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EAN : 9782362791932
137 pages
Alma Editeur (25/08/2016)
2.84/5   29 notes
Résumé :
Dans une prose hypnotique, Alice ou le choix des armes inventorie les faits, les motifs et les conséquences de la violence au travail.

Un inspecteur de police auditionne une jeune femme, Alice Delcourt, soupçonnée du meurtre de son ancien chef de service, Samuel Tison. Nous apprendrons au fil de l’interrogatoire qu’elle a été harcelée par Samuel Tison, et que c’est peut-être là le mobile du crime, si crime il y a eu.
Le roman tout entier tourn... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (18) Voir plus Ajouter une critique
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Alice ou le choix des armes est un récit qui ne laisse pas indifférent·e : il dépose sur moi une empreinte en demie-teinte au point de ne pas savoir véritablement si j'ai apprécié le livre. Stéphanie Chailloux offre un récit quelque peu insondable dont la composition, énigmatique et troublante, est toutefois très éveillée : l'auteure fait le choix narratif de segmenter ses propos en deux tableaux, d'une part l'interrogatoire mené par le personnage du policier -en retrait malgré le fait qu'il soit le conteur du roman- et d'autre part, des inserts -qui me semble-t-il se veulent poétiques mais qui restent hermétiques- nichés à chaque fin de chapitre. Cette esthétique architecturale, prometteuse au demeurant, met selon moi en péril l'essence du roman et dessert le caractère emphatique des propos. Ce huis-clos psychologique fait la dissection du piège qu'enferme les victimes d'harcèlement moral au travail, mais au gré d'un détachement proche de l'abnégation qui provoquera un certain malaise chez le·a lecteur·rice. En outre, l'entretien entre les deux protagonistes paraît peu crédible du point de vue du dispositif quand bien même il permet de tendre un fil d'ariane accompagnant le·a lecteur·rice. Pour autant, l'auteure parvient à retenir ce·tte dernier·ère dans cet espace feutré duquel découle in fine une relative sensibilité. C'est en définitive une lecture qui a je pense atteint son but premier, celui d'interroger et d'intriguer son lectorat, qu'il y prenne du plaisir ou non.
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Je la trouvais un peu plan-plan, cette rentrée littéraire. Il y a bien quelques romans que j'ai trouvés habilement troussés et les nouveaux opus d'auteurs déjà bien installés que je n'omets jamais de lire. Mais disons que j'étais en attente de livres véritablement marquants... jusqu'à ce que je tombe, par le plus grand des hasards, sur Alice. Présenté parmi les nouveautés dans une bibliothèque parisienne que je fréquente régulièrement, je m'en suis saisi pour lire la quatrième de couverture. Il y était question de violence au travail, traitée sous la forme d'un roman policier. Surprenante approche... le roman était bref, je n'avais pas encore commencé celui qui m'attendait : je suis repartie avec.

Dès les premières pages, j'ai été happée par le style, sec, coupant, qui traduisait d'emblée la violence du propos. Une violence feutrée, sans coups portés, avec même des sourires et l'assentiment général, mais une violence terrible, sans doute d'autant plus douloureuse qu'elle se part des voiles de la respectabilité, faisant passer la victime pour coupable. Une mise à mort symbolique qui se joue entre deux êtres, avec la bénédiction de ceux qui incarnent l'autorité. Une forme de piège lent et insidieux se refermant sur un individu pour l'étouffer mentalement, le réduire à l'impuissance, le priver de ses facultés de raisonner, l'amener à craindre la moindre de ses paroles, même la plus anodine, qui pourrait se retourner contre lui. Prendre l'ascendant sur cette personne et instiller dans son esprit qu'elle n'est pas là pour réfléchir, mais obéir et s'incliner. Lui faire oublier que le travail a un sens, négliger qu'il est une forme d'organisation collective pour ne plus devenir qu'une somme d'individualités réduites à effectuer les tâches qui leur sont dévolues sans jamais s'interroger sur ce qu'elles font.

Un chef de service, Samuel Tison, est retrouvé mort sous un pont, battu à mort. Dans les locaux de la police, l'inspecteur Kerrelec interroge Alice Delcourt, qu'une lettre anonyme désigne comme la coupable de ce meurtre : elle a subi le harcèlement de cet homme et a fini par démissionner de son entreprise...
Jour après jour, elle raconte son histoire. Sa parole se libère et elle peut enfin dire l'enchaînement des événements, l'incompréhension, l'isolement, la perte des repères, la perte de confiance - en les autres et en elle-même.

Stéphanie Chaillou déroule tout le fil de ce qui se joue dans cette confrontation entre deux êtres. Elle pénètre au coeur des processus mentaux, elle dit combien au-delà de ce qui se passe entre ces deux personnes, quelque chose de beaucoup plus profond et sans doute de beaucoup plus grave advient : une inversion des valeurs, lorsque la loyauté, la qualité du travail, l'expérience, ne sont plus reconnues ; lorsque l'espace du travail est en perpétuelle recomposition, que l'on ne peut plus s'appuyer sur rien ni sur personne et qu'il se réduit à un leurre où chacun essaie de satisfaire ses ambitions personnelles en flattant sa hiérarchie ; elle dit l'incompréhension et l'effroi devant cette volonté de réduire l'autre à néant, elle dit la nécessité désespérée de renouer avec la raison et, plus encore, avec la conscience d'une humanité partagée.
Puis vient l'heure du renoncement à se battre, lorsque le seul objectif n'est plus que de conserver son intégrité mentale. Elle dit la manière dont tout finit par devenir animal. le moment où on ne cherche plus les mots, où le rationnel n'a plus sa place, mais où l'on réagit de manière instinctive, où l'on ne cherche plus qu'à se protéger de l'agression. le moment aussi, parfois, où le sentiment de révolte prend le dessus sur la peur. le moment où la seule chose que l'on réclame à tout prix, c'est la réparation, et voir enfin tomber les masques.

Ce qui, hélas, ne vient généralement pas, ou trop rarement. Combien de chefs de service se complaisent aujourd'hui dans de tels agissements, sans qu'ils soient jamais remis en question ? Combien de dépressions, combien de salariés quittant leur entreprise ou leur poste sans que leur bourreau soit inquiété ? Sans parler des cas les plus graves où certains ne voient plus d'autre issue que celle de se donner la mort ? Pourquoi ? Au nom de quoi ? Qu'est-ce qui justifie de tels actes ? Comment peut-on fermer les yeux ?

Autant de questions que notre société devrait légitimement et sérieusement se poser pour en finir avec la souffrance au travail, ce mal intolérable qui la ronge.
Nombre de dirigeants d'entreprises et de responsables de ressources humaines seraient bien inspirés de lire ce roman d'une grande justesse. Peut-être permettrait-il une première prise de conscience. A tout le moins constitue-t-il l'occasion de lire un texte d'une rare intensité.

Lien : http://delphine-olympe.blogs..
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Dès les premières pages j'ai eu un choc car ce qui est relaté je l'ai vécu. C'était les mêmes situations, les mêmes expressions, les mêmes pensées..... Une bouffée de mon passé est remontée à la surface et, même si le temps a passé, j'ai eu le même mal être.
Alice a bien du mal à expliquer sa relation avec Samuel Tison, son supérieur hiérarchique, même à l'enquêteur. Elle a tellement vécu cela de l'intérieur, à l'intérieur de l'entreprise, à l'intérieur d'elle même qu'elle ne répond pas toujours aux questions. Elle tourne en rond, en boucle. L'inspecteur Kerrelec est pourtant bienveillant, mais il veut comprendre ce qui c'est réellement passé, pourquoi a-t-elle démissionné, pourquoi n'a-t-elle pas été entendue ?
Pour avoir vécu ce genre de situation, il est très difficile de faire comprendre aux autres le vécu, l'enfer que cela représente car on a à faire à des personnes manipulatrices, bien sous tout rapport, qui donne satisfaction à leur direction (n'était-elle pas d'ailleurs pilotée par elle.....). On se sent seule, incomprise, ignorée, dévalorisée.
Je pense que l'auteure a dû vivre une situation analogue ou alors a relaté l'expérience d'une personne ayant vécu ce genre de situation tellement les mots, les états d'âme, les situations sont proches du réel.
Ce court récit mérite d'être lu pour se rendre compte du vécu de certaines personnes, qui tous les jours doivent affronter des hommes ou des femmes pour qui le management se résume à donner hurler des ordres, humilier, rabaisser et fragiliser des êtres humains pour des raisons parfois obscures, parfois pour de la rentabilité, parfois pour les guider vers la sortie.
Tout le monde n'a pas les moyens de dire non (moi je l'ai eu), il y a un prix à payer (le mien a été la satisfaction de voir virer la personne quelque temps après), mais d'autres en viennent à des extrêmes.
J'ai bien aimé le récit car il est le reflet d'une réalité que j'ai connue, que j'ai vécue, même si par moment j'ai trouvé certains passages un peu longs, un peu répétitifs mais sûrement pour refléter l'esprit embrouillé d'Alice mais pourtant elle sait où elle va, elle sait maintenant ce qu'elle veut. Elle a enfin pu crever l'abcès et l'inspecteur a été celui qui a su l'entendre.

Lien : http://mumudanslebocage.cana..
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Pour aborder le thème de la violence au travail, Stéphanie Chaillou choisit l'enquête policière et cela s'avère très judicieux. Car souvent, le silence des harcelés empêche que les faits soient révélés au grand jour. Pourtant, la parole n'est pas facile à libérer. Ce face à face entre Alice Delcourt et l'inspecteur François Kerrelec dans le cadre d'une enquête sur le meurtre de Samuel Tison, l'ancien supérieur d'Alice permet d'éclairer de façon très intelligente et sensible ce qui se joue exactement dans l'esprit d'une victime.

Il y a donc l'enquête elle-même et la question qui garde le lecteur en haleine : Alice Delcourt s'est-elle vengée de ce supérieur qui la harcelait après avoir fait d'elle son bras droit pendant de longues années ? Alice Delcourt, qui a fini par démissionner a-t-elle assassiné Samuel Tison un mois après ? Au fil des interrogatoires, l'histoire d'Alice se dévoile face à un inspecteur de police qui semble comprendre l'importance de lui accorder une écoute attentive.

"Elle explique que ce qu'elle n'avait pas compris à l'époque, c'est que cette loyauté, construite et exercée pendant des années. A l'égard de Samuel Tison, mais pas seulement, à l'égard des autres aussi, de ceux qui étaient là et qui, même si elle ne le savait pas encore, allaient jouer un rôle dans cette histoire, y prendre part. Que cette loyauté donc, la sienne, son respect, son acceptation des places assignées, de la hiérarchie, n'allait rien lui garantir, rien lui assurer".

Stéphanie Chaillou réussit à décrypter avec une précision chirurgicale le processus, l'engrenage qui conduisent à la destruction psychologique d'une femme qui a priori n'avait rien d'une victime potentielle mais qui, confrontée à une mécanique perverse s'aperçoit qu'elle est seule et ne fait pas le poids... à moins de...

Je ne dévoilerai pas ici "l'arme" choisie par Alice pour se sauver. Il faut lire ce court roman qui apporte sa pierre à une meilleure connaissance d'un phénomène que l'on devrait s'attacher à éradiquer, un phénomène accentué par les contraintes de plus en plus dures de la vie en entreprise qui finissent par produire des monstres. Commençons par entendre les victimes et cessons de fermer les yeux.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Il s'agit ici de harcèlement moral au travail et c'est à travers l'interrogatoire d'Alice Delcourt, jour après jour, que nous découvrons et décortiquons ce Mal de la vie professionnelle.

Samuel Tison est découvert mort sous un pont, roué de coups et pantalon baissé. C'est alors que le commissaire en charge de l'enquête, François Kerrelec, reçoit une lettre anonyme dénonçant Alice Delcourt comme coupable du meurtre. S'en suit de longues explications souvent complexes d'Alice au sujet de son supérieur et des actes de torture mentale de celui-ci. Son absence d'alibi n'empêche pas la jeune femme de se livrer chaque jour dans l'enceinte du Commissariat, de faire le récit complet et rigoureux de ce qu'elle a subi toutes ces années, ces huit ans durant lesquels elle s'est soumise à cet homme avide de pouvoir, de puissance et de supériorité.

Le personnage du commissaire est tout d'abord assez effacé, comme s'il n'était présent que pour éviter un long monologue de la suspecte, afin d'entrecouper son récit. Mais j'ai apprécié ses interventions, même courtes et succinctes, car l'écriture y est plus fluide, les faits sont résumés et concis, ce qui tranche avec les textes précis et plus laborieux d'Alice.

Aux confins de la folie, il est disséqué ce que la violence morale engendre sur ses victimes et des mots forts sont employés tout au long du récit pour la désigner : « torture », « mépris », « terreur », « emprise », « manipulation », « humiliation », « guérilla professionnelle ». Les sentiments d'Alice sont mis à découvert, projetés dans une réalité difficile et rude. On accuse le coup et on prend connaissance des siens, ces salves psychologiques que Samuel Tison lui infligeait. Nous plongeons dans le cerveau du harceleur. Nous découvrons un personnage animal dépeint comme un prédateur.

C'est une véritable descente en enfer qui nous submerge de sentiments noirs, qui nous détaille les étapes de la dégringolade, la solitude dans l'épreuve, mais aussi la tardive prise de conscience de la victime.

Alice ou le choix des armes met donc le doigt sur les faits de la violence morale au travail et ses conséquences. Il s'apparente à un traité sur la psychologie de l'harceleur et de l'harcelé. Stéphanie Chaillou décortique avec intelligence les étapes de ce harcèlement et ajoute une pointe d'onirisme à travers de petits paragraphes réguliers et déroutants mettant en scène le « théâtre d'Alice », reflétant ses pensées et son état d'esprit de façon burlesque et poétique. Toutefois, je dois avouer que la ponctuation et la construction des phrases rendent la narration plus compliquée, hachée et répétitive. D'autre part, un manque de crédibilité se fait ressentir à travers un interrogatoire long qui s'étale sur un mois et demi, pendant lequel le commissaire fait preuve d'une improbable patience, laissant la suspecte partir à sa guise, revenant chaque jour pour ajouter de nouveaux récits à sa longue liste. L'enquête piétine et certaines longueurs s'en ressentent. On réalise qu'elle n'est qu'un prétexte pour traiter du sujet, il ne faut pas s'attendre à un roman policier. Mon avis est par conséquent mitigé, et le fait que le roman soit court le sauve d'un éventuel abandon. Cette lecture fut très intéressante mais a demandé beaucoup de concentration et d'exigence. La non-fluidité de l'écriture a mis en péril l'intelligence du texte, ce qui est fort dommage. Ce type d'ouvrage ne s'adresse pas à tous, mais surtout à celles et ceux qui apprécient les analyses fines qui se dissèquent avec lenteur et précision.
Lien : https://ducalmelucette.wordp..
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Parfois le théâtre d'Alice ressemble à un abattoir. Un abattoir jonché de corps, de plumes, de viscères. Ca sent la cire chaude et le sang et la merde. Ca sent la chair, les yeux fermés, les aliments. Quand Alice regarde son théâtre, elle pense à des choses qu'elle sait. Alice a une mémoire.
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Elle aimerait pouvoir comprendre comment une personne peut un jour désirer en détruire une autre. Comment une personne peut avec son cerveau et son corps, avec sa bouche, ses mains, son dos, ses avant-bras, avec tout ce qu'elle a de vivant et d'humain en elle. Comment une personne peut, avec tout ça, grâce à tout ça, orchestrer une destruction, désirer mettre en oeuvre une destruction.
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Il aimait humilier, me dit elle. Lancer des petites phrases dont il savait qu’elles rempliraient leur office, qu’elles blesseraient. (…)
Il lançait ses petites phrases et si celui ou celle qui en était l’objet répondait, se rebiffait en quelque sorte, alors il bottait en touche. Tentait de faire passer ce qui venait d’être dit pour une blague, quelque chose de drôle. Il insinuait ainsi que la personne manquait d’humour ou de distance. Qu’elle était rigide. De cette façon, il gagnait à tous les coups.
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Elle avait honte. Envie de crier aussi.
Envie de leur crier que ce n’étaient pas les mots qui étaient vulgaires, mais seulement la réalité qu'ils désignaient.
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