AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Tim O`Brien (71)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Les choses qu'ils emportaient

Mise en garde: il s'agit du nouveau titre de "A propos de courage".
Commenter  J’apprécie          10
Les choses qu'ils emportaient

C'est une oeuvre puissante et certains passages prennent au tripes. Les épisodes poignants se suivent dans une chronologie déstructurée. On navigue dans le temps, jusqu'à des souvenirs d'enfance, le retour au pays et les étapes d'écriture du livre. Au final, on ignore ce que le soldat O'Brien avait dans son paquetage mais une chose est certaine : il en est revenu avec un matériau précieux, des histoires captivantes et des sentiments forts, qu'il a su exploiter intelligemment.

L'article complet sur mon blog.
Lien : https://touchezmonblog.blogs..
Commenter  J’apprécie          40
À propos de courage

À l'âge de vingt-deux ans, Tim O' Brien reçoit sa feuille d'enrôlement et part pour le Vietnam. 
Mais alors, qu'est-ce qu'un jeune homme envoyé malgré lui en enfer peut bien choisir d'emporter ? Et qu'en est-il de ses compagnons de patrouille ?




” Les choses qu'ils emportaient étaient déterminées jusqu'à un certain point par la superstition. Le lieutenant Cross emportait son galet porte-bonheur. Dave Jensen emportait une patte de lapin...(...) Ils emportaient du papier à lettre de l'USO, des crayons et des stylos, ils emportaient du Sterno, des épingles de nourrice, des fusées éclairantes, des bobines de fil électrique...“ 




À travers ses souvenirs, et de toutes les anecdotes vécues ou rêvées, entre fiction et réalité, l'auteur nous livre les histoires de ces jeunes hommes enrôlés malgré eux dans une guerre abominable qui fera d'eux des hommes meurtris à jamais



.

(...) il faudrait que j'oublie tout ça. Mais le problème des souvenirs, c'est que l'on ne peut pas les oublier. On prend son inspiration du passé et du présent. La circulation des souvenirs alimente une rotative dans votre tête, où ils tournent en rond pendant un certain temps, puis l'imagination se bientôt à couler et les souvenirs se confondent et repartent dans un millier de directions différentes. En tant qu'écrivain, tout ce qu'on peut faire, c'est choisir une direction et se laisser porter en formulant les choses comme elles viennent à nous. Voilà ce qu'est la vraie obsession. Toutes ces histoires. " 





Revisitant ce qui a été, imaginant ce qui aurait pu être Tim O' Brien récrée une expérience unique et réinvente la littérature consacrée au Vietnam. 


Tous ces fragments de vies, si courts parfois, couchés sur le papier par un vétéran qui survécu au pire cauchemar que l'on puisse imaginer entre guerre et plaie.



.

” Je veux que vous ressentiez ce que j'ai ressenti. Je veux que vous sachiez pourquoi la vérité des récits est parfois plus vraie que la vérité des événements. “ 




Ce que j'en dis :


Comme beaucoup d'entre vous, c'est au travers de certains films inoubliables comme Platoon, ou encore, Good morning Vietnam que j'ai découvert les horreurs de cette guerre. 

En lisant ce récit découpé sous forme de nouvelles, on découvre des histoires authentiques, poignantes et même parfois insupportables tellement inimaginables. 




L'auteur nous livre ses souvenirs, ce qu'il a vécu au cœur de cette jungle du Vietnam, ouverte sur les portes de l'enfer. 
Dans un style très évocateur, sa plume singulière pose un regard sans concessions sur cette guerre qu'il a malheureusement connue.




Un livre essentiel qui figure déjà aux programmes des lycées et des universités aux États-Unis.



N'hésitez surtout pas à le lire, en hommage à tous ces vétérans courageux morts pour leur patrie, et à ceux qui en se revenus avec un douloureux fardeau de traumatismes. 


Lien : https://dealerdelignes.wordp..
Commenter  J’apprécie          30
À propos de courage

La guerre du Viêt-nam a depuis longtemps quitté les pages de l'actualité et pourtant elle a profondément marqué l'Amérique. Depuis, on a inventé " la guerre propre" faite de drones et de technologie, comme si une guerre pouvait être propre. J'ai beaucoup apprécié ce livre qui remet les choses à leur juste place, celle des morts, de la peur, des cauchemars … et des succédanés pour les exorciser. Les protagonistes ne sont pas les décideurs, ce ne sont pas des héros courageux de légende, ils subissent en essayant de ne pas sombrer. Cette lecture n'est pas particulière agréable à lire, mais elle est salutaire. Le style, paradoxalement poétique, et la construction, faite d'anecdotes vraies ou imaginaires, exhalent l'authenticité.
Commenter  J’apprécie          200
Les choses qu'ils emportaient

Tim O’Brien raconte, vingt ans après l’avoir vécue, sa Guerre du Vietnam. Il raconte la vie dans la jungle, les soldats, les amitiés, les rivalités, la folie. Les choses qu’ils emportaient c’était tout leur barda bien sûr, des dizaines de kilos à se coltiner mais aussi leurs pensées, leurs réactions diverses face à la mort et à l’horreur. On ne ressort pas indemne d’une guerre comme celle-là. Rat Kiley préfèra se tirer une balle dans le pied plutôt que de continuer à entendre des voix, Ted Levander prit une balle dans la tête parce qu’il planait trop.. De retour au pays, Norman Bowker passe ses journées à parcourir a ville natale au volant de sa voiture, Tim O’Brien ne cesse de revenir au Vietnam dans ces écrits… Après la guerre, c’est le risque du vide.

Tim O’Brien a vécu tout ça et il le fait vivre au lecteur dans toute sa vérité même quand il se met dans la peau d’un de ses camarades de combat. Un classique du roman de guerre sans fard ni esbroufe.
Lien : http://puchkinalit.tumblr.com/
Commenter  J’apprécie          20
À propos de courage

Quel bonheur de tomber sur un style pareil ! Récit au présent et surtout au passé d’un vétéran du Vietnam Même si on le sait, là on prend vraiment conscience que ce sont des gamins qui ont une arme entre les mains. Une puissance d’écriture qui met le lecteur dans le feu de l’action. L’auteur a le don des descriptions qui en fait un texte très visuel avec des scènes fortes inoubliables. Sensible, honnête, intelligent, profond. Une grande œuvre ! S’il n’y avait qu’un livre à lire sur la guerre du Vietnam, ce serait celui-là.

La première page présente Tim O’Brien. Il est dit : " Ce best-seller, vendu à plus de deux millions d’exemplaires, a été sélectionné parmi les meilleurs livres du siècle par le New York Times et est aujourd’hui enseigné dans les lycées et les universités."

Commenter  J’apprécie          293
Les choses qu'ils emportaient

« Les choses qu’ils emportaient (The Things They Carried) » par Tim O’Brien qui fut appelé pour servir au Vietnam à 22 ans en 1968 est devenu un classique de la littérature américaine. Mes deux fils aînés l’avaient au programme de leurs cours d’anglais. J’ai donc pris l’exemplaire aux pages cornées dans lequel ils avaient annoté au crayon et je suis entré dans la peau de ces jeunes américains partis, pour beaucoup contraints et forcés, se battre dans un pays dont ils ignoraient tout, sans trop comprendre pourquoi. C’est là la force de ce roman qui mêle fiction et souvenirs personnels. On se glisse dans les bottines pleines de boue du héros et de ses compagnons d’armes et on sent le poids de ce qu’ils avaient à porter : la tentation de passer la frontière avec le Canada pour échapper à la conscription, les blagues idiotes dans la section, l’espoir naïf que leurs petites amies leur resteront fidèles, la peur des embuscades, le souvenir d’un copain qui a sauté sur une mine, les remords après avoir tué un soldat Viet Cong, l’incompréhension lors du retour au pays…
Lien : http://www.lecturesdevoyage...
Commenter  J’apprécie          10
Si je meurs au combat

« Mettez-moi dans une boîte et renvoyez-moi à la maison ». C’est là le sous-titre de ce poignant recueil de nouvelles autobiographiques de Tim O’Brien. Originaire d’une petite ville du Midwest autoproclamée « capitale mondiale de la dinde » et qui compte de fait plus de dindes que d’habitants, O’Brien, alors étudiant, est appelé sous les drapeaux durant l’été 1968. Il fera son temps au Vietnam, après ses classes, en 1969 et 1970 et en reviendra avec une partie des nouvelles de ce recueil.

Les amateurs de combats héroïques en seront pour leurs frais, tout comme d’ailleurs les zélateurs d’un discours totalement opposé.

Tim O’Brien est un pur produit de l’Amérique des années du baby-boom. Philosophiquement opposé à la guerre du Vietnam, il est aussi un enfant qui a grandi dans le culte des vétérans de la Seconde Guerre mondiale et même de celle de Corée. Cela signifie quelque chose dans cette Amérique et certainement plus encore dans la petite ville d’Austin, Minnesota, où tout le monde se connaît et où le patriotisme est une valeur cardinale. Certes, Tim O’Brien, étudiant féru de philosophie peut trouver la guerre menée par son pays au Vietnam mauvaise, mais Tim O’Brien, fils de la famille O’Brien, d’Austin, capitale mondiale de la dinde, ne peut que difficilement refuser d’y aller et, ce faisant, faire honte à sa famille et à sa communauté : « Comme des aimants, tous ces trucs tiraient d’un côté ou de l’autre, presque comme des forces physiques qui ajoutaient de la lourdeur au problème initial, de sorte que, au bout du compte, c’était moins la raison que la gravité qui prenait vraiment le dessus. »

C’est d’abord tout cela que raconte Tim O’Brien : les doutes, la peur, la pression sociale, et un projet de désertion avorté. Puis les classes, et enfin le Vietnam, les mines antipersonnel à travers un inventaire à l’ironie morbide, les embuscades – les vraies et les fausses que l’on monte ou pas pour satisfaire un officier dans son bureau –, les combats parfois, courts et meurtriers et pas seulement à cause de l’ennemi, la ségrégation de fait dans l’armée américaine, la peur, le courage, la peur de manquer de courage, la méfiance qui peut virer à la haine entre américains et population vietnamienne…

Tim O’Brien n’a aucune envie d’être là mais il y est pourtant et, porté par ses convictions, en particulier celle qu’il n’a rien à faire dans ce pays, pas plus que ces camarades, mais aussi celle qu’il n’a vraiment pas envie d’y mourir, il décrit avec précision ses états d’âmes comme les événements auxquels il assiste. Il y a là l’ennui de la guerre, la façon dont tous les honneurs ne peuvent effacer l’image d’un corps déchiqueté ou l’humiliation d’un vieil homme. Avec une écriture sans fard mais évocatrice, il dit ce qu’il voit et ce qu’il pense. C’est la guerre vue à hauteur d’homme et c’est moche.

« J’observais le sergent-chef. Il a fait marche arrière, s’est accroupi, et de la poussière et un nuage de fumée rouge sont montés dans les airs, tout autour de ses cuisses. Il s’est redressé et il est resté bouche bée en voyant la brève explosion. Il n’a rien dit. Comme s’il essayait de se protéger des éclats d’obus et de tout ce raffut, il a fait trois pas en arrière. Là, ses jambes se sont désagrégées sous son poids et il est tombé sur le dos comme une masse.

Ça a explosé juste sous ses pattes. Personne ne s’est senti vraiment triste quand l’hélico a atterri et qu’on l’a foutu à bord. »

Profitons-en au passage pour saluer le superbe travail de feues les éditions 13ème Note qui ont su, quelques années durant, dénicher de magnifiques textes et leur offrir un bien bel écrin. Au fond, c’est un peu tout le livre de Tim O’Brien qui est résumé dans la photo de couverture de Don McCullin représentant ce soldat hagard et qui pose plus de questions qu’elle n’offre de réponses.


Lien : http://www.encoredunoir.com/..
Commenter  J’apprécie          90
À propos de courage

Un livre qu'il est difficile de refermer quand on l'a commençe. Une écriture pleine d'intelligence et vibrante d'authenticité. Avec Kent Anderson, cet auteur me semble incontournable pour qui s'interesse à la guerre du Viêt Nam.
Commenter  J’apprécie          20
À propos de courage

Comment parler de la guerre du Vietnam ? Comment parler de ce que l’on a vu ? Ressenti ? Vécu ? Comment parler des gars de sa compagnie qui y sont restés ? Comment relater l’ennui et la monotonie, la peur, la culpabilité ?



Je dois dire que Tim O’Brien y arrive avec brio, sans sombrer dans le mélancolique, dans le gore, le voyeurisme ou la violence gratuite.



Au travers de ses chapitres, il nous raconte des histoires qu’il a vécu au Vietnam, de ses camarades tombés au combat, ou dans des champs de merde, de ses peurs, de ses envies de foutre le camp, de sa mini désertion lorsqu’il fut appelé sous les drapeaux.



Au travers de ses histoires, nous aussi on portera notre barda avec eux, ces sacs qui étaient lourdement chargé, ces armes lourdes, ces tonnes de munitions, nous les porterons avec eux durant leur périple au pays du napalm déversé…



Son écriture comme ses histoires sont soignées, léchées, tournées de manière à vous plonger dans la boue du Vietnam, dans le quotidien de ces hommes, jeunes pour la plupart, fauchés bêtement, pour la plupart… ou devenu un peu fou.



Si ses histoires sont fictives, c’est aussi pour mieux retranscrire la réalité, l’auteur nous expliquera même comment il fabrique des fictions pour dire la réalité.



De ces histoires, même fictives, le lecteur ne sera pas dupe car tout le monde sait qu’il y a une grosse part de réalité dedans – l’auteur l’a faite, la guerre du Vietnam – il en ressortira des grosses doses d’émotions de ses différents récits.



Oui, l’histoire est fictive, mais les émotions, elles, elles ne sont pas feintes, elles sont véridiques, et elles te sauteront à la gueule sans que tu y prennes garde.



Un récit fort, profond, sans fard, mais sans surenchère dans le glauque, des personnages attachants et de belles tranches de vie, le tout sans la musique de Apocalypse Now car moins trash.



Une écriture poétique, magnifique, qui sublime encore plus les récits de guerre ou d’après-guerre, pendant la reconstruction du corps et de l’esprit.


Lien : https://thecanniballecteur.w..
Commenter  J’apprécie          170
Si je meurs au combat

Après avoir vu Platoon d'Oliver Stone, j'ai eu l'impression de lire le roman qui avait donné naissance au film. Mais une différence de taille, ce jeune étudiant américain qui part au Vietnam n'est pas si enthousiaste, il envisage même toutes les possibilités pour fuir avant le départ. Avec ce récit de Tim O'Brien, on est au plus près de la guerre vécue par le simple soldat. Les classes, la chambrée, la difficile cohabitation avec les autres, et puis la découverte du Vietnam, l'ennemi invisible, la peur omniprésente, l'ennui, l'attente et soudainement, l'irruption de la violence. C'est sans concession, c'est un excellent récit pour dénoncer l'absurdité de la guerre.
Commenter  J’apprécie          10
Au lac des bois

Il devait l'emporter. C'était couru d'avance. Tous les sondages le donnaient grand gagnant des prochaines élections sénatoriales. Une formalité même que de passer devant les urnes. Des années qu'il s'était consacré à cet avenir, la politique était devenu sa raison de vivre. Son obsession, même. C'était pourtant sans compter sur l'acharnement médiatique qu'il subit une semaine avant les élections.



La nuit est arrivée, les votes ont été dépouillés. Pas besoin de recompter. Une grosse claque. Une humiliation même. Prendre en compte ce cuisant échec : il n'a plus qu'à se retirer. De la vie politique. De la vie même. Mais comment en est-il arrivé là. A ce point. Aussi bas. Aussi méprisant. Et sa femme qui s'efface deux jours après. Étrange disparition. Dispute ? Fuite ? Pire...



Les médias s'emballent, la vérité devait sortir. Mais de quoi était-il question ? Emplois fictifs, costumes fictifs, j'ai piqué un peu dans la caisse, des emprunts sans intérêt juste pour le fun de prêter de l'argent ? Non, il faut regarder derrière soi, déterrer quelques cadavres et soulever les immondices du Vietnam. Lui, celui qu'on appelait Sorcier... Et regarder les mouches.



Là-bas, ça sent le cadavre en putréfaction, les mouches bourdonnent par centaines - par millier ? - dans l'air au milieu d'amas de chair et de sang coagulé. Le massacre de Thuan Yen... Il faisait partie des troupes, simples exécutants d'ordre. Mais il y était avec son fusil chargé et des morts sur la conscience qu'il a essayé d'enfouir au plus profond de sa mémoire, jusqu'à ce que la presse s'empare du sujet. Oui, pour pouvoir prétendre à de hautes fonctions politiciennes, il faut être irréprochable. Lui, il a fait partie de la compagnie Charlie.



Mais revenons au Vietnam... Tim O'Brien écrit un réquisitoire dans cette guerre. Il ne dénonce pas. Il ne mésestime pas les faits, même les plus cruels. Il les raconte simplement, en toute objectivité, une plume froide, sans cœur, qui annonce les morts, les tueries, le napalm et les fumées de corps carbonisés dans des charniers à la sortie des villages vietnamiens. Les soldats tirent, ne savent pas sur quoi ou qui tirer, mais ils sont pris dans cet engrenage. Tire d'abord regarde ensuite. Entre roman et enquête journalistique, les faits sont difficiles à lire. Le Vietnam hier, la Somme avant-hier, la Syrie maintenant. La guerre ne change pas, les morts continuent à s’amonceler dans des champs, cimetières improvisés logeant les cadavres de la barbarie.



[...]
Lien : http://memoiresdebison.blogs..
Commenter  J’apprécie          454
À propos de courage

Dans les années soixante, Le cas de conscience des Américains c'était la guerre du Vietnam.

Tim 0'Brien que j'avais apprécié avec son roman "Au lac des bois" paru en 1996, témoigne dans "A propos de courage" de sa propre expérience du conflit qu'il a vécu bien involontairement en direct.

Au gré des souvenirs qui reviennent et s'emmêlent en désordre et jusqu'à l'obsession, parfois déformés ou fantasmés, il place le lecteur au plus près du ressenti d'un soldat dans le feu de l'action : peur, révolte, culpabilité, désir de vengeance, sentiment d'absurdité, reformulation intégrale de la notion de bien et de mal, mais aussi courage, fraternité.

Malgré certaines scènes d'une incroyable cruauté, sa plume livre ses états d'âme d'une façon poétique, évoquant aussi les fragments de plaisirs minuscules avec les compagnons d'armes, la beauté des paysages quand les combats ont cessé, la nostalgie des jours heureux qui reviendront peut-être mais différents car l'expérience de la guerre l'a transformé à jamais.

Par goût, j'évite les récits de guerre, mais la personnalité de Tim O'Brien, pleine d'humanité, donne à ce témoignage particulièrement poignant une force exceptionnelle.

Commenter  J’apprécie          190
Au lac des bois

Un lieu. Au nord de l’Etat du Minnesota, à la frontière qui sépare le Canada des Etats-Unis. Des milliers de kilomètres carrés de nature sauvage. Rien que des arbres et de l’eau. Des étendues d’eau immenses et glaciales, une succession de vastes lacs parsemés d’îles, un maillage de chenaux secrets, une suite de portages et de baies. Sur la terre ferme, des enchevêtrements de forêts de pins et de bouleaux traversés par une étroite route de terre. Au bout de cette route, un vieux cottage situé au bord du lac des Bois. Un lieu idéal pour s’isoler.



Un homme. John Wade est âgé de 41 ans. Il s’est lancé dans la politique pour palier à son sentiment d’insécurité affective. Il est rapidement élu au poste de gouverneur du Minnesota et décide de se lancer dans la primaire démocrate aux élections sénatoriales. Donné d’abord gagnant, il sera largement battu après la révélation de sa participation au massacre de Mỹ Lai durant la guerre du Viêt Nam. Après cette défaite cinglante, il décide de se retirer quelques jours avec son épouse Kathy au cottage situé du lac des Bois.



Un événement. Un matin, il constate la disparition de Kathy. Le canot en aluminium rangé dans le hangar attenant au cottage a lui aussi disparu. Après de vaines recherches, il décide de donner l’alerte. Les secours se mettent en place. Mais il est difficile de couvrir une région si vaste et si sauvage. Le comportement de John Wade est singulier. Des enquêteurs commencent à le soupçonner d’être à l’origine de la disparition de son épouse.



Le roman est un patchwork de textes de différentes natures : récits, flashbacks, témoignages, listes de pièces à convictions, hypothèses… Ces éléments permettent de fouiller la psychologie des deux personnages principaux. John est un enfant réservé raillé par un père alcoolique. Il se passionne très tôt pour la magie. Il sort de la guerre du Vietnam traumatisé. Il recherche une relation fusionnelle avec Kathy, craignant plus que tout de la perdre. La politique est pour lui un exutoire affectif, il vit donc très mal sa lourde défaite. Kathy est elle-même assez complexe à cerner. Elle est parfois désemparée face au comportement étouffant de son mari. Elle se réjouit de la fin de sa carrière politique et fait de nouveaux projets : voyage, enfant.



L’écriture est précise et la construction du récit est subtile. Tim O’Brien délivre des hypothèses et différentes alternatives. Il appartient au lecteur d’interpréter les informations et les conjectures livrées et de choisir sa propre conclusion. J'ai trouvé cette fin ouverte très puissante. L’auteur parle extrêmement bien de la naissance d'une ambition en politique, des traumatismes de la guerre, du poids d’une culpabilité intériorisée et de la manière dont des faits anodins peuvent nourrir les soupçons et les rumeurs après un drame. J’ai trouvé le traitement du thème de la prestidigitation particulièrement pertinent dans le cas de cet homme qui a pris pour habitude de masquer ses souffrances et ses blessures. Merci aux éditions Gallmeister de donner une seconde vie à ce texte magnifique vingt ans après sa première publication en France.

Commenter  J’apprécie          220
Si je meurs au combat

J'avais hâte de pouvoir lire une autre oeuvre sur la guerre du Vietnam, période historique qui me fascine à tous points de vue.

C'est donc l'histoire d'un homme comme des milliers d'autres : il veut s'engager au nom de son pays mais ne comprend pas vraiment les enjeux de cette guerre dans la jungle, si loin. Il doute, a peur surtout et envisage la désertion, mais renonce et part au combat. Il se fait des amis, tout en sachant que ceux-ci peuvent sauter sur une mine avant que la nuit ne tombe. Il est horrifié des exactions commises sur les civils, mais pris dans la tourmente de cette guerre horrible il accepte, impuissant. Il marche les yeux rivés sur la terre vietnamienne, incapable de savoir si une mine est enterrée à deux pas. Il se demande ce qu'on ressent, quand ça nous arrive, de marcher sur une mine.

J'ai donc surtout aimé le caractère profondément humain et "normal" de cet homme. Ce n'est pas un sur-homme, qui ne ressent pas la peur. Il fait juste en sorte de survivre à cette journée et à celle d'après, histoire de rentrer aux Etats-Unis. Et c'est déjà beaucoup.

J'ai trouvé ce roman incroyablement juste dans le ton, pas trop dans le pathos, mais pas trop léger. Juste bien. En effet, les événements sont suffisants pour inspirer l'horreur et la compassion, nul besoin d'en rajouter. Et un peu d'humour là où il en faut.

L'auteur décrit également les supérieurs, ces lieutenants si différents les uns des autres. Il raconte ce qu'on ressent, la nuit, enterré dans la forêt et qu'on guette le Vietcong. Exprime ses doutes avant de partir, son incompréhension, ses sentiments contradictoires. Relate ce monde du Vietnam où chacun se raccroche au nombre de jours restant à tirer. Où chacun se démène pour obtenir un boulot tranquille à l'arrière.

La fin m'a vraiment beaucoup émue, je l'ai trouvée absolument parfaite. Ce moment où le soldat survole pour la première fois depuis un an le sol américain...

Encore une très belle découverte de la littérature de guerre !
Lien : http://lantredemesreves.blog..
Commenter  J’apprécie          210
Si je meurs au combat

Après un entraînement qui fera de lui un soldat, O’Brien est appelé pour servir sous le drapeau. Talonné par sa conscience, il passe à un cheveu de déserter mais se rend finalement au Vietnam. Son quotidien consiste à éviter de piler sur une mine, creuser des tranchées et surveiller le ciel illuminé par les explosions la nuit. La vie de soldat n’est pas de tout repos et, au fil des mois, il voit plusieurs de ses potes —ou ce qui en reste— être emportés par l’hélico-ambulance.



Si je meurs au combat nous amène sur le champ de bataille et nous fait vivre la guerre, avec tout ce qu’elle a d’illogique et d’effrayant. C’est le récit d’un type qui a peur, qui ne comprend pas ce qu’il fout là et qui espère être envoyé à l’arrière, là où l’on fait un boulot peinard sans craindre de recevoir un mortier sur la tronche. Après avoir été inondé d’histoires abracadabrantes sur le Vietnam, ce livre brille par son aspect anodin. Et c’est sans doute son point le plus fort : l’aspect anodin de se retrouver coincé dans une technocratie qui se nourrit d’hommes et qui en sacrifie un de temps en temps.
Lien : https://alaincliche.wordpres..
Commenter  J’apprécie          10
Au lac des bois

Certes, on peut tout supposer... et c'est frustrant. On peut quand même se faire sa petite idée, y'a des indices (et des longueurs aussi, que l'on peut survoler en hélico. )
Commenter  J’apprécie          30
Au lac des bois





"D'une manière ou d'une autre, semble-t-il, nous effectuons tous des escamotages, effaçant l'histoire, verrouillant notre vie, et glissant jour après jour dans les ombres grisaillantes. Notre position est incertaine. Tous les secrets mènent à l'obscurité, et au-delà de l'obscurité il n'y a que des peut-être."



John Wade, homme politique qui a le vent en poupe, voit sa carrière s'effondrer à la révélation du secret bien gardé de sa participation au massacre de My Lai. En même temps que sa carrière, c'est toute sa vie qui est remise en cause, son couple, sa façon d'accommoder la vérité pour la rendre tolérable, d'escamoter ce qui dérange, de faire croire à une personnalité solide et bienheureuse là où tout n'est que fragilité et masque.



Bien au-delà du traumatisme central de la guerre du Vietnam, toute la personnalité de John Wade, depuis l'enfance - mais de façon beaucoup plus générale tout le roman - vise à une manipulation de la vérité, une culture de l'illusion. Magicien de l'enfance pour séduire un père alcoolique suicidaire, espion de son épouse, homme incertain et fragile, John enfouit, sous l'apparente réussite, sa quête d'amour, de reconnaissance et de bonté. Par le silence il croit pouvoir défier le mal qui tout au long de sa vie, s’impose à lui.



" Il y avait longtemps, encore enfant, il avait appris le secret qui permettait de transformer son esprit en tableau noir. Efface tout ça. Dessine des jolies images à la place."





Tim O'Brien mène magistralement ce récit complexe mais fluide de la perte et de la fuite . John et Kate après la défaite se retirent loin de tout dans un lieu de nature idyllique où Kate va a son tour disparaître. L'auteur alterne efficacement la description de cette pause supposée ressourçante, des recherches, des hypothèses, des éléments antérieurs de la vie des personnages qui ont amené à cette situation, avec des témoignages ultérieurs recueillis lors de l'enquête, des citations littéraires en rapport avec les traumatismes de guerre, la façon d'y faire face, la disparition… Il décortique, comme on enlève les couches d'un oignon dit un des personnages, la fragilité de ce couple, apparemment résiliant, mais dont l'étayage se base sur les silences et ce, jusqu'à une certaine folie.



Cela donne un enchevêtrement brillant d' éléments qui pourraient paraître disparates, mais confèrent au contraire une extraordinaire richesse au récit et à l'étude de la personnalité de cet homme tragique, insaisissable parce qu'il l'a voulu tel, se croyant protégé derrière ses non-dits, en quête perpétuelle d'une reconnaissance. Témoin de la précarité de chacun, le mot peut-être est le fil rouge de ce récit qui n'affirme jamais rien, mais aborde ses personnages avec une totale humanité .
Commenter  J’apprécie          10
Au lac des bois

Tim O'Brien est le nom de plume de William Timothy O'Brien, né en 1946 dans le Minnesota. O'Brien est diplômé en sciences politiques de Macalester College, où il a été président de l'association des étudiants, en 1968. Cette même année, il est enrôlé dans l'armée américaine et envoyé pour deux ans au Viêtnam, où sa division comprenait l'unité qui fut impliquée dans le massacre de My Lai. L'essentiel de son œuvre, entamée en 1973, relate son expérience de cette guerre et son impact sur les soldats américains qui y ont combattu. Aujourd’hui O'Brien vit dans le centre du Texas et enseigne à l'université du Texas-San Marcos. Au lac des bois, paru en 1996, vient d’être réédité.

Après une sévère déculottée aux élections sénatoriales, John et Kathy Wade tentent de retrouver un second souffle et font une retraite dans une petite maison à l’écart du monde, entre les forêts du Minnesota et le lac Supérieur. Un jour, Kathy ne revient pas d’une promenade sur le lac. Noyade, fuite pour refaire sa vie ? Les recherches s’organisent et des hypothèses troublantes commencent à émerger.

Encore un de ces livres où il ne faudrait rien dire de son contenu pour ne pas gâcher le plaisir du lecteur potentiel mais alors, comment vous inciter à le lire ? Le premier attrait du roman réside dans sa construction déstructurée. Le passé, sensé éclairer le présent n’arrive qu’à posteriori dans la narration et même pas de façon linéaire mais par petites touches, ce qui créé un splendide climat de mystères divers.

Le personnage de John Wade évolue dans la perception que l’on s’en fait, au fil des pages, ici l’on s’émeut de son enfance avec le père suicidé, ailleurs on s’intrigue de son comportement malsain lorsqu’il espionne sa petite amie, là on le suspecte d’être un manipulateur – dans tous les sens du terme – doué (il adore les tours de prestidigitation) et quand surgissent des éléments d’informations sur son activité au Vietnam, on angoisse carrément. Tous ces faits sans narration chronologique comme je l’ai déjà dit. Et puis cette Kathy, elle aussi recèle des zones d’ombres.

Tim O’Brien nous embringue dans ces zones de l’esprit où le Bien et le Mal n’ont plus cours quand les acteurs ont subi ou vécu des traumatismes profonds. Comme ce John Wade et ses épouvantables souvenirs de My Lai qu’il aura tenté toute sa vie d’enfouir et de faire disparaitre de sa conscience ; lui le grand magicien, le Sorcier des rizières du Sud-est asiatique, atteint les limites de ses pouvoirs. Quand la mémoire et la culpabilité ne font pas bon ménage, le cerveau n’a plus qu’une seule issue, le déni. Effacer, faire disparaitre, éliminer…

Le récit est ponctué d’extraits de livres, de dépositions à la cour martiale après My Lai ou bien de notes de bas de page où l’auteur s’adresse au lecteur, fiction et réalité mêlées pour nous embrouiller un peu plus encore. Un tel roman ne pouvait s’accommoder d’une fin simpliste. Rassurez-vous, ce n’est pas le cas.

Commenter  J’apprécie          80
Les choses qu'ils emportaient

Selon moi, un des plus beaux recueils de nouvelles sur la guerre!

L'auteur est un vétéran; il sait de quoi il parle lorsqu'il évoque les blessures indélébiles de la guerre, l'absurdité du conflit, de la mort de ses hommes si jeunes loin de chez eux. Il montre que la guerre n'a rien de beau, ni de glorieux, elle est inhumaine même si les soldats sont campés avec justesse et humanité, elle est insensée.

Dans les nouvelles qui composent ce recueil, Tim O'Brien réussit à dépeindre l'horreur de la guerre à travers des pages très poétiques. J'ai beaucoup aimé la langue de Tim O'Brien, ce décalage entre un style parfois lyrique et une réalité très dure et très cruelle.

Il arrive également à faire sourire par des anecdotes qui révèlent qu'au coeur même des heures sombres, l'humour permet de survivre et de ne pas sombrer dans la folie.

Paradoxalement par ces écrits, cet auteur américain évoque le caractère indicible de la guerre; il faut l'avoir vécue pour pouvoir savoir ce que c'est (c'est la raison pour laquelle, les vétérans se retrouvent isolés au milieu des leurs à leur retour et incapables de partager leur expérience du combat) et aucun mot, ni récit ne saurait retranscrire ce que chacun des combattants a intimement vécu.

MAGNIFIQUE!

Commenter  J’apprécie          40




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Tim O`Brien (359)Voir plus

Quiz Voir plus

Milan Kundera

Presque tous les romans de Kundera comportent le même nombre de parties : quelle est la structure type de ses romans ?

3 parties
5 parties
7 parties

10 questions
167 lecteurs ont répondu
Thème : Milan KunderaCréer un quiz sur cet auteur

{* *}