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Critiques de Sidonie-Gabrielle Colette (1164)
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Le Blé en herbe

On a dit bien des choses sur ce roman: d'abord qu'il illustrait assez largement la relation que Colette a eue avec son jeune beau-fils. Que c'était un roman de plus sur l'adolescence et ses émois. Que c'etait une histoire démodée. Même si ce n'est certes pas mon roman préféré de Colette, je lui reconnais un intérêt et un attrait certains.



Tout d'abord, rappelons que ce livre , paru en 1923, a fait plutôt scandale. Il faut se replonger dans le contexte de l'époque. On ne racontait pas l'initiation amoureuse d'un jeune garçon. Surtout par une femme plus âgée que lui! Et en plus dans un livre écrit par une femme! Colette a eu cette audace et ce courage.



Ensuite et surtout, Colette nous offre une description subtile et sensible , intelligente, du passage de l'enfance à l'adolescence. Phil a seize ans et demi, Vinca quinze ans. On sent encore en eux des attitudes puériles et même une nostalgie de cette enfance qui leur échappe. Ils se trouvent confrontés à des désirs, des sentiments qui les dépassent , les attirent et leur font peur. Tout cela est très bien rendu dans leurs paroles maladroites , cruelles parfois mais si touchantes aussi, ainsi que leurs silences, leurs pensées secrètes.



Et puis il y a bien sûr ce style magnifique, tout en nuances et en délicatesse, où la nature participe à l'évocation de ce lien bouleversant, tourmenté et unique de deux amis d'enfance qui se savent destinés l'un à l'autre depuis toujours. Leurs émotions se mêlent au paysage breton, à ses criques intimes, à son aspect sauvage. Autant de lieux qui vont marquer pour eux comme jamais l'été des vacances. Un été qui se termine d'ailleurs et qui va symboliser un rite de passage, un changement radical. Ils auront gagné en maturité, mais aussi en amertume et blessures.



C'est pour moi un livre émouvant, présentant des personnages en devenir, que j'ai aimés jusque dans leurs contradictions, leurs faiblesses. Vinca, la sauvage aux yeux pervenche, fière et passionnée, Phil, le jeune homme qui se cherche, attiré par la dame en blanc, cruel et naïf à la fois.



Ce qu'ils partagent tous les deux, c'est cet idéal d'un amour entier, pur et exigeant, un amour que nous désirons tous...
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La Naissance du jour

Après avoir lu, voici très longtemps, et avec beaucoup de plaisir les oeuvres les plus lues de Colette , je voulais lire une oeuvre écrite vers l'âge de cinquante ans quand elle s'installe à la Treille Muscate à Saint-Tropez .

Dans le livre, je retrouve la même Colette, toujours indifférente aux différences de l'âge, avec un esprit libre.

Je découvre les observations profondes qu'on a à cet âge sur la nature, ses beautés. Elle prend le temps de regarder de nous livrer des descriptions magnifiques.

Elle entretient énormément d'amour pour ses chats et semble les comprendre, communiquer avec eux.

Et puis, Sido, sa mère nous est présentée à travers ses lettres, parfois inventées mais on a la chance d'en découvrir d'authentiques dans un dossier en fin de livre.

Décidément, Colette écrit spontanément, avec le cœur sans avoir besoin de nous lancer des citations, des auteurs... Elle est authentique et cela fait vraiment partie de son charme.

Plusieurs fois, en lisant je m'arrêtais et me disais :

"Qu'en de beaux mots, ces choses là sont dites" !











































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Julie de Carneilhan

Je ne saurais dire si Colette sera une écrivaine qui marquera à jamais la littérature française, je ne la place pas dans mon panthéon littéraire, mais il se trouve qu'à chaque fois que je la lis je suis épaté par l'art qu'elle possède pour choisir et placer les mots au bon endroit, décrire un personnage, un paysage, une situation et qui fait mouche...

Ici encore, sur un court récit dont le thème a priori aurait dû me laisser sur le bas-côté de la route, j'ai été séduit par sa langue et sa manière de peindre un très beau personnage féminin.

J'ai imaginé que cette Julie de Carneilhan avait en elle quelque chose de Colette, une rage exquise et vacharde, un amour de la vie pour vouloir la croquer à belles dents malgré les rebuffades, la mesquinerie des hommes, le désespoir, peut-être le chagrin aussi.

Tremper sa plume dans le cyanure des mots...

Et puis se relever, continuer de vivre, tendre son visage au soleil et s'en délecter comme si c'était du miel.

C'est un peu l'image que je me fais naïvement de cette écrivaine qu'il m'aurait plu d'avoir comme amie.

Le personnage de Julie de Carneilhan incarne ici un très beau portrait de femme qui ouvre et clôt le récit ramassé sur une courte période d'une quinzaine de jours.

Nous faisons sa connaissance dans son studio d'un quartier populaire de Paris, où elle vit désormais, tout en étant comtesse, - une comtesse ruinée sans le sou, continuant de vouloir donner le change par sa beauté, son orgueil, ses quarante-cinq ans qu'elle porte allégrement. Se croyant guérie de l'amour et de ses blessures, elle se drape d'une sorte de légèreté désinvolte pour camoufler sa situation devenue précaire, la solitude...

Financièrement, les choses ne vont pas fort pour Julie de Carneilhan d'autant plus qu'elle tente d'ignorer son sort, faire la fête, continuer de tenir peut-être son rang de comtesse. Aimer la vie...

Justement, est-elle guérie de ses amours contrariées ? Elle se console auprès d'une jeunesse insouciante à laquelle elle voudrait continuer de ressembler, des jeunes hommes tournent autour d'elle, affolés comme des guêpes.

Il ne se passe pas grand-chose dans ce récit, sauf au moment où Julie de Carneilhan va retomber sous le charme de son dernier mari le comte d'Espivant, lorsqu'il l'appelle à son chevet, à la suite d'une crise cardiaque. Sans doute elle l'aime encore... Il va jouer la comédie, c'est un homme politique... Elle accepte sans scrupule d'être mêlée à une déloyale opération d'argent...

On voudrait tant lui dire non, n'y va pas ma chère Julie... Ne te fais pas avoir par la bassesse de cet homme une seconde fois...

Colette nous décrit ici un personnage féminin haut en couleurs qui assume ses choix de femme, ses goûts, ses erreurs aussi, sa liberté. Même bafouée par l'homme ingrat qu'elle a aimé, elle renonce à être une victime, elle agit, jouissant pleinement de la vie telle qu'elle se présente...

La fin de l'histoire donne à voir une femme meurtrie une nouvelle fois, qui se console auprès de son amour indéfectible pour les chevaux.

L'amitié de cette femme avec son frère est belle et touchante aussi. Elle nourrit la respiration de ce récit.

Tout est fin ici, délicat, triste, cruel, cynique, beau, jubilatoire. La vie, quoi !

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Claudine à l'école

Jusqu'à présent, j'ai assez peu apprécié les romans de Colette dont j'ai croisé la route. Pourtant, je suis prête à réviser mon jugement après la lecture de "Claudine à l'école", un titre innocent qui sonne comme un album de Martine mais qui, en réalité, est beaucoup plus que cela.



Le ton de la narration est résolument moderne, voire provocateur pour l'époque. "Claudine à l'école" provoqua en effet un véritable scandale à sa parution (sous le nom du mari de Colette) car la liberté d'expression de la narratrice et le récurrent thème de l'attirance sentimentale et physique entre femmes - véritable fil rouge du roman - ont surpris et indigné les braves gens d'alors.



Aujourd'hui, le lecteur n'est plus effarouché mais admiratif du style facétieux et bien rythmé, de la richesse du lexique, de la musicalité du phrasé et de la truculence des lieux et personnages.



La narratrice ne ménage personne, ni son entourage, ni ses amies, ni ses institutrices et inspecteurs d'examen ; seule sa chatte trouve grâce à ses yeux.



"Claudine à l'école" est un roman très sensuel, surtout pour les mœurs de 1900, date de parution. Il présente la gent féminine sous un jour rebelle, avide d'indépendance ou de soumission - selon l'éduction reçue -, rusée et futée, facilement cruelle - ou farouche et déterminée selon le point de vue.



Bien plus mature qu'un "Poil de Carotte", "Claudine à l'école" est bien plus que le simple récit d'une succession de gamineries et de roueries adolescentes, c'est un témoignage et un cri de libération d'une nature en mal d'émancipation.





Challenge PLUMES FEMININES 2023

Challenge MULTI-DEFIS 2023

Challenge ENTRE DEUX 2023
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La Chatte





Alain a accepté ce mariage de convenance avec Camille , lui qui ne peut vivre ailleurs que dans la maison familiale auprès de sa chatte Saha. Car entre Alain et Saha se joue une véritable histoire d’amour.

Un petit appartement triangulaire, leur ‘nid’ comme l’appelle Camille, est le décor de ce huis clos étouffant. Alain et Camille ne communiquent plus que par non-dits, Saha dépérit progressivement. Jusqu’au moment où…



Ce roman très court décrit les affres de la jalousie, même si nous avons ici dans notre triangle amoureux un couple et un chat. Colette a su parfaitement mettre en mots les relations qui s’établissent entre un humain et un animal (au point où parfois les relations maître – animal sont inversées).





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Le Blé en herbe

Dans le "Blé en herbe" Colette nous raconte les vacances de 2 adolescents, Phil et Vinca, 16 et 15 ans, amis depuis l'enfance parce que leurs familles se retrouvent chaque été à Cancale. On nous décrit avec une grande profondeur ces deux êtres qui se transforment en adulte, par l'amour qui est en train de naître en eux, mais aussi par la trahison dont sera capable Phil envers elle. Trahison d'autant plus difficile à accepter qu'elle sera vécue avec une femme de 30 ans. Femme dont la description fait étrangement penser à Colette elle-même. Ce roman regorge à mes yeux de beaucoup de longueurs et de descriptifs. Les couleurs prennent une grande importance dans les écrits de l'auteure et son style souligne bien le ton nostalgique qu'impose la situation. Même si je reconnais le talent de Colette, j'ai trouvé la lecture fastidieuse.
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Les Vrilles de la vigne

Dans ce volume sont rassemblés des textes auparavant publiés dans des revues. C'est apparemment en 1908, que les nouvelles sont rassemblées et éditées.

Colette y parcourt sa vie depuis son enfance, dans sa maison natale, en vacances en Baie de Somme, à Paris.

Elle aborde des thèmes comme la nature, les animaux qu'elle apprécie beaucoup et dont elle ne se sépare jamais, les amours...

Je me suis procuré ce petit livre de recueils pour " Le dialogue des bêtes " que je n'avais jamais eu l'occasion de lire mais curieusement, j'ai été très attirée par le conte "Les vrilles de la vigne" et ce rossignol qui chante sans arrêt pour empêcher les vignes de grandir et de l'emprisonner.

Dans "Rêverie de Nouvel-An", Colette nous apprend comment on abordait les fêtes de fin d'année chez elle où on appliquait un esprit libre-penseur, sans fantaisies racontées aux enfants.

Je me suis laissée charmer par "Baie de somme" où l'auteure parcourt l'endroit à la manière d'un peintre.

On y voit des enfants, leur mère en train de lire, des animaux qui se promènent, les pêcheurs si bien décrits qui n'attendent que la marée montante pour repartir.

Une belle promenade dans les courts textes de Colette.
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Chéri

« Raconte, va, raconte. »



Un roman tendre et touchant. Une femme qui vieillit, un homme qui grandit. Quelles étaient belles ces années d'insouciance. La rondeur d'une perle, un creux d'épaule où il fait bon se blottir ...comme un enfant.



« Chéri, tu dors ? Oh ! Non, Nounoune, je suis trop bien pour dormir. »



Mais les esprits s'affirment, les yeux s'ouvrent, les devoirs, les sacrifices et certaines évidences pour ces amoureux jaillissent comme une crue que rien ne peut empêcher. Ça déborde d'amour, souvent méconnu, parfois tu. J'ai adoré la plume de Colette. Cela virevolte d'intelligence, de vie et d'humeurs. Les personnages sont complexes, ils ont tous un petit quelque chose qui m'émeut ou m'amuse.



« Les gens ne savent pas ce que c'est que Chéri. »
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La Maison de Claudine

Je suis une grande admiratrice de Colette, et ce livre fait partie de mes préférés d'elle, car s'y expriment avec force son attachement presque douloureux aux souvenirs d'enfance, son style savoureux, riche et précis, l'amour des bêtes et de la nature.Et la présence tutélaire de sa mère, dominant , émouvante et mélancolique,toutes les autres évocations du passé. ...



Claudine, c'est bien sûr elle-même. La maison, c'est celle de Saint Sauveur en Puisaye, son village natal dans l'Yonne. J'ai vu ces lieux d'origine et je me suis imaginée sa vie d'alors, lorsqu'à sept huit ans, sauvage et libre,elle parcourait les bois ou jouait dans le jardin...



Magnifique récit autobiographique, éclaté en courts chapitres, comme autant d'instantanés éphémères d'un jardin à jamais perdu, celui de l'enfance...



Les parfums du jardin vibrent dans ton souvenir

Bel-Gazou , pivoines ,herbe fraîche, tu les respires

Et l'écho des mots aimés :" Où sont les enfants?"

Te poursuit comme un chagrin, un sanglot déchirant

Minet-Chéri, tu les revois, chats languissants,

Mangeurs de fraises, et sur le gravier s'étirant;

Une soeur aux longs cheveux, s'éloignant , nostalgique

Un frère créateur d'épitaphes si drolatiques

Et tu n'es pas en reste, belle imaginative

Sur ton mur, très curieuse de mots et pensive,

Enrobant de mystère le simple presbytère

La petite, c'est toi , fillette humant la terre

Qui cherche, comme nous, à arrêter le temps

Pour retrouver l'ivresse de tes rires d'enfant...







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Claudine à l'école

Pour le cent cinquantième anniversaire de sa naissance, Colette occupera une place centrale dans le monde littéraire, succédant à Proust, qu’elle désignait comme un « petit complimenteur », un « jeune et joli garçon de lettres », avis méprisant qu’elle révisera après avoir été séduite par la lecture de Du côté de chez Swann.



C’est donc l’occasion de lire ou relire l’oeuvre de la sulfureuse femme de lettres.



Claudine à l’école, paru en 1900, évoque l’adolescence de l’autrice. Dans un milieu rural, la vie est partagée entre la solitude de la maison familiale, seule avec son père qui passionne beaucoup plus pour ses limaces que pour le quotidien de sa fille, et l’école, lieu de tous les émois imaginables. Les jeunes filles assistent avec une curiosité malsaine aux relations à peine voilées entre deux de leurs institutrices, Mlle Sergent et Melle Lanthenay éveillant chez Claudine une rancoeur tenace, car elle se voit privée de l’amitié de cette dernière.

L’arrivée d’une nouvelle élève mettra en évidence ce qui ne s’appelait pas à l’époque du harcèlement.



Vient le temps du brevet, dont l’issue unique est l’accès à l’école normale pour devenir elles-même institutrices.



Ce personnage de Claudine est loin d’être sympathique : tyrannique, exclusive, vaniteuse et imbue de sa personne, comme elle ne s’en cache pas dans ces pages constituant son journal d’adolescente. Maltraitante avec ses amies, certaine d’être au-dessus du lot, que ce soit pour sa beauté ou son intelligence.



Malgré tout la lecture est intéressante. En particulier sur le plan historique, et sociologique. Découvrir le programme du Brevet de la fin du dix neuvième siècle, avec les épreuves d’écriture dont on a tout oublié (qui sait encore ce qu’est la ronde moyenne ou la batarde, à l’heure des polices sans sérif ? ).

La sortie de fin d’année pour aller présenter les élèves à l’examen est un morceau d’anthologie, à la fois drôle et édifiant.



Parlerai-je de cet odieux médecin libidineux, très attiré par le charme juvénile de ces demoiselles ?



L’écriture a la charme désuet des écrits du passé, d’autant que le texte s’orne de termes vernaculaires, heureusement expliqués en notes de bas de pages



La question se pose, à la fin de ce premier tome de la série des Claudine, de suivre Claudine à Paris. Ce sera vraisemblablement la curiosité qui l’emportera .



254 pages Livre de poche Première parution en 1900




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Le Blé en herbe

J'ai lu ''Le blé en Herbe" au cours de mon adolescence et j'avais particulièrement été sous le charme de ce roman de Colette. C'est une œuvre très audacieuse de la part de l'auteur pour l'époque car elle y décrit les premiers émois amoureux et parfois torrides de Phil et Vinca, la fin de l'enfance et l'ouverture et l'initiation à la sensualité, l'amour et la vie qui s'accomplissent plus ou moins dans la douleur.



C'est un roman classique, plein de pudeur et d'humanité, qui parle si on l'interprète bien pourtant des cruautés de l'amour. La jeune héroïne, Vinca, est assez émouvante dans un rôle où elle domine, par sa sagesse, son jeune partenaire, Phil.

Les visites nocturnes de Phil à leur belle voisine, Mme Dalleray, n'échappent pas à son amie. Malgré cela, Vinca se tait et encaisse : à quinze ans, elle apprend à souffrir de la sournoise trahison masculine, sans pour autant renoncer à son amour.



Avec ce récit, on découvre le grand art et la poésie si chère et si sensuelle de Colette, tout comme son style d'écriture , remarquable, au travers d'une histoire prenante et courte qui se laisse lire comme un roman d'été sur la plage ou en vacances tout simplement.

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Le Blé en herbe



Qu’une femme ose écrire dans les années 1920s comment un adolescent de seize ans est déniaisé par une femme mûre, cela a probablement déchainé les passions. D’autant plus quand l’écrivain en question a séduit son beau-fils. Le texte nous décrit à demi-mot l’éveil sexuel de Philippe durant un été. C’est tout à la fois sage et suffisamment provocant. Paradoxalement, les réactions de son amie Vinca sont très conformes à ce qui est attendu d’une femme à cette époque. J’en retiendrai de belles pages des dernières vacances sur une plage de Bretagne de deux adolescents qui comprennent que leur relation a changé à tout jamais.

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La Chatte

« Déjà elle embaumait la menthe, le géranium et le buis. Il la tenait confiante et périssable, promise à dix ans de vie peut-être, et il souffrait en pensant à la brièveté d'un si grand amour.

- Après toi je serai sans doute à qui voudra... A une femme, à des femmes. Mais jamais à un autre chat. »

Alain vénère Saha, une chatte de la race des chartreux qui partage son coeur et son jardin de verdure. Il passe son temps à la cajoler et à s'extasier sur sa majestueuse beauté. Rien n'est trop beau ni trop bon pour cet animal qu'il gâte outrageusement. Un comportement qui n'est pas du goût de Camille, la jeune fille qu'il vient d'épouser. Si cette dernière est follement éprise de son jeune mari, Alain lui préfère de loin sa tendre et silencieuse Saha. Le jeune homme de 24 ans, oisif et très infantile, voit avec effroi son univers douillet se fissurer par la présence bien trop envahissante de cette jeune femme épousée suite à un arrangement entre familles du même milieu social. Un bancal ménage à trois va se mettre en place, la chatte prenant de plus en plus de place dans cette union boiteuse qui ne tient qu'à un fil. Camille va prendre en grippe sa féline rivale et tenter de l'écarter de son chemin par tous les moyens.

Qui remportera la mise ? La femme amoureuse ou la chatte ?



C'est toujours avec beaucoup de plaisir que je retrouve la plume poétique et inimitable de Colette dont j'ai dévoré les écrits quand j'étais adolescente. Cruel et délectable à la fois, ce court roman qui nous raconte l'histoire d'une passion exclusive et dévorante entre un homme et son félin n'a rien perdu de sa justesse et de son originalité. Avec une grande subtilité, l'auteure dissèque à la perfection les affres de la jalousie et les liens étroits et privilégiés que peuvent entretenir un animal et son maître. Voilà un récit dérangeant (car comment l'être humain qui croit en sa suprématie pourrait-il songer ne serait-ce qu'un instant d'être détrôné par une bête ?) mais ô combien réaliste !


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Gigi

Cette Gigi m'a un peu agacé au tout début de son histoire, mais peut-on lui faire le reproche que le destin qu'on lui façonne est d'aller voir du côté de ce qu'on appelle, certainement à tort, le beau monde ? Gigi est la première des quatre nouvelles qui composent ce recueil écrit par Sidonie-Gabrielle Colette.

Gilberte, dite Gigi, est une jeune Parisienne de quinze ans, une demi-mondaine de la Belle Époque, qui vit avec sa mère et sa grand-mère. Comme son métier d'actrice laisse peu de temps à la mère, ce sont la grand-mère et la tante Alicia qui ont décidé de lui faire son éducation de future courtisane, lui apprendre les manières, les codes, le savoir-vivre.

Mais il se dégage de cette nouvelle un rêve d'amour en partance, une joie pure qui bondit dans les pages de cette nouvelle, la fraicheur de Gigi, aux allures presque naïves, y est sans doute un peu pour quelque chose, mais cette adolescente qu'on cherche à dompter, n'a peut-être pas dit son dernier mot et va bousculer le cours des choses...

Tout comme Gigi, les trois autres nouvelles mettent en scène un personnage central. J'ai beaucoup aimé la seconde nouvelle, L'enfant malade, touchant de douceur et de compassion, d'un ton poétique qui m'a séduit. Ici encore ce n'est pas la douleur d'un enfant souffreteux qui nous invite mais plutôt son imaginaire éperdu comme une fenêtre tendue vers sa guérison qu'il espère...

La dame du photographe, elle aussi est touchante de poésie et de fraternité, de sororité devrais-je dire plutôt, autour de cette femme, Mme Armand, qui se résout à mettre fin à ses jours. On est pris par la main dans une sorte de bovarysme à la façon de Colette, dans un texte généreux, jamais désespéré.

Enfin, la dernière nouvelle, Flore et Ponome, bucolique à souhait, nous surprend par son côté autobiographique puisque Colette se met elle-en même en scène, évoque son amour immodéré pour les jardins, à un moment où elle nous révèle avec amertume qu'elle n'en possède déjà plus aucun. Ici j'ai eu le bonheur de croiser Jean Giono, ami de l'écrivaine. Elle est déjà âgée, évoque cependant l'envie de renouer avec la terre, avec le végétal. Ce dernier récit est teinté d'un lyrisme débridé, foisonnant d'odeurs et de couleurs, on sent presque l'humeur de la terre dans les doigts qui tournent les pages. Ici c'est le mystère de la vie que convoque Colette, au travers des jardins de son enfance, de ses voyages aussi. Une force sensuelle sous-jacente habite ces pages et c'est avec émotion qu'on imaginera l'étreinte du coeur de l'écrivaine décrivant la beauté d'une fleur, tandis qu'elle pense peut-être qu'elle est déjà au soir de sa vie...

Ce qui lie ces quatre nouvelles est peut-être simplement une manière harmonieuse d'aborder l'existence et de s'y tenir debout.
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La retraite sentimentale

Dernier-né de la série des Claudine, ce roman est pour moi attachant et différent. C'est le premier roman que Colette signe de son seul nom. Ce droit, elle déclare " l'avoir revendiqué à cause du côté paysagiste de cette petite oeuvre qui lui tenait à coeur". Et il a une place particulière dans mon coeur de lectrice car étudiante, c'est sur ce livre que j'ai fait mon mémoire de maîtrise...



Ce roman nous fait entendre, même si c'est de façon encore maladroite, la vraie voix de Colette. Certes, il reste lié aux autres "Claudine" par des personnages, une certaine ligne d'intrigue, mais une nouvelle narratrice naît , qui est déjà la Colette-phénix, apte à changer de peau et à durer. C'est en cela qu'il est intéressant.



Car Claudine , double de l'auteure, change, c'est la fin de la première jeunesse, et surtout elle apprend la solitude car son mari Renaud, malade, est soigné en montagne ( symbole de sa séparation avec Willy) et elle se retrouve à Casamène, la propriété de son amie Annie. Celle-ci, de même que Marcel" ce bibelot suspect" ne sont que de pâles figurants dans ce décor campagnard. Ce qui compte, c'est le ressenti de la narratrice, et j'avoue que les conversations de ces deux-là sont assez artificielles, c'est la faiblesse du roman...



La plume de l'auteure est nerveuse, humoristique à certains moments, précise dans ses évocations et souvent tendrement nostalgique.



J'avais choisi ce livre car j'avais passionnément aimé , outre la libération du joug de son mari Willy qu'il préfigure , le lyrisme mélancolique qui émane des descriptions de la nature,des animaux et des réflexions de la narratrice. Parlant de la maison d'Annie, elle écrit:" L'automne éblouit ici. Casamène est perchée sur l'épaule ronde d'une petite montagne crépue de chênes bas, qu'octobre n'a pas encore mordu de sa flamme. Du haut de la terrasse de gravier, on voit luire une froide rivière, argentée et rapide, couleur d'ablette."



Et Colette n'est jamais aussi émouvante que quand elle évoque, à travers Claudine, ses souvenirs d'enfance :" Ya t-il ailleurs, dans toute ta vie qui se précipite, un soleil aussi blond, un lilas aussi bleu à force d'être mauve, un livre aussi passionnant, un fruit aussi ruisselant de parfums sucrés ?"



Depuis, j'ai évidemment préféré d'autres oeuvres de Colette, plus profondes, plus accomplies, mais ce livre-là reste pour moi un bijou d'émotion et de poésie, il palpite toujours en secret au fond de moi...







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Le Pur et l'Impur (Ces plaisirs)

Colette n'est définitivement pas une auteure pour moi et je ferai mentir l'adage "Jamais deux sans trois" car cette deuxième rencontre sera bien la dernière.



Avant que ne se déchaînent sur ma pauvre tête de lectrice lambda les foudres propres à terrasser l'iconoclaste, je reconnais que "Le pur et l'impur", écrit en 1930 et publié dix ans plus tard, a pour lui cette audace de propos qui caractérise la "reine de la bisexualité", bien que je reste complètement imperméable à son style qui abuse des sujets inversés et voue un culte à la ponctuation éthérée.



Tout comme chez Duras et Yourcenar, j'ai dû m'accrocher à mes bretelles pour faire émerger du texte un sens que mes pauvres neurones puissent comprendre. Il est coutume de dire pudiquement : "Je suis passée à côté" ou encore "Voici un rendez-vous manqué" mais dans le cas présent, j'ose dire "Quelle via dolorosa que ces malheureuses 188 pages !".



Oh, je sais que j'aurais dû y voir une ode à Sapho, un traité féministe ou encore une oeuvre d'avant-garde, etc. mais "Le pur et l'impur" ne fut pour moi qu'un pensum verbeux et abscons. Qu'est-ce que je déteste lire sans comprendre ce que je lis, en me demandant à chaque phrase : "Mais je suis débile ou quoi ? De quoi s'agit-il ? Où veut-elle en venir ? Vais-je terminer ce bouquin sans savoir de quoi il parle ?".



Alors je vous rassure, je sais de quoi il parle, j'y ai mis quelques dizaines de pages mais j'ai fini par saisir l'essence de ce que Colette désignait elle-même comme "son meilleur roman". Sauf qu'il ne s'agit pas d'un roman mais d'un recueil de témoignages, autobiographiques pour la plupart, mettant en lumière les égéries de la Belle-Epoque où les amours féminines étaient à la mode et où il était délicieusement sulfureux de porter le smoking et d'aller s'encanailler chez Mathilde de Morny, alias la Chevalière.



Alors, je sais, je sais, si moi aussi j'avais connu et vécu cette période charnière de l'Histoire où la Femme a pu (enfin) commencer à s'émanciper (bien qu'à mon humble avis un très faible échantillonnage privilégié du sexe ait pu le faire en réalité, la masse plébéienne ayant dû attendre pour cela de remplacer les hommes au travail pendant la Première Guerre Mondiale), j'aurais alors saisi tout l'enjeu de ce manifeste, j'en aurais sans doute été interloquée, choquée, éblouie et stimulée, mais lu en 2018, et tout en essayant de faire la part des choses, je ne peux que conclure sur l'ennui profond qu'il m'a procuré.





Challenge PLUMES FÉMININES 2018

Challenge 1914/1989 - Edition 2018
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Les Vrilles de la vigne

Ce recueil de textes qu'à sa publication Colette a appelé" mon dernier -né fait de pièces et de morceaux" présente en effet des fragments de vie, des instantanés.



Le livre s'ouvre sur la légende du rossignol , pris dans les sarments de vigne pendant son sommeil , et qui inspire le joli titre du livre, aux sons harmonieux.



Il regroupe des textes très variés , évoquant ses relations amoureuses, le music-hall mais aussi toute une chronique du quotidien: le dernier feu dans la cheminée, les vacances, les animaux familiers...



J'ai aimé plus particulièrement trois textes: " le dernier feu", ode poétique à la flamme envoûtante, " Nonoche", qui transcrit si bien la personnalité complexe d'une chatte, finement observée par Colette. Et " En baie de Somme", juste et magnifique évocation d'une région pleine de charme , que j'affectionne . L'auteure en saisit toutes les nuances, les jeux de lumière changeants sur l'eau." La baie de Somme, humide encore, mire sobrement un ciel égyptien, framboise , turquoise et cendre verte."



La plume précise, inventive, subtile, parfaite de concision et de choix judicieux des mots se reconnaît ici encore.



Ce kaléidoscope d'instants captés sur le vif est une merveille...
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Sources d'amour

C'est un peu cliché je le conçois de lire un livre sur des citations des plus grands noms de la littérature française (enfin, ils sont loin de tous y être bien entendu) mais c'est pour le livre objet que je me suis plongée dans cette lecture. En effet, bien caché dans les trésors que recèle la médiathèque dans laquelle je travaille, ce livre attendait son lecteur, donc moi en l’occurrence. Tout petit forma, imprimé sur une sorte de cahier à spirale avec une couverture cartonnée, c'est d'abord la forme qui m'a intriguée plus que le fond.



Ici, le lecteur retrouve des noms qu'il connaît bien ou peu, tels Colette, Shakespeare, Goethe pour ne citer qu'eux et tant d'autres poètes tels Eluard, Verlaine et j'en passe encore qui nous parlent d'amour. Certes, ce ne sont que des citations qui ont été réunies ici mais imprimés sur ce petit papier cartonné et, le lecteur se sent bien ! Hors contexte, j'avoue que certaines peuvent induire en erreur mais toutes parlent d'amour et j'avoue qu'à mes yeux, c'est tout ce qui compte et que cela este extrêmement réconfortant, surtout en ce moment où il ne fait pas bon de trop se tenir au courant de l'actualité bien que l'on ne puisse y échapper et que ce serait foncièrement égoïste de fermer les yeux sur ce qui se passe autour de nous ! Bref, tout cela pour vous dire que cette petites lecture met du baume au cœur et qu'il serait donc dommage de s'en priver ! A lire et à relire de temps à autre !
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Claudine à l'école

Le plus drôle, le plus impertinent, le plus vert, le plus sensuel, le plus innocent, le plus vrai, le plus original, le plus lyrique, le plus paysan, le plus poyaudin de la série des Claudine.

Le moins démodé, aussi, car l'enfance est au-dessus des modes.

Claudine à l'école a été lu par des générations de filles plus ou moins innocentes..

Beaucoup de parents ont cru que leur fille lisait une bluette moralisatrice. S'ils avaient su! Beaucoup de jeunes filles et de petites filles s'y sont trompées également, mais bien peu ont arrêté leur lecture, quitte à ne pas tout bien comprendre.

Ces mémoires d'écolière rustiques furent écrites par une Colette déjà bien aguerrie aux plaisirs et aux chagrins de la vie, et déjà désenchantée. Elle répondait ainsi à une commande de son mari, le très parisien Henry Gauthier-Villars, , séducteur fils de famille et tyran conjugal, qui commença par trouver sans intérêt ce roman sagement écrit sur cahier d'écolière, puis en tira finalement un bon bénéfice en le cosignant (quelle générosité).

Colette découvrait, après l'école de Montigny (Saint Sauveur en Puisaye), la non moins rude école de la vie. La série des Claudine se déclina encore en Claudine à Paris, Claudine en ménage (le plus raté de tous), Claudine s'en va,au titre trompeur puisque l'héroïne est un autre personnage féminin.

Enfin Colette se décida à porter le coup de grâce au romantique et falot personnage masculin de la série dans La retraite sentimentale, jetant par là même Claudine avec l'eau du bain. Elle s'était entre temps affranchie de son redoutable mari ,était devenue danseuse nue, et surtout entrait vraiment en littérature.
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Le Blé en herbe

A sa façon de nous parler des gosses on voyait bien qu’elle nous aimait beaucoup…

C’était bien, c’était chouette, chez Colette.



Première incursion dans ce monde où les phrases se dégustent souvent fraiches de l’éclat de leur perfection mais parfois trop onctueuses de leur musique aux saveurs complexes et tendrement surannées.



J’ai apprécié débusquer les idées masquées d’interdits par l’époque trop prude aux épanchements.

J’ai ressenti pleinement les émois de l’adolescence de Philippe « enfermé dans son précoce amour comme un prince orphelin dans un palais trop vaste », identiques aux miens malgré une période plus tardive mais toujours marquée de l’inhibition imposée par l’ombre des parents.

J’ai aimé les minauderies et les enfantillages de Vinca et Philippe ancrés aux phrases de luxe de cette auteure qui possède le talent de décortiquer les sentiments de la fin de l’enfance où les passions ne s’expriment que dans l’extrême.

J’ai profité de l’environnement vivifiant de cette Bretagne aux parfums d’iode et de goémon, entouré de buissons d’ajoncs et de chardons de dunes aussi bleus que les yeux de Vinca.

J’ai frémi avec Philippe lorsqu’il rejoignait Mme Dalleray avec ce sentiment ambivalent de faire de lui un homme victorieux mais tremblant de perdre son innocence.



« Mais le plus beau matin rajeunissait jusqu’à ces enfants égarés et qui se tournaient parfois, plaintivement, vers la porte invisible, par où ils étaient sortis de leur enfance. »



On y retournera, pour ne pas l’oublier, Colette. Ce sera bien, ce sera chouette.

Et on reparlera des histoires du passé.



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