complètes des ouragans et autres tempêtes dans leur langue, arts de la guerre sous toutes leurs formes, etc... Sur elle règne une sorte de figure presque divine et féroce, Père, qui a recruté ou kidnappé des enfants dont les études vont se spécialiser dans chacune des branches du savoir officiel et officieux ; mais l'éducation de ces enfants est subtilement, cruellement, atrocement menée, et l'intrigue du livre relate leurs relations et leurs aventures. Parvenu à la fin de ce roman haletant, on est forcé d'admirer tout l'art de la composition qui est ici à l'oeuvre, et par lequel le romancier guide le lecteur où il veut. C'est une vraie réussite.
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La Bibliothèque de Mount Char

Comme chaque été, je relève le défi du pavé de l'été de Sur Mes Brizées ! Après un pavé très décevant l'an dernier, j'ai choisi avec soin celui de cet année et me suis lancé dans le très intriguant "La bibliothèque de Mount Char".



Premier roman de Scott Hawkins, le livre est une excellente surprise. Loin de nous prendre par la main, l'auteur nous emporte dans un récit mystérieux, ampli d'une mythologie propre, parallèle à notre monde. On prend une histoire en cours, on rencontre une dizaine de personnages différents et cherchons un sens, un but, à tout cela. L'auteur rattache le tout petit à petit, de façon astucieuse, pour nous offrir une vision limpide pour son dernier tiers.



Plus qu'une histoire prenante et intéressante, les personnages qui peuplent le roman sont tous très bien écrits et intéressants. On a envie de suivre Carolyn, Steve, Erwin et l'ensemble de la fratrie, malgré la maladresse et la cruauté de certains.



Aussi drôle, décalé, que terrifiant, "La Bibliothèque de Mount Char" est un pavé captivant que je ne peux que conseiller fortement. Je découvrirai avec grand plaisir les prochains romans de Scott Hawkins !
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La Bibliothèque de Mount Char

Ce livre avait tout pour me séduire.

D'abord une bibliothèque vertigineuse et infinie, telle que Borges l'avait imaginée. Ensuite un mélange de genres, de la science fiction, de la fantasy, de la mythologie, du gore, du Polar. Même les scènes de tortures ne me rebutent pas, lorsqu'elles sont, comme ici, justifiées par le récit. Des super-héros, sortes de mutants savants et psychopathes, pourquoi pas !

J'accepte également d'être desarconnee devant la construction erratique d'un roman, les flashbacks à répétition.

J'apprécie beaucoup l'humour noir surtout lorsqu'il sert de contrepoint à des scènes d'action complètement délirantes.

La surenchère dans certaines scènes, comme celle du tueur en tutu, des resurrections multiples, des combats entre lions et chiens aurait pu aussi me séduire.

Les ingrédients étaient bons, mais pour moi la recette est ratée. D'abord parce que le livre m'a ennuyée, malgré ou peut-être à cause de la répétition des effets spéciaux. Et je n'ai pas réussi à lâcher prise pour entrer dans cet univers, peut-être parce qu'il ne m'a pas convaincu au début de la lecture.
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La Bibliothèque de Mount Char

Attention OVNI ! Difficile de parler de ce roman qui en rappelle beaucoup d'autres mais qui ne ressemble à aucun… Pour donner quelques pistes et une idée de ce à quoi peut s'attendre le lecteur, comment ne pas penser à "American Gods" de Neil Gaiman – que pour ma part je n'avais pas du tout aimé – et à la série "Les princes d'Ambre" de Roger Zelazny – que j'ai appréciée mais au milieu de laquelle je suis restée bloquée par manque de temps.



A travers le destin de ces enfants, l'auteur s'en donne à cœur joie : clin d'œil à la littérature du genre, mondes parallèles, chaos organisé, batailles mémorables, personnages déjantés… les clichés sont légions mais dans une sorte de frénésie jubilatoire qui laisse le lecteur essoufflé, hagard mais tellement heureux au bord de la route. Entre le thriller fantastique où la magie côtoie la religion et le mystique et le grand guignol sanglant et violent, on sent que l'auteur se régale à noyer les pistes et à nous présenter ses personnages tous plus tordus les uns que les autres. Pas vraiment de normalité dans ce roman, la normalité ressemble plutôt à des scènes tirées du film The Truman Show. Entre humour et galerie de portraits atypique et bizarre on se retrouve entre Freaks et les Monty Pythons mais quel bonheur !



Rien de nouveau dans la thématique, puisque l'on est dans la relation entre les Dieux et les hommes mais la façon dont l'auteur nous entraîne dans son délire est époustouflante. Du début à la fin, le lecteur se retrouve embringué, presque malgré lui dans cette course de près de 500 pages où la violence la plus crue se confronte à l'humour le plus noir et grinçant. On peut se sentir perdu par moment, dérouté, énervé de se faire mener par le bout du nez mais au final, cela fait vraiment du bien de se faire bousculer dans sa lecture et rares sont les romans qui font vraiment cet effet.



J'ai mis du temps à faire cette chronique car je dois avouer que je ne savais pas trop par quel bout la prendre… tant ce roman est surprenant, inclassable, ne ressemble à aucun autre. Je suis consciente que certains détesteront, d'autres seront bluffés. Pour ma part je n'ai qu'un conseil : lisez-le, faites-vous votre propre avis !



A lire sur le blog :
Lien : http://bidules16.canalblog.c..
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La Bibliothèque de Mount Char

Extrait de ma chronique :



"Comme dans le fameux montage des attractions d'Eisenstein ou le théâtre épique de Brecht, les épisodes semblent en effet avoir été choisis plus pour leur impact sur le lecteur ou la lectrice que pour leur intégration dans une trame d'ensemble (voir notamment le chapitre 5, le seul à ne pas adopter le point de vue d'un des trois protagonistes principaux) ; mais bien sûr, comme dans les meilleurs Harry Potter, ces éléments en apparence gratuits prendront tout leur sens ultérieurement...





Cette apparente disparité, qui contribue à l'aspect comics de l'oeuvre, trouve très certainement sa source dans la méthode d'écriture de Scott Hawkins, qui fait partie des "back-to-front and inside-out writers" (suivant la typologie de Diana Wynne Jones dans Reflections, page 136) : comme il l'explique rapidement dans cet entretien, et plus en détail dans cet autre, Scott Hawkins "passe basiquement les N premiers mois d'écriture à jeter au hasard des scènes sur une page", avant de "voir émerger une ligne directrice quelconque de la fange"."
Lien : https://weirdaholic.blogspot..
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La Bibliothèque de Mount Char

La bibliothèque de Mount-Char m'attendait patiemment dans la PAL. Le résumé et les bonnes critiques m'avaient poussé à le prendre et enfin, quand je l'ai lu, il s'est révélé proche de la perfection ! A noter que je l'ai lu en VO.



Tout d'abord, j'ai trouvé l'univers très bien pensé et d'une grande originalité. Les bibliothécaires possèdent des spécialités, un catalogue, qui leur confère des talents spécifiques. Ces bibliothécaires ont été élevés et obéissent à Père, qui semble un équivalent de Dieu, tout simplement. Figure terrifiante, son autorité sévère et son mystère en font un personnage très marquant, malgré son absence.



Le livre touche à de nombreux domaines : les langues, les animaux, les religions, le monde, les mathématiques... Ce qui donne une impression de profusion grisante, d'une univers vaste et complexe qui dépasse notre entendement mais qui pourtant semble cohérent. Il y a des lions qui parlent, des sortes de mort-vivants, des entités anciennes, sans âge... L'univers créé par Hawkins est très bien construit.



Le récit s'articule autour de la disparition de ce Père qui laisse désemparé ses enfants adoptifs face aux nombreux et puissants ennemis de ce dernier. La psychologie de ces derniers est très réussie. Ils parviennent à créer une forme de distance et d'étrangeté avec eux, Scott Hawkins a réussi à créer des personnages ambigus, à la fois touchants et terrifiants.



Nous ne pouvons nous rattacher qu'à Steve, qui se retrouve au centre des plans de Carolyn. Ce personnage, qui pourtant me laissait indifférente, s'est finalement révélé très attachant, notamment dans sa relation avec d'autres personnages du livre.



Le livre est de temps en temps traversé par des scènes sanglantes. Mais j'ai pris cela comme des actions pour nous rappeler que les bibliothécaires sont malgré leurs apparences, différents des êtres humains. Leur rapport à la mort et à la violence est complètement différent, ce qui explique des moments très gores, mais trop exagérés pour vraiment choqués.



Enfin, j'ai trouve la plume très claire, parfois poétique, parfois plus crue, mais toujours juste. Il nous emporte dans le flot de son histoire avec aise. D'autant plus qu'il distille des rebondissement nombreux et des scènes d'action bien tournées. Résultat : Je ne me suis jamais ennuyée dans ce récit atypique.



Je ne peux que vous conseiller ce roman. Si vous cherchez de la fantasy adulte de très bonne facture, au monde original et au goût résolument moderne et un peu incisif, foncez !
Lien : https://www.lageekosophe.com
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La Bibliothèque de Mount Char

Après quelques difficultés à entrer dans ce roman (pendant les vingt premières pages), j’ai été agréablement surpris. L’univers décrit par l’auteur avec l’éducation des enfants de Père est assez dérangeant et en même temps envoûtant. Pourtant, les différents personnages ne déclenchent pas d’empathie. J’ai suivi avec attention l’évolution de Carolyn, même si je me suis rapidement douté de certaines choses, qui se sont confirmées ensuite.

[...]

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Lien : https://www.aupresdeslivres...
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La Bibliothèque de Mount Char

La Bibliothèque de Mount Char est l'un de ces rares livres qu'il est difficile de classer dans un genre spécifique. Est-ce de la fantasy urbaine ? De la science-fiction ? Du réalisme magique ? De l'horreur ? De la comédie noire ? Du mystère ? Tout cela à la fois, et bien plus encore. Si vous préférez que votre bibliothèque soit soigneusement organisée avec des piles faciles à déchiffrer en termes de genres et de catégories, celui-ci vous déconcertera.



Ce livre demande d'être prêt à rester dans l'obscurité jusqu'à la grande révélation finale. Il est quelque peu non linéaire, avec de nombreux flashbacks, et il y a des moments "WTF ?!?" Mais ne vous inquiétez pas, tout s'emboîtera une fois que vous comprendrez les "comment" et "pourquoi" des personnages.



Certains passages (avec le président !) étaient hilarants et d'autres absolument terrifiants, voire répugnants. Il y a beaucoup d'action et une construction de monde exceptionnelle. C'est une fantasy sanglante où la vie s'éteint en un instant avec des conséquences à long terme qui s'étendent comme de longs tentacules.



Bravo à M. Hawkins pour ses dialogues bien ciselés qui ont permis des moments de rire franc. L'humour est inhérent au monde magnifiquement construit.

Je recommanderais certainement ce livre pour de longues périodes de lecture ininterrompue plutôt que pour des lectures courtes "prise et reprise". Une fois que vous commencez, vous verrez ce que je veux dire.
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La Bibliothèque de Mount Char

Ce roman est d'une inventivité étourdissante. L'auteur y peint une monde de fiction si vaste et si déconcertant que, par moments, le livre semble presque trop étroit pour le contenir. De nombreuses idées, des concepts, des personnages, des situations, n'existent que sous la forme d'allusions et confèrent au lecteur l'illusion d'être plongé dans un contexte bien plus profond que celui qui peut être exploré dans ces pages.



A l'image de ce décor original et ambitieux, l'intrigue elle aussi prend des chemins qu'il est rigoureusement impossible d'anticiper, et au cours de la lecture, alors qu'on croit avoir compris de quoi parle le roman, celui-ci se transforme, tant dans son propos que dans les thèmes qu'il explore. On a affaire ici à de la littérature de l'imaginaire sous sa forme la plus pure.



Le livre a malgré tout les défauts de ses qualités. Je ne connais pas les méthodes de travail de Scott Hawkins, mais tout indique qu'il ne travaille pas avec un plan et qu'il improvise son récit au fur et à mesure, au gré des fulgurances de son imagination. Le résultat, c'est une narration inégale, avec une tendance de la part de l'auteur à explorer les événements plus longtemps que nécessaire (ou parfois, beaucoup moins longtemps). Ici, une mission qui paraît assez simple et qui consiste pour un des personnages à trouver un objet banal dans une rue occupe plus de 300 pages. Ailleurs, en particulier vers la fin, le récit se transforme de manière radicale, à plusieurs reprises, en quelques paragraphes.



Le ton vacille également en fonction de la fantaisie de l'auteur, et peut passer de l'horreur à l'humour, du baroque au réalisme, et cela d'une scène à l'autre, sans que ces variations de ton obéissent réellement aux nécessités de l'intrigue.



Ces défauts ne sont que les conséquences sans doute inévitable d'une imagination foisonnante, qui vaut à elle seule la peine de s'intéresser dans ce roman unique au monde.

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La Bibliothèque de Mount Char

Père et les Enfants Particuliers.



Des orphelins recueillis par un être autoritaire et immortel (?), qui développent des talents particuliers à force de lectures et d'apprentissages des catalogues – une somme de savoirs ahurissante – que renferme sa Bibliothèque.

Ce Père qui disparaît, mettant en branle des rouages prêts à broyer tous ceux pris dedans.

Des lions qui se battent contre une armée de chiens, des meurtres sanglants en tutu, une fin du monde programmée...

Oh, et un taureau en bronze qui s'avère un bien étrange barbecue.



Tant d'étrangetés (et bien d'autres encore), et la promesse de refermer le bouquin en se demandant ce qu'on vient de lire.

Et pourtant le continuer, fasciné·e.



Certes, on devine vite la résolution du fil rouge sur la disparition de Père, l'auteur appuyant un peu trop les indices semés – comme un Petit Poucet qui aurait eu la main lourde sur les cailloux, traçant une piste un peu trop évidente ; quand un twist mettant un taquet derrière la nuque n'aurait pas été de refus.



Mais le récit en lui-même s'avère parfaitement imprévisible, prenant des virages totalement inattendus, mélangeant allègrement les genres et les situations, au point de se demander où l'auteur veut aller et s'il a vraiment une idée de sa destination, ou s'il brode en attendant de trouver.



Pourtant, force est de constater que ça marche.

Que ce soit avec cette galerie de personnages étranges, décalés ou paumés, ces événements barrés, cet humour noir qui point parfois, ce débordement de violence (certains ne font pas dans la dentelle), ces vrais moments de bravoure et ces relations touchantes, ces mystères obscures dont on se demande si l'auteur les éclaircira à un moment... Chaque passage fait mouche et accroche l'intérêt, même si le plan d'ensemble nous reste flou.

Pendant un temps.



Puis certaines révélations arrivent, les pièces se mettent en place, s'assemblent, les ramifications prennent sens et on se rend compte que l'auteur savait pertinemment où il allait depuis le début.



Une lecture délicieusement étrange, dont on reste captif, comme prisonnier dans un taureau de bronze. Un taureau qui abrite un brasier.

La chaleur suffocante nous étouffe, les flammes nous mordent.

On serre les dents, puis on crie, inévitablement.



Jusqu'à ce que l'on nous ressuscite.
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La Bibliothèque de Mount Char

ME LE FALLAIT







Avec mon double programme de lecture (et même triple, si l’on compte le jeu de rôle), programme panachant imaginaire et choses nippones, il m’est plus difficile encore qu’auparavant de suivre véritablement « l’actualité » (et, disons-le, hors imaginaire et hors nippon, c’est encore pire – l'année dernière, il m'a bien fallu un Larry McMurtry pour que je m’octroie une pause d’un autre ordre). C’est très con, je sais. Mais du coup, en imaginaire, puisque c’est bien de cela qu’il s’agit, je passe généralement à côté de ce qui fait le buzz (hors « Une Heure-Lumière », hein ! Mais en ajoutant, tendance dont je ne suis pas tout à fait inconscient, que ces derniers temps, même dans le cadre de Bifrost, j’ai lu essentiellement des choses, eh bien, pas toutes jeunes…).







Quelques titres, cependant, apparaissent malgré tout sur mon radar – et, l’an dernier, ce fut surtout le cas de cette Bibliothèque de Mount Char, premier roman de Scott Hawkins, paru en Lunes d’Encre sous une couverture de l’excellent Aurélien Police, et dans une traduction de l’indispensable Jean-Daniel Brèque. Les camarades de la blogosphère étaient en effet formels : c’était génial, fou, innovant, unique, drôle, terrible, et à même de susciter le malaise – autant dire, tout ce que j’aime ! Cependant, je n’ai pu trouver le temps de lire ce roman que tout récemment – et donc après tout le monde...







Ce qui biaise sans doute mon rapport à ce livre. Que j’ai trouvé vraiment très bon, et que je recommanderai sans l’ombre d’un doute, en gardant par ailleurs un œil sur la production à venir du bonhomme... Cependant, j’en attendais probablement un peu trop, après ce concert de louanges – aussi la satisfaction d’avoir lu ce livre pouvait-elle être un peu mêlée d’une vague déception, en même temps… Mais le bilan demeure très positif. Bon, je vais tâcher de m’expliquer sur tout ça...







NE PAS TROP EN DIRE







La tâche n’est pas aisée, mine de rien. Notamment parce qu’il ne faut pas trop en dire… Sur ce blog, je n’ai pas de politique déterminée sur les Odieux et Scandaleux Spoilers – si ce n’est celle de signaler quand je révèle comme un porc. Mais La Bibliothèque de Mount Char me paraît clairement devoir intégrer la catégorie des livres dont je dois préserver le secret, dans la mesure du possible – et, dès lors, cette chronique, exceptionnellement peut-être, est conçue pour être lisible en préalable de l’acquisition du roman de Scott Hawkins, et pas seulement après lecture. Bizarrement, cette lecture après tout le monde m'incite aussi à revenir sur certains échos de la blogosphère... Mais c'est autre chose, ça.







C’est que le roman, à sa manière éventuellement particulière, du fait de sa construction un peu alambiquée notamment, est riche de mystères, et que l’auteur fait preuve d’un certain savoir-faire pour ce qui est de l’intrigue. Je suppose que, pour que La Bibliothèque de Mount Char fonctionne, et c’est souhaitable, il ne faut donc pas trop en savoir au préalable.







Mais il faut bien en dire quelque chose... Le roman s’ouvre sur Carolyn, la trentaine, qui sera plus ou moins notre héroïne, et qui erre en piteux état le long d’une autoroute, plus ou moins dans notre monde (aux États-Unis), plus ou moins de nos jours. Un teaser qui fera bientôt sens, mais a pour objectif à très court terme de nous plonger aussitôt dans le bain – avec réussite en ce qui me concerne.







Cependant, nous avons bientôt droit à un flashback en forme de zoom arrière, et conséquent, qui nous permet d’envisager les choses sous un autre angle, en contextualisant un peu – toujours avec Carolyn pour point de référence, à ce stade. Les parents de cette dernière sont morts alors qu’elle était toute petite, et a elle a aussitôt été « adoptée » par un vieux bonhomme, qu’elle appelle Père. Elle n’est pas la seule : elle a onze frères et sœurs « adoptés » exactement dans les mêmes conditions.







Et ils vivent ensemble dans une bibliothèque qu’on sait d’ores et déjà Majuscule, sise à Garrison Oaks si elle doit se trouver quelque part. Là, Père a dispensé son enseignement à sa « progéniture », en confiant à chacun de ses enfants/disciples un « catalogue » qu’ils doivent maîtriser à la perfection, et ne surtout pas communiquer aux autres. Carolyn, ainsi, est la spécialiste des langues ; David, le plus qu’inquiétant David, de la guerre ; Michael, des animaux ; Margaret, de la mort, etc.







Mais les méthodes d’enseignement de Père sont pour le moins rugueuses – parfaitement horribles, en fait. Son antique « barbecue » d’aspect taurin, en est la meilleure illustration (de couverture – merci Aurélien Police).







Or cette petite famille, qui est donc aussi un petit groupe de bibliothécaires ultra-spécialisés, semble disposer de pouvoirs bien singuliers – la mort n’est à vrai dire pas un problème en tant que telle, les concernant. Ce qui rend l’usage du « barbecue » plus terrible encore, car jamais fatal au sens fort… C’est que ces gens-là ne sont pas des « Américains » : les Américains, ce sont les autres – la banalité faite hommes et femmes. Les bibliothécaires sont avant tout des étudiants (des Pelapi). Mais Père ? Père avec sa majuscule, sa sévérité, sa cruauté, son goût de l’ordre ? On est plus que tenté d’y voir Dieu, comme de juste – mais pas forcément le créateur… et probablement pas l’unique.







Quoi qu’il en soit, quand débute le roman, c’est le drame – enfin, un de plus : Père a disparu. Et les douze bibliothécaires ne savent absolument pas quoi faire. Se prémunir contre les ennemis de Père, nombreux, et éventuellement responsables de sa disparition ? Mais celle-ci est de toute façon tellement inconcevable… Le départ de Père suscite l’anarchie – laquelle est le vivier des hérauts de l’ordre, de la force brute, de la « supériorité naturelle » : ceux qui se débrouillent très bien avec la loi de la jungle. Le redoutable et ultra-violent David semble tout disposé à prendre le pouvoir…







Mais Carolyn, la discrète Carolyn, pourrait bien avoir un plan.







Impliquant des Américains – un, surtout, du nom de Steve...







PAS SI ORIGINAL, ET PAS SI FOU







Je m’arrête là pour la présentation de l’histoire. Je suppose que cela fournit les bases nécessaires pour discuter de tout ça sans trop déflorer le reste.







Autant passer de suite à la question cruciale : le caractère original et même fou de l’univers créé par Scott Hawkins. C’est que je n’en suis pas vraiment convaincu pour ma part… Déjà parce que nous pouvons sans peine participer au (vilain) petit jeu des « références » (qui ne sont pas nécessairement des « influences »).







L’originalité supposée du roman est d’emblée battue en brèche, car quelques titres sautent littéralement à la gueule du lecteur – voire quelques auteurs, et au premier chef, clairement, Neil Gaiman : si la famille dysfonctionnelle de plus ou moins dieux ne fait pas penser à Sandman… Et les développements de l'intrigue, dans leur caractère saugrenu et étrangement poétique, justifient tout autant cette citation. Pour moi, c’est le titre clef – et à un double niveau, car, plus généralement, nombreux sont ceux, sur la blogosphère et ailleurs, qui ont très justement relevé que La Bibliothèque de Mount Char avait un côté comics assez prononcé (nouvelle tentation, du coup, de citer d’autres grands noms de ce médium bien particulier – et notamment Alan Moore). Mais si vous voulez du Gaiman littéraire, American Gods vous tend les bras – avec cette même idée de figures plus ou moins divines s’inscrivant dans une Amérique contemporaine du quotidien. Dans une matière proche, on a pu mentionner aussi Roger Zelazny, sans doute à bon droit.







Dans la dimension parfois horrifique et éventuellement un peu gore (mais j’y reviendrai) de La Bibliothèque de Mount Char, la tentation pourrait être grande de mentionner également Clive Barker, mais en bien plus soft cela dit. Ceci étant, Gaiman et Barker, hein…







Pour ma part, je m’en tiendrais là. Cela me paraît déjà suffisant. Le fait est que, à la lecture de La Bibliothèque de Mount Char, je n’ai jamais eu la sensation de me retrouver dans un monde véritablement singulier, unique… Et dans le déroulement de la trame, même chose : ce n’est pas si fou que ça, loin de là en fait – parfois un tantinet surréaliste sur un mode rigolard, mais ce registre n’est certainement pas sans précédents (qu’on les cherche, au-delà de Gaiman, du côté de Douglas Adams, Terry Pratchett ou Jasper Fforde, et ce ne sont que des exemples parmi tant d'autres) ; ceci dit, cet aspect est parfaitement géré, et compte pour beaucoup dans la réussite du roman.







Pourtant, même chez les partisans de l’originalité intrinsèque de La Bibliothèque de Mount Char, d’autres noms encore ont pu être avancés – deux surtout : celui de Charles Stross, notamment pour le « cycle de la Laverie », mais ça ne m’a pas sauté aux yeux pour ce que j’en ai lu ; et, corrélé, primordial, celui de Lovecraft – et là je ne suis vraiment pas convaincu : même à vouloir ériger comme un pseudo-panthéon autour de Père et de ses ennemis, avec les Pelapi comme séides, idée plutôt saugrenue à mes yeux, tout cela est à mon sens bien trop « humain » (mais c’est à débattre, et justement parce que c’est sans doute le thème de fond sous-jacent au roman de Scott Hawkins, quelle que soit la lecture qu’on en tire ; j'y reviendrai, forcément) ; tardivement, le roman acquiert une perspective que l’on pourrait qualifier de « cosmique », certes, mais, là encore, ça ne me paraît pas coller au niveau des principes – Scott Hawkins s’intéresse à des personnages, lui.







Mais peu importe. Si j’ai laborieusement livré ce genre de développements, c’était pour tenter d’expliquer en quoi ce roman m’avait été un peu « survendu », même avec les meilleures intentions du monde et une sincérité dont je ne doute pas un seul instant ; or je n’ai pas ressenti lors de ma lecture cette originalité fondamentale. Sur cette base, j’en attendais donc trop – et « reconnaître », ici tel truc, là tel autre, ne pouvait que me décevoir un peu a priori, parce que je souhaitais être bien plus violemment dépaysé. Cela ne m’a pas empêché de beaucoup aimer le roman, heureusement.







DES FOIS JE ME DIS QUE JE SUIS QUAND MÊME UN PEU PSYCHOPATHE







Un dernier point, toutefois, concernant ce ressenti personnel un tantinet différent de ma part, à en juger par les nombreuses critiques mises en ligne depuis la publication du roman – un point qui me fait me demander si je ne serais pas un peu psychopathe, tout compte fait…







J’ai en effet lu plusieurs articles mettant en avant quelques passages un peu gores et/ou sadiques dans La Bibliothèque de Mount Char – et, oui, il y en a bien quelques-uns, j’imagine… Le supplice incroyablement atroce du « barbecue », ou disons plutôt, ça sonne plus sérieux, du « taureau d’airain » (ou « taureau de Phalaris » – la symbolique n’est probablement pas neutre), produit bien quelques scènes passablement horribles ; la violence de David, cette cruelle ordure qui torture, viole et tue comme elle respire, de même – alors le lien entre les deux, forcément…







Reste que je suis perplexe – ayant lu çà et là que le roman était proprement horrifique, que ces scènes étaient terribles, insoutenables même… Je n’ai certainement pas eu ce sentiment. Pas le moins du monde, en fait. Est-ce donc que je ne ressens rien ? Trop blindé à force de mauvaises lectures et de mauvais films ?







(« Mauvais », pas pour moi, hein.)







En fait, les quelques scènes mentionnées mises un peu à part s’il le faut, les usages conjoints de la violence, de la cruauté et de l’horreur dans La Bibliothèque de Mount Char… ont bien plus souvent suscité mon rire que mon effroi ou mon dégoût. C’est vraiment dans ce registre rigolard que je suis porté à inscrire le roman de Scott Hawkins, de manière générale. Comme certains films gores – mais sur un mode incomparablement plus atténué, par ailleurs –, il dérive, si l’on y tient, du Grand-Guignol, où l’outrance est essentiellement drôle.







D’autres ont par ailleurs trouvé ce roman très sombre – et cela n’a pas du tout été mon cas. Le passé des personnages (Carolyn, David, Steve, Erwin) contient certes des moments tragiques, mais je n’ai pas le sentiment que le roman en acquière pour autant une tonalité noire prononcée, à un niveau global disons. Cependant, ces personnages sont autant de pistes pour explorer un autre ressenti eu égard à la cruauté – non pas physique, cette fois, mais clairement psychologique. Et c’est ici que ladite cruauté produit son effet, me concernant – en s’associant en dernier recours à une douloureuse mélancolie : c’est dans la dernière partie du roman que j’y trouve effectivement des aspects sombres et désagréables, mais toujours rapportés à l’échelle des personnages, et de manière pertinente et efficace tout à la fois.







Le reste… mais je dois être un peu psychopathe.



CONSTRUCTION CERTES ZARBI – MAIS SENS DE L’INTRIGUE







Sans aller donc jusqu’à y déceler une originalité fondamentale (ou une « folie » du même ordre), le roman de Scott Hawkins peut effectivement surprendre à maints égards, mais cela concerne surtout à mon sens la construction de l’intrigue, relativement alambiquée. La linéarité n’est guère de mise, et les séquences, même s’il y a bien un fil rouge, s’enchaînent souvent dans le désordre – au point en fait où parler de flashbacks ne fait plus vraiment sens.







Cette dimension est encore accrue par le jeu sur les points de vue, peut-être plus complexe qu’il n’y paraît. Deux personnages, essentiellement, nous servent de focales : Carolyn, et Steve – sa marionnette dans son plan inhumain ? Il faut y ajouter, un peu plus secondaire, Erwin, « bigger than life » mais néanmoins « américain ». Enfin, à l’occasion, Scott Hawkins produit quelques saynètes faisant intervenir d’autres personnages points de vue, éventuellement très éphémères (un exemple : la star du rap qui drague une jeune femme, notre point de vue pour le coup, en lui montrant ses lions, subtilement appelés Dresde et Nagasaki, lesquels jouent un rôle non négligeable dans la suite du roman).







L’alternance des points de vue a un effet pratique, qui se conjugue avec le caractère globalement non linéaire de la structure du roman, à savoir que les deux participent du sens de l’intrigue de l’auteur, qui sait ménager son suspense, quitte à « tricher » un peu – au sens où, au moment où ce sont les intentions de Carolyn qui sont primordiales, nous suivons alors plutôt Steve, ce genre de choses, et à plusieurs reprises. Globalement, c’est très efficace – et c’est pour partie ce qui explique pourquoi j’ai préféré faire une chronique spoiler-proof : si l’univers n’est pas si original, si le développement de la trame n’est pas si fou (mais un peu quand même), reste que Scott Hawkins balade bien son lecteur, et sait ménager quelques jolies surprises, et quelques jolie révélations. C’est assez roublard, en fait – même si pas sans aspects critiquables, tenant peut-être à ce qu’il s’agit d’un premier roman, après tout. Néanmoins une belle réussite, d'autant plus dans ces conditions.







Car la structure du roman interloque sous un autre angle – disons celui de la densité du récit, et par ricochet de ses connotations. Je suppose en effet que l’on peut grosso merdo le diviser en trois temps.







Dans un premier temps, Scott Hawkins, petit à petit, brique après brique et le cas échéant avec un certain nombre de détours qui ne sont pas aussi gratuits qu’ils en ont tout d’abord l’air, pose son univers et ses personnages – comme de juste, mais de manière parfois un peu inattendue, formellement, disons. Carolyn errant en sang le long de l’autoroute, les douze Pelapi qui se retrouvent après la disparition constatée de Père, Steve qui croit draguer Carolyn, ce genre de choses… C’est très efficace, réellement intriguant, et cela a constitué à mes yeux une très bonne « accroche prolongée », disons – mais tout le monde n’est visiblement pas de cet avis. Opinion très personnelle, donc.







Après quoi nous en arrivons au cœur – et au plus gros – du roman. Le plan de Carolyn entre en action, ce qui passe tout d’abord par les galères de son instrument, Steve, abondamment détaillées – mais il faut aussi y inclure les à-côtés d’Erwin, qui est d’une certaine manière un antagoniste, et que, pourtant, on n’est pas du tout porté à envisager de la sorte. C’est ici que le roman devient « fou », si l’on y tient. L’action est très dense, et part du niveau du trottoir pour dériver vers le délire cosmique, sur un rythme proprement frénétique. La dimension comics est ici plus particulièrement appuyée, il se passe plein de choses, et les personnages y acquièrent un caractère « bigger than life » essentiel, qui transcende toutes leurs actions. On a pu dire qu’il fallait avoir une certaine capacité à la « suspension d’incrédulité » pour gober tout ça, mais à titre personnel, et sans doute parce que « l’accroche prolongée » avait bien fonctionné sur moi, me mettant bien comme il faut dans le bain, je n’ai ressenti aucune difficulté à cet égard, me régalant avec jubilation des excès d’une trame qui ose des choses incongrues, pour notre plus grand plaisir.







Ça monte, ça monte, ça monte… Jusqu’à l’explosion totale… Et pourtant, il reste encore une troisième partie du roman, qui fait une bonne centaine de pages, et qui prend à nouveau le lecteur par surprise, pas tant pour les « révélations » (en fait assez convenues) qui y son exposées, que par son caractère « calme après la tempête », où tout est plus lent, plus mou, plus morne. S’il y a eu « accroche prolongée », il y a donc aussi « épilogue prolongé », encore que cette expression ne soit pas très juste car nous sommes alors encore dans le récit, sans ambiguïté. Or c’est ici, surtout, que la souffrance psychologique s’exprime, dans une atmosphère où la fascination cosmique, qui aurait dû l’emporter, ne parvient pourtant pas à se dégager d’une gangue très humaine de mélancolie. L’effet, pour le coup, est passablement déstabilisant. À en juger par certaines critiques, d’aucuns y ont vu une faiblesse du roman – qui se traînait un peu trop en définitive. Je ne le crois pas pour ma part : même si je n’exclus pas que cette approche déconcertante tienne pour partie au statut de premier roman de La Bibliothèque de Mount Char, j’ai apprécié ce finale étrange, un peu cotonneux, après l’hystérie du cœur du livre. Et, là, oui, j’ai ressenti quelque chose – au-delà de la seule jubilation hilare qui m’avait accompagné sur la majeure partie du roman. C’est peut-être un peu maladroit, parfois, mais cela a fait sens, pour moi.







Reste donc que cette construction alambiquée pourra surprendre – mais, globalement, de manière convaincante, et c’est donc à mettre au crédit de Scott Hawkins.







DES PERSONNAGES BRILLANTS (ET HUMAINS – S’IL LE FAUT ?)







Mais j’en arrive à ce qui, à mon sens, constitue les deux principaux points forts de La Bibliothèque de Mount Char : ses personnages, et sa plume – notamment en ce qui concerne les dialogues.







Mais commençons par les personnages – qui sont à peu près tous brillants. Et brillamment employés, aussi, au regard d’une problématique sous-jacente des plus complexe, renvoyant à leur humanité ou à l'absence (supposée) d’icelle.







Mais la question se pose différemment selon que l’on envisage les « Américains » et les Pelapi. Au début du roman, cela participe d’un procédé où le décalage systématique des disciples de Père, Carolyn et David en tête (parce qu’ils ne comprennent absolument rien au monde des « Américains », ce qui se traduit notamment par leur accoutrement fantasque), les relègue au rang de l’étrangeté absolue, ne facilitant pas l’identification. Ça ne durera pas éternellement.







Mais notre première véritable accroche est Steve – un personnage d’une richesse exceptionnelle, un peu loser, un peu naïf, humain
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La Bibliothèque de Mount Char

Sur un bord de la Highway 78, non loin de Garrison Oaks, une jeune fille marche couverte de sang. Un poignard d’obsidienne est caché au creux de ses reins. Elle se nomme Carolyn et se présente comme bibliothécaire américaine. Elle parle en fait plus couramment le Palapi, un langage vieux de plus de 60 000 ans ; phénomène plutôt étrange me diriez-vous, mais qui ne semble cependant pas l’émouvoir plus que cela.



Mais qui est vraiment Carolyn, et surtout qui est cet homme qu’elle recherche et appelle « Père »? Un homme tout aussi mystérieux qu’ omniscient. Une figure ténébreuse, qu’on n’évoque qu’avec respect et terreur. Une ombre qui l’a élevée sous une férule de fer et de bronze, elle ainsi que d’autres enfants tout aussi étranges, comme Michael qui parle aux animaux ou Jennifer qui ressuscite les morts…



Scott Hawkins, informaticien américain jusqu’alors absolument inconnu du grand public, signe là un premier opus digne d’un télescopage dément entre le duo Tarantino/Rodriguez satellisé, un Clive Barker en grand forme ainsi qu’un Garth Ennis façon Preacher. C’est percutant, cru, surréaliste et drôle, absolument insaisissable et viscéralement addictif. Les virages sont à 180°, ça drift sévère et on se demande s’il y a un feu à un moment donné, quelque part sur la piste.



l’intégralité de cette chronique sur le site des nyctalopes !
Lien : http://www.nyctalopes.com/la..
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