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Critiques de Tim O`Brien (71)
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Les choses qu'ils emportaient

C'est un livre que je n'aurais pas rencontré sans Babelio et ses lecteurs, une lecture atypique et originale, à savoir :

Qu’est-ce qu’un jeune homme envoyé malgré lui dans l’enfer du Vietnam peut bien choisir d’emporter ?

Si la réponse à cette question sera donnée, elle sera plutôt succincte et accessoire, car nous allons surtout lire les extraits choisis des souvenirs et réflexions de Tim O'Brien sur sa guerre du Vietnam.

Tim O'Brien a participé à cette guerre dans une unité de combat, groupe le plus souvent composé de 18 hommes. Vingt ans après, devenu écrivain il va avoir besoin de raconter et de se raconter, et des anecdotes et des histoires sur la guerre il en a "à la pelle".

Je vais faire une digression qui expliquera en partie mon ressenti global, mes seules connaissances sur la guerre du Vietnam me venaient des films "Apocalypse now" et "Full métal jacket", et je dois dire que ces deux films confirment parfaitement le contexte que l'on va trouver dans ce livre.

L'auteur nous le rappelle très tôt dans le récit, les GI's avaient majoritairement entre 18 et 20 ans, jeunes et immatures donc, ils disposaient de ressources quasi illimitées en terme d'armement ou de matériel et c'était la guerre, une guerre d'embuscades dans la jungle, probablement ce que l'on fait de plus stressant.

J'ai été un peu surpris et désappointé par le parti pris narratif, l'auteur l'admet, il ne dit pas la vérité, enfin pas vraiment, il invente souvent et assume de nous emmener dans une fantasmagorie permanente sur la guerre, celle qui justifie les actes les plus vils et les attitudes les plus troublantes, celle qui tord la réalité et transforme ce théâtre de guerre en un lieu en dehors du temps et de la logique.

Je pense que cet aspect m'a un peu contrarié, j'aime l'histoire, mais surtout l'histoire vraie et réelle, et là ce que nous avons avec certitude c'est une allégorie, certes puissante et parlante, mais composée d'images qui ressemblent seulement à ce qui est réellement arrivé, peut-être l'auteur s'est-il imposé une réserve ?

Je n'ai pas été happé par ces anecdotes comme je m'y attendais pour la raison évoquée plus haut, je n'ai pas non plus tellement apprécié le style, trop lent et souvent répétitif, cela dit je ne me suis pas ennuyé non plus et je peux comprendre l'intérêt que beaucoup y ont trouvé, je n'ai simplement pas vraiment trouvé ce à quoi je m'attendais...
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Les choses qu'ils emportaient

« Toute cette guerre, dit-il. Tu sais ce que c’est ? C’est juste un immense banquet. De la viande, mon vieux. Toi et moi. Tout le monde. De la viande pour les insectes. »

La guerre du Vietnam racontée par Tim O’Brien, soldat et déjà écrivain, rêveur qui mêle le passé, la guerre et le présent. C’est à la fois un récit historique et une fiction où le courage et la peur affleurent à chaque page.

Toutes ces choses, photos, lettres ou encore collants, qui ont accompagné ces soldats dans ce conflit absurde donnent une dimension humaine inédite à ce récit.

A travers les odeurs, les amitiés, l’amour, les fantômes, la folie, l’humour (noir) Tim O’Brien nous narre son Vietnam vingt ans après. C’est magnifique !
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Les choses qu'ils emportaient

Pas vraiment un livre de guerre mais plutôt un livre sur la guerre, et qui offre l'intéressante particularité de prendre comme point de départ du récit le contenu des sacs à dos... Ce que ces militaires US considéraient comme indispensable, utile, futile, précieux ou encore lié à des superstitions, croyance. L'écriture est soignée, précise, taillée au diamant et nous entraîne dans des réflexions profondes, puissantes, évocatrices... bref tout ce qui fait d'un bouquin un très bon livre...Le chapitre "sur la Rainy River" qui évoque les tourments et les hésitations de T. O'Brien avant de partir ( partir ou déserter ? ) est bouleversant, comme bien d'autres....Indispensable pour les amateurs de ce sujet...
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À la poursuite de Cacciato

Après avoir lu "Les choses qu'ils emportaient" de Tim O'Brien, chef d'oeuvre sur la dénonciation de la guerre du Vietnam, ce roman, bien que grandiose par son imagination, m'a laissé sur ma faim, et un peu déçu. En effet, l'aspect irréel et onirique, s'il permet la métaphore de l'enfer des soldats qui ne peuvent échapper à leur destin, avec un côté "Au coeur des ténèbres" de Conrad, lui donne un côté artificiel qui le disqualifie à mes yeux. Ce livre a tout de même obtenu le National Book Award, et sans doute m'attendais-je trop à l'ultra réalisme de celui cité ci-dessus, finaliste au Pulitzer.
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Au lac des bois

Il s’agit, à première vue, d’une histoire simple : John voit sa carrière politique brisée, définitivement. Lui et sa femme, qui lui a tout sacrifié, ont eu besoin de se mettre au vert, au fin fond de l’état dont il voulait être le sénateur. Ils sont tous les deux dans un endroit isolé, près d’un lac : de nombreux locataires sont venus se reposer en ces lieux. Mais, un matin, un après-midi, au beau milieu de la nuit, on ne sait pas au juste tant John a mis du temps à s’apercevoir que Kathy n’était pas simplement partie en promenade, Kathy disparaît. Un bateau a disparu avec elle. L’a-t-elle pris ? Si oui, où peut-elle être ?

Le récit est rétrospectif, et c’est un narrateur anonyme, à la première personne, qui semble enquêter quelques temps après. Il recueille les confidences de la famille, des proches, des témoins aussi. L’un des enquêteurs a une certitude, se fiant à son intuition, ses impressions. Les autres aussi ont leur idée sur la question, qu’ils s’appuient sur les circonstances de la disparition de Kathy, sur ce qui s’est passé après, ou sur leur connaissance du passé de John.

Le sujet principal de ce livre, outre la soif de se réaliser à travers la politique, est la guerre du Vietnam, cette guerre dont on a besoin de parler, qu’il ne faut pas oublier. Déjà, à l’époque, les Etats-Unis se voulaient les sauveurs du monde et envoyaient au Vietnam des jeunes gens qui en sont revenus irrémédiablement changés – quand ils en sont revenus. Pas de romantisme, pas de sensationnalisme non plus : le récit est au plus près des faits, comme un reportage journalistique. C’est d’ailleurs ce que semble être le narrateur, qui est passé par les mêmes lieux que John, un an après les faits. Les faits ? Le massacre de deux cents à cinq cents civils à My Lay, par la compagnie Charlie, compagnie à laquelle appartenait John.

John, depuis sa jeunesse, se tient sur un fil ténu. Il a fait avec, avec un père alcoolique, déprimé, qui passait le plus clair de son temps à le rabaisser. Il a fait avec une femme qu’il aimait – Kathy – dont il n’a jamais respecté les désirs. Il a fait avec ce qui s’est passé au Vietnam, qu’il a fait disparaître de son esprit, comme si, tant que l’on n’en parlait pas, cela n’avait jamais existé. Il a passé tant de temps à concilier sa réalité avec la réalité qu’il ne sait même plus lui-même ce qui s’est passé au lac des bois, pas plus que le lecteur ne saura réellement ce qui s’est passé. A lui, parmi toutes les versions qui sont proposées, toutes les pistes qui ont été suivis, de choisir celle qui lui convient le mieux, entre noirceur et espoir mince.
Lien : https://deslivresetsharon.wo..
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Au lac des bois

Malgré les très bons sondages au début de sa campagne qui le donnaient gagnant haut la main, John Wade, le gouverneur du Minnesota, essuie une défaite cuisante aux élections sénatoriales. Humilié, bafoué, blessé, il décide de louer, avec sa femme, Kathy, un vieux cottage dans la forêt au bord du lac des Bois afin de s'y ressourcer, oublier ces élections, se retrouver tous les deux et penser à leur avenir. Après tant de tumultes, le couple veut croire que, évidemment, tout n'est pas perdu. Mais, après quelques jours passés paisiblement au rythme des balades, des baignades et des soirées sous le porche, Kathy disparaît subitement un matin. John ne s'inquiète pas jusqu'au moment où il se rend compte que le bateau garé dans le hangar n'est plus là et que le soir venu, sa femme n'est toujours pas revenue. Le shérif, prévenu de cette disparition, met aussitôt en place des recherches mais s'interroge aussi sur le rôle de John dans cette sombre histoire...



Après une défaite humiliante à des élections, quoi de plus ressourçant qu'une mise au vert ? Histoire de digérer cet échec personnel et professionnel et réfléchir à l'avenir. Sauf que la disparition inexpliquée de Kathy va mettre à mal John Wade. S'est-elle enfuie ? Perdue ? Ou pire noyée ? D'une grande habileté, Tim O'Brien tisse un roman patchwork mélangeant aussi bien le présent, le passé, les pièces à conviction, les témoignages ou encore les hypothèses. Il dévoile, petit à petit, le passé peu glorieux de John Wade lors de la guerre du Vietnam, nous plongeant ainsi dans une ambiance de plus en plus oppressante, et délivre peu à peu la relation unissant John et sa femme. Des personnages parfaitement dépeints psychologiquement au cœur desquels de nombreuses zones d'ombre surgissent. Un roman prenant, à la fois troublant et fascinant, campé autour de l'illusion, du mensonge et du secret.
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Les choses qu'ils emportaient

La guerre du Vietnam, vous savez, cette guerre qui comme toutes les guerres est essentiellement faite par des enfants ? 18 ou 20 ans… Les kids, les boys… Tim O'Brien rentre dans les détails, les minuscules détails concrets qui font le quotidien d'un soldat. A travers cela émerge une sensation de peine, de grande peine, un chagrin qui reste coincé dans la gorge du lecteur. La guerre. Des ados. Des enfants. Des tueurs. La peur, la mort, la souffrance. Des grandes gueules, la trouille au ventre. le fatalisme. Comment est-ce possible ? Comment peut-on faire ça, nous, les humains ?

Ces derniers commentaires, c'est moi, Sweetwater, qui les rajoute… Tim O'Brien, lui reste en retrait. Il parle de ses amis. Ceux qui sont morts, ceux qui vivent encore, ceux qui préfèrent finalement se donner la mort. Et la petite fille de l'auteur le regarde et lui demande : « Papa, pourquoi écris-tu toujours sur la guerre ? » Un très grand livre.

Finaliste au Pulitzer.
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À propos de courage

Tim O'Brien a fait la guerre du Vietnam. Comme beaucoup il en est revenu blessé et marqué à vie. Ce livre est écrit à partir de ses souvenirs, il parle de la guerre, des hommes et du Vietnam. Les textes sont courts, bien écrits et comme le titre l'indique évoquent le courage. Ce courage dont tous ont fait preuve dans les moments difficiles mais qui leur a aussi fait faute parfois. Pas de condamnation ni de glorification, juste un état des lieux. A lire.
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Les choses qu'ils emportaient



Tim O'Brien a fait la guerre du Vietnam. Écrire ce qu'il y a vécu avec les hommes de son unité s'est imposé à lui comme une évidence.

"Les choses qu'ils emportaient" est le titre du premier des récits que O'Brien a réunis dans cette œuvre. Il fait mieux que raconter, il nous fait sentir le Vietnam, en un condensé d'émotions, d'anecdotes, de souvenirs, d'images, d'odeurs, de sons, comme une empreinte des fantômes du passé. Ainsi se dégage de cet ensemble une ambiance incroyable, grâce à des personnages intenses et une écriture sensible. Ce n'est pas le Vietnam des combats, des héros qu' O'Brien raconte. Il s'intéresse aussi bien à l'avant qu'à l'après-guerre, à la terreur et à l'amitié que partagent ces jeunes gars dans cette guerre absurde. Il raconte leurs désirs, leurs peurs, leur courage ou leur lâcheté, leurs blessures et leur mort, trop souvent.J'ai été frappée par la violence des sentiments et des combats, que O'Brien restitué dans des images et des situations d'une grande puissance, mais aussi par la marque indélébile que laisse sur chacun des rescapés le souvenir de cette guerre, et enfin par l'importance accordée à la littérature pour rendre compte de la vérité des êtres plus que de leur réalité. Tim O'Brien signe un roman sublime et fort que je ne peux que vous recommander!
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Au lac des bois

Après un échec cuisant à l'élection de 1986 pour le poste de sénateur des Etats-Unis, John Wade et sa femme Kath se réfugie dans leur chalet situé près du lac des bois dans le Minnesota. le couple a dû affronter le scandale qui a entaché la campagne de John et il essaye de tourner la page. Le site est idyllique, quelques voisins - le couple Rasmussen -, et une petite ville pour y manger de temps en temps au restaurant. Un matin, John se lève et ne trouve pas Kath à ses côtés, le hangar à bateaux est ouvert, le crist-craft (leur bateau à moteur) a disparu. John et Kath se connaissent depuis l'université, avant que John ne combatte au Vietnam et il pense simplement que Kath est partie, le temps d'une journée, pour évacuer le stress post-électoral. La disparition semble durer et, le lendemain John alerte les secours.



C'est dans l'ambiance envoûtante du lac, en ce début d'automne, où brouillards succèdent aux pluies et averses de neige, que l'enquête commence et Tim O'Brien s'ingénie à livrer un récit parcellaire, entrecoupant l'enquête de témoignages des amis, ou des personnes ayant côtoyé le couple, et surtout de flash-back évoquant la tuerie de Thuan Yen pendant la guerre du Vietnam, un massacre qui pourrait être un des verrous du comportement secret de John.

Alternant les périodes, les extraits d'interviews, témoignages, des coupures de journaux, les différentes hypothèses de l'enquête et le récit de John, le roman offre autant de pièces de puzzle qui font perdre pied, autant que les recherches dans ce lac particulièrement méandreux où disparaître est presque certain.

Cette construction très particulière du roman de Tim O'Brien a rendu ma lecture assez difficile et c'est avec un avis mitigé que j'ai terminé le récit. Si j'ai beaucoup aimé la partie historique, évoquant la guerre du Vietnam, les actes de cruautés et les traumatismes infligés aux victimes et aux tortionnaires, j'ai été moins intéressée par les personnalités de John et Kath, que j'avais plus de mal à suivre.

Un roman très psychologique, voire philosophique, où l'enquête - ou sa résolution à proprement parler - n'est qu'un prétexte pour dénoncer le déni que l'on peut s'infliger à soi-même, en s'appropriant et se forgeant un passé inventé pour se protéger.
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Les choses qu'ils emportaient



Tim O'Brien est un gamin lorsqu'il doit s'envoler pour le Vietnam et participer à une guerre absurde, qui n'est pas la sienne mais va le devenir.

Si le bouquin s'ouvre effectivement sur l'énoncé détaillé de ce que ces jeunes soldats emportaient avec eux avant de partir en patrouille, en mission de reconnaissance, de repérage, de surveillance ou autres – cette revue de "détail(s)" a par ailleurs tout son pesant d'intérêt, ne serait-ce que parce qu'elle nous met d'emblée en immersion au contact de leurs réalités, de leurs univers, de leur quotidien, de leurs peurs, de leurs croyances, de leurs petites manies... bref, de ce qu'ils étaient, de qui ils étaient, et de ce à quoi ils étaient confrontés ou destinés -, il se poursuit sur un récit qui ne répond pas aux impératifs d'une narration linéaire et carrée, mais à l'accueil de souvenirs qui habitent et hantent une mémoire traumatisée qui a d'autres priorités que celles de respecter un ordre chronologique qui serait par définition un contresens absolu et une contrevérité préjudiciable au récit.

La force de ce bouquin réside dans son honnêteté, honnêteté que l'on ressent à travers des scènes crues sans concessions, d'où sont bannis lyrisme, pathos, plaintes, jérémiades, auto apitoiement... des scènes qui sont comme des bouffées mnésiques où les "protagonistes" vont, viennent, se croisent, s'effacent et reviennent, donnant cet effet – c'est ainsi que je l'ai ressenti – d'une mémoire en souffrance, une mémoire qui balbutie, qui veut essayer de dire ce qui trop lui pèse, ce fardeau trop lourd dont elle veut s'alléger, mais dont on sait qu'elle ne parviendra jamais à s'en défaire totalement... et le voudrait-elle ?

Le cinéma nous a offert des témoignages puissants grâce à des films comme – Platoon, Full Metal Jacket, Apocalypse Now,Voyage au bout de l'enfer, Né un 4 juillet, Nous étions soldats - ... la littérature, elle, est loin d'être en reste avec des oeuvres comme celle de Tim O'Brien.

Un livre dont croyez-moi, vous garderez les visages de ces jeunes hommes (vivants ou morts), dont l'auteur nous raconte ce qu'ils ont vécu, et auxquels ils donne la parole... au moment où celle-ci s'exprima à travers les mots simples et vrais qui furent les leurs... et que vous n'oublierez pas non plus.
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Au lac des bois

Au lac des bois, Tim O'Brien, Gallmeister, 2019, roman

traduction de l'américain par Rémy Lambrechts







Tim O'Brien est né en 1946, à Austin, dans le Minnesota. Il a fait la guerre au Vietnam, trois ans durant.



Au lac des bois, quand tout s'effondre, emmène au cœur du mystère. De toute façon, la vérité est inaccessible, dit Freud.

Ce livre est rudement bien construit.

C'est l'histoire d'un Sorcier. Sorcier est le surnom d'un homme qui enfant, parce qu'il voulait être aimé, et de son père particulièrement, trouve l'oubli, lui le solitaire, le frustré, le honteux des remarques paternelles sur son poids, « jelly Jim », dans une cave où il s'exerce à des tours de magie.

Son père se pend, qui avait des problèmes d'alcool et que rien ne satisfaisait jamais. Pour que son père- mort-soit fier de lui, Sorcier, alias John Wade, s'enrôle dans les combattants au Vietnam. Perdu, comme déjà petit il l'était, il commet deux meurtres dont il ne se remet pas. A son retour du Vietnam, il s'inscrit en politique, parce que la politique, c'est aussi des tours de passe-passe. Mais c'est encore le moyen de venir sincèrement en aide aux gens, et de racheter un peu ses tueries de soldat. Ce qu'il a fait au Vietnam, le massacre atroce d'un village de vieillards, de femmes, d'enfants et de bébés, ressort, et le scandale éclate dans les journaux. Il est défait complètement aux élections qui lui ouvraient le Sénat fédéral. Avec sa femme, il s'éloigne dans le Nord, à la frontière du Canada, là où les habitations sont rares, où les bois et les eaux prennent toute la place et ressemblent aux miroirs dans lesquels John Wade effaçait tout. Sa femme disparaît, lui aussi quelque temps après. Où ? Comment ?

La construction donc. On est en 83, après l'échec cuisant, comme un point de non-retour, aux élections, dans un petit cottage au pied du lac. Le couple forme des projets d'avenir heureux. Elle, est tout pour lui, et de son côté, elle ne peut quitter son mari, amour, fidélité, protection ? L'homme présente des signes de folie, la femme, de dépression, mais ils sont résolus à être heureux. Ils le méritent. L'intérêt de John pour la magie le pousse à croire ou à faire semblant de croire à un bonheur possible. Des flash-back, des retours en arrière, expliquent la situation du couple, l'enfance de John, sa guerre du Vietnam, ses rapports avec son père ; pour elle, son comportement au boulot, son aventure avec le dentiste.

Les flash-back sont récurrents, et à chaque fois qu'ils reviennent, un élément est ajouté, un autre éclairage est donné. Le lecteur a droit à un puissant suspense, et il arrive un moment où il croit deviner ce qui a pu arriver, mais ce ne peut être qu'une hypothèse.

Au même titre que les hypothèses qui sont proposées. Le narrateur est extérieur, et le focus est placé sur le personnage principal. Si bien que ce qui a trait au personnage féminin rend perplexe. Qui parle véritablement quand il est question de sa promenade en bateau ?

Des éléments sont ajoutés à l'enquête : on entend des voix multiples, des voix aimantes ou accusatrices, des avis de psychiatres, on lit des consignations de procès pour crimes de guerre, on a des paroles d'écrivains, des notes en bas de page de l'auteur lui-même.

En outre, il y a cette image qui parcourt tout le roman, celle de deux serpents qui par amour s'avalent l'un l'autre. Que se serait-il passé s'ils s'étaient avalés totalement ?

Le lecteur participe à une véritable enquête. Que cachait ce couple ? S'aimait-il ? La disparition de la femme était-elle préméditée ? L'intérêt de la lecture s'étend au-delà du couple. Qu'en est-il de l'amour ? Du besoin d'être aimé ? Peut-on vivre avec un secret ? Et quel secret ? Peut-on vivre encore une fois que le secret a été divulgué ? Et à l'être le plus cher qui soit ? Qu'est-ce que la guerre fait des hommes ? Qu'est-ce que le manque d'amour fait d'eux ? Peut-on se racheter après avoir commis des actes que la raison ne peut expliquer ? Est-on condamné à être un mort-vivant ?

L'auteur s'interroge sur les atrocités perpétrées au Vietnam par les Américains ; sur ce que sont devenus les vétérans de cette guerre une fois revenus au pays, sur l'ingratitude de l'Etat à leur égard : certains en effet deviennent des clochards et vivent sous les ponts. L'auteur s'interroge aussi sur les massacres des Indiens.

La lecture de ce livre est passionnante. L'auteur écrit pour se donner à lui-même des réponses sans doute. De réponse, il n'y en a pas. A moins qu'elles ne se trouvent au fond du fond du lac, ou dans la tête de qui sait d'avance et donc ne sait pas, ou dans le cœur d'une personne aimante et dont l'objectif est de profiter de la vie qu'on a.





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Au lac des bois

Un grand roman, original tant dans le thème que dans la construction : une disparition et un auteur qui fusionne avec le narrateur pour émettre des hypothèses et enquêter... (plus d'infos ici : https://pamolico.wordpress.com/2019/10/20/disparition-et-amnesie-au-lac-des-bois-tim-obrien/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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Si je meurs au combat

Dans Si je meurs au combat, passé pour être devenu un classique sur le conflit Nord-Vietnamien, Tim O'Brien nous raconte sa guerre, l'horreur au quotidien pour lui et quelques uns de ses camarades et l'allégresse voire la délectation pour certains autres. Certains autres à qui, soulignons-le, on n'aurait même pas confié un crayon de bois à surveiller chez eux aux États-Unis et qui se retrouvent à diriger des divisions entières au Vietnam. Avec le recul et sachant cela, il apparait évident que ça ne pouvait qu'immanquablement conduire à des tragédies comme le massacre de My Lai (que quelques galonnés arrivent encore – un tel niveau d'indignité, ça me dépasse – à justifier, comme quoi que voulez-vous, c'était la guerre ma bonne dame... Par contre l'offensive du Têt par le Viet-Cong et l'APVN, alors là, non, pas d'excuse ! pas de quartier ! kill 'em all !!)



Tim O'Brien, envoyé là-bas alors qu'il n'était qu'un tout jeune étudiant et presque prêt comme des milliers d'autres à déserter au Canada et puis finalement non, apporte un témoignage précieux sur cette foutue trouille qui ne le lâche jamais, sur les amitiés qui se tissent, souvent improbables mais tellement bienvenues, sur l'incompétence de nombreux gradés, sur les drogues qui aident un peu à supporter et sur la littérature dans laquelle il trouve une échappatoire salutaire. Et enfin le retour au pays, sauf et presque sain.



Seul regret pour ma part, j'aurais parfois aimé quelques développements plus approfondis, My Lai par exemple doit se contenter de quelques pages et se concentre surtout sur l'ardeur que met un commandant gueulard à refuser de comprendre où se situait exactement le problème avec ce massacre (je précise tout de même que Tim O'Brien n'était pas au Vietnam lors de ce carnage, malgré tout puisqu'il a commencé à en parler...)

D'autres situations sont ainsi survolées qui auraient (peut-être) méritées qu'on s'y arrête un peu plus longuement. Malgré cela, Si je meurs au combat reste le témoignage sincère d'un jeune soldat qui n'a pas perdu les pédales une fois son bioutifoul AK-47 entre les mains, s'est posé les bonnes questions, y a parfois trouvé des réponses, parfois non, et nous livre finalement une analyse solide, pertinente et idéalement antimilitariste.



« Si seulement ce livre pouvait prendre la forme d'un plaidoyer pour une paix éternelle, un plaidoyer écrit par une personne qui sait de quoi elle parle, par une personne qui était sur le terrain et qui est revenue, un vieux soldat qui repense à une guerre en train de mourir !

Ça serait bien. Ça serait bien de pouvoir tout intégrer afin de persuader mes plus jeunes frères, et peut-être aussi d'autres personnes, de dire non à la guerre et à toute forme de combat. »

Tim O'Brien

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Au lac des bois

"Peut-être est-ce là le but de ce livre.Me rappeler. Me rendre la vie évanouie."

Tim O'Brien a fait le Vietnam à vingt-deux ans. Le souvenir du massacre de My Lai le hante. L'auteur l'a-t-il vécu ? On n'en sait rien. En tout cas, John, le personnage principal de cette lente descente vers le néant y était. Par un tour de passe-passe dont il est coutumier, John essaie d'effacer le passé. Mais la guerre a laissé des séquelles que Kathy semble ignorer tellement elle est amoureuse. Son mari se lance en politique sur la base de fragiles idéaux forgés sur la culpabilité. Les premières victoires échouent sur un gros échec, moment de vérité pour le couple, questionnement sur le sens de la vie.

L'auteur excelle à nous glisser dans les méandres des faux semblants, des impostures mineures et majeures, des blessures de l'enfance. Son écriture dense, narratif et descriptif entremêlés, nous rend proche une Amérique lisse en surface, si tourmentée dans ses tréfonds. Le style renvoie à Wallace Stegner ( En lieu sûr), lui aussi appliqué à saisir les fissures d'une probité de façade. Le livre déposé, un léger cafard vous prend, vite dissipé, car ici ce n'est pas comme là-bas.
Lien : https://cinemoitheque.eklabl..
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Les choses qu'ils emportaient

J'ai adoré, sans doute le meilleur livre que j'ai pu découvrir sur la guerre du Vietnam. L'auteur parvient à raconter la guerre en parlant d'abord des hommes qui l'ont faite, de leurs objets, de leurs histoires, de leur mort...

Il nous lance sur de fausses pistes, montre qu'il y a pas qu'une vérité, une seule bonne manière de raconter la guerre et son horreur. Que la lâcheté, ça peut être de ne pas avoir le courage de s'enfuir, de déserter. Que les liens que les soldats tissent entre eux sont forts même si cette amitié est tacite et violente.

Le récit n'est pas linéaire, certains passages se déroulent avant, d'autres pendant ou après la guerre. On assiste plus à une suite d'histoires, d'anecdotes ou de légendes sans pouvoir démêler le vrai du faux, exactement comme si un soldat nous avait raconté ces histoires. Et finalement, par bribes, on a l'impression d'avoir une vision plus complète de cette guerre que si nous avions lu un livre d'Histoire.

Le style est excellent, le récit est fin, l'auteur mélange très habilement les faits et sa vision de la guerre, de la mort et de la vie.
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Les choses qu'ils emportaient

Un livre écrit avec les tripes et avec le coeur. Une plongée dans la jungle vietnamienne et dans la mémoire de ce soldat. Un style qui nous fait vivre de l'intérieur des sensations, des images. On prend les émotions, les doutes, les obsessions en direct, grâce à un style simple, exprimé sans filtre à partir de sa mémoire traumatisée, et de celle de jeunes soldats à peine sortis de l'adolescence et subissant la violence d'une guerre qui ne les concernait pas.

Les descriptions de la forêt, de la pluie, du silence, des morts sont exceptionnelles de vérité. C'est vivant, traumatisant ! On en sort soi même choqué !

Magnifique !
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Les choses qu'ils emportaient

En décrivant méticuleusement, quasi cliniquement, le quotidien de ces jeunes appelés américains parachutés au Vietnam, Tim O’Brien – traduit par Jean-Yves Prate - nous embarque dans une vision des plus réalistes d’une guerre atypique.



Certes il y a Les choses qu’ils emportaient, mais O’Brien décrit surtout ces petits moments qu’ils vivaient, ces grandes peurs qu’ils affrontaient et ces fêlures irrémédiables qu’ils ramenèrent.



Page après page, souvenir après souvenir, il nous plonge dans un sentiment bizarre, partageant le déséquilibre de ces garçons venus à cheminer le long de la frontière peu évidente entre fascination morbide et dégout d’une guerre qu’ils subissent sans la comprendre.



C’est cette perte progressive de repère qu’O’Brien décrit parfaitement : la guerre « ce n’est pas exactement beau à voir. C ’est stupéfiant. Ça remplit l’œil. Ça vous subjugue. Vous haïssez cela, c’est vrai, mais vos yeux ne le détestent pas ».



Après tant d’autres, O’Brien apporte sa pierre à cette grande blessure américaine dont les traces ne sont toujours pas effacées, décrit sa vérité, pas la vérité. Car « à la guerre, vous perdez le sens de ce qui est défini, par conséquent le sens de la vérité elle-même, et donc on peut dire que dans une histoire de guerre véridique, rien n’est jamais absolument vrai ».



Un livre exigeant, pas toujours passionnant sur le moment, mais qui fait sens une fois refermé.
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Au lac des bois

🏞 Au lac des bois - Tim O'Brien 🏞

Traduction : Rémy Lambrechts @editions_gallmeister



John et Kathy Wade se sont mis en retrait de la vie publique après la cuisante défaite de John aux élections sénatoriales. Ils logent dans un petit cottage au bord du Lac des Bois dans le nord du Minnesota. Ils essayent de se ré-imaginer un avenir, d'avancer malgré les horribles révélations sorties dans la presse et qui lui ont coûté la victoire, ils tentent de se projeter dans une nouvelle vie, mais les choses sont-elles si simples?

Et puis un jour Kathy ne revient pas de sa promenade. Le hangar à bateaux est vide, le canot n'est plus là. Les heures passent et elle ne réapparaît pas. John alerte les autorités, les recherches commencent...

Ce livre présente une construction plutôt originale avec des chapitres faits de citations de procès-verbaux et de livres, de témoignages recueillis par l'auteur et de descriptifs de pièce à conviction, d'autres présentent des hypothèses sur ce qui aurait pu se passer et enfin des chapitres narrent le présent et racontent le passé. Le passé de ce couple, mais surtout le passé de John au Vietnam pendant la guerre. En disséquant l'histoire de John, de son enfance, de sa guerre du Vietnam, de son histoire d'amour avec Kathy et du poids de la culpabilité, l'auteur tente de comprendre ce qui est arrivé le jour de la disparition, de trouver des réponses mais dès les premières pages on comprend qu'il n'y aura que des spéculations. Libre à chacun de choisir la plus crédible.
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Les choses qu'ils emportaient



Les choses qu?ils emportaient

Tim O?BRIEN



Tim O?Brien avait 22 ans lors de la guerre du Vietnam.

Et de jeune étudiant américain il est passé à soldat dans une guerre qu?il ne cautionnait pas.



Il y a senti la putréfaction des corps en décomposition et l?humidité des tranchées ds les rizières.

Il y a entendu les déflagrations des tirs, les cris de douleur de ses camarades blessés.

Il y a vu les habitants fuir et leurs corps tomber.

Il a goûté aux rations de l?armée et à la boue.



Et il a partagé une partie de sa vie avec ces camarades d?infortune et leurs mystérieux paquetages.

Les choses qu?ils emportaient...



Tim O?Brien a écrit ce livre 20 ans plus tard en y racontant ses souvenirs réels et fantasmés.

Un livre intime sur les blessures physiques et psychologiques de ces jeunes hommes partis au front...
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