Cette
Gigi m'a un peu agacé au tout début de son histoire, mais peut-on lui faire le reproche que le destin qu'on lui façonne est d'aller voir du côté de ce qu'on appelle, certainement à tort, le beau monde ?
Gigi est la première des quatre nouvelles qui composent ce recueil écrit par
Sidonie-Gabrielle Colette.
Gilberte, dite
Gigi, est une jeune Parisienne de quinze ans, une demi-mondaine de la Belle Époque, qui vit avec sa mère et sa grand-mère. Comme son métier d'actrice laisse peu de temps à la mère, ce sont la grand-mère et la tante Alicia qui ont décidé de lui faire son éducation de future courtisane, lui apprendre les manières, les codes, le savoir-vivre.
Mais il se dégage de cette nouvelle un rêve d'amour en partance, une joie pure qui bondit dans les pages de cette nouvelle, la fraicheur de
Gigi, aux allures presque naïves, y est sans doute un peu pour quelque chose, mais cette adolescente qu'on cherche à dompter, n'a peut-être pas dit son dernier mot et va bousculer le cours des choses...
Tout comme
Gigi, les trois autres nouvelles mettent en scène un personnage central. J'ai beaucoup aimé
la seconde nouvelle, L'enfant malade, touchant de douceur et de compassion, d'un ton poétique qui m'a séduit. Ici encore ce n'est pas la douleur d'un enfant souffreteux qui nous invite mais plutôt son imaginaire éperdu comme une fenêtre tendue vers sa guérison qu'il espère...
La dame du photographe, elle aussi est touchante de poésie et de fraternité, de sororité devrais-je dire plutôt, autour de cette femme, Mme Armand, qui se résout à mettre fin à ses jours. On est pris par la main dans une sorte de bovarysme à la façon de Colette, dans un texte généreux, jamais désespéré.
Enfin, la dernière nouvelle, Flore et Ponome, bucolique à souhait, nous surprend par son côté autobiographique puisque Colette se met elle-en même en scène, évoque son amour immodéré pour les jardins, à un moment où elle nous révèle avec amertume qu'elle n'en possède déjà plus aucun. Ici j'ai eu le bonheur de croiser
Jean Giono, ami de l'écrivaine. Elle est déjà âgée, évoque cependant l'envie de renouer avec la terre, avec le végétal. Ce dernier récit est teinté d'un lyrisme débridé, foisonnant d'odeurs et de couleurs, on sent presque l'humeur de la terre dans les doigts qui tournent les pages. Ici c'est le mystère de la vie que convoque Colette, au travers des jardins de son enfance, de ses voyages aussi. Une force sensuelle sous-jacente habite ces pages et c'est avec émotion qu'on imaginera l'étreinte du coeur de l'écrivaine décrivant la beauté d'une fleur, tandis qu'elle pense peut-être qu'elle est déjà au soir de sa vie...
Ce qui lie ces quatre nouvelles est peut-être simplement une manière harmonieuse d'aborder l'existence et de s'y tenir debout.