La Guerre aux papiers

« À présent que cette guerre est finie, on voit qu'elle n'a pas été une vraie guerre, puisqu'on s'est à peine battu. Il faut bien dire qu'on n'en avait pas envie, et le mot d'ordre avait toujours été : « Paix aux hommes, morts aux papiers… ». Ça ne fait rien ; on ne s'en était pas moins jeté dans une aventure ; l'aventure avait mal tourné. Et voilà que, pour finir, c'était contre la nature elle-même qu'il avait fallu se battre. »

Ces papiers qu'on veut à tout prix brûler dans ce pays de Vaud, en 1802, ce sont des actes notariés donnant le droit à leurs détenteurs de percevoir une dîme. Ces actes ils les ont achetés, comme un investissement. Mais les paysans n'entendent pas accepter ce retour aux pratiques des anciens droits seigneuriaux. Au début du printemps, ils se soulèvent donc à travers tout le canton.

Des personnages forts marquent ce court roman. Borchat, tout d'abord, un ancien soldat qui a quarante ans. Autant dire un vieillard. Il voudrait persuader sa voisine Fanchette, qui vit seule avec un frère handicapé, de l'épouser. Mais la belle hésite beaucoup (on la comprend, notre Borchat n'étant pas franchement du genre spontanément utile). Borchat, comme beaucoup d'autres hommes du village de Bossenges, va se laisser entraîner dans cette révolte, presque malgré lui. Nous suivrons aussi Rose, qui a rompu avec son amoureux parti guerroyer. Et la Tserpette, une vieille femme qui lit dans le plomb fondu (j'ignorais tout de cette forme de voyance).

Le feu de poudre initial de la révolte des Bourla-Papey va vite tourner court. le printemps a cédé la place au retour d'un hiver rigoureux qui rend les déplacements hasardeux.

C'est mon premier contact avec l'oeuvre de Charles-Ferdinand Ramuz. Son style est souvent tout à fait éblouissant, notamment dans ses descriptions de la nature. On ne perd pas de vue que les hommes sont peu de chose face à elle...

NE PAS CONNAITRE LF RAMUZ POUR UN SUISSE SE SERAIT NE PAS CONNAITRE PAGNOL POUR UN FRANCAIS